• Aucun résultat trouvé

L’objectif de ce paragraphe est de relier le spectre mesuré S(ω) aux fluctuations de hauteur de l’interface, caractérisées par la fonction d’autocorrélation temporelleD

˜ζ(k, t0)˜ζ(k, t + t0)E

t0, calculée au paragraphe2.3.

Nous avons vu que le spectre mesuré, correspond à la densité spectrale de puissance de la différence de tension normalisée.

S(ω) = * 1 T TFδV Vtot  2+ (I.49) Or la tension délivrée par un quadrant est proportionnelle à l’intensité lumineuse qu’il reçoit. En effet, les quadrants de la photodiode ont une réponse linéaire. Le spectre mesuré peut donc s’exprimer en fonction des intensités totales IA et IB reçues sur chacun des quadrants.

S(ω) = * 1 T TFIA− IB IA+ IB  2+ (I.50) Les intensités totales IAet IBreçues sur chacun des quadrants sont soumises à des fluctuations instantanées δI opposées car l’intensité réfléchie par l’interface, notée 2I0, est constante :

IA= I0+ δI (I.51)

IB = I0− δI (I.52)

La puissance du bruit mesuré, S(ω), s’exprime donc comme : S(ω) = * 1 T |TF(δI)|2 I02 + (I.53) Nous allons maintenant calculer la fluctuation d’intensité δI ainsi que l’intensité I0. Pour cela, il est nécessaire de calculer l’intensité diffusée par l’interface vers chaque quadrant A et B de la photodiode. Nous détaillons le calcul publié dans [14].

On se place dans le cas où l’interface fluctuante est située au col du faisceau laser, la surface d’onde du faisceau est donc plane. De plus, on considère le cas où l’incidence du faisceau est normale à l’interface. Afin de calculer l’intensité diffusée vers chaque quadrant, on cherche à exprimer le déphasage φ de l’onde lumineuse qui est diffusée en un point de l’interface repéré par le vecteur ~r(r, ψ) et la hauteur ζ(~r, t) suivant l’axe z (figure I.6).

)

,

( trr

ζ y

x

z

rr

ψ

θ

ϕ qr

Onde incidente Onde diffusée

Figure I.6Définition des paramètres géométriques du calcul. Le faisceau incident est normal au plan z = 0. La direction de diffraction est repérée par le couple d’angle (θ, ϕ). La hauteur d’un point de coordonnée ~r situé sur la surface est z = ζ(~r, t).

Ce déphasage dépend de la direction suivant laquelle l’onde lumineuse est diffusée, on repère cette direction par le couple d’angles (θ, ϕ). Le déphasage φ s’exprime suivant la relation1 :

φ(~r, t) =

λ [~q.~r + (1 + cos θ) ζ(~r, t)] (I.54)

Où ~q est la projection plane du vecteur de transfert : ~

q = sin θ cos ϕ sin θ sin ϕ

!

(I.55) et λ est la longueur d’onde du faisceau. Pour le laser He-Ne, λ = 632.8 nm.

1. En effet, le vecteur unitaire (sin θ cos ϕ, sin θ sin ϕ, cos θ) est orthogonal au plan d’onde dans la direction de diffraction passant par l’origine pris comme référence. La distance à ce plan du point de la surface de coordonnées (~r, ζ(~r)) est donc la différence de marche en réflexion, elle s’écrit ~q.~r + cos θζ(~r). La différence de marche totale est obtenue en rajoutant celle de l’onde incidente : ζ(~r).

En pratique, l’angle polaire θ est petit, le déphasage peut s’écrire : φ(~r, t) ≈

λ [~q.~r + 2ζ(~r, t)] (I.56)

L’intensité dans la direction définie par les angles (θ, ϕ) est donnée par le carré du module du champ électrique et s’écrit :

I(θ, ϕ) =Z Z d~rd~r0E(r)E(r0)ei(φ(~r,t)−φ(~r0,t)) (I.57) où E(r) est le champ électrique réfléchi sur la surface. En supposant que le faisceau laser est gaussien et en notant R son rayon au col, le champ s’écrit :

E(r) = E0e−r2/2R2 (I.58)

