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argumentatif en tant que tel. Les propositions du type G sont très rares dans des textes littéraires (Voïtenkova 2001 : 23-25).

3.3. Propositions déductives

Un autre type de proposition, apparenté également au modèle conditionnel, est présenté par les propositions déductives. La déduction peut être faite à partir d’un fait réel – dans ce cas, elle sera introduite par raz ou esli, ou d’un fait hypothétique et dans ce cas on peut trouver la conjonction esli uniquement.

D’habitude, le schéma déductif s’appuie sur un rapport d’identification préalablement établi. Prenons un exemple qui illustre bien un raisonnement déductif :

Exemple 29 : И Ёжик стал прикидывать, куда мог спрятаться Дед-Мороз. "(a) Если он влез на сосну, - рассуждал Ёжик, - (b) то где-то под сосной стоят его большие валенки. (c) Ведь даже Медвежонок не может влезть в валенках на сосну! (d) Если он залез под лёд, - продолжал размышлять Ёжик, - (e) то где-то на реке обязательно должна быть дырка, и из неё должен идти пар. (f) Потому что Дед-Мороз сидит в валенках на дне и дышит. (g) А если он совсеFм ушёл из леса, (h) я обязательно увижу его следы!" И Ёжик надел лыжи и побежал между деревьями. [Сергей Козлов. Правда, мы будем всегда? (1969-1981)]

Le raisonnement du Hérisson s’appuie sur une évidence largement exploitée par des enquêtes policières – là où l’homme passe, il laisse toujours des traces de son passage. La localisation d’un sujet impliquera donc l’existence des preuves de cette localisation. A partir de là, l’Hérisson construit sa déduction sur plusieurs hypothèses. Le fait de grimper dans l’arbre (a) implique le fait qu’on le fait sans ses bottes. Cette implication repose sur les connaissances universelles (ved’) : (c) personne ne peut grimper dans l’arbre avec ses chaussures, même pas un Ourson. La deuxième déduction établit une implication entre (d) « se cacher sous la glace » et l’aptitude de respirer, et enfin la troisième insiste sur la relation entre (g) partir et laisser des traces. Mais ces constructions déductives auront une structure plus complexe, car ce n’est pas la conclusion (voir schéma page 117) qui sera explicitée mais la conséquence de cette conclusion : la présence des bottes, du trou et de la buée, et des traces sur la neige. Nous avons ainsi le schéma suivant :

Séquence 1 : Données ---> Inférence ---> Conclusion ---> Conséquence (a) (c) (il a grimpé sans les bottes) (b) Séquence 2 : (d) (il respire sous la glace) (e) : (f) Séquence 3 : (g) (il a laissé les traces sur la neige) (h)

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Bien évidemment, il existe des schémas déductifs conformes au modèle prototypique comme, par exemple, l’exemple A :

A. Если они не поднимут трубку, то их нет дома.

Le fait de ne pas décrocher équivaut dans la vision du locuteur à « être absent ». En revanche, l’indication sur le départ dans la proposition q (oni uže uexali) doit être considérée comme une conséquence découlant du fait de ne pas être là : Esli oni ne

podnimut trubku, to ix net doma / oni uže uexali. Les deux variantes de la proposition q semblent bien fonctionner dans la proposition déductive. Cela étant dit, il convient sans doute d’affiner le schéma argumentatif prototypique général pour le cas particulier des constructions déductives afin de donner une explication plus précise de ses possibilités structurelles.

Comme nous l’avons noté, le mouvement argumentatif repose ici sur une certaine identité des événements (comme « ne pas décrocher » équivaut à « être absent »). Cette identité est présentée comme un fait établi pour le locuteur. La plupart du temps la déduction est faite sur l’équivalence des actions (exemples A et D) et leur interprétation, mais on peut aussi construire un raisonnement sur l’identité des objets (animés ou non) comme dans les exemples B et C :

B. Если ему было интересно, значит, и всем другим должно быть интересно. [Даниил Гранин. Зубр (1987)] C. Автолюбители - не самая бедная часть нашей читательской аудитории. Если в семье есть машина, значит, скорее всего, есть также неплохая квартира и дача. ["Амурский Меридиан" (Хабаровск), 2004.12.22] D. Младший загремит за глотку, а старший за дурость, за то, что слушает и молчит. Ну а раз молчит, значит, соглашается, а раз соглашается, то участвует. Ну а как же иначе? Кто не за нас, тот против нас. [Юрий Домбровский. Факультет ненужных вещей (1978)]

Les éléments mis en relation peuvent avoir différents liens entre eux : le rapport « partie / tout », mais aussi des liens de parenté ou des situations particulières qui comprendraient les deux éléments (Voïtenkova 2001 : 269), comme dans notre exemple B où le personnage principal est lié aux autres par une situation déterminé grâce au contexte.

