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LE PROBLÈME DU BIOS CHEZ FOUCAULT

Nous avons vu comment nous pouvons comprendre la mort dans sa double articulation du faire mourir souverain et du laisser mourir biopolitique. Foucault résume le lien du pouvoir et de la vie qui sřy manifeste par la formule : faire vivre. Dans le dernier chapitre de La volonté de savoir, il situe son analyse du biopouvoir par rapport au concept de zoon politikon chez Aristote. « L'homme, pendant des millénaires, est resté ce qu'il était pour Aristote : un animal vivant et de plus capable d'une existence politique; l'homme moderne

105 Sur lřapparition du racisme dřÉtat, voir le cours de Foucault Il faut défendre la société (1976), éd. citée,

(les leçons du : 21janvier 1976, 28 janvier 1976, 4 février, 11 février 1976, 17 Mars 1976) et la discussion quřArendt fait de ce problème dans (Arendt, 2005 : chap. 6 et 7).

est un animal dans la politique duquel sa vie d'être vivant est en question. » (VS, 188)106. Ce qui est en jeu ici c'est bien dřabord l'interprétation que Foucault fait de l'articulation du zoon, ou du vivant, au politikon, à sa qualité dřêtre politique107. Il est, en outre, important de noter tout de suite que cřest le zoon, lřindividu vivant, et non pas bios ni zoe, «la vie», qui est désigné ici comme ce qui compose avec le politique. Cřest bien le zoon qui a la capacité dřexercer la politique. Le zoon politikon, comme animal politique parmi dřautres, se définit par son existence dans la cité (polis) comme la plus excellente (aretê) des communautés108.

On pourrait ainsi croire que le concept de vie de Foucault renvoie à un référent général, comme celui dřAristote, dans la mesure où le concept de vie de Foucault serait assimilable à la figure du «corps-espèce» ou, mieux encore, à la vie (zoe) qui est présente comme le

fonds commun de toutes les espèces. Dans ce cas, on devrait plutôt parler chez Foucault de « zoo-politique » et non pas de « bio-politique ». Mais cette manière de parler serait précisément irrecevable pour deux raisons. Dřabord, elle méconnaîtrait textuellement la nouveauté du concept de biopolitique qui pose un autre «rapport de lřhistoire et de la vie»

(VS, 189) et le thème dřune vie biologique «pénétrée» par des «techniques de pouvoir et de

savoir» (VS, 189). De plus, elle contredirait, comme on va le voir, la notion même de vie

qui est celle de Foucault lorsquřil parle de «bio-politique». Afin de saisir le concept de vie

que Foucault mobilise en 1976, il faut dřabord se reporter à son analyse de la vie dans Les mots et les choses (1966). Dans ce texte, nous le savons, le concept de vie a une importance décisive aux côtés de ceux de travail et de langage. Dřabord, ce concept, pour autant que

106 Chez Aristote, la vie politique (bios politikos) est une forme de bonheur (eudaimonia) seulement dans la

mesure où elle vise lřexcellence aretê et non pas timê, la renommée et la gloire (Hoffe, 2003: 149). Rappelons que le zoon est défini chez Aristote comme celui qui a la capacité de subsistance, de croissance et de désintégration (Aristote, 2005b: 412a). Aristote distingue entre la simple vie (zen), qui serait la vie animale et la vie bonne (eu zen), qui est la vie de l'homme capable d'action. La vie bonne dont lřhumain est capable a pour résultat le bonheur et elle est par là le point d'articulation de la biologie, de l'éthique et de la politique (Hoffe, 2003: 167). Ceci dit, Foucault insiste sur la notion de zoon politikon (Aristote, 2005a: 1253a) chez Aristote et non pas sur la notion de vie bonne (eu zen) ou encore sur la notion de bios politikos.

107 (Aristote, 2005a: 28 : note 2). Comme le précise Tricot, le mot politikon devrait être compris au sens précis

de Ŗciviqueŗ, civisme Ŗrattaché à une citéŗ et non pas au sens trop large dř Ŗêtre socialŗ.

108 Dans la présentation de la nouvelle traduction de la Politique dřAristote par J. Aubonnet, J.- L. Labarrière

remarque, avec beaucoup dřà propos, quřAristote nřécrit pas que lřhomme est Ŗlřanimal politiqueŗ, mais Ŗunŗ animal politique parmi dřautresŗ (Aristote, 1986: III). Il faut noter encore que le titre grec de lřouvrage est

son référent est une réalité uniforme et universelle109, joue dans l’épistémé moderne le rôle dřun «quasi-transcendantal» dans la mesure où la vie elle-même est pensée comme une condition de possibilité des multiplicités empiriques vivantes. La vie est ainsi pensée comme « entrecroisement de fonctions et de structures » qui fonde lřordre des empiricités. Cřest à propos du traitement de Cuvier que nous pouvons saisir la formation de cette double thèse dans Les mots et les choses. Chez Cuvier, lřanatomie et la morphologie des organes dépendent de leurs fonctions, elles-mêmes relatives à leur corrélation. Il lřappelle le «principe de la corrélation des formes». Cette compréhension fonctionnelle de la vie se

dissocie dřun principe ontologique continuiste de lřéchelle des êtres fondés dans la représentation. À partir de Cuvier, il existe en biologie une opposition claire entre un plan dřorganisation qui a une cohérence fonctionnelle et la continuité de lřéchelle des êtres. Cuvier «soumet la disposition de lřorgane à la souveraineté de la fonction. Il dissout, sinon lřindividualité, du moins lřindépendance de lřorgane. » (MC, 276). «Dans chaque organe

