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Les quartiers créatifs : hyper-concentration à l’échelle de la rue et développement des espaces de coworking

territorialement Le cas des quartiers des Olivettes (Nantes), du Panier (Marseille) et Berriat (Grenoble)

Chapitre 4 : Situations géographiques et trajectoires évolutives de trois quartiers créatifs Terreaux et prémices de la clubbisation aux Olivettes, au

2. Trois quartiers créatifs, trois modèles de clusters

2.1. Les quartiers créatifs : hyper-concentration à l’échelle de la rue et développement des espaces de coworking

Après avoir abordé chacun des quartiers au travers d’une présentation générale des travailleurs créatifs et de portraits d’acteurs majeurs, une dernière partie sera consacrée aux espaces de

coworking dans lesquels se concentre une part importante des travailleurs créatifs. Les portraits

sont l’occasion de présenter des activités culturelles et créatives qui seront mobilisées dans la suite de la thèse.

2.1.1. La rue des Olivettes, haut-lieu créatif du quartier

Des activités culturelles et créatives diverses concentrées autour de la rue des Olivettes

Le quartier des Olivettes s’affirme comme un quartier créatif de par la concentration d’activités culturelles et créatives dont il est le support. 15 % des activités culturelles et créatives de la ville de Nantes y sont agglomérées contre 30 % dans le centre-ville sur une surface sept fois plus grande et 16 % dans le Quartier de la Création de l’île de Nantes sur une surface deux fois plus grande (Gravelaine, 2011). En 2016, 250 associations et entreprises de ces secteurs d’activité y sont installées, soit une densité de 830 activités culturelles et créatives par km². Leur répartition à l’échelle du quartier est inégale avec une hyper-concentration dans la rue des Olivettes et les passages attenants (carte 5). Cette hyper-concentration tient à l’implantation de la majorité des espaces de coworking du quartier dans cette zone (19/22, voir annexe 6), sachant que 75 % des activités culturelles et créatives ont leur bureau dans ce type d’espace.

La dimension créative du quartier est renforcée par la présence d’acteurs culturels et créatifs reconnus à l’échelle nantaise et nationale tels que le Lieu Unique et la Cantine numérique123. La

renommée de ces lieux nourrit celle du quartier dans le domaine de la culture et du numérique. Le cas d’une graphiste venant de Paris en est une illustration. Avant de s’installer dans un espace de

coworking du quartier, elle connaissait déjà les Olivettes au travers de la Cantine : « Pour moi c’était le quartier de la Cantine numérique » (entretien n°151, mars 2016). Un effet comparable

est perceptible dans le secteur de l’architecture avec la présence d’architectes reconnus (Atelier

123 La Cantine numérique est un espace de coworking géré par l’association Atlantic 2.0 dont l’objectif est la

structuration et l’animation d’un réseau régional de l’innovation numérique. Depuis ses locaux de la halle de la Madeleine, l’association organise de nombreux évènements et accueille des coworkers nomades et sédentaires. La Cantine nantaise fait partie du réseau national des Cantines.

Carte 5 : Concentration spatiale des activités culturelles et créatives dans le quartier des Olivettes (Nantes).

Pellegrino, DMT architectes…) et de jeunes architectes indépendants talentueux. Ainsi, en 2016, trois des dix lauréats des Jeunes Architectes Paysagistes Ligériens124 (JAPL) sont installés dans le quartier dont deux ont également été lauréats des Albums des Jeunes Architectes et des Paysagistes125 (AJAP), concours européen organisé par le ministère de la Culture et de la

Communication.

De manière générale, les activités culturelles et créatives installées aux Olivettes appartiennent à des secteurs variés (graphique 1). Ce sont les secteurs de l’architecture (19 %), de l’art (plus de 17 %), du design (17 %) et du numérique (11 %) qui sont les plus représentés.

Graphique 1 : Répartition des activités culturelles et créatives du quartier des Olivettes par secteur.

Réalisation : Basile Michel, 2017. Source : enquête Basile Michel, 2016.

En se basant sur l’échantillon interrogé126, il est possible d’affiner la description des activités en

présence. Cinq caractéristiques principales ressortent :

- Les activités appartiennent principalement au secteur privé (auto entrepreneuriat…) : 62 % ont un statut privé alors que 38 % appartiennent à l’ESS (associations, Sociétés coopératives et participatives (Scop)…), principalement sous le statut associatif (87 %).

- Les structures sont majoritairement de petites tailles (3,5 personnes en moyenne) : plus de 83 % sont composées de moins de cinq personnes et seulement 3 % d’entre-elles dépassent les 15 personnes.

