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Propriétés linéaires des modes d’une fibre optique

Les modes guidés par une fibre optique possèdent un certain nombre de propriétés qui déterminent leurs utilisations pratiques. Il s’agit, par exemple, de leur indice ef- fectif, déjà évoqué dans la section précédente, mais aussi d’autres propriétés telles que l’indice de groupe, la dispersion chromatique de vitesse de groupe, l’aire effec- tive, les pertes linéiques que nous allons aborder dans cette section.

1.2.1 Indice effectif et constante de propagation

Lorsqu’un mode guidé se propage dans un guide d’onde, une SSIF par exemple, il n’a pas une vitesse de phase v1 égale à c/n1 (n1 étant l’indice le plus élevé du guide), ni v2égale à c/n2 (n2 étant l’indice de la gaine). Le mode, du point de vue monochromatique, évolue plutôt à une vitesse de phase veff =c/neffcomprise entre v1et v2, où neff est son indice effectif (obtenu en résolvant les équations de Maxwell, rubrique1.1.6), relié à sa constante de propagation β [22] [28]. La vitesse de phase doit être distinguée de la vitesse de groupe :

vg= c/ng (1.25)

où ngest l’indice de groupe du mode. Lorsque l’on ne prend pas en compte l’effet du guide d’onde, et qu’on se limite aux propriétés du matériau, on peut définir l’indice de groupe par [22], [28] :

ngr = c vg

=n−λdn

, (1.26)

où n(λ)est l’indice du matériau. Cependant, pour un mode guidé dans une fibre

optique, il est important de tenir compte de l’effet du guide d’onde. Dans ce cas, l’indice du matériau, n(λ), doit être remplacé par l’indice effectif du mode (qui dé-

pend de la géométrie de la fibre et de la longueur d’onde d’opération) :

ng= c vg

= neff−λdneff

(1.27)

Nous verrons plus loin que l’indice de groupe est lié au coefficient β1du développe- ment en série de Taylor, autour de la fréquence centrale ω0du spectre de l’impulsion, de la constante de propagation β du mode (voir rubrique1.5.2).

En dehors des modes guidés, il existe un autre groupe de modes, ayant des indices effectifs complexes, dits radiatifs. Ces modes se décomposent en modes évanescents ayant des valeurs de β imaginaires pures et qui ne se propagent pas dans la fibre ; en

modes réfractés, ayant des valeurs de β réelles, et qui sont localisés dans la gaine et s’atténuent très vite ; et en modes à fuite ou pseudoguidés dont les valeurs de β sont complexes et qui s’atténuent plus ou moins lentement [22].

1.2.2 Phénomènes de dispersion

Les informations transmises par un système de communication optique numérique sont d’abord codées en impulsions de lumière qui sont envoyées d’un émetteur à un récepteur à travers une fibre optique. Plus le nombre d’impulsions pouvant être envoyées par l’émetteur et résolues du côté du récepteur, par unité de temps est important, plus la capacité de transmission du système sera grande [45].

Lorsqu’une impulsion lumineuse voyage dans la fibre, elle s’élargit dans le temps sous l’effet de plusieurs phénomènes que nous allons détailler plus loin. Ce méca- nisme, appelé dispersion, peut limiter fortement la capacité des systèmes de trans- mission, à cause d’impulsons non-résolues par le récepteur comme l’illustre la figure

1.12.

𝛿𝛿 d2 = 2×d1 Non résolvable

𝛿𝛿 d1 Résolvable

Figure 1.12 – Les impulsions séparées de δt à l’entrée pourraient être ré-

solues à la sortie de la fibre de longueur d1(haut). Les mêmes impulsions

pourraient ne pas être résolues à la sortie de la même fibre de longueur

d2=2×d1. (repris de [45])

La dispersion peut avoir diverses origines. Les sources de lumière émettent sur une plage de longueurs d’onde finie (même si cette plage peut-être réduite pour cer- taines sources comme le laser) et, à cause des propriétés intrinsèques du matériau de la fibre (la dépendance spectrale de son indice de réfraction), différentes longueurs d’onde nécessitent différentes durées pour se propager sur le même trajet : il s’agit de la dispersion chromatique. Le profil d’indice et la géométrie de la fibre contri- buent aussi à la dépendance spectrale de l’indice effectif et donc à l’élargissement des impulsions. On parle de dispersion du guide d’onde qui ajoutée à la dispersion du matériau constitue la dispersion chromatique de vitesse de groupe. Enfin, les dif- férents modes que peut guider une fibre optique multimode (MMF) possèdent des indices effectifs différents et voyagent à des vitesses différentes, ce qui entraîne une dispersion intermodale.

matique de vitesse de groupe, au sein d’un mode par [22], [28] : Dλ = (1/vg) ∂λ = 1 c dng (1.28)

Comme nous le verrons plus loin, la dispersion chromatique de vitesse de groupe est aussi liée au coefficient β2 du développement en série de Taylor, autour de la fréquence centrale ω0 du spectre de l’impulsion, de la constante de propagation β du mode (voir rubrique1.5.2).