~

q est un vecteur de norme sin θ, on a dqxdqy = d~q = sin θ cos θdθdϕ. L’intensité totale sur un quadrant (demi-espace 0 < θ < π/2, 0 < ϕ < π) s’écrit :

IA=Z d~qI(θ, ϕ) =Z π/2

0 cos θ sin θdθZ π

0

dϕI(θ, ϕ) (I.59)

Pour des interfaces usuelles, nous avons vu au paragraphe 2.2 que la rugosité de la surface est de l’ordre de quelques Ångströms. La différence des hauteurs ζ(~r, t) − ζ(~r0, t) est donc très faible devant la longueur d’onde λ, ce qui permet de développer le terme de phase dans l’expression de l’intensité IA(I.59) au premier ordre en

λ [ζ(~r, t) − ζ(~r0, t)]. En effectuant ce développement limité et en exprimant les grandeurs ζ(~r, t) et E(r) dans l’espace de Fourier, on montre dans l’annexe A, que la différence d’intensité δI entre les deux quadrants peut s’écrire :

δI =Z d~kF(~k)ζ(~k, t) (I.60)

où F (~k) est une fonction qui dépend de l’éclairement du faisceau et où l’on a posé :

ζ(~k, t) =Z d~rζ(r, t)e−i~k~r (I.61)

Pour un système ergodique, le théorème de Wiener-Khintchine stipule que la densité spec-trale de puissance correspond à la transformée de Fourier de la fonction d’autocorrélation correspondante. Ce théorème permet ainsi de relier une mesure à un calcul de physique sta-tistique. En supposant notre système ergodique, le théorème de Wiener-Khintchine permet d’exprimer le spectre mesuré S(ω) à partir de la fonction d’autocorrélation de δI.

S(ω) = 1 I2 0 TF δI(t0)δI(t0+ t) t0  (I.62)

En utilisant la forme (I.60) de la différence d’intensité, on montre également dans l’annexe

A que le spectre mesuré peut alors se mettre sous la forme : S(ω) =Z

0

P(k, ω)Φ(k)kdk (I.63)

Où P (k, ω) correspond à la densité spectrale de puissance de hauteur de l’interface (I.25), définie au paragraphe2.3. Et Φ(k) est une fonction de pondération, calculée à partir de F (~k), qui ne dépend pas du milieu sondé mais uniquement de la longueur d’onde du laser λ et de la largeur R du faisceau au col.

Dans l’annexe B, on calcule cette fonction de pondération : Φ(k) = 1 π2λ2eκ2R22 Z 0 erf2κR 2 sin α  (I.64) Une bonne approximation de la fonction Φ(k) est donnée par :

Φ(k) ∼= 1

π2λ2Bk2R2ek2R2c (I.65)

où B = 0.979 et c = 1.658.

Contrairement aux techniques de diffusion, pour lesquelles une très faible gamme de vec-teur d’onde est sélectionnée, le spectre mesuré S(ω) avec cette technique dépend de l’ensemble des modes de fluctuations de surface. Cependant, la contribution de ces différents modes spa-tiaux dans le signal mesuré, n’est pas égale. La fonction Φ(k) permet de tenir compte de l’inégalité de ces différentes contributions.

Figure I.7Fonction de pondération Φ en fonction du produit kR (calculée pour λ = 632.8 m). Le signal possède une sensibilité maximale lorsque la longueur d’onde de fluctuation est comparable à la taille du faisceau, kR ∼ 1.

On remarque d’après l’expression (I.64) que la fonction de pondération peut s’exprimer en fonction du produit kR (FigureI.7). Lorsque la longueur d’onde est très grande devant la taille du faisceau (kR  1), à l’échelle du faisceau, l’interface est plane et la pente entre l’in-terface et l’horizontale est proportionnelle au vecteur d’onde k. Ce cas correspond au schéma de gauche de la figure I.8. Il est satisfaisant de retrouver le comportement Φ ∼ (kR)2 dans la limite kR  1. A l’opposé, lorsque la longueur d’onde est très faible devant la taille du faisceau, kR  1, le faisceau est peu dévié, la différence de tension δV est donc peu sensible à ces modes de fluctuation. Il s’agit du cas représenté sur le schéma de droite de la figureI.8. C’est la raison pour laquelle la fonction de pondération tend rapidement vers zéro lorsque kR 1. La fonction d’appareil passe par un maximum lorsque la longueur d’onde de fluc-tuation est comparable à la taille du faisceau kR ∼ 1.

