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Détermination du profil de température à la surface libre

4.2 Cas du film mince sur un substrat absorbant

4.2.1 Détermination du profil de température à la surface libre

On considère un film non absorbant d’épaisseur h et de conductivité thermique Λf sur un substrat solide absorbant d’épaisseur e, de conductivité thermique Λs et de coefficient d’absorption α (figure III.37). On assimile le faisceau laser incident à un faisceau gaussien.

Air Film Substrat h r z 0 2w 1 α Faisceau  laser e

Figure III.37Schéma du problème thermique. Un faisceau laser de rayon w0est incident sur un film d’épaisseur h supporté par un substrat solide absorbant, d’épaisseur e et de coefficient d’absorption α.

La distribution d’intensité I(r, z) dans le substrat (z < 0), s’écrit : I(r, z) = 2P πw2e 2r2 w2 0 +αz (III.66)

où P est la puissance du faisceau laser, w0 est la largeur du faisceau laser. Dans cette expres-sion, on suppose que la largeur du faisceau est constante et égale à w0. Cette hypothèse est correcte car en pratique, la distance typique sur laquelle le faisceau est absorbé (α−110 µm) est beaucoup plus petite que la distance typique sur laquelle le profil transversal du faisceau varie, soit la longueur de Rayleigh zR. On résume les notations du problème dans le ta-bleau III.1. Les valeurs indiquées correspondent aux valeurs des expériences effectuées.

Epaisseur du film h ≤1 µm

Epaisseur du substrat e ≈3 mm

Conductivité thermique du substrat Λs=1.2 W/m/K

Conductivité thermique du liquide Λf=0.14 W/m/K

Rayon du faisceau laser 1.5 µm ≤ w0116 µm

Viscosité η = 0.02 Pa.s

Tension de surface γ = 20 mN/m

Variation de la tension de surface avec la température γθ = −8.10−5N/m/K

Puissance laser 0.1 mW ≤ P ≤ 5 mW

Coefficient d’absorption α >105m−1

Tableau III.1Résumé des notations et des ordres de grandeurs du problème thermocapillaire.

Afin d’évaluer l’importance du transport convectif de chaleur dans le film, on calcule le nombre de Péclet thermique : P e = ulT/κl. Où u est la vitesse typique du fluide, lT est la largeur sur laquelle le profil de température s’établit et κl la diffusivité thermique du liquide. On obtient P e ≈ 10−5, le transfert thermique s’effectue donc uniquement par conduction. Par ailleurs, le temps caractéristique de chauffage l2

Ts, (où κs est la diffusivité thermique du substrat) est de quelques millisecondes. Ce temps est très faible devant la durée typique des démouillages observés dans nos expériences. Par conséquent, les champs de température dans le film et dans le substrat, notés respectivement θf, θsobéissent à l’équation de diffusion de la chaleur dans le régime stationnaire [56] :

2θf = 0 pour 0 < z ≤ h (III.67)

Λs∇2θs= −αI(r, z) pour z ≤ 0 (III.68)

Où Λs est la conductivité thermique du substrat et ∇2 désigne l’opérateur laplacien. Le se-cond terme de l’équation (III.68), αI(r, z), correspond à l’énergie absorbée dans le substrat par unité de volume et par unité de temps. Notons que dans l’écriture de ces équations, on néglige la variation de la conductivité et de la diffusivité avec la température.

Compte tenu de la symétrie cylindrique du problème, la méthode classique de résolution utilise les transformées de Fourier-Bessel [54]. Cette transformée est l’analogue de la

transfor-mée de Fourier classique, mais elle tient compte de la symétrie cylindrique par l’intermédiaire de la fonction de Bessel d’ordre zéro J0. La température est décomposée sur les modes propres ˜θ(k, z) définis par :

˜θ(k, z) =Z 0

θ(r, z)J0(kr)rdr (III.69)

Conditions aux limites :

Puisque la longueur d’absorption α−1est très faible devant l’épaisseur du substrat e, il est approprié de considérer le substrat comme un milieu semi-infini. On écrit donc la condition : θs(k, z) → θ0 lorsque z → −∞. De plus, on écrit la continuité du flux thermique à l’interface film/substrat : Λszθs(r, z) = Λfzθf(r, z) en z = 0. Enfin, on suppose qu’il n’y a pas de pertes thermiques à la surface libre du film : ∂zθf(r, z) = 0 en z = h.

