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Propriétés dynamiques des fluctuations pour un milieu viscoélastique . 51

fluide peut affecter les fluctuations à son interface.

Au paragraphe2.3, nous avons montré qu’il est possible de retrouver la relation de disper-sion grâce à une analyse énergétique du problème. Dans cette analyse, on évalue les énergies stockée et dissipée par le fluide. Or pour un fluide visqueux, l’énergie peut uniquement être stockée dans l’interface, on a ainsi obtenu la relation :

ωnγk

η (II.7)

Pour un milieu viscoélastique, l’énergie élastique peut également être emmagasinée dans le volume lorsque le matériau se déforme. Ceci est possible à condition que le temps de relaxation des perturbations soit plus faible que le temps caractéristique τc du matériau viscoélastique. Dans le cas où l’énergie est principalement stockée dans le volume, l’analyse énergétique donne la relation :

ωn∼ 1

τc (II.8)

Les fréquences propres ωnsont indépendantes du vecteur d’onde k. La relaxation des pertur-bations est contrôlée par le temps caractéristique du matériau. Cette analyse montre que la dynamique des fluctuations à l’interface peut être modifiée par l’élasticité du matériau.

Pour connaître exactement les relations de dispersion pour un milieu viscoélastique, il faut déterminer les pôles de la susceptibilité (II.3) où la viscosité n’est plus une constante réelle mais une fonction complexe de la fréquence. La partie imaginaire de la viscosité permet de tenir compte de l’élasticité du matériau. A priori, les pôles de la susceptibilité doivent être recherchés dans le plan complexe des fréquences. Afin de travailler avec des fréquences complexes, il est nécessaire d’utiliser un modèle pour décrire les variations des propriétés viscoélastiques. Or le choix du modèle semble influencer les relations de dispersion trouvées. En résumé, lorsque les propriétés mécaniques dépendent de la fréquence, la détermination des relations de dispersion n’est pas aisée [20], [21]. Ces relations sont pourtant utiles lorsque l’on souhaite identifier les différents modes de surface. Par exemple, dans le cas où l’on excite un fluide à une certaine fréquence et que l’on observe les ondes qui se propagent à sa surface [22]. Dans notre cas, la détermination de ces relations de dispersion n’est pas indispensable. En

effet, il est possible de calculer la fonction d’autocorrélation de hauteur P (k, ω) en utilisant la relation donnée par le théorème fluctuation-dissipation, rappelée ci-dessous :

P(k, ω) = kBT

πω Im (χ(k, ω)) (II.9)

Pour un milieu viscoélastique, la susceptibilité χ(k, ω) dépend de la viscosité complexe η(ω). On peut relier η(ω) au module viscoélastique complexe G(ω) = G0(ω) + G00(ω) :

η(ω) = G(ω)

(II.10)

où G0(ω) et G00(ω) correspondent respectivement au module élastique et au module visqueux du milieu.

En injectant la viscosité complexe, définie à partir du module viscoélastique complexe (II.10), dans l’expression de la susceptibilité (II.3), on obtient :

1 χ(k, ω) = γk2+ G∗2(ω)k3 ω2ρ 4 s 1 − ω2ρ k2G(ω) 2 − ω2ρ k2G(ω) !2 (II.11)

Et on peut calculer le spectre des fluctuations avec la même expression que celle définie au paragraphe 3.3:

S(ω) =Z

0

P(k, ω)Φ(k)kdk (II.12)

Finalement, pour un milieu viscoélastique, le spectre des fluctuations dépend de la tension de surface γ, de la masse volumique ρ et des modules visqueux et élastique, G00(ω) et G0(ω) . On rappelle que la fonction de pondération Φ(k) reste identique quel que soit le milieu considéré. Elle dépend uniquement de la largeur du faisceau utilisé R, et de la longueur d’onde lumineuse λ.

3.2 Les dépendances du spectre mesurés : diagramme |G| vs ω

Compte tenu de l’expression compliquée de la susceptibilité (II.11), il est difficile de savoir quels sont les paramètres auxquels le spectre S(ω) est réellement sensible. En effet, le spectre S(ω), donné par l’expression (II.12) ne peut pas être calculé analytiquement. Cependant, afin de connaître le rôle des différents paramètres, il est possible d’effectuer son développement asymptotique en fonction de la fréquence ω et du module viscoélastique |G|=G02+ G002. Les résultats du développement asymptotique, effectué en annexe E, sont réunis sur le dia-gramme de la figureII.2. On distingue 4 régions, notées A, B, C et D. Chaque région

corres-pond à un développement différent, et le résultat se met sous la forme : S(ω) = Af(G

