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Effet du réglage de la position de l’interface dans le faisceau

Dans ce paragraphe, on discute de l’effet du réglage de la position de l’interface dans le faisceau. Nous verrons que la sensibilité de la technique dépend de ce réglage et se traduit par une diminution de l’amplitude du spectre lorsque l’interface ne se situe pas au col. Nous

verrons également comment prendre en compte ces effets dans le calcul du spectre.

Dans le calcul de la fonction de pondération Φ, effectué en annexes A etB, on suppose que la surface d’onde incidente à l’interface est plane. Or, pour un faisceau gaussien, d’après l’expression du rayon de courbure Rc donné par (I.73), rappelée ci dessous :

Rc(z) = z 1 +zR2 z2

!

(I.88) cette hypothèse est correcte uniquement au col du faisceau. En effet, pour z=0, on a effecti-vement Rc→ ∞. De part et d’autre du col, c’est-à-dire pour z 6= 0, le rayon de courbure est fini, la surface d’onde incidente à l’interface n’est donc pas plane mais sphérique (figureI.16). Cette onde sphérique est convergente si l’on place l’interface avant le col (z < 0), et divergente si l’on place l’interface après le col (z > 0). D’après (I.88), la distance caractéristique sur la-quelle le rayon de courbure évolue est la longueur de Rayleigh zR= 2πR02. En effet, c’est cette longueur qui définit la limite entre le champ proche et le champ lointain du faisceau. Notons que plus le faisceau est focalisé, plus la longueur zR est faible et moins la surface d’onde peut être considérée plane. De plus, d’après l’expression (I.71), la taille du faisceau augmente de part et d’autre du col. Or, le signal mesuré dépend de la largeur du faisceau éclairant l’interface. On rappelle que cette taille apparaît dans la fonction de pondération Φ et définit la longueur d’onde des fluctuations auxquelles le signal δV est principalement sensible. On peut donc déjà affirmer que le spectre mesuré doit dépendre de la position à laquelle on place l’interface dans le faisceau.

0 = z z Z z= r Onde plane (au col) Onde sphérique  divergente ) ( 2 ZR 0 2R z

Figure I.16Lorsque l’interface se situe à une distance Z du col du faisceau laser, la largeur R(Z) du faisceau dans le plan de l’interface est différente de la largeur R0 au col. Par ailleurs, l’onde lumineuse incidente, n’est plus plane mais sphérique.

En pratique, l’interface ne se situe jamais exactement dans le plan z = 0. Il est donc intéressant de savoir de quelle façon le spectre est modifié lorsque l’on place l’interface en dehors du col du faisceau laser (figure I.16). Cela nous permettra de savoir quel degré de précision il est nécessaire d’atteindre pour placer l’interface dans le faisceau laser. Pour étudier cet effet, on mesure les spectres de fluctuations en plaçant l’interface à différentes hauteurs Z dans le faisceau laser. Sur la figureI.17, on représente l’évolution de l’amplitude du spectre normalisée par celle obtenue au col en fonction de la position Z. On affiche ces variations pour deux fréquences : 2 kHz et 40 kHz. Le liquide sondé est une huile silicone (γ = 20.6 mN/m et η = 20 mP a.s) et le faisceau laser utilisé possède une largeur au col de R0 = 3.5 µm. L’amplitude du spectre est maximum au col et décroît de façon symétrique de part et d’autre. La chute de l’amplitude du spectre dépend de la fréquence. Lorsque l’interface se situe à ±200 µm du col, à 2 kHz, l’amplitude du spectre est 1.4 fois moins élevée qu’au col, et à 40 kHz, l’amplitude est 2.6 fois moins élevée qu’au col. Pour le liquide sondé et pour la largeur du faisceau utilisé, les deux fréquences (2 kHz et 40 kHz) se situent respectivement sur le plateau et sur la décroissance (en S ∼ ω−2) du spectre. Or, dans ces deux régimes, définis par (I.86), (I.87), l’amplitude du spectre est respectivement proportionnelle et inversement proportionnelle à la taille du faisceau. Les décroissances observées sur la figureI.17ne peuvent donc pas uniquement être expliquées par l’augmentation de la largeur du faisceau en dehors du col. Autrement dit, on ne peut pas décrire les spectres mesurés en dehors du col par (I.85) en prenant un rayon effectif supérieur à R0. Ceci est la preuve que la sensibilité de la technique dépend de la forme du front d’onde du faisceau qui éclaire l’interface. Lorsque l’onde incidente n’est plus plane mais sphérique, la sensibilité de la technique décroît.

Figure I.17Amplitude du spectre normalisé par l’amplitude maximale en fonction de la position Z à laquelle est située l’interface sondée dans le faisceau laser. On affiche ces variations à 2 kHz et 40 kHz. Les spectres sont obtenus sur une huile telle que γ = 20.6mN/m et η = 20 mP a.s avec un faisceau laser tel que R0 = 3.5µm. L’amplitude du spectre est maximale au col du faisceau pour z = 0. De part et d’autre, l’amplitude du spectre décroît.

