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D. Facteurs influençant la gravité des conséquences d’une exposition néonatale aux PEO

IV. Problématique et stratégie expérimentale

Il semble bien établi que lors de la naissance, l’animal s’affranchit du contexte endocrine maternel -notamment des œstrogènes- et que ceci est un facteur permissif pour la formation des follicules

dans l’ovaire chez les rongeurs (Kezele & Skinner, 2003;Chen et al., 2007b;Lei et al., 2010). Dans un

premier temps, nous avons cherché à mesurer cette décroissance œstrogénique physiologique mais aussi à mimer son absence en traitant des rattes avec des injections d’œstradiol, la molécule endogène, durant trois jours à partir de la naissance afin d’en caractériser les effets sur la formation

des follicules chez la ratte (Rattus Norvegicus). La clairance de l’œstradiol a donc fait l’objet d’une

étude dans le sang. Des enzymes de la métabolisation de cette molécule ont été étudiées dans le foie mais aussi dans l’ovaire, aussi bien pour améliorer notre connaissance du système physiologique de détoxication à cet âge que pour évaluer le système de défense métabolique mis en place suite à l’exposition à l’œstradiol. Comme de nombreux travaux l’ont déjà démontré, la quantité de cellules

germinales décroit physiologiquement concomitamment avec la formation folliculaire (Beaumont &

Mandl, 1962; Pepling & Spradling, 2001) et est aussi affectée par l’exposition à des composés

œstrogéniques exogènes (Jefferson et al., 2006; Chen et al., 2007b). Nous avons donc souhaité

évaluer l’évolution physiologique et pathologique du nombre d’ovocytes entre la naissance et la fin du processus d’histogenèse folliculaire (à 3 jpn) d’une part par comptage des ovocytes suite à l’utilisation de différentes doses d’œstradiol, d’autre part par évaluation de l’apoptose, phénomène

contribuant à la fragmentation des cordons ovariens (Pepling & Spradling, 2001). Le remodelage de

la membrane basale accompagnant cette fragmentation (Rajah et al., 1992) a également été étudié.

Nous montrons que l’animal immature acquiert rapidement la capacité d’éliminer l’œstradiol mais que le traitement induit malgré tout un ralentissement de l’acquisition de la maturité du système enzymatique à l’origine de cette détoxication. Il induit en outre une réduction dose-dépendante du nombre d’ovocytes présents dans l’ovaire et perturbe la formation folliculaire. En effet, des zones non fragmentées persistent à 3 jpn et l’apoptose frappe anormalement des ovocytes déjà enclos dans des follicules, conduisant à l’apparition de « follicules vides ». Ces résultats font l’objet d’un article publié dans la revue PLoS One.

Dans un second temps, les effets à long terme de l’œstrogénisation néonatale pendant la formation des follicules ovariens ont été évalués. Les effets d’une œstrogénisation sont souvent persistants à

l’âge adulte, tant sur l’ovaire (Sotomayor-Zarate et al., 2011; Cruz et al., 2012) que sur les étages

supérieurs de l’axe HHG (Bateman & Patisaul, 2008; Patisaul et al., 2009). Nous avons choisi de

comparer les effets de 2 doses : la dose de référence utilisée dans de nombreuses études (10

µg/jour) (Ikeda et al., 2001; Patisaul et al., 2009; Bertolasio et al., 2011) et une dose 100 fois plus

première vague de croissance folliculaire (étape nécessaire à l’établissement du dialogue entre l’ovaire et ses centres de contrôle), la puberté et l’établissement de la cyclicité, les capacités de reproduction et la dynamique de recrutement folliculaire à l’âge adulte sont décrits. Par ailleurs les profils hormonaux (gonadotropines et hormones ovariennes) ont été établis.

Nous montrons que les ovaires des animaux traités mettent en place leurs premières vagues de croissance malgré les effets délétères constatés à la dose forte sur l’ovaire (voir première publication). La puberté survient plus tôt chez les animaux traités et leurs capacités de reproduction

sont rapidement altérées (comme rapporté dans la littérature, McLachlan et al., 1982; Newbold et

al., 1998;Varayoud et al., 2011;Ohta et al., 2012). Toutefois, si ces deux doses induisent le même

effet (avancement de la puberté), les mécanismes mis en jeu sont très différents. Chez les animaux traités à forte dose, le recrutement folliculaire est inefficace, il ne conduit pas à la déplétion progressive de la réserve folliculaire, il n’y a pas d’ovulation et les ovaires sont atrophiés. Chez les femelles traitées à faible dose en revanche la réserve folliculaire est précocement épuisée et les ovaires sont souvent asymétriques et polykystiques.

Le troisième volet de ma thèse porte sur les effets immédiats dans l’ovaire d’un traitement aux deux doses d’œstradiol utilisées précédemment. Le premier jour de la vie étant crucial pour le

développement ovarien et les conséquences à long terme (Cruz et al., 2012), nous avons souhaité

évaluer les conséquences directes de l’injection d’œstradiol le jour de la naissance qui pourraient être à l’origine de tous les troubles observés (voir parties 1 et 2). Les mécanismes conduisant à l’infertilité étant très différents à forte et faible dose, nous avons conservé ces deux doses pour comparer leurs effets sur le transcriptome ovarien, en particulier sur le cycle cellulaire, l’apoptose et

la méiose, cibles connues de certains PEO (respectivement Peretz et al., 2012, Xu et al., 2002 et

Zhang et al., 2012b,Eichenlaub-Ritter et al., 2008,Lenie et al., 2008). Les dommages de l’ADN induits

par ces traitements ainsi que les capacités de réparation mises en place en retour ont également été évalués.

Nos résultats préliminaires démontrent que les traitements induisent des modifications transcriptomiques différentes. Par ailleurs les tests de génotoxicité indiquent que la proportion de cellules dont l’ADN est très endommagé à la suite du traitement est paradoxalement plus importante à la dose faible qu’à la dose forte mais les mécanismes de réparation sont plus efficaces à la dose faible.

Figure 36 : Traitement d’une ratte nouveau-née par injection.

À la naissance, les rats pèsent environ 5 grammes et mesurent environ 5 cm. Ils reçoivent leur traitement à l’aide du matériel d’injection présenté sur la photo de droite: une aiguille de 27 G reliée à une seringue dont le piston est actionné par un micro-injecteur automatique.

Unités Pattes droites Dizaines Pattes gauches Système Aramis Aiguille