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La problématique de l’organisation des services des Collectivités Territoriales

les règlements du pays, la CT dispose d’une administration publique locale composée de rouages, de services et de structures administratifs et techniques, déclinés sous forme d’un organigramme. La conception et la mise en œuvre d’un organigramme correspondant aux missions et objectifs de l’organisation, sont considérées comme un standard en termes de gestion administrative de qualité par de nombreux spécialistes du management des organisations9.

Pour les administrations publiques locales en Afrique, la question de l’organisation des services demeure l’un des points d’achoppement de la Décentralisation dans de nombreux pays, sans oublier son impact budgétaire et financier sur les ressources de la collectivité territoriale. C’est aussi une question qui reflète le degré de confiance entre l’administration centrale et les gouvernements locaux ou les autorités Locales. Elle donne lieu à plusieurs interrogations fondamentales, notamment :

- Faut-il laisser les gouvernements locaux ou autorités locales, dont le mandat est limité, qui sont censés servir un agenda politique, et qui sont parfois très peu formé(e)s aux pratiques et techniques administratives, déterminer l’organisation et le fonctionnement des services des administrations publiques locales ?

- Ou bien, dans le cadre du processus d’accompagnement et d’appui au processus de la décentralisation, revient-il à l’administration, centrale chargée de la régulation de ce processus de mettre à la disposition des collectivités territoriales des organigrammes-types, à charge pour les entités décentralisées de les adapter à leur contexte propre ?

9 ICMA, Human Resources Management In Local Government, ICMA Press, 3rd edition, 2016, USA, pp. 3-10

- Par ailleurs, comment les élus ou exécutifs locaux, en tant qu’acteurs autonomes, dotés de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, pourraient mettre en œuvre leur vision du développement de leurs Collectivités sans pouvoir décider du type d’organisation et de fonctionnement des services mis à leur disposition?

Face à ces interrogations légitimes, reflets à la fois de la dynamique « centralisation-décentralisation » voire de positionnements vraisemblablement antagonistes, la meilleure approche serait de faire en sorte que la fixation de l’organisation des services dans les administrations publiques locales soit un sujet de dialogue entre l’administration centrale et les exécutifs locaux, en gardant à l’esprit deux soucis majeurs : d’un côté, les gouvernements locaux ou les autorités locales ont besoin d’une administration publique locale pour traduire leur vision en politiques, en stratégies et en programmes et surtout pour tenir leurs engagements vis-à-vis des populations, de l’autre, les populations, les citoyens et les usagers sont en droit d’exiger l’existence d’une administration publique locale qui répond à leur besoins et attentes.

En tout état de cause, qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre option, chaque organigramme a un impact budgétaire et financier, notamment pour doter l’administration publique locale en infrastructures et équipements (bureaux, équipements, fournitures, internet, téléphone, fax…), pour nommer aux postes de responsabilités et pour allouer les salaires et indemnités afférents à ces postes de responsabilités.

1. Les responsabilités en matière de fixation des organigrammes

Dans la pratique, on a relevé l’existence de deux modèles : l’organigramme est fixé soit par le gouvernement central, soit par chaque CT. Dans la majorité des cas, l’organigramme des CT est fixé en amont, entièrement ou souvent partiellement, par le gouvernement central. C’est notamment le cas en Algérie, au Botswana, au Cameroun, aux Comores, au Libéria, en RDC, en Sierra Leone, au Tchad, en Tunisie, aux Seychelles et dans de nombreux pays anglophones.

Cette situation est beaucoup plus observée dans les pays anglophones où la gestion des administrations locales est confiée à des Etablissements publics spéciaux (Local Government Services or Council) qui relèvent très souvent du gouvernement central.

De même, dans plusieurs pays francophones, comme le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Maroc, le Sénégal, et en dehors des grandes CT ou les villes-capitales, telles que Bamako, Ouagadougou, Bobo Dioulasso, les organigrammes des autres CT sont fixés par le gouvernement central, sous forme d’organigrammes-types des CT, qui reste généralement à titre indicatif. Ainsi, au Burkina Faso, le gouvernement central a doté, en 2012, les CT d’organigrammes-types selon quatre catégories : la mairie de la commune à statut particulier, la mairie de la commune urbaine, la mairie de la commune rurale et l’administration du conseil régional. Toutefois, ces organigrammes-types restent des modèles indicatifs dans la mesure où chaque collectivité a la compétence pour établir son propre organigramme. Pareillement, au Cameroun, l’arrêté n°1306/A/MINATD/DCTD du 24 Août 2009 fixait trois modèles d’organigramme-types pour les Communautés Urbaines, les Communes et les Communes d’arrondissement. Au Mozambique, en dehors de la ville de Maputo qui a un statut particulier, l’organigramme des autres villes est défini en amont par le gouvernement central, notamment à travers la définition des principales fonctions, avec la possibilité pour chaque collectivité de l’adapter à ses besoins et à son contexte propre (voir en Annexe Figure 2 et Figure 3 sur les Organigramme-type des Communes au Burkina Faso et au Cameroun).

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Dans l’autre sens, d’autres pays tels que l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burundi, la République Centrafricaine, l’Ile le Maroc, Maurice, la Gambie, le Malawi, la Namibie, chaque collectivité définit son organigramme qui doit par la suite être approuvé par la tutelle.

En Namibie, les Communes de Catégorie 1 comme Swakopmund fixent elles-mêmes leurs organigrammes tandis que le Gouvernement central fixe les organigrammes des Communes des autres Catégories.