124 Voir le site du concours : www.japl.fr, consulté le 10/08/2016.

125 Voir le site du concours : http://ajap.citechaillot.fr/fr, consulté le 10/08/2016.

126 Pour rappel, l’échantillon interrogé a été constitué de façon à être représentatif suivant le secteur d’activité (voir

chapitre 3 et annexe 1). 0% 5% 10% 15% 20%

- Les activités se sont implantées récemment dans le quartier des Olivettes (date moyenne d’arrivée dans le quartier : 2010) : plus de 78 % des activités sont arrivées après 2010 et seulement 6,5 % avant 2000.

- Les travailleurs sont principalement locataires de leur bureau (77 %) : des travailleurs créatifs ont toutefois réussi à acquérir dans le quartier en investissant avant la montée des prix de l’immobilier (10 %) ou en se regroupant collectivement (13 %).

- Une minorité de travailleurs créatifs habitent et travaillent dans le quartier des Olivettes (12 %) : les travailleurs ne résidant pas dans le quartier habitent à Nantes (54 %) ou dans les communes périurbaines de la ville (46 %).

Portraits d’acteurs culturels et créatifs du quartier des Olivettes

Pol’n : un pôle de compétences culturelles et un lieu collectif d’artistes

Pol’n est une association créée en 2000 et regroupant une douzaine de structures artistiques. Elle est porteuse d’un projet partagé par ses membres reposant sur la volonté d’expérimenter artistiquement, de travailler de manière transdisciplinaire et de mutualiser des compétences, des moyens et des réseaux. Pol’n résulte de la rencontre de divers acteurs culturels nantais qui font face à des difficultés dans la recherche de bureaux. Le groupement s’implante dans le quartier des Olivettes en 2003. Le local investi est l’ancien atelier des costumiers Peignon (photographie 8). Ces derniers, toujours propriétaires du bâtiment, louent l’espace à la mairie de Nantes qui le met à disposition de Pol’n à un prix modéré. L’objectif de l’association est d’en faire un lieu artistique de gestion administrative, de création, de fabrication et d’exposition pour l’ensemble des structures membres de l’association. La vie du lieu est ponctuée de projets collectifs mêlant les disciplines artistiques (théâtre, sérigraphie…). Certains de ces projets s’inscrivent dans le quartier et créent du lien avec les habitants127. Pol’n s’affirme et se revendique comme un lieu culturel intermédiaire. Sans être un lieu institutionnel, Pol’n jouit d’une réputation dans les milieux culturels en offrant un espace d’expression à des artistes alternatifs.

Scopic : valorisation du rôle social et territorial de l’entreprise

Scopic est une agence de communication au statut Scop. Sa création en 2004 résulte des nombreuses sollicitations pour la réalisation de communications évènementielles faites à l’association culturelle Pick Up Productions, membre fondateur de Pol’n. Trois membres de cette association vont créer une Scop afin de répondre à la demande des clients, tout en préservant en

127 Les éléments ayant trait aux actions concrètes menées par les travailleurs créatifs sur le quartier et créant du lien

parallèle l’activité associative de Pick Up. Scopic compte aujourd’hui 14 salariés et est installée depuis sa création dans le quartier des Olivettes (photographie 8). Suivant les principes de la Scop, l’entreprise accorde une place importante à l’humain et au bien-être de tous les salariés au travail :

« On part du constat qu’on passe les 3/4 de sa vie à bosser et que pour nous en fait, c’est juste hors de question de passer les 3/4 de sa vie à se faire chier. Donc on essaye de voir en fait comment on peut faire en sorte que ça se passe bien et donc c’est tout revoir en fait, c’est se poser la question de l’entreprise en elle-même » (co-fondateur et directeur de Scopic, entretien n°1, avril

2013). Cette réflexion incite Scopic à s’ouvrir à son territoire pour y jouer un rôle social. Ainsi, au-delà de sa mission économique de création de richesse, l’entreprise est considérée comme un acteur de la vie sociale de son territoire d’implantation, dont les premières échelles ne sont autres que la rue et le quartier.

A B

Implanté au fond d’une cour réhabilitée (A), le local de Pol’n est un vaste espace partagé sur deux niveaux (B).

D C

Les bureaux de Scopic en open space (D) sont installés au fond du passage Douard (C).

Source : photographies prises par B. Michel le 19/04/2013 (A), le 08 et 28/07/2015 (B et D) et le 17/03/2016 (C).