En calculant la transformée de Fourier-Bessel inverse, on en déduit l’élévation de tempé-rature ∆θ à la surface libre du film (en z = h). On obtient :

∆θ(r) = θf(r, z = h) − θ0 = αP Z 0 e k2w2 0 8 1 α+ k 1 Λs+ Λltanh kh 1 cosh khJ0(kr)dk (III.70) Pratiquement, compte tenu de la gaussienne dans l’integrand, seul les modes tels que k ≤ 1/w0

contribuent à l’élevation de température. Dans la limite w0  α−1 et w0  h, l’intégrale de l’équation (III.70) s’approxime donc à

Z 0 e k2w2 0 8 1 αΛsJ0(kr)dk (III.71)

Or cette intégrale est tabulée8, l’élevation de température s’écrit donc :

∆θ(r) =P 2πΛsw0e r2 w2 0I0 r2 w2 0 ! (III.72) où I0 est la fonction de Bessel modifiée de première espèce et d’ordre zéro.

L’élévation de la température à la surface libre ne dépend ni du coefficient d’absorp-tion, ni de l’épaisseur du film. Par ailleurs, on vérifie que la température en profondeur du film (0 < z < h) est identique à celle calculée à la surface libre (z = 0). Autrement dit, il n’existe pas de gradient vertical de température dans le film. L’effet thermocapillaire observé est uniquement dû à un gradient de température horizontal. Les conditions dans lesquelles on observe l’effet thermocapillaire sont donc très différentes des conditions rencontrées dans

8. On a :R∞ 0 e k2 w20 8 J0(kr)dk = w0 e r2 w20I0  r2 w2 

les expériences visant à étudier l’instabilité de Bénard-Marangoni. En effet, dans ces expé-riences, le gradient de température imposé à une couche horizontale de fluide est vertical [57].

Dans notre cas, il est important de remarquer qu’il n’existe aucun couplage entre la dé-formation de la surface libre et l’élévation de la température. La température à la surface libre du film est constante au cours de l’amincissement du film. Notons que la courbure de la surface libre sous le faisceau agit comme une lentille divergente pour le faisceau réfracté par la surface libre et entraîne un éventuel couplage entre la déformation de la surface libre et l’élévation de la température. En effet, cet effet augmente la largeur du faisceau absorbé dont dépend l’élévation de température. Cependant, compte tenu de la très faible propagation du faisceau dans le film et dans le substrat, cet effet est totalement négligeable. Notons que le gradient radial de température entraîne un gradient d’indice optique dans le film et amplifie également la divergence du faisceau réfracté, cet effet est connu sous le nom de lentille ther-mique. Pour la même raison que celle évoquée précédemment, l’effet de lentille thermique est négligeable dans notre cas.

L’élévation maximale de température (en r = 0) s’écrit :

∆θmax = √ P

2πΛsw0

(III.73) Dans le cas d’un substrat en verre, on a Λs = 1.2 W m−1K−1. Pour un faisceau incident tel que P = 1 mW et w0 = 100 µm, on obtient ∆θmax= 3.3°C.

Remarque :Dans cette étude, nous avons négligé les pertes thermiques à la surface libre du film. Ainsi, l’élevation maximale de température calculée d’après (III.73) est une majora-tion de la valeur réelle.

D’après l’expression (III.72), pour r < w0, la température décroît suivant une fonction gaussienne, ∆θ ∼ exp −r2/w02. Pour r > w0, la température décroît lentement en ∆θ ∼ 1/r. Le profil de la température à l’interface n’est pas identique au profil de l’intensité du faisceau laser, il ne s’agit pas d’une gaussienne. Cependant, la distance caractéristique sur laquelle ce profil varie est bien la taille du faisceau w0.