Les MMFs conventionnelles à saut d’indice (guidant quelques centaines de modes) souffrent d’une grande dispersion intermodale, ce qui limite leur utilisation sur de longues distances et aussi leurs capacités en détection directe. Dans ce contexte, les MMFs à gradient d’indice ont été créées pour égaliser le plus possible les vitesses de groupe des différents modes guidés [45]. La dispersion intermodale peut être quan- tifiée par la valeur de différence de délai de groupe (DGD), par unité de longueur entre le mode le plus rapide (fastest en anglais, souvent le LP0 1) et le mode le plus lent (slowest en anglais), c’est-à-dire ayant la vitesse de groupe la plus faible :

DGD= τslowest−τfastest

L , (1.29)

où L, est la longueur de la fibre et le délai de groupe τ pour un mode donné est défini par la relation [28] :

τ= L

vg

(1.30)

Il faut noter que la valeur de DGD peut être aussi calculée entre deux modes quel- conques de la fibre.

A l’intérieur des groupes de modes (LP0 1par exemple), chaque dégénérescence en polarisation (LPx

0 1 et LP y

0 1 par exemple) devrait avoir exactement le même indice effectif dans une fibre à symétrie circulaire. Cependant, dans la pratique, il existe gé- néralement une légère différence entre les modes de polarisations différentes d’un même groupe, causée par les variations inattendues du profil d’indice (voir rubrique

1.3.1). La biréfringence (βx - βy) est due au terme ∇ln n2 (où n(x, y, z)est le pro- fil d’indice de la fibre fabriquée) et engendre une différence des délais de groupes [28]. Cette dispersion est appelée dispersion de polarisation (PMD) et peut aussi être quantifiée par la différence des délais de groupe.

1.2.3 Aire effective

Lorsqu’un mode se propage dans une fibre, son champ s’étend au-delà du cœur de la fibre. Ainsi la surface réelle qu’occupe le mode n’est pas égale à l’aire du cœur. De plus, l’aire du mode varie aussi en fonction de la longueur d’onde d’opération. Dans ces conditions, on définit l’aire effective (Aeff) d’un mode à une longueur d’onde donnée en utilisant la relation [25] :

Aeff(λ) = " R R S |E(x, y, λ)|2dxdy #2 R R S |E(x, y, λ)|4dxdy , (1.31)

avec S l’aire de la fibre. Les transmissions sur fibre requièrent de faibles effets non- linéaires et donc des valeurs élevées de Aeff (voir équation 1.49 plus loin) [9]. Il est donc important de tenir compte de ce paramètre dans la conception des fibres optiques. Pour les transmissions longues distances sous-marines, les fibres mono- modes fabriquées actuellement ont une aire effective pouvant atteindre 153 µm2 à

λ = 1550 nm (comme le modèle TeraWave SCUBA 150 de OFS). Cependant, l’aug-

mentation de l’aire effective peut impacter négativement les pertes linéiques de la fibre puisqu’elle augmente les pertes par microcourbures [46] [47], et peut changer son contenu modal. Ainsi l’augmentation de l’aire effective nécessite quelques com- promis.

1.2.4 Pertes dans les fibres

L’atténuation du signal optique lors de sa propagation dans une fibre représente une caractéristique importante qui détermine la portée de transport d’informations du système de communication qui l’utilise. Une faible atténuation permet un grand espacement entre les amplificateurs et permet donc un coût de communication plus bas. Les pertes dans la fibre optique sont souvent exprimées par unités de longueur. La fibre monomode (SMF) standard de silice a une perte de l’ordre de 0.2 dB/km à 1550 nm, et des constructeurs affichent aujourd’hui des pertes linéiques pouvant atteindre 0.1419 dB/km à 1560 nm [48].

Les pertes dans une fibre optique peuvent provenir de divers mécanismes. Le plus connu est la diffusion de la lumière qui est minimale à la longueur d’onde de 1550 nm, pour la silice, ce qui constitue la raison de l’utilisation de cette longueur d’onde dans les systèmes de communication optique. La non-homogénéité de la fibre constituent une autre source de pertes, notamment les défauts à l’interface cœur/gaine. Ces non- uniformités apparaissent souvent lors de la fabrication de la fibre.

Les pertes par défaut de confinement constituent un autre mécanisme affaiblissant les signaux et concernent les modes à fuite. En effet, lorsque le champ décroissant dans la gaine n’est pas encore nul avant d’atteindre l’enveloppe extérieure de la fibre (constituée d’un matériau absorbant à indice élevé conçu exprès pour éliminer les modes présentant des fuites dans la gaine), une partie de la puissance du mode peut- être perdue. Généralement, l’enveloppe absorbante est intentionnellement placée à une distance suffisante (62.5 µm de l’axe de la fibre pour les fibres conventionnelles) de l’interface cœur/gaine pour ne pas absorber les modes guidés. Cependant, des courbures peuvent modifier l’indice de la fibre et faire intervenir ces pertes même dans les fibres conventionnelles via un transfert d’énergie entre modes guidés et modes de gaine [25].

comme la présence de bandes d’absorption et les courbures [28].