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3. Corpus

3.1 Corpus d’écrit oralisé

3.1.1 Propriétés des informations télévisées

Nous précisons le type d’informations télévisées qui correspond aux propriétés de l’unité discursive définie dans le chapitre précédent.

Au Japon il y a plusieurs stations de télé comme en France et en conséquence il existe plusieurs styles des journaux télévisés. Parmi ces stations, le NHK, Japan Broadcasting Corporation, a un centre de recherches, NHK Broadcasting Culture Research Institute. A cet institut, les études sur la langue orale de radio et de télévision sont effectuées en collaboration avec les linguistes des universités ou du NINJAL, National Institute for Japanese Language and Linguistics, sur les divers plans linguistiques ; la structure de phrase, le type d’expression, la structure de discours, la structure du commentaire des nouvelles, la méthode d’analyse des informations, la manière de lecture des informations (Uechi 1962, Suzuki 1962, Miyaji 1962, Hayashi 1963, Minami 1963, Kanno 1963, Kanno et Ishino 1968 et 1969, Ishino 1972, Usuta 1980, Ishino 1983, Matsuoka 1990, Akiyama 1997, Mogami 1997, NHK Publishing 2005). Ces études ont deux objectifs : réaliser la langue orale en tant que moyen de transmettre les informations avec la plus grande efficacité, c’est-à-dire, avec des expressions concises et faciles à comprendre pour les auditeurs, et d’assurer le développement de la langue parlée

commune par l’émission (Uechi 1962). NHK publie un dictionnaire de l’accent standard du japonais, à savoir de l’accent de Tokyo. Nous considérons donc que le style du journal du NHK est une réalisation en se fondant sur les résultats des études linguistiques58.

Mogami (1997) constate que les types d’informations dans le journal télévisé japonais sont plus variés après le milieu des années 1970 : les informations racontées par le commentateur, celles écrites par le journaliste et lues par le présentateur, le rapport en direct, le rapport par le journaliste ou le réalisateur, le commentaire des nouvelles, le rapport spécial, etc. Parmi ces types, il prétend que les informations lues sont plus efficaces pour transmettre les nouvelles compliquées précisément, rapidement et clairement.

Il montre d’abord que la structure d’une information télévisée se constitue en trois parties, le titre sur l’écran, l’introduction (ou le « lead »), et le texte principal. Ensuite il présente le style de l’introduction : elle comporte les éléments les plus importants pour décrire ce qui s’est passé tels que le lieu (où), le temps (quand), le sujet (qui), l’objet (quoi), la raison ou la cause (pourquoi), le moyen (comment), et elle forme souvent une phrase longue et complexe avec des propositions adnominales ou adverbiales.

Il signale que cette dernière propriété de l’introduction demande une lecture d’une très haute technicité pour que les téléspectateurs la comprennent facilement. Il explique comment un présentateur expérimenté lit l’introduction : d’abord il saisit la structure de la phrase, ensuite met les pauses, la variation de tempo, l’intonation naturelle, la proéminence et l’accent ; éléments pertinents correspondant à la structure de la phrase pour l’oraliser.

Ishino (1987) examine les propriétés de lecture de l’information par le présentateur. Il distingue d’abord la lecture de l’information avec les autres lectures à haute voix telles que la conférence, la narration, la déclamation. Il prétend que ces dernières demandent un art, un jeu, ou une interprétation tandis que la lecture de l’information est une transmission des informations avec objectivité pour que les auditeurs les comprennent.

Ensuite il présente les résultats de deux sortes d’analyses acoustiques de la lecture de l’information : l’une analyse une séquence de mots lue par les présentateurs et par les personnes ordinaires ou les amateurs, et l’autre est l’analyse de la pause dans une information lue par les deux présentateurs. Le résultat de la première analyse montre que la modulation mélodique est plus variée, chaque voyelle est prononcée plus nettement, et la tonalité est plus

58 Notons qu’en français on peut trouver des travaux sur le style de journal dans la cadre de la sociolinguistique pour catégoriser chaque style de la langue orale tels que la conférence, l’interview, le discours politiques (Léon 1993, Goldman, Auchlin, Simon 2009), mais il n’y a pas d’études sur la structure du texte ou de la phrase des informations à notre connaissance.

claire dans la lecture par les présentateurs. Concernant la deuxième analyse, il observe que les pauses après la fin de la phrase durent plus d’une seconde en principe et qu’il y a trois sortes de pauses classées par durée dans une phrase. Pourtant, il conclut que ces trois types de pauses sont utilisés différemment par chaque présentateur et que les différences de la position et de la durée ne correspondent systématiquement ni à la structure syntaxique, ni à la structure sémantique59.

Akiyama (1997) définie d’abord que « la facilité de compréhension » ou « l’exactitude » que la langue orale pour l’émission demande est « une compétence de présentation pour transmettre les informations sans causer un malentendu, sans difficulté, et avec précision entre l’émetteur et la récepteur dans une durée déterminée en étant tenu par une contrainte de la langue orale transitoire ».

Il suggère ensuite « la prosodie sémantique » qui transmet la structure sémantique naturellement et qui est facile à comprendre. Il explique que la structure sémantique est la relation entre les constituants modifiants et modifiés et qu’une prosodie sémantique forme une ligne descendante sans pause dans une séquence de constituants modifiants et modifiés.

Il présente les résultats du test perceptif pour vérifier que la prosodie sémantique est facile à comprendre en comparant trois sortes de réalisation de la même information : la première est une réalisation de la prosodie sémantique ou de l’intonation naturelles par un présentateur, la deuxième est l’intonation peu naturelle qui ne correspond pas à la structure sémantique par le même présentateur que la première, et la troisième est une réalisation par un étudiant qui n’a pas suivi de formation en phonétique. Il conclut que la réalisation de l’intonation naturelle est plus facile à comprendre que celle de l’intonation peu naturelle.

Ces études sur les informations télévisées nous conduisent à sélectionner le corpus des introductions des informations du NHK pour les raisons suivantes60 : 1) le fait que les informations télévisées du NHK sont écrites et oralisées dans le but de transmettre les informations avec objectivité et avec des expressions concises et compréhensibles pour les auditeurs, correspond à notre objectif, 2) la structure et les constituants de l’introduction de l’information télévisée que Mogami (1997) présente sont presque identiques à celles de l’unité discursive qui transmet l’information linguistique sans l’information paralinguistique,

59 Goldman, Auchlin et Simon (2009) concluent que l’on ne trouve pas de relation évidente entre la pause et la structure des phrases et que la fonction de la pause est essentiellement pour prendre le souffle dans la lecture des informations (le journal parlé) en français.

60 Nous n’avons pas choisi les informations radiodiffusées parce que le présentateur ajoute une autre lecture à certains mots homophones pour éviter les contresens : « shian » = « kokoromi no an » (projet) / « watakushi no an » (plan personnel).

3) la formation en phonétique pour le présentateur vise la réalisation de la prosodie qui correspond à la relation des constituants modifiants et modifiés pour oraliser les informations écrites.

Pourtant, il reste encore des problèmes à résoudre : Mogami et Akiyama ne précisent suffisamment ni la structure syntaxique ou sémantique dans une phrase de l’introduction telle que l’ordre des mots61, ni la structure prosodique théorique ou généralisée par des données suffisantes. En outre les manières de lire des présentateurs entraînés ne sont pas toutes les mêmes, comme Ishino le signale, bien que la lecture par les présentateurs soit jugée plus facile à comprendre que la lecture par les amateurs.