1

>>

kR

1

<<

kR

R

2 2R

k

/

1

k

/

1

Figure I.8Représensation d’un fluctuation de surface à un vecteur k très faible (schéma de gauche) et très grand (schéma de droite) devant la largeur R du faisceau laser.

Avec un raisonnement simplifié, nous allons voir qu’il est possible d’évaluer rapidement la contribution associée à chaque mode k de fluctuation dans le spectre mesuré. Ce raisonnement, moins rigoureux que celui du calcul précédent, permet de calculer des contributions assez proches de celles données par la fonction de pondération (I.64). Puisque la technique est sensible à la pente de l’interface sous le faisceau, quel que soit le mode k de fluctuation de l’interface, on suppose que le signal mesuré est proportionnel à une pente effective αeff

obtenue en calculant la moyenne des pentes locales de l’interface pondérées par l’intensité I(r) du faisceau. Si l’on détecte les fluctuations dans la direction x, la pente effective s’écrit :

αeff =

R

d~r∂ζ(~∂xr,t)I(~r)

R

d~rI(~r) (I.66)

Pour un faisceau gaussien, l’intensité s’écrit I(~r) = I0e−r2/R2, la pente effective devient :

αeff= kζ0ek2R24 e (I.67)

Or le spectre mesuré est sensible à la statistique des fluctuations de pente, le spectre est donc proportionnel à la moyenne quadratique des pentes effective :

S ∼Dα2effE (I.68)

∼ k2ζ02ek2R22 (I.69)

On retrouve une dépendance en k proche de celle obtenue pour la fonction de pondération par le calcul détaillé, qui prédit que Φ ∼ k2ek2R2c avec c = 1.658. La prise en compte des modes de fluctuation tels que kR  1 est identique. En revanche, pour les modes tels que kR 1, celle-ci diffère légèrement compte tenu de la différence du coefficient numérique dans la gaussienne.

Remarque :

Notons qu’un montage comparable au nôtre a été développé par T. Mitsui et K. Aoki [15,16]. Ce montage mesure les fluctuations de surface également à partir de la réflexion spé-culaire d’un faisceau laser. Dans leur travail, les spectres de fluctuation mesurés sont décrits avec la fonction d’appareil obtenue avec le raisonnement simplifié : Φ(k) = k2e−k2R2/2. Cette équipe s’est appliquée à réduire le bruit du signal mesuré. Afin d’éviter de prendre en compte le bruit autre que celui dû aux fluctuations de surface, leur montage utilise en parallèle deux faisceaux laser et quatre détecteurs. On rappelle que notre montage utilise uniquement un faisceau laser et deux détecteurs. Le spectre est obtenu en calculant la corrélation croisée de deux signaux δV1 et δV2. Pour comparaison, dans notre montage on obtient le spectre en effectuant l’auto-corrélation du signal δV . Bien que ces modifications alourdissent et com-pliquent le montage, elles leur permettent d’augmenter significativement le rapport signal sur bruit.

Dans ce paragraphe, nous avons calculé le spectre de fluctuation mesuré avec notre mon-tage. Contrairement aux méthodes de diffusion, où les fluctuations sont mesurées à un vecteur d’onde unique, notre montage est sensible à l’ensemble des modes de surface. Ainsi le spectre s’écrit en sommant la contribution de l’ensemble des vecteurs d’onde (I.63). Ceci explique la grande sensibilité de notre montage. Au chapitre II, nous verrons que la technique est suf-fisamment sensible pour mesurer les fluctuations à la surface d’un matériau dont le module élastique est de quelques centaines de kPa. Cependant, compte tenu de la taille finie du fais-ceau R, ces contributions sont inégales. La fonction d’appareil Φ (I.64), en forme de cloche

autour de kR ≈ 1 , rend compte de ces différentes contributions. Ainsi, le spectre mesuré dépend à la fois des propriétés physiques du milieu sondé mais également de la largeur du faisceau (et de sa longueur d’onde). Il est donc essentiel de déterminer précisément la largeur du faisceau utilisé. C’est l’objectif du paragraphe suivant.