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3. Conscience de soi et polyhandicap : une équation à deux inconnues ?

3.1. Définir le polyhandicap : un processus en cours

3.1.3. Propositions de classifications du polyhandicap en sous-groupes

Dans la littérature scientifique anglophone, à notre connaissance seul le SIRG-PIMD (2001) propose une classification en sous-groupes ; la littérature francophone en propose deux : celle de Georges-Janet (2003) et celle de Saulus (2008, 2009, 2011). Le Groupe Romand sur le Polyhandicap (2005) propose quant à lui un élargissement de sa définition de base. Aucune de ces propositions n’a pour le moment abouti à une opérationnalisation des critères de classification dans les différents sous-groupes. Vlaskamp (2005a) estime que l’adoption d’un cadre développemental permettra de les distinguer, même s’ils se chevauchent un peu. Nakken et Vlaskamp (2007) pensent que le développement de nouveaux outils d'évaluation et de procédures d'intervention spécifiques aux personnes polyhandicapées permettra de fournir des informations importantes sur les critères à partir desquels les sous-groupes de personnes pourront être différenciés.

Ø Un groupe principal et deux groupes adjacents (SIRG-PIMD, 2001)

Le SIRG-PIMD décrit en détail les caractéristiques du groupe principal (tableau 3), dans lequel les déficiences intellectuelles et motrices sont profondes. Les deux autres groupes comprennent des personnes qui se situent soit à l’extrémité inférieure ou supérieure du continuum de la déficience intellectuelle ou de celui de la déficience motrice profonde.

Figure 6. Classification du SIRG-PIMD (2001)

Le SIRG ne donne toutefois pas plus de précisions quant à la distinction entre ces deux groupes. Groupe principal Déficience intellectuelle ++ Déficience motrice ++ Groupe adjacent Déficience intellectuelle ++ Déficience motrice + Groupe adjacent Déficience intellectuelle + Déficience motrice ++

Ø Quatre sous- groupes au sein du polyhandicap (Georges-Janet, 2003)

Georges-Janet procède à des groupements selon des critères cliniques et étiologiques :

Figure 7. Les quatre sous-groupes de la classification de Georges-Janet (2003)

Le premier groupe est constitué de personnes présentant une déficience intellectuelle sévère, chez lesquelles la déficience motrice est moindre quoique souvent associée à des malformations et/ou des dysmorphies. Un autre groupe est formé de personnes lourdement atteintes sur le plan moteur mais avec de bonnes capacités de communication non-verbale (DI moins sévère). Les grands épileptiques sévères présentant parfois des comportements de type autistiques forment un troisième groupe. Enfin, un dernier groupe est composé de personnes souffrant de maladies évolutives du système nerveux central.

Ø Trois profils de polyhandicap (Saulus, 2008, 2009, 2011)

Saulus distingue trois profils prototypiques du polyhandicap, il s’agit de « profils psycho- développementaux qui témoignent de perturbations des phases précoces du développement cognitif et psychoaffectif » (Saulus, 2008, p. 180)

Figure 8. Les trois profils de polyhandicap de Saulus

Le profil I est le profil de polyhandicap le plus sévère, il est caractérisé par :

• un syndrome tonico-moteur (motricité de masse, décharges motrices globalisées en réponse aux flux sensoriels)

•Déficience intellectuelle ++ •Déficences motrices ++ •Maladies évolutives SNC •Epilepsie sévère

Pr

of

il

I

Pr

of

il

II

Pr

of

il

III

• une fréquente alternance d’hypertonie et d'hypotonie, accompagnée souvent de manifestations émotionnelles massives (pleurs, cris,…)

• des mouvements souvent répétitifs, les actions sur le corps propre sont produites dans le but de se procurer de sensations

Le profil II est caractérisé par l’émergence :

• d’expressions de plaisir/déplaisir qui se différencient et se nuancent progressivement

• d’une intention de communiquer, la présence d’autrui est activement recherchée • d’une d’instrumentation du corps propre, la personne cherche à reproduire

certains éprouvés

• de signes de mémorisation, d'attention sélective et d'attention conjointe

Le profil III se distingue des deux autres profils par la manifestation des comportements et habiletés suivants :

• un accordage affectif, des échanges plus construits • des jeux corporels et jeux sonores

• un intérêt pour les apprentissages, un début de permanence de l’objet • l'apprentissage d'un code oui/non, un début de communication de ses choix • l'apparition d'une activité symbolique

Ces profils entretiennent entre eux des rapports dynamiques : une personne peut passer d'un profil à l'autre dans le sens d'une progression ou d'une régression.

Ø Elargissement de la définition du polyhandicap par le Groupe Romand sur le Polyhandicap (GRP) (2005)

Ce groupe constitué de professionnels de la pédagogie spécialisée et de parents propose une définition « stricte » du polyhandicap, mais estime nécessaire d’élargir la notion de polyhandicap en fonction du profil des personnes qui fréquentent les structures accueillant les personnes polyhandicapées en Suisse. Il propose de l’élargir :

• « aux personnes atteintes de perturbations cérébrales postnatales précoces (avant l’âge de 2 ans) ou évolutives »

• « aux personnes qui, outre les atteintes motrices perceptives et cognitives, présentent des altérations de l’équipement sensoriel, des troubles épileptiques ou encore, de manière transitoire ou durable, prévalant cliniquement, des manifestations de la série autistique »

Si l'on procède à une comparaison de ces diverses propositions, celles du SIRG-PIMD et du GRP consistent plus en une démarche d’élargissement d’un « groupe-noyau » à des personnes dont les caractéristiques diffèrent quant à la gravité des déficiences ou quant à leur étiologie. Celle de Georges-Janet consiste plutôt en une distinction de groupes d'individus avec des caractéristiques particulières. Celle de Saulus décrit des profils en fonction du degré de sévérité de polyhandicap ; sa grande qualité est d'offrir une vision développementale et dynamique qui n'enferme pas définitivement la personne dans un profil. Toutes ces propositions ont pour mérite de tenter de "démêler l'écheveau" de l'hétérogénéité du polyhandicap. Cependant l'absence d'études visant à opérationnaliser ces classifications empêche pour le moment de valider l'une plutôt que l'autre.

La première partie de l'équation ayant été précisée, la deuxième partie de l'équation - la conscience de soi chez les personnes polyhandicapées - sera approfondie dans la suite de ce chapitre.