2.1.2. Le Panier : un quartier d’artistes et de créateurs

Hyper-concentration des activités culturelles et créatives dans trois rues du quartier

En 2016 le quartier du Panier concentre 128 activités culturelles et créatives soit une densité moyenne de 640 par km². Comme aux Olivettes, leur répartition spatiale est inégale. Trois rues sont particulièrement investies par les travailleurs créatifs : la rue du Panier, du Petit Puits et du Refuge (carte 6).

Carte 6 : Concentration spatiale des activités culturelles et créatives dans le quartier du Panier.

Le profil des activités est moins diversifié que dans le cas nantais puisqu’il est dominé par deux secteurs : les arts (60 %) et la création d’objets et de vêtements (23 %). Afin de mieux cerner les acteurs composant le secteur artistique, deux sous-catégories ont été créées : les artistes (38 % de l’ensemble des activités) et les structures culturelles (théâtre, galerie d’art… 22 %) (graphique 2).

Graphique 2 : Répartition des activités culturelles et créatives du quartier du Panier par secteur.

Réalisation : Basile Michel, 2017. Source : enquête Basile Michel, 2016.

Au sein de ces activités, l’échantillon enquêté possède cinq caractéristiques principales :

- Les activités appartiennent principalement au secteur privé (auto entrepreneuriat…) : 69 % ont un statut privé alors que 31 % appartiennent à l’ESS, uniquement sous le statut associatif.

- Les structures sont majoritairement de petites tailles (1,9 personnes en moyenne) : 67 % des activités ne sont composées que d’un travailleur, notamment des artistes indépendants.

- Les activités récemment implantées cohabitent avec des acteurs historiques du quartier du Panier (date moyenne d’arrivée dans le quartier : 2008) : 62 % des activités sont arrivées à partir de 2009, soit dans la période de transformation du quartier identifiée dans le chapitre 4. Cette cohorte d’artistes et de créateurs rejoignent des acteurs (artistes et théâtres) ancrés dans le quartier depuis une vingtaine d’années (17 % des activités sont installées avant 2000).

- Les travailleurs sont principalement locataires de leur bureau (81 %) : les travailleurs créatifs propriétaires de leur espace de travail ont majoritairement acquis leur bien immobilier avant la transformation du Panier dans les années 2010 (date moyenne d’acquisition : 2005).

- Une majorité de travailleurs créatifs habitent et travaillent dans le quartier du Panier (51 %) : les travailleurs ne résidant pas dans le quartier habitent à Marseille (91 %) et plus rarement dans les communes périurbaines de la ville (9 %).

0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40%

Portraits d’acteurs culturels et créatifs du quartier du Panier

Le théâtre de Lenche : un symbole culturel du Panier… mis en danger

Le théâtre de Lenche a été créé en 1977 et s’est installé dans le Panier en 1987 en réaménageant un ancien cinéma abandonné depuis quelques années. Fortement soutenu par le conseil général des Bouches-du-Rhône (CG13) pendant les mandatures de Jean-Noël Guérini128, le

théâtre bénéficie de plusieurs locaux répartis dans le quartier : une salle de spectacle principale et deux autres secondaires, un espace de bureaux administratif et un local principalement dédié à la billetterie. Le théâtre propose une programmation variée composée de spectacles de renommée nationale et internationale ainsi que des actions pédagogiques. Co-organisateur de la fête du Panier, le théâtre s’affirme comme un acteur de la vie culturelle et sociale du quartier. Le départ à la retraite du fondateur et directeur du théâtre de Lenche en 2016, combiné à la baisse des subventions départementales suite à la défaite de J-N Guérini aux élections de 2015, remet en cause la pérennité d’un théâtre devenu l’un des symboles culturels du Panier.

L’Atelier 1 par 1 : un lieu de création intégré au territoire

L’Atelier 1 par 1 est une association regroupant divers créateurs autour d’un lieu de création et de vente. Il est implanté dans le quartier du Panier depuis 2011. C’est une femme souhaitant effectuer une reconversion professionnelle et commencer un nouveau projet de vie qui est à l’origine de l’atelier : « Ici j’ai pu faire ce que je voulais. J’ai travaillé pendant 25 ans dans des trucs à la con

qui ne m’ont pas plu du tout. Je préfère être bénévole et ne vraiment pas avoir d’argent mais être heureux dans ce que je fais, que travailler comme j’ai travaillé. […] Je trouve que le bonheur passe par là » (créatrice de l’Atelier 1 par 1, entretien n°130, novembre 2015). Une douzaine de

créateurs différents sont exposés dans la partie galerie et deux d’entre eux viennent régulièrement utiliser l’atelier (matériel…). Ce lieu est pensé comme un espace de mutualisation, de rencontre, de passage et de vie collective intégré dans le territoire.

