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Procédure

La propagation des muons et des particules secondaires générées par leur interaction avec l’eau, ainsi que la détection des photons par les modules optiques d’Antares, sont simulées par la suite logicielle KM3. La procédure consiste à générer dans un premier temps des tables relatives à la distribution des photons, qui sont ensuite utilisées pour la propagation et la détection proprement dites. Le principal avantage de cette méthode est le gain de temps qu’elle procure, puisqu’il n’est pas nécessaire de simuler la propagation de chaque photon individuellement. Le principal inconvénient réside dans la discrétisation des distributions.

L’élaboration des tables de photons tient en deux étapes. Les photons sont d’abord générés et propagés à partir de la simulation d’un segment de trajectoire de muon ou d’une gerbe électromagnétique par le programme GEN, qui fait lui-même appel au programme GEANT pour la génération et la propagation des particules secondaires. Les caractéristiques des photons au passage d’un certain nombre de sphères de différents rayons centrées sur le milieu du segment ou de la gerbe sont enregistrées.

Ces données sont ensuite utilisées par le programme HIT pour simuler la détection des photons par un module optique : chaque sphère est divisée en un certain nombre de bandes suivant l’axe de propagation du muon ou de la gerbe, et un OM est virtuellement présenté à chaque bande

3. Chaîne Monte-Carlo 111 selon différentes orientations. Le nombre de photons détectés et le temps écoulé depuis leur émission selon chaque sphère, bande et orientation définissent les tables utilisées ultérieurement. Des tables séparées sont utilisées selon que les photons ont été diffusés ou non5.

Les tables de photons sont normalement générées une seule fois, et servent pour toutes les simulations. Elles sont exploitées par le programme KM3MC : celui-ci fait appel au programme MUSIC pour effectuer la propagation d’une particule sur une certaine longueur, puis détermine en fonction de l’énergie perdue le nombre de photons détectés par les OMs, en tenant compte de la géométrie du détecteur.

Approximations et limitations

La suite KM3 comporte un certain nombre d’approximations et de limitations. Quelques amé-liorations et corrections ont été apportées en vue de cette étude. En particulier, trois problèmes dont l’influence sur les simulations était non négligeable ont été mis en évidence et corrigés. L’effet de ces corrections n’est cependant pas trivial à estimer, car les différents problèmes se compensent partiellement, et sort du cadre de ce manuscrit. Le lecteur intéressé se reportera au journal électronique d’analyse Antares [179] et aux informations présentées à la réunion de collaboration Antares à Amsterdam en novembre 2010 [180]. Ces modifications n’ont pas en-core été officiellement intégrées à la suite KM3 ; elles devraient vraisemblablement être l’objet du passage aux versions v3r8 (pour les corrections) et v4r0 (pour l’implémentation de la dispersion chromatique, voir le paragraphe suivant).

Parmi les principales approximations faites par KM3, on peut mentionner entre autres l’ab-sence de traitement de la décroissance du muon et de la production de gerbes hadroniques. Il pourrait résulter de ces approximations, en particulier à basse énergie, une sous-estimation du nombre de photons émis et de la durée d’un événement [181]. Une autre approximation impor-tante concerne la dispersion chromatique des photons : celle-ci a cependant été implémentée en vue de cette étude, et fait l’objet du paragraphe suivant. Cette implémentation compense en partie la sous-estimation due aux approximations sus-mentionnées : du fait de l’architecture de KM3, la vitesse du muon n’est pas prise en considération dans le calcul de la dispersion (β = 1), ce qui entraîne une surestimation du nombre de photons à basse énergie. Cette compensation est cependant spéculative, car la différence du nombre de photons n’a pas été estimée, et surtout les caractéristiques en position, direction et temps d’arrivée des photons sont vraisemblablement différentes. En outre, les antimuons sont traités par KM3 comme des muons — ce qui devrait toutefois n’avoir qu’une influence largement négligeable, au moins en termes de photons.

Dispersion

Au moment de la génération de cette simulation, la dispersion chromatique (c’est-à-dire la dépendance en longueur d’onde de l’indice de réfraction dans l’eau) n’était pas prise en compte dans KM3 (version v3r7). L’influence de la dispersion sur le nombre de photons émis est négligeable (paragraphe (iv) 4.3.2), mais le temps de parcours des photons de leur point d’émission aux OMs s’en trouve modifié (via l’indice de groupe, cf. paragraphe (ii) 1.3), et surtout l’angle Čerenkov (via l’indice de phase, équation (ii) 2.11). À grande distance du point d’émission, l’écart introduit par la variation de cet angle peut devenir très important — de l’ordre de plusieurs mètres à une distance de quelques dizaines de mètres de la trajectoire du muon.

5En réalité, suite à l’une des corrections évoquées au paragraphe suivant, les photons non diffusés émis lors des pertes à basse énergie sont également enregistrés dans les tables de photons diffusés, avec un nombre de diffusions arbitrairement fixé à 30.

La dispersion chromatique a donc été implémentée dans KM3 afin de rendre cette simulation plus réaliste. L’implémentation est contrainte par la manière dont est conçue la suite KM3. Les effets de la dispersion sont pris en compte au niveau de la génération et de la propagation des photons avec GEN, et donc inclus dans les tables de photons. Si l’implémentation de la dispersion temporelle est très simple (t = dn

c ), le cas de la dispersion angulaire est rendu plus délicat par la structure de la suite KM3.

