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S’agissant de s’exprimer sur ce que les uns et les autres mettent sous le terme « offre de service globale » on retrouve des similitudes avec la discussion portant sur les réseaux. L’offre est perçue comme globale selon la place que les acteurs occupent dans le champ de l’intervention à domicile et selon la manière dont ils perçoivent les enjeux. Par exemple : une offre globale pour une SARL qui s’intéresse à l’aide à domicile, c’est : faire les courses, les toilettes, le ménage, aide à la sortie, les surveillances de nuit, repas, aide aux transferts etc.. Pour les services qui ont des interventions beaucoup plus globales et déjà coordonnées, l’approche globale ou l’offre globale de services c’est : offrir des prestations articulées entre-elles et qui peuvent intégrer des interventions concernant le soin, l’aide à l’aménagement au logement, à l’acquisition de nouveaux appareillages, à l’installation de matériel au domicile, à la réflexion sur le domicile, l’installation des sanitaires, sur un accompagnement à l’accès à la culture, voire aussi de l’accompagnement d’économie sociale aussi, aide au budget, à la vie quotidienne, etc.. Donc on le voit, la notion d’offre globale de services varie selon la culture et la possibilité des différents services de se projeter dans cette dynamique. Sur ce point, on peut évoquer deux aspects : le premier est que vraisemblablement l’offre libérale en matière de prestations et de services semble antinomique de l’approche globale (sauf à organiser un ensemble commercial dans lequel le client est fidélisé). On l’a vu plus haut, chaque service organise son offre et tente de fidéliser la clientèle pour lui-même car orienter un client vers un autre service « complémentaire » c’est prendre le risque de le perdre au profit d’un autre service. Dans un contexte de forte libéralisation du secteur l’offre globale devient une utopie, un objectif certes à atteindre, mais difficilement réalisable, du fait de la concurrence. L’ensemble des directeurs interviewés s’accorde pour dire, c’est le deuxième aspect, qu’aucune organisation n’est en mesure de faire une offre de service globale, d’où, effectivement, la nécessité de travailler ensemble. Ceci d’autant plus que les situations des personnes fragiles sont de plus en plus complexes, et d’autant plus que les situations concernent des personnes isolées, socialement vulnérables et en situation de précarité économique.

Aussi les propos des directeurs sur l’offre globale nous incitent à penser que de réels progrès ont été réalisés s’agissant de la coordination et du pilotage,

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notamment dans les secteurs du soin, mais qu’il reste à articuler l’intervention des domaines de la santé avec celle centrée sur l’accompagnement social. La vision contrastée des directeurs, (notamment pour B, C, D, E, F, H) à propos du fonctionnement réel de l’offre globale laisse toutefois penser que les interventions continuent à être réalisées en ordre dispersé et qu’il revient au client de les coordonner. On peut penser que les bénéficiaires les plus isolés et les moins accompagnés par des aidants familiaux sont enclins à subir le système de l’offre à défaut de pouvoir y participer comme acteur. Car si l’offre globale de service semble bien être là, elle est perçue comme impossible à atteindre par ces bénéficiaires démunis, et les plus démunis d’entre eux semblent être dans la difficulté pour se l’approprier car dans l’impossibilité de la coordonner culturellement et matériellement (abstraction faite des problèmes financiers qui peuvent se dresser sur la route de la réalisation d’une offre globale de services).

6° - Les modalités et la gestion de l’intervention à domicile A PROPOS DES MODALITES DACCES A LAIDE A DOMICILE.

S’agissant de commenter les modalités d’accès de l’aide à domicile, les directeurs évoquent l’existence de contradictions entre les discours volontaristes politiques affichés, concernant les efforts faits pour améliorer la qualité de l’accompagnement et les moyens toujours à la baisse accordés aux services d’aide à domicile. Les services disent avoir conscience du coût que représente l’instauration de l’APA en 2002 pour les Conseils Généraux. Ceux-ci tentent aujourd’hui, du fait de la montée en charge de la demande, de réduire leurs dépenses en réduisant le montant des coûts horaires. Cette logique de la baisse tendancielle du niveau de tarifications des services n’est pas sans rapport pour les directeurs avec l’apparition du Plan Borloo en 2005 et à sa suite, le développement des chèques emploi service dans le cadre du développement du marché de gré à gré. Si les directeurs déplorent cette mise en concurrence entre le gré à gré et les services institutionnalisés (le concurrent principal restant toutefois le marché au noir de l’aide à domicile), ils se plaignent de l’effet de désorganisation d’un secteur qui a mis, selon eux, près de 30 ans à se structurer. Serait à l’œuvre actuellement un processus contradictoire d’organisation- désorganisation du marché du maintien à domicile. D’un côté on assiste à une professionnalisation relative des personnels, à un accroissement relatif de la qualité dans l’intervention du fait d’une législation (Lois 2002 et 2005 notamment) qui organise les procédures et à la transparence des finalités (bénéficiaires au centre du dispositif) et des modes de fonctionnement (évaluation des établissements). De l’autre, pour la majorité des directeurs, le Plan Borloo est perçu comme un principe de désorganisation du secteur par la libéralisation qu’il en propose et par l’impossibilité pour les services de