128 Président du CG13 de 1998 à 2015.

2.1.3. Berriat : un quartier d’artistes et d’architectes

Concentration spatiale des activités culturelles et créatives à Bouchayer-Viallet

En 2016, 174 activités culturelles et créatives se concentrent au sein du quartier Berriat, soit une densité moyenne de 134 activités par km². Comme dans les cas nantais et marseillais, leur répartition spatiale est inégale avec une hyper-concentration dans l’ancienne friche Bouchayer- Viallet (carte 7). 47 % des activités culturelles et créatives du quartier y sont localisées avec une densité de 662 activités par km².

Carte 7 : Concentration spatiale des activités culturelles et créatives dans le quartier Berriat.

Réalisation : Basile Michel, 2017. Source : enquête Basile Michel, 2016. Fond de carte : Géoportail.

La dimension créative du quartier est rendue visible par la présence de nombreux lieux culturels. Outre le CNAC le Magasin reconnu internationalement, le Théâtre 145 implanté au bout du cours Berriat est accompagné de quatre autres théâtres. Dans le domaine musical, l’offre est tout aussi impressionnante. La SMAC La Belle électrique (voir chapitre 4), la salle de concerts associative

intermédiaire de l’Ampérage, la salle privée du Drak-Art ou encore la Salle Noire gérée par la compagnie des Barbarins Fourchus constituent un archipel de lieux musicaux ancrés dans le quartier. D’autres lieux alternatifs tels que Le 102 (rue d’Alembert), Le 38 (rue d’Alembert) et l’Espace 10/12 participent également à construire une offre culturelle diversifiée et abondante à Berriat. Le collectif Mann’Art(e) regroupant huit compagnies artistiques de différentes disciplines complète ce riche panel. A l’échelle de Grenoble cette concentration des acteurs culturels, doublée de travailleurs des secteurs créatifs, est remarquée. Les propos d’un responsable du développement culturel de la ville en témoignent : « Si on prend Chorier-Berriat : une salle de

concerts de 800 places, deux théâtres, deux petites scènes de musiques actuelles, allez trois en mettant Le 102, plus le collectif Mann’Art(e), je veux dire c’est énorme. Sur un quartier comme Chorier-Berriat dans une ville comme Grenoble, c’est totalement énorme donc on va faire en sorte de préserver ça » (entretien n°171, avril 2016).

De manière générale, les activités culturelles et créatives implantées dans le quartier Berriat appartiennent à deux secteurs principaux : les arts (39 %) et l’architecture (plus de 26 %) (graphique 3). Le design apparaît en troisième position (9 %).

Graphique 3 : Répartition des activités culturelles et créatives du quartier Berriat par secteur.

Réalisation : Basile Michel, 2017. Source : enquête Basile Michel, 2016. 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40%

L’échantillon enquêté de ces activités possède cinq caractéristiques principales :

- Les activités appartiennent principalement au secteur privé (auto entrepreneuriat…) : 65 % ont un statut privé alors que 35 % appartiennent à l’ESS, uniquement sous le statut associatif.

- Les structures sont majoritairement de petites tailles (3 personnes en moyenne) : plus de 88 % ont moins de 5 personnes. 50 % des activités ne sont composées que d’un travailleur, notamment des artistes, architectes et designers indépendants.

- Comme dans le cas du Panier, les activités récemment implantées cohabitent avec des acteurs historiques du quartier Berriat (date moyenne d’arrivée dans le quartier : 2005) : 54 % des activités se sont installées à partir de 2010 mais également 27 % avant 2000, principalement des artistes ayant investi des friches et s’étant maintenus dans le quartier malgré l’avancée de la rénovation (voir chapitre 4).

- A l’image des cas nantais et marseillais, les travailleurs sont principalement locataires de leur bureau (92 %) : pour les rares travailleurs créatifs propriétaires de leur espace de travail, c’est grâce à l’état de friche de certains biens immobiliers qu’ils ont pu investir dans les années 1980 et 1990.

- Une part importante des travailleurs créatifs habitent dans le quartier Berriat (42 %) : les travailleurs ne résidant pas dans le quartier habitent à Grenoble (73 %) et dans les communes périurbaines de la ville (27 %).

