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2 État de l’art, méthodes d’analyses fréquentielles des signaux en régimes permanent et

2.1 État de l’art

2.1.1 Problématiques liées à l’emballement

Tout au long de cette section, les termes "rejet de charge" et "emballement" seront utilisés. Ils correspondent aux définitions suivantes:

- rejet de charge: coupure de la charge (retrait du couple de résistance engendré par l’alternateur) avec fermeture des organes de régulation du débit (exemple: la fermeture des directrices ou de la vanne fourreau);

- emballement: coupure de la charge sans fermeture des organes de régulation du débit, donc atteinte de la survitesse d’emballement.

Durant l’emballement, d’importants changements au niveau de la vitesse de rotation de la roue ω, du débit Q et du couple moteur T ont lieu, comme le montre, à la figure 2.1, le résultat d’une simulation sur un modèle de type Kaplan réalisée par Liu et al. [17] au point de meilleur

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rendement (BEP – Best Efficiency Point). Tout au long de cette simulation, la chute brute reste constante. La vitesse de rotation de la roue et le débit augmentent tandis que le couple diminue.

Figure 2.1 Évolution de ω (Rotational speed), Q (Flow rate) et T (torque) par rapport à leur valeur initiale lors d’une simulation d’emballement réalisée par Liu et al. [17], initiée au BEP, pour une turbine Kaplan à échelle modèle. Image tirée de: [17].

De façon générale, l’équilibre des forces au niveau de la roue respecte l’équation suivante: T-TG-Tpertes=I

∂ω

∂t , 2.1

où T ( en Nm) représente le couple hydraulique net (couple moteur), TG (en Nm) le couple au

niveau de l’alternateur (couple de résistance), Tpertes (en Nm) le couple dû aux pertes fluides et

mécaniques et I (en kg·m²) l’inertie des composantes tournantes de la turbine et de l’alternateur. Lors d’opérations en régime permanent, ω est constant donc T=TG+Tpertes. Cependant, lors

d’une coupure du couple de résistance, TG devient nul. Étant donné que T n’est pas égal à Tpertes,

la roue accélère afin de revenir à une situation d’équilibre. Lorsque T=Tpertes, la roue se stabilise

à la vitesse d’emballement (ωemb) dont la valeur se situe entre 1,5 et 3,5 fois la vitesse ω

nominale selon le type de turbine [8].

Liu et al. [17] quantifient ωemb grâce à des simulations d’emballement initiées de deux

différents points d’opération. Ils indiquent que, pour la turbine modèle Kaplan étudiée, ωemb,

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au numérique. L’emballement numérique initié du BEP est stabilisé à partir de 3,4s. La valeur de ωemb, initiée d’un point d’opération où la chute du banc d’essai a été augmentée à sa valeur

maximale, est 1,67 fois et 1,69 fois les vitesses ω initiales expérimentale et numérique respectivement. L’emballement numérique initié du point d’opération à chute maximale est stable à partir de 4,07s. Avellan et al. [18] précisent que la valeur de ωemb est grandement

influencée par le nombre de Thomas σth, qui caractérise le niveau de cavitation dans la turbine,

tout particulièrement dans le cas de turbines de types Kaplan ou Bulbe, comme l’illustre la Figure 2.2.

Figure 2.2 ωemb en fonction du nombre de

Thomas σth pour une turbine Kaplan. Image

modifiée de: [18].

Durant le rejet de charge et l’emballement, le couple fluctue inévitablement en passant par des valeurs nulles ou négatives [14]. Pour des turbines-pompes et des turbines Francis avec de très faibles vitesses spécifiques, la machine peut temporairement entrer en mode pompage [4].

Le débit à l’emballement est fonction de la vitesse spécifique de la turbine. Par rapport à sa condition de départ, il diminuera pour une turbine de faible vitesse spécifique tandis qu’il augmentera pour une turbine de vitesse spécifique élevée [9]. La figure 2.1 illustre, par exemple, une augmentation de Q de 1,24 fois celui au BEP, car la turbine modèle Kaplan simulée par Liu et al. [17] a une vitesse spécifique élevée. Cherny et al. [19], qui simulent un emballement de turbine Francis à échelle prototype et de vitesse spécifique plus faible, observent une diminution de Q avec l’augmentation de ω.

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Les machines hydrauliques doivent être conçues pour supporter un emballement. Il n’en reste pas moins qu’un rejet de charge et un emballement sont les évènements transitoires les plus sévères vécus par une turbine [20]. Aucune mesure de contraintes durant un emballement typique n’est disponible dans la littérature. Seules des mesures de contraintes lors d’un rejet de charge ont permis d’estimer l’ampleur de celles atteintes durant tout le processus d’emballement. Ainsi, l’évolution des contraintes lors d’un démarrage, d’un arrêt, d’une marche à vide et d’un rejet de charge (implique la fermeture des directrices) a été mesurée par Gajìc et al. [20] sur l’intrados d’une aube d’un prototype de turbine Kaplan. L’amplitude des contraintes maximales atteintes lors du rejet de charge est de deux fois supérieure à l’amplitude maximale des contraintes atteintes lors des autres régimes transitoires étudiés. Gagnon et al. [11] montrent aussi que les cycles de fatigue générés par le rejet de charge sont significativement plus importants que ceux générés par le reste des conditions d’opération. En effet, la figure 2.3 illustre les contraintes mesurées sur la roue d’un prototype durant une séquence enchainant un démarrage, une marche à vide, une production normale et un rejet de charge.

Figure 2.3 Contraintes mesurées en fonction du temps sur la roue d’une turbine à échelle prototype durant une séquence enchainant un démarrage (startup), une marche à vide (SNL), la production (maximum opening) et le rejet de charge (load rejection). Image tirée de: [11].

La sévérité du rejet de charge est aussi démontrée par les mesures de Pöll et al. [21] sur une turbine Francis. Ses mesures montrent l’augmentation rapide et soudaine de la pression dans l’aspirateur et des contraintes sur une aube au moment du rejet de charge. De fortes fluctuations

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de pression mesurées dans l’aspirateur suite au rejet de charge laissent présager la présence d’une instabilité.