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Chapitre 1. PROBLÉMATIQUE

1.3. Problèmes, questions et objectifs de recherche

Dans le contexte mondial actuel, les pays en développement sont de plus en plus amenés à faire la démonstration des valeurs d’équité (Solar, 1999) dans la scolarisation. En ce sens, la scolarisation des filles exige une attention particulière. Cette attention se manifeste par des conférences, des déclarations et des discours de la part des organismes internationaux et des demandes de reddition de comptes, voire des résultats de la part des États signataires. Malgré ces conférences, pourvoir un territoire des trois cycles d’enseignement - primaire, secondaire et universitaire - requiert des moyens et des ressources énormes. Pour scolariser les enfants sur plusieurs cycles, les États doivent composer avec plusieurs facteurs, ce qui fait que les politiques éducatives varient beaucoup d’un pays à l’autre. On peut croire que les différences entre les pays en matière de scolarisation sont liées aux divers facteurs rencontrés.

Toutefois, être un enfant de sexe féminin reste un facteur important de sous-scolarisation (World Bank, 2003; Pilon, 1995). Si l’on considère globalement la durée des différents cycles, le cycle primaire (cinq-six ans), le cycle secondaire (sept ans) et le cycle universitaire (deux ans et plus), nous constatons que dans les pays en développement, en 1997, 8.6% des filles avaient accès à l’enseignement supérieur contre 12% des garçons. En 1990, c’est-à-dire sept ans auparavant, 36% d’entre elles entraient au secondaire contre 48.2% des garçons. En 1985, 90.7% de filles avaient accès au primaire contre 107.5% de garçons (UNESCO, 1999). À travers ces chiffres, on comprend bien la chute des effectifs entre les différents cycles du système éducatif. Ces données révèlent non seulement la représentation des filles dans l’enseignement supérieur, mais aussi leur cheminement vers les études supérieures. En réalité, peu de recherches sont faites sur les mécanismes et les processus de scolarisation des filles et sur ce qu’elles vivent réellement sur le chemin des études vers le supérieur.

Dans des contextes où peu de filles parviennent à un niveau d’études supérieures, force est de se demander comment celles qui se sont engagées dans des études universitaires ont vécu leur

trajectoire scolaire. Les moments qui ont été pour elles significatifs. Les obstacles qu’elles ont rencontrés sur leur chemin. Les situations et les personnes qui ont favorisé ou facilité leur persévérance, leur résilience et leur éducation. Pourquoi elles ont jugé le projet d’études important pour leur perspective d’avenir. Devant ces questions, nous avons orienté nos investigations vers l’expérience et les représentations sociales de l’école des jeunes femmes au regard de la scolarisation. L’idée directrice de cette investigation se situe dans la culture des filles et de leur entourage, car cette culture fonctionne souvent comme un obstacle à leur scolarisation. Il est donc pertinent pour nous de conduire une recherche sur la scolarisation des filles en prenant comme points de référence les représentations sociales et la trajectoire des étudiantes. Nous insistons sur les filles scolarisées aux trois niveaux du système éducatif. Il s'agit de connaître et de découvrir les étudiantes qui se sont déplacées successivement pendant 13 années et plus dans les structures des systèmes éducatifs considérés comme des espaces sociaux et institutionnels contraignants. Il est possible de découper, de distinguer et de formuler le problème de la scolarisation des filles au Togo et au Cameroun en posant trois questions:

1- Comment se déroule la scolarité des filles qui deviennent étudiantes au bout de plus de 13 années de scolarisation? Il est question ici de mieux cerner les différents processus (processus de représentations sociales de l’école et de résilience), les différentes positions, séquences, étapes, les événements, les déplacements, les tensions, les mouvements dans les rapports aux savoirs, l’articulation des différents facteurs situationnels, facteurs contextuels, facteurs de risque et facteurs de protection, les choix qui sont faits, les valeurs qui sont privilégiées. En clair, comment les filles deviennent-elles étudiantes dans des contextes dramatiques et d’inéquité?

2- Quelles sont les représentations sociales de l’école et quelles sont les facteurs de risque et les facteurs de protection de la résilience scolaire chez les filles qui accèdent à l’enseignement supérieur? Pour ainsi dire, comment est connue, structurée, formée, perçue, vécue, jugée et représentée l’école chez les filles dans leurs familles et/ou leur espace scolaire? Il s’agit ici de tenter d’analyser et d’expliquer les pratiques familiales et les pratiques dans divers degrés scolaires, de même que les attitudes positives et/ou négatives symboliques qui contribuent au développement des rapports aux savoirs des filles. En outre, les représentations sociales de l’école à travers la dynamique des parcours scolaires, du processus de résilience et du processus de scolarisation

participent aussi des enjeux d’émergence des formes identitaires qui se dégagent sur la trajectoire scolaire.

3- Que disent les étudiantes de leur parcours et des déterminants des situations (obstacles, facteur de risque, facteur de protection, facteur inhibant, facteurs facilitant) et comment entrevoient-elles leur avenir? Sans chercher à entrer dans une perspective purement psychologique et théorique de la motivation de la scolarisation des filles, nous voulons écouter ce que les filles ont à nous dire sur leur scolarité, et comprendre les sens des études pour des filles qui ont une longue scolarité. Qu’est-ce qui fait qu’elles persévèrent même lorsqu’elles rencontrent des obstacles des événements majeurs alors que d’autres démissionnent? Quelle place espèrent-elles occuper dans leur société? Étant donné que les valeurs ne sont pas que des mots, et que les valeurs motivent les gestes et les actions à la base de la vie, nous cherchons à travers la scolarisation des filles à comprendre non seulement des parcours, mais aussi un temps où la valeur 'instruction' est élevée à un niveau supérieur et où cette valeur devient prioritaire dans les choix de vie.

1. 4. Objectifs de recherche

Notre recherche vise cinq objectifs généraux et quatre objectifs secondaires:

Objectifs généraux

1. Décrire et comprendre l’évolution de la trajectoire scolaire dans le processus de scolarisation des filles en Afrique subsaharienne.

2. Décrire les différents parcours vers l’enseignement supérieur des filles au Togo et au Cameroun. En décrivant ces itinéraires, nous dégageons des récits biographiques, la dynamique des pratiques et des représentations sociales construites tout au long de leur trajectoire scolaire.

3. Reconstruire le cheminement scolaire des filles à partir des obstacles, des événements, des facteurs de risque et des facteurs de protection qui ont traversé leur trajectoire scolaire et que les filles nomment dans leurs récits biographiques.

5. Déterminer les événements et les expériences de la scolarisation que les filles ont vécue et qu’elles évoquent avec un certain recul.

Objectifs secondaires

1. Connaître et comprendre les représentations sociales que les filles se font de leurs études et de l’école.

2. Comprendre comment les filles elles-mêmes, voient, perçoivent ou / et se représentent leur trajectoire scolaire. Il s’agit de saisir, de comparer et d’obtenir les singularités, les spécificités et les dimensions subjectives du parcours de chacune des filles dans son milieu, sa situation, voire son contexte.

3. Formuler des hypothèses sur le processus de scolarisation des filles et ses déterminants. 4. Fournir des pistes d’interventions à celles et ceux qui cherchent à améliorer et à prolonger les parcours et les expériences scolaires des filles dans les pays en développement et principalement en Afrique subsaharienne.

1.5. Choix de l’enseignement supérieur, du Cameroun et du Togo