Portraits d’acteurs culturels et créatifs du quartier Berriat

Les Barbarins Fourchus : ouvrir le théâtre sur le quartier

Les Barbarins Fourchus est un collectif d’artistes de rue créé en 1992 à Grenoble. Les artistes fondateurs sont issus de différentes disciplines (arts plastiques, musique, écriture) et de différents milieux (punk, rock’n’roll, conservatoire). Pour le collectif, bénéficier d’un lieu est primordial. Dès le départ, les artistes souhaitent pouvoir se retrouver, échanger, se loger, créer, diffuser et accueillir dans un même lieu, un lieu central de vie, de création et de diffusion. Jusqu’en 1999, le collectif investit plusieurs squats grenoblois avant d’obtenir par délégation de service public la gestion du Théâtre 145 dans le quartier Berriat. Le théâtre devient alors ce lieu central recherché par les Barbarins Fourchus. Les artistes l’ouvrent aux publics et spécifiquement aux habitants du quartier à travers la mise en place de différentes actions telles que l’organisation de bals, de répétitions publiques… En 2011, la mairie décide de confier la gestion du théâtre à une autre compagnie (le Tricycle). Le collectif a alors manifesté son désir de bénéficier d’un autre lieu, condition nécessaire à leur travail de création et d’ouverture au public : « On souhaite conserver

un lieu parce que c’est notre centre, c’est le centre qui nous permet de travailler et de créer, et puis c’est aussi là où l’on rencontre les gens de notre quartier et que ça nous semble être quelque chose d’important » (membre fondateur du collectif, entretien n°190, juin 2016). Après de

longues négociations avec les partenaires publics (ville, département, région), le collectif obtient un nouveau lieu : la Salle Noire, une ancienne usine de textile sur le site Bouchayer-Viallet. C’est donc à partir de cet espace que les Barbarins Fourchus poursuivent leurs actions129.

Le 102 : permanence d’un lieu artistique alternatif

Le 102 est une association artistique installée dans un squat de la rue d’Alembert depuis 1983. Après avoir été de nombreuses fois menacée d’expulsion, l’association bénéficie aujourd’hui d’une convention d’occupation avec la ville de Grenoble. Le lieu demeure indépendant, autogéré et non subventionné. La présentation du lieu montre la volonté d’indépendance vis-à-vis des institutions et de promotion d’œuvres non conventionnelles : « Le 102 est un espace autogéré, fonctionnant sans subvention, occupant des locaux appartenant à la Ville de Grenoble. Depuis 1983 des associations y organisent concerts, séances de cinéma expérimental, expositions, théâtre, danse, rencontres, débats... avec pour but de faire découvrir autre chose, autrement » (http://www.le102.net/index.html, consulté le 20/04/2016). Le 102 est reconnu comme un lieu culturel alternatif à l’échelle de la ville : « C’est un lieu important parce que c’est surement le

seul et unique lieu de culture alternative […] l’anti institution complète » (chargé de mission à la

Direction des Affaires Culturelles de la ville de Grenoble, entretien n°171, avril 2016).

2.1.4. Les espaces de coworking : le recours massif des travailleurs créatifs à la mutualisation

Dans les quartiers des Olivettes et Berriat, et dans une moindre mesure du Panier, de nombreuses activités culturelles et créatives sont installées dans des espaces de coworking. En 2016, il existe 22 espaces de ce type aux Olivettes, 15 à Berriat et 8 au Panier dans lesquels se concentrent respectivement 75 %, 68 % et 26 % des activités culturelles et créatives de chaque quartier. Seuls 13 de ces espaces utilisent la terminologie du coworking pour se définir, mais leur configuration permet bien de les qualifier ainsi puisqu’il s’agit de bureaux en open space loués et partagés par plusieurs entrepreneurs indépendants mutualisant l’espace et le matériel (photographie 9).

Photographie 9 : Intérieur d’espaces de coworking implantés dans les quartiers des Olivettes et Berriat.

Source : photographies prises par B. Michel le 06/04/2016 (A), le 08, 09 et 17/07/2015 (B, C et D). Espaces de

coworking du quartier Berriat (A) et des Olivettes (B, C et D).

Ces espaces de coworking résultent d’initiatives privées et visent à offrir des lieux de travail partagés à des entrepreneurs culturels et créatifs, dont les créateurs des espaces eux-mêmes. Ils appartiennent donc aux espaces de type associatif et communautaire définis par Christine Liefooghe (2016) (voir chapitre 1). Ils offrent un espace de travail à un prix attractif. Aux Olivettes, les neuf lieux se revendiquant « espaces de coworking » pratiquent en moyenne des tarifs de 141€ TTC par mois, soit plus de deux fois moins cher que les centres d’affaires reconvertis en coworking dans le même secteur géographique (275€ HT par mois).

Tous les espaces proposent des postes de travail pour des travailleurs sédentaires130, et rares sont

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