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Cette identité des situations est d’ailleurs soutenue par les particules takže ou i (Uryson 2000 : 110).

Outre le rapport d’identité, les constructions déductives peuvent aussi reposer sur un autre type de relation, surtout si le lien est établi entre deux actions. Ainsi, dans l’exemple A, se profile nettement un lien de causalité entre q et p : Ix net doma, poètomu oni ne

podnimut trubku. Toutefois il n’y a pas de causalité ni dans l’exemple B, ni dans notre séquence déductive : *tam stojat ego valenki, poètomu on vlez na sosnu. Il est vrai que les deux événements ne sont pas concomitants : avant de grimper dans l’arbre on enlèvera ses bottes et on ne peut décrocher qu’après être rentré. Pour cette raison, il n’est pas justifié de voir dans la causalité la condition nécessaire d’un lien implicatif.

Enfin, l’implication reposera en partie sur divers connecteurs qui ont pour fonction d’expliciter un lien implicatif. Parmi ces connecteurs on comptera bien évidemment to, mais également des connecteurs plus spécifiquement déductifs comme značit, stalo byt’,

vyxodit, formes grammaticalisées, dont certaines ne sont pas rares en tant que prédicats. A la lumière de l’approche textuelle, nous avons la possibilité d’affiner nos observations sur la question. Il serait plus juste de dire que to est le seul connecteur capable d’indiquer un lien implicatif. Les autres mots – značit, stalo byt’, vyxodit – ne représentent que des mots introductifs mais leur caractère déductif fait qu’ils peuvent fonctionner en début de proposition en présentant une déduction dans une séquence déductive même en dehors de la construction déductive avec esli ou raz.

Ces mots fonctionnent ainsi en tant que connecteurs textuels et ils ont non seulement une valeur logique mais aussi modalisatrice car ils expriment un degré de certitude du locuteur sur la fiabilité de son raisonnement. Si la déduction est incontestable, c’est značit qui « s’en charge » (exemples B, C, D). Alors que si la déduction est contestable ou si elle introduit un fait qui sera réfuté par la suite, on recourra à stalo byt’ ou à vyxodit :

E. К вечеру он умер. Но списали его на два дня позднее, – изобретательным соседям его удавалось при раздаче хлеба двое суток получать хлеб на мертвеца; мертвец поднимал руку, как кукла-марионетка. Стало быть, он умер раньше даты своей смерти – немаловажная деталь для будущих его биографов. [В. Т. Шаламов. Колымские рассказы (1954-1961)] F. Да, но непристойности! Их ведь пишут на уличном языке, а не на древнем поэтическом. Не может быть, чтобы в одно и то же время в Помпеях уличным языком была латынь, а у Данте во Флоренции - итальянский. Выходит, надписи всё-таки поддельные: иначе ведь пришлось бы учение А. Т. Ф. под сомнение ставить! [А. А. Зализняк. Лингвистика по А. Т. Фоменко]

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Ainsi, dans l’exemple E, mourir avant la date de sa mort est un fait pour le moins inhabituel ce qui peut rendre contestable ce type de déduction. De plus, stalo byt’ comme

vyxodit sont plus marqués et, de ce fait, sentis comme plus subjectifs. Le locuteur semble émettre quelques réserves avant d’affirmer sa déduction, mais en même temps il invite le lecteur à prendre partie et à adhérer à son propos. Ces connecteurs entraînent donc le lecteur dans un échange dialogique qui caractérise souvent les textes argumentatifs (voir Boissinot 1999 : 24-26). Au regard de ces connecteurs, le caractère « monologal » de

značit se révèle plus nettement. Et dans ces contextes, ce dernier serait inapproprié : cf. ??Značit on umer ran’še daty svoej smerti / ??Značit nadpisi poddel’nye : inače ved’

prišlos’ by učenie A.T.F. pod somnenie stavit’. Ce caractère dialogique est bien illustré par l’exemple F tiré d’un célèbre article où A.A. Zaliznjak démontre la fausseté des thèses avancées par A.T. Fomenko et invite le lecteur à s’en convaincre.

Outre ces mots connecteurs logico-subjectifs, on peut également trouver des connecteurs subjectifs, ou pragmatiques (voir page 150), qui insisteront sur le caractère nettement incertain de la déduction (po vsej verojatnosti, možet, etc.) :

G. ПЫШУЩИМ здоровьем… Если столько было в русском языке точных и разных слов для описания здоровья, может, и здоровье было ? [A. Битов. Ожидание обезьян]