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1. Structure syntaxique et prosodique en japonais

1.4 Intonation et pause

Dans cette section, nous présentons des travaux antérieurs sur l’intonation et la pause dans la phrase.

1.4.1 Intonations continuative et finale

Comme mentionné dans la section 1.2., la mélodie de chaque unité prosodique, marquée au début par une montée mélodique, descend vers la fin même si elle a des caractéristiques différentes. On peut donc décrire le schéma intonatif de la phrase en japonais comme formé par une répétition de la mélodie descendante à la fin de chaque unité et vers la fin de la phrase.

Dans ce schéma intonatif la distinction entre l’intonation continuative et celle de la fin de la phrase déclarative qui descend également n’est pas aussi évidente qu’en français où on peut distinguer clairement l’intonation continuative marquée par la mélodie montante avec celle de la fin de la phrase déclarative marquée par la mélodie descendante.

Koori (2003) constate qu’en japonais l’intonation continuative est plate et en moyenne deux demi-tons plus haute que l’intonation finale de la phrase déclarative, qui est légèrement descendante. Il montre que la hauteur mélodique à la fin du syntagme prédicatif en forme « -te » au milieu d’une phrase est plus hau-te que celle à la fin du prédicat final de la phrase, en forme césure, dans les quatre cas suivants :

1) syntagme prédicatif court et accentué : trois demi-tons (figure 17) en forme « -te » : 飲んで 騒いだ。

no’nde sawa’ida

boire-TE avoir fait la fête. On a bu et fait la fête en forme césure : 飲んだ。

no’nda avoir bu On a bu.

2) syntagme prédicatif court et inaccentué : un demi-ton (figure 18) en forme « -te » : 並んで 歌った。

narande utatta. se mettre en rang-TE avoir chanté On a chanté en rang.

en forme césure : 並んだ 。 naranda.

s’est mis en rang On s’est mis en rang.

3) syntagme prédicatif long et accentué : 2,1 demi-tons

en forme « -te » : 日が 長くなって 7時でも まだ 明るい。 hi ga na’gakunat’te shichi’ji demo ma’da akaru’i. jour S allonger-TE sept heures même encore être clair Les jours allongent et il fait encore clair même à sept heures. en forme césure : 日が 長くなった。

hi ga na’gakunat’ta. jour S avoir allongé

Les jours allongent.

4) syntagme prédicatif long et inaccentué : 1,9 demi-tons

en forme « -te » : それを 本当にして ひどい目にあった。 sore o hontou ni shite hido’i me’ ni at’ta. cela O prendre au sérieux-TE en avoir vu du dures Comme je l’ai pris au sérieux, j’en ai vu de dures. en forme césure : それを 本当にした。

sore o hontou ni shita. cela O avoir pris au sérieux Je l’ai pris au sérieux.

Figure 17 : Syntagme prédicatif court et accentué (figure 6.2, p. 118) forme « -te » en point blanc et forme césure en point noir

Figure 18 : Syntagme prédicatif cour et inaccentué (figure 6.3, p. 118) forme « -te » en point blanc et forme césure en point noir

Pourtant Inoue (1997) signale que l’on observe très souvent dans la conversation spontanée une intonation montante ou montante-descendante, parfois avec l’allongement, à la fin du syntagme, notamment de la part des jeunes japonais. Il prétend que cette intonation a deux fonctions, l’une de garder le tour de parole et l’autre d'attirer l’attention de l’écouteur.

Cette différence entre l’énoncé expérimental (Koori 2003) et l’énoncé spontané nous suggère qu’il existe des facteurs paralinguistiques pour l’intonation continuative dans l’oral du japonais.

1.4.2 Intonation et pause dans la phrase complexe

La recherche de Ueno (1989) porte sur des phrases à ambiguïtés syntaxiques de construction et examine les schémas intonatifs et les pauses centrés sur le début du modifiant.

Elle suggère qu’il existe deux sortes de montée mélodique du « phrasing » au début de la proposition et du syntagme, qui donc correspondent aux démarcations syntaxiques de différents niveaux, pour la raison que la montée mélodique au début de la proposition est souvent plus haute que celle du syntagme. Elle signale aussi que la pause la plus longue est insérée entre le constituant de la proposition principale et le début de la proposition adnominale. La proposition adnominale de l’exemple (35) commence au troisième syntagme ( ↑ ↑ ) et celle de l’exemple (36) commence au deuxième syntagme (indiqué par la parenthétisation et par la flèche).