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concurrencer le marché de gré à gré (et comme on l’a vu plus haut, la libéralisation provoquait la concurrence entre prestation non comparable). Certains directeurs avancent que le Plan Borloo vise plus la création d’emplois précaires que la structuration du champ du maintien à domicile, même si ce plan semble avancer ses faveurs pour les services prestataires et mandataires qui offrent de meilleures garanties en termes de statuts de l’emploi pour les personnels et en termes de qualités professionnelles des intervenants. Ainsi les services autorisés notamment, se trouvent dans une difficulté de plus en plus importante pour faire reconnaître la légitimité de leur coût d’intervention face aux conseils généraux en recherche d’économie et qui, de ce fait, sont enclins à chercher à aligner leurs tarifications au plus près du coût du gré à gré.

Les services privés agréés perçoivent plutôt positivement l’intervention des pouvoirs publics. En effet, ils accèdent au marché des mandataires agréés en échappant aux conventions collectives et à certaines contraintes de la Loi 2002, ce qui leur permet des stratégies d’embauches du personnel aux qualifications moindres par rapport à celles relevant du secteur autorisé. Ces services, notamment depuis 2006, sont devenus plus attractifs auprès de leur public du fait de l’exonération de certaines charges, des réductions d’impôts consenties aux bénéficiaires et des prestations facturées à une TVA à 5 ,5 %. Mais ces services mandataires sont cependant critiques par ailleurs. En effet, les contrats de travail manquent de souplesse (par exemple : pas de continuité de contrat, d’un client à un autre si le personnel est « usé par un client, pas d’autre choix que de démissionner ou de se faire licencier pour changer d’employeur »). Mais surtout restent problématiques les fins de contrat du fait du décès de la personne employeur (les indemnités de fin de contrat ainsi que les congés payés ne sont réglés bien souvent qu’au moment de la liquidation de la succession). D’autres remarques plus mineures portent sur les délais de paiement des prestations aux allocataires qui ne leur permettent bien souvent pas de régler au service mandataire la prestation en temps et en heure, obligeant ce dernier à faire l’avance financière pour régler les salariés.

Nous pouvons aussi mentionner d’autres éléments qui vont au-delà des partis pris liés aux intérêts des organisations. Les directeurs de services saluent les avancées de la Loi 2002 (professionnalisation du secteur) et du Plan Borloo (les chèques emploi services ont favorisé le développement du service à la personne) et de ce fait, la personne handicapée, en devenant employeur, exprime son autonomie et garde une responsabilité sur sa vie quotidienne. De même, la création du régime d’autorisation a permis l’existence de procédures de contrôles favorables à la lutte contre la maltraitance.

De même, les critiques sur les modes de financement et de tarifications ne manquent pas. Par exemple, les directeurs regrettent que la PCH fonctionne sur des enveloppes fermées (ce qui nécessite des services un fonctionnement stratégique : faire un maximum de demande de PCH en début d’année). Une autre critique faite au dispositif financier concerne l’absence de financement pour

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l’aide à la parentalité. Soutenir la famille dans son rôle éducatif n’est pas pris en compte, de même les directeurs mentionnent la faiblesse de l’aide pour le cadre de vie et à l’environnement. Autre remarque : pour le moment coexiste encore l’allocation compensatrice à tierce personne qui est plus faible que la PCH mais a l’avantage de ne pas être contrôlée. Elle est garante de la liberté des personnes, alors que la PCH suppose le contrôle par ce qu’elle est une allocation affectée.

Enfin, s’agissant du gré à gré, certains directeurs de services évoquent que le chèque emploi service organise une zone de non droit en organisant la libéralisation du droit du travail.

Les directeurs marquent leur étonnement sur le fait qu’il n’existe que peu de procédures de contrôles a posteriori du travail fait. Il y aurait des droits d’entrée sur le marché du maintien à domicile, les entreprises doivent être agréées, certifiées mais une fois l’autorisation concédé a priori, qu’existe-t-il en matière d’évaluation des dispositifs visant à vérifier si le réel est congruent avec le déclaratif.