, γ, ρ, R) ωn (II.13)

où A est une constante fixée par les propriétés du faisceau laser, et f une fonction des propriétés du milieu et de R la largeur du faisceau. Sur le diagramme de la figure II.2, l’expression de f est donnée pour chaque région ainsi que la valeur de l’exposant n. Notons que f est une fonction de G(ω), et dépend donc aussi de la fréquence ω. Afin de pouvoir comparer des milieux de différentes tensions de surface, le diagramme est affiché en fonction des variables de ω et G(ω) normalisées. Ces variables normalisées sont notées Ω et Γ :

Ω = ω s ρR3 γ (II.14) Γ =|G| R γ (II.15)

Les frontières entre les différentes régions du digramme dépendent donc de la tension de sur-face γ, de la masse volumique ρ et de largeur R du faisceau. En pratique, la tension de sursur-face varie relativement peu par rapport aux décades couvertes par |G| suivant les systèmes et par rapport à ω dans l’expérience.

zone C 1 2 ′′

ω

R G G 5 5 2

′′ ω

ρ R

G

1 2

′′

ω

γ

R

G

zone D 3 / 1 3 / 5 2 3 / 2

ω

γ

ρ R

Γ

log

Ω log zone A zone B 2 Ω = Γ 1 = Γ 1 = Ω 3 / 4 Ω = Γ

Figure II.2Diagramme |G∗|vs ω réunissant les résultats du développement asymptotique du spectre

S(ω). Afin de pouvoir comparer sur le même diagramme le comportement de milieux dont les énergies de surface et les densités sont différentes, |G∗|et ω sont normalisées respectivement par les quantités γ/R

etp

γ/ρR3. Les valeurs normalisées sont notées Γ et Ω. Chacune des 4 régions, notées A, B, C et D, correspond à un développement différent.

Discussion sur le diagramme obtenu

Notons que quelle que soit la région du diagramme, l’expression du développement asymp-totique dépend de R. La forme et l’amplitude des spectres mesurés dépendent de la largeur du faisceau. En modifiant la focalisation du faisceau laser, on peut modifier les effets sondés par la technique.

Cas d’un liquide newtonien

Pour un liquide purement visqueux, le module viscoélastique G est imaginaire et se relie à la viscosité η, tel que : G = iωη. Dans le diagramme de la figureII.2, un liquide newtonien correspond donc à une droite de pente 1.

Lorsque la viscosité est suffisamment grande, la droite de pente 1, traverse les régions A et C du diagramme. Les développements dans les régions A et C, pour un liquide newtonien, sont ηR/γ2 et 1/ηRω2. On retrouve les expressions (I.86) et (I.86) calculées au paragraphe3.5. Le spectre des fluctuations possède une forme lorentzienne. Nous avons pu vérifier cette forme sur les spectres de la figure I.14. Aux très hautes fréquences, la droite traverse également la région D, dont le développement est η/ρ2R5ω4. Dans cette région, le spectre devient sensible aux effets inertiels. La pente du spectre devient plus importante que pour une lorentzienne, comme observé pour l’huile de viscosité η = 20 mP a.s sur la figure I.14. Notons que la frontière séparant les régions C et D, définie par Γ = Ω2, correspond à St = 1 pour k = 1/R .

Lorsque la viscosité est faible, la droite associée dans le diagramme traverse les régions B et D. Dans ces deux régions, le spectre est sensible aux effets de l’inertie. Aux basses fré-quences, S(ω) n’est plus constant mais croît comme ω1/3. Aux hautes fréquences, S(ω) décroît comme ω−4. Ces deux variations peuvent être observées pour l’huile de viscosité η = 5 mP a.s sur la figure II.1. Dans la région B, le spectre ne dépend pas de la viscosité. Les fluctuations mesurées sont dans le régime propagatif. La relation de dispersion associée à ces ondes ca-pillaires (II.6) est effectivement indépendante de la viscosité. Remarque : dans la région D, le spectre est fortement sensible à la largeur R, S(ω) ∼ R−5. Si l’on connaît correctement la viscosité et la masse volumique du milieu, on peut utiliser le spectre mesuré pour déterminer précisément la largeur du faisceau.

Cas d’un milieu viscoélastique

Pour un milieu viscoélastique, le module viscoélastique a une partie réelle non nulle. Afin de connaître les régions du diagramme traversées, permettant de trouver les paramètres qui contrôlent l’amplitude et la forme du spectre, il est nécessaire de spécifier les variations des

modules G0 et G00 avec la fréquence.

Lorsque le module élastique est suffisamment grand pour que G0  G00 et |G| ≈ G0 > γ/R, l’énergie thermique n’est plus stockée à la surface mais dans le volume. C’est pourquoi, dans ces conditions, le développement de la région C ne dépend pas de la tension de surface mais des deux modules viscoélastiques G0 et G00. Dans ce cas, les ondes mesurées sont des ondes de Rayleigh. Dans les autres cas, au premier ordre, le spectre ne dépend pas du module élastique, mais uniquement du module visqueux G00.