En effet, la lumière Čerenkov émise par les muons et non diffusée est collectée sur une seule bande, autour d’un angle Čerenkov fixé. L’implémentation  naturelle  de la dispersion angulaire consisterait simplement à augmenter le nombre de bandes. Mais à moins d’augmenter significativement ce nombre, ce serait sans effet, étant donnée la faible dispersion angulaire dans la plage de longueurs d’onde d’intérêt. C’est donc une approche alternative qui a été mise en œuvre6.

L’approche privilégiée ici pour l’implémentation de la dispersion angulaire est la suivante : un facteur de correction sin θ0/ sin θ(λ) est appliqué au sein du programme GEN au rayon des

sphères sur lesquelles sont déterminées les distributions des photons. Ceci revient à considérer que selon leur longueur d’onde, les photons ont été émis en amont ou en aval du point d’émission simulé. Ainsi le point d’émission n’est pas correct, mais la distance parcourue par les photons est correcte. Cette approche est justifiée par le fait que le muon émet des photons Čerenkov tout au long de son parcours, dont la longueur est largement supérieure à la variation de distance induite par la dépendance en longueur d’onde de l’angle Čerenkov. Les effets dus à la variation de la perte d’énergie du muon sont supposés négligeables, ainsi que l’erreur à l’extrémité de la trajectoire — la décroissance du muon n’étant par ailleurs pas simulée, comme indiqué au paragraphe précédent.

Si l’effet de la dispersion temporelle est faible, la dispersion angulaire augmente le nombre de photons détectés de manière significative. Ceci s’explique par le fait que la distance par-courue par les photons pour arriver à un OM éloigné d’une certaine distance de la trajectoire, et donc le risque d’être absorbé, diminue avec la longueur d’onde (car l’angle Čerenkov aug-mente) ; le nombre de photons émis étant inversement proportionnel à leur longueur d’onde (équation (ii) 2.15, page 66), la distance totale parcourue par un même nombre de photons ini-tiaux est inférieure à celle calculée sans la dispersion. Par conséquent, le nombre de photons atteignant une certaine distance de la trajectoire est plus important.

Extension à haute énergie

Par défaut, les tables de photons utilisées par Antares sont générées jusqu’à une distance de 194 m. C’est également la valeur des paramètres XMCUT, qui définit la distance par rapport au détecteur au-delà de laquelle les muons ne sont pas simulés, et XRANG, qui définit la distance maximale considérée pour le parcours des photons entre la trajectoire du muon ou de la gerbe et chaque OM (en ligne droite). Le paragraphe (iv) 4.3.3 démontre cependant, notamment à travers la figure (iv) 4.19 (page 132), que cette distance est insuffisante pour rendre compte de toute la lumière produite par les gerbes électromagnétiques à haute énergie.

La solution la plus simple consiste à augmenter les valeurs de ces paramètres. Si cela ne pose pas de problème particulier pour la génération des tables de photons, en revanche cela

6Notons au passage que la restriction à une bande, initialement conçue dans le but de réduire le temps de calcul en supprimant les bandes sur lesquelles par définition il ne pouvait y avoir de photons, souffrait d’un défaut important : la lumière émise par les électrons de basse énergie, produits notamment de la perte d’énergie du muon par ionisation, n’était pas prise en compte. Cette erreur a été corrigée pour cette simulation.

3. Chaîne Monte-Carlo 113 augmente excessivement le temps de calcul nécessaire pour KM3MC en proportion du gain de précision obtenu.

Le paramètre XRANG détermine la distance maximum parcourue par les photons dans la simulation. Pour les gerbes, elle est augmentée en fonction de l’énergie E de la gerbe, de 50 m par décade en énergie, selon l’équation

dmax= XRANG + 50(log(E) − 1) ((iv) 3.2)

(où les distances sont en mètres et E en GeV). Le paramètre par défaut est donc suffisant, puisque la dépendance en énergie est d’ores et déjà prise en compte. Cependant, une coupure logicielle est appliquée sur dmax, limitant cette distance à 194 m dans le fichier km3-process_em_shower.f. Cette coupure est ici remplacée par une coupure à 574 m — distance maximale considérée pour la génération des tables de photons.

Le paramètre XMCUT détermine quant à lui la distance par rapport au détecteur à partir de laquelle un muon n’est pas traité par KM3MC, afin d’éviter de simuler inutilement des muons qui ne feront pas de lumière dans le détecteur. On peut a priori être restrictif sur ce critère, car un muon qui illumine faiblement les bords du détecteur aura peu de chances d’être reconstruit cor-rectement. Cette lumière peut cependant parasiter le signal d’un muon qui traverse le détecteur, et donc dégrader sa reconstruction. Il convient donc d’être suffisamment prudent pour prendre en compte cette éventualité. Le choix de ce paramètre sera déterminé au paragraphe (iv) 4.3.3. En outre, deux tables de photons, relatives à des gerbes électromagnétiques de 1 TeV et 10 TeV, ont été ajoutées aux tables générées par défaut (100 MeV, 1 GeV, 10 GeV et 100 GeV).

Propriétés optiques

Pour calculer de manière fiable la propagation des photons et leur détection par les mo-dules optiques, il est nécessaire de fournir à la suite KM3 les paramétrisations correspondant aux propriétés optiques de l’eau et à l’acceptance angulaire des OMs, en particulier. Dans cette simulation, cette dernière correspond à la paramétrisation la plus à jour, dite Genova  [182]. En revanche, les valeurs de la longueur d’absorption ne sont pas à jour, le fichier fourni avec la suite KM3 étant obsolète. Les différences avec les valeurs généralement utilisées sont reportées sur la figure (ii) 1.3 (page 53).