On observe cependant que dans bon nombre de ces pays où l’élaboration de l’organigramme est laissée à l’appréciation de chaque CT, en dehors des grandes villes, de nombreuses collectivités ne disposent pas d’un organigramme fixe. Les différents services et cadres organiques d’emploi changent en fonction des changements des exécutifs locaux. C’est pourquoi, au cours de ces dernières années, certains Etats, à l’instar du Maroc et de la Côte d’Ivoire, ont décidé de mettre en place des organigrammes-types pour orienter, accompagner et appuyer les CT dans ce domaine.

2. Principales Structures des services dans les Administrations Publiques Locales Les organigrammes des administrations publiques locales sont structurés autour de deux principaux services :

- le cabinet du maire ou du président de la collectivité qui se compose essentiellement de ses conseillers et de son secrétariat particulier. Dans certaines grandes collectivités, à l’instar du Conseil Régional de Casablanca-Settat (Maroc), de nombreux services sont directement rattachés au bureau du président parmi lesquels, la division de gouvernance et d’ingénierie Institutionnelle, des établissements publics locaux majeurs (l’agence régionale d’exécution des projets, les sociétés de développement régional) ;

- le secrétariat général ou la direction générale des services : Le secrétariat général regroupe l’ensemble des services administratifs et techniques. Ces services sont mis en avant en fonction de leur importance ou de l’importance que leur accordent les responsables locaux. Ils sont organisés en de grands blocs thématiques (parfois des pôles, des départements, des directions ou des divisions) subdivisés en différents niveaux de services ou unités. Les dénominations de ces grands blocs et leurs subdivisions varient d’un pays à l’autre, d’une CT à l’autre et d’une administration à l’autre.

Sous le secrétariat général, on retrouve souvent, des directions générales subdivisées en directions, puis en service. On retrouve ce modèle principalement dans les grandes villes ou dans les capitales comme Abidjan, Accra, Bissau, Casablanca, Dakar, Lilongwe, Maputo, Ouagadougou, Rabat, etc…10.

Parfois, le secrétariat général est subdivisé en départements sous lesquels on trouve des divisions et des services. C’est le modèle des petites et moyennes villes, à l’instar des villes béninoises comme Ouidah et Kpomassè ou des villes togolaises comme Tsévie ou encore de Bujumbura au Burundi.

10 On a constaté qu’à Bissau les services du secrétariat général sont sous la double responsabilité du secrétaire général et d’un vice-président du conseil communal.

L’organisation et la répartition des services est fonction de la taille et des moyens des CT. Ainsi, on observera dans les grandes villes de nombreux et importants services qui n’existent absolument pas dans les petites et moyennes villes. Il existe toutefois des services communs à toutes les administrations locales, quels que soient leurs tailles ou les moyens dont elles disposent. Il s’agit en l’occurrence du département chargé des affaires financières et comptables (budget, comptabilité, marchés publics, audit et contrôle de gestion…), du département chargé des Affaires administratives (gestion du personnel, état civil, affaires sociales…) et des départements chargés des affaires ou des services techniques (assainissement liquide et solide, transport public urbain, éclairage public, gestion des marchés et des souks, etc….).

3. Le gap entre les fonctions organiquement fixées et celles réellement existantes Il est important de noter qu’entre les fonctions organiquement fixées et les fonctions réellement existantes ou fonctionnelles, on a relevé l’existence d’un réel un gap très préoccupant. En effet, plusieurs administrations locales travaillent dans un cadre organique complétement différent de celui fixé par les lois ou les règlements. Plusieurs raisons peuvent permettre d’expliquer cette situation :

- La première raison réside dans le problème d’effectif. Différentes études sur la base d’audits organisationnels ont effectivement montré que les CT africaines souffrent d’un manque de personnel. Ce problème touche particulièrement les petites CT loin des grands espaces urbains. Dans ce genre de situation, plusieurs fonctions ou attributions sont exercées et cumulées par une seule et même personne. A contrario, dans certaines autres CT, il y a une pléthore d’effectifs ne correspondant nullement aux besoins réels de l’administration publique locale.

- Un autre élément explicatif est le fait que parfois, il n’y a pas de personnes qualifiées parmi le personnel pour occuper certaines fonctions, alors que la collectivité n’a pas les moyens de recruter le profil correspondant. Le poste reste ainsi vacant ou est assuré par le secrétaire général ou le directeur de service lui-même. C’est notamment très souvent le cas pour la fonction RH.

Extrait du Rapport de la Cour des Comptes du Maroc sur Le Système de la Fonction Publique, décembre 2017

« Sur le plan des structures de l’Administration locale, l’absence d’organigrammes officiels dûment établis et visés par les autorités de contrôle administratif constitue une des défaillances majeures de l’organisation administrative des communes. Ce sont souvent les difficultés à assurer une enveloppe budgétaire pour couvrir les indemnités de responsabilité qui sont à l’origine du non visa des organigrammes proposés par ces collectivités. Cette situation ne favorise pas la stabilisation des structures de l’Administration des collectivités territoriales et n’offre pas un cadre adéquat pour motiver les cadres des collectivités territoriales à occuper des postes de responsabilité. Le résultat est que le service public local demeure loin des exigences de qualité et de célérité des prestations rendues aux usagers. Les insuffisances en la matière apparaissent notamment dans la qualité de l’accueil et d’orientation des usagers ainsi que dans la communication avec les citoyens ».

Source, www.courdescomptes.ma

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Le positionnement du responsable des ressources humaines reste toutefois problématique dans la plupart des cas, et parfois, il n’existe même pas.

II. Le positionnement du Responsable des Ressources Humaines au sein de