Afin de décrire correctement les spectres mesurés hors du col, il est nécessaire de reprendre le calcul effectué au paragraphe 3.3 qui détermine le spectre S(ω). Pour tenir compte de la forme exacte du front d’onde du faisceau incident, on décrit le champ du faisceau par la forme générale (I.70), rappelée ci-dessous :

E(r, z) = E0 R0 R(z)e r2 2R(z)2e−i  λz−φ(z)+λ 2Rc(z)r2  (I.89) Pour z = 0, il s’agit du champ gaussien réel utilisé dans le calcul précédent : E(r) = E0e

r2

2R0. L’utilisation du champ exact E(r, z), défini d’aprèsI.89, permet donc de généraliser le calcul précédent. Ce calcul est effectué en annexeDet montre que les spectres mesurés en plaçant l’interface à une distance Z du col se mettent sous la même forme :

S(ω) =Z

0

P(k, ω)ΦZ(k)kdk (I.90)

où ΦZ est une fonction de pondération qui dépend du vecteur d’onde k, de la longuer d’onde λet du rapport entre la distance Z et la longueur de Rayleigh zR. Comme pressenti en début de discussion, zR est la longueur caractéristique du problème. Sur la figureI.18, on affiche les fonctions de pondération ΦZ normalisées par 1/π2λ2 en fonction du produit kR0 calculées pour les rapports Z/zR = 0, 0.2, 0.5 et 1. Pour les deux premiers rapports, quel que soit le vecteur d’onde k, on n’observe aucune différence. Pour ces rapports, la sensibilité est très proche de celle obtenue en plaçant l’interface exactement au col. En revanche pour Z/zR=0.5 et Z/zR=1, aux vecteurs d’onde tels que kR0≥1, la fonction de pondération est plus faible. Lorsque l’on place l’interface à une distance Z comparable à zR, la technique devient moins sensible aux fluctuations telles que kR0≥1.

Sur la figureI.19, on représente en rouge les points de la figureI.17en fonction du rapport Z/zR. On rappelle que ces points ont été obtenus avec un faisceau tel que R0 = 3.5 µm. Sa-chant que zR= 2πR02/λ= 122 µm, les points correspondent à un rapport Z/zRinférieur à 2. Les courbes rouges en traits pleins et traits pointillés représentent les amplitudes de fluctua-tions calculées grâce à l’expression (I.90) aux deux fréquences 2 kHz et 40 kHz. Pour chaque fréquence, la diminution de l’amplitude des spectres est correctement décrite. Les points noirs correspondent à une mesure des fluctuations en dehors du col où la largeur minimale du faisceau est R0 = 28 µm. Dans ce cas, la longueur de Rayleigh est égale à zR= 7.8 mm. La diminution de l’amplitude du spectre est à nouveau bien décrite par la nouvelle expression du spectre (I.90). Notons que cette nouvelle expression permet de décrire les mesures obtenues des rapports Z/zR relativement importants. En effet, dans le calcul de la fonction d’appareil ΦZ, aucune hypothèse n’a été effectuée sur la distance Z. L’expression (I.90) est donc valable aussi bien en champ proche (|Z| < zR) qu’en champ lointain (|Z| > zR).

2 2 0) ( ×π λ Φ kRZ 0 kR 0 /zR= Z 2 . 0 /zR= Z 5 . 0 /zR= Z 1 /zR = Z

Figure I.18Fonctions de pondération ΦZnormalisées par 1/π2

λ2en fonction du produit kR0calculées pour les rapports Z/zR=0, 0.2, 0.5 et 1. Les courbes obtenues pour les rapports Z/zR= 0 et Z/zR= 0.2 affichées respectivement en trait rouge pointillés et trait vert continu sont difficiles à distinguer.

Figure I.19Variations de l’amplitude normalisée des spectres en fonction du rapport Z/zR. Les points rouges correspondent aux points affichés sur la figure I.17. Les points noirs sont obtenus avec un faisceau tel que R0 = 28 µm. Les courbes en traits pleins et en traits pointillés correspondent aux amplitudes calculées d’après (I.90) et se superposent aux points expérimentaux quelle que soit la largeur du faisceau, quelle que soit la fréquence.

En conclusion, le spectre mesuré avec notre technique est sensible à la position à laquelle est placée l’interface dans le faisceau. L’amplitude du spectre diminue lorsqu’on éloigne l’inter-face du col. Le spectre mesuré en dehors du col peut être correctement décrit en introduisant une nouvelle fonction d’appareil ΦZ qui dépend de la distance séparant l’interface du col.

Cette fonction d’appareil est obtenue en généralisant le calcul effectué au paragraphe3.3 en utilisant la forme exacte du champ lumineux pour un faisceau gaussien. D’après l’expression de ΦZ, la vitesse à laquelle l’amplitude décroît dépend du rapport Z/zR. Ainsi, le réglage de la position de l’interface dans le faisceau (pour obtenir une sensibilité maximale) est de plus en plus délicat lorsque l’on réduit la taille R0 du faisceau. Enfin, d’après la forme des fonctions ΦZ(k), la baisse de l’amplitude du spectre en dehors du col est principalement due à la chute de la sensibilité de la technique aux grands modes de fluctuations. En pratique, pour R = 28 µm (zR = 7.8 mm), si l’on souhaite mesurer un spectre dont l’amplitude est moins de 5% différente de celle calculée en utilisant la fonction de pondération au col (ΦZ=0), on doit placer l’interface à moins de 3 mm du col.