(35) ( ( 王は ( 疑い深く ) ) ( ( 権勢欲の 強い 王妃を) 恐れていた。) ) ↑(a) ↑↑(b)

o’u wa utagaibu’kaku {77} kense’iyoku no tsuyo’i o’uhi o oso’reteita. [proposition coordonnée] [proposition adnominale] [nom(cpt)] [pdc]

roi TH être méfiant-RY la volonté de puissance S être fort reine O avait peur de Le roi, il était méfiant et il avait peur de la reine dont la volonté de puissance était forte.

(36) ( ( 王は ( ( 疑い深く ) ( 権勢欲の 強い 王妃を) ) 恐れていた。) ) ↑↑(a) ↑(b)

o’u wa {71} utagaibu’kaku kense’iyoku no tsuyo’i o’uhi o oso’reteita. [thm] [proposition adnominale] [nom(cpt)] [pdc]

roi TH être méfiant-RY la volonté de puissance S être fort reine O avait peur de Le roi, il avait peur de la reine qui était méfiante et dont la volonté de puissance était forte.

Toutefois, elle observe aussi quelques phénomènes contradictoires avec sa proposition : qu’il n’y a peu de différence entre les valeurs F0 de sommet de la mélodie (a), au début de la proposition adnominale, et de la mélodie (b), au début de la proposition coordonnée dans la proposition adnominale ou que la durée de pause avant le début de la proposition adnominale varie selon les constituants précédents, soit le thème, soit le circonstant.

Par contre, Azuma (1992), portant également sur des phrases à ambiguïtés syntaxiques de construction, effectue un test perceptif pour préciser le facteur crucial du « phrasing », la montée mélodique ou la pause. Ses résultats révèlent que c’est la montée mélodique qui importe, pas la pause.

Sugitou, Inukai, Sadanobu (1997) tentent d’expliciter la corrélation entre la prosodie et la subordination de la phrase complexe. Ils postulent que la subordination peut être représentée par la fonction iconique de la prosodie, l’intonation et la pause, l’intention ou l’émotion du locuteur étant représentée par cette fonction.

Leur notion de subordination se fonde sur le classement de la proposition subordonnée de Minami (1993) par la composition de constituants en trois groupes suivants :

1) Groupe A : adverbial – complément – prédicat (+voix)

2) Groupe B : adverbial de modalité appréciative – circonstant – sujet

– les constituants de Groupe A – prédicat (+aspect, négation, temps) 3) Groupe C : adverbial de modalité épistémique – thème

– les constituants de Groupe B – prédicat (+politesse, modalité) Ils analysent les lectures d’exemples de ces trois groupes, dix phrases de A, trente trois phrases de B, onze phrases de C. Ils concluent que le schéma intonatif ou la position et la durée de la pause ne correspondent pas à la subordination mais à la longueur de la phrase, autrement dit la prosodie est contrôlée par les contraintes physiologiques.

Pourtant, les propositions principales des exemples qu’ils analysent sont marquées par la modalité variée, comme dans l’exemple (37). Il en résulte donc que la modalité de la phrase est représentée par la fonction iconique de la prosodie, pas par la subordination. Notons aussi que le classement de Minami (1993) est effectué par la fonction syntaxique sans égard pour la fonction restrictive suggérée par Masuoka (1997).

(37) ひまが できたら いちど 会いたいものだね。 Hima ga de’kitara ichido aita’i mono da ne. [proposition circonstancielle] [cct] [pdc]

temps libre pouvoir avoir si une fois aimerais voir AT Si je peux me libérer, j’aimerais la voir une fois, hein ?

Pour autant que nous sachions, il n’y a pas d’autres travaux sur l’intonation et la pause dans une phrase complexe, et tous signalent que la pause ne porte pas de fonction linguistique.

Néanmoins, comme on peut l’observer dans l’exemple (27) de la section 1.2., plusieurs pauses sont insérées et leurs durées sont variées pour lire des phrases composées de propositions multiples. Nous considérons que les positions et la variation de durée des pauses ne sont pas arbitraires si l’on compare l’énoncé de la présentatrice et celle de l’étudiant.