(comme élément fonctionnel) cřest toute lřorganisation dřun individu qui sřannonce. »

(Sabot, 2006: 91). Ce qui en résulte est une figure discontinue de lřêtre de la vie qui compose avec la notion de fonction, entendue comme plan dřorganisation, à chaque fois particulier, qui élabore une cohérence fonctionnelle. Cuvier refuse lřexistence dřune continuité autre quřimaginaire entre les organes, dřoù sa critique radicale du transformisme de Lamarck. Lřeffet remarquable de cette discontinuité radicale de lřensemble des vivants est la dépendance continuelle de lřorganisme à lřégard des conditions qui rendent sa vie possible. Cřest cette conception qui permet lřémergence au XIXe siècle de la notion de milieu. Le vivant se définit désormais par sa disposition entre un intérieur organique, réduit à des plans dřorganisation fonctionnelle, et un dehors de lřordre de la finitude et soumis à lřhistoire.

En même temps, Foucault avance la thèse dřune «historicité propre à la vie» (MC, 288) qui se trouve problématisée par la biologie du début du XIXe siècle. La vie dans son sens moderne, sens que Cuvier a le premier découvert, est un «a priori historique dřune science des vivants » (MC, 287)110. Autrement dit, le concept de vie, qui émerge dans la biologie du

109 Pour une analyse plus détaillée du rapport de Foucault à lřuniversel, voir lřAnnexe I. 110 Voir aussi (Sabot, 2006: 94).

début du XIXe siècle, remplit la fonction dřun «quasi-transcendantal» qui, en même temps,

renvoie à des transformations historiques constantes des corps des vivants. Mais pour Foucault, ce concept précis de vie, qui apparaît en biologie à la toute fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, nřest pas responsable du progrès de la biologie elle-même. Cřest ainsi que huit ans après Les mots et les choses, revenant sur cette période de la pensée biologique dans une discussion avec N. Chomsky, Foucault relève que le concept de vie a surtout une fonction classificatrice, à lřintérieur du discours de la biologie, et une fonction différenciatrice, dans le rapport de la biologie aux autres discours scientifiques. Mais, comme pour la notion dřhomme en sciences humaines, la notion de vie nřest pas à proprement parler scientifique chez Foucault : « […] la notion de vie nřest pas un concept scientifique, mais un indicateur épistémologique classificateur et différenciateur dont les fonctions ont un effet sur les discussions scientifiques, mais non sur leur objet.» (DEI, 1342). La notion dř « indicateur épistémologique » renvoie ici à la capacité de la biologie à reconnaître ce qui relève de son champ. Ainsi, peut-on dire que la fonction «quasi- transcendantale» du concept de vie est historique de part en part, puisque le concept de vie

lui-même est radicalement posé comme historique. Deux autres citations vont nous permettre dřéclairer lřhistoricité radicale du concept, mais aussi du référent que tente dřassoir Foucault. La première est tirée de Les mots et les choses : « On veut faire des histoires de la biologie au XVIIIe siècle; mais on ne se rend pas compte que la biologie nřexistait pas et que la découpe du savoir, qui nous est familière depuis plus de cent cinquante ans, ne peut pas valoir pour une période antérieure. Et que si la biologie était inconnue, il y avait à cela une raison bien simple : cřest que la vie elle-même nřexistait pas.» (MC, 139). On peut ajouter aussi que Foucault envisage par exemple la structuration dřune «biologie sans vie» en lien avec la génétique qui est centrée autour de la notion de «programme»111 génétique (DEI, 971). Cřest donc à partir de cette notion de vie qui, dans Les mots et les choses, remplit une fonction transcendantale que nous pouvons mieux comprendre le sens que Foucault accorde au concept de bio-histoire en 1976 : « (…) on

111 Voir à ce sujet (Doron, 2009).

peut appeler bio-histoire les pressions par lesquelles les mouvements de la vie et les processus de l'histoire interfèrent les uns avec les autres» (VS, 188).

Cela montre assez clairement lřirréductible historicité du concept de vie chez Foucault et la volonté qui est la sienne de faire du concept de vie le seul garant de lřexistence de «la vie en général» dans le réel. Autrement dit, sous les apparences dřune formulation paradoxale -

«la vie nřexistait pas avant le XVIIIe siècle»- ce qui est visé dans la négation, cřest la

possibilité dřune réalité universelle sans le concept qui lui donne son apparence dřexistence indépendante. Nous pouvons aussi avancer que la biopolitique chez Foucault est indissociable dřun concept éminemment historique de la vie. Il faut préciser en même temps que le sens épistémologique du concept de vie est seulement un aspect de ce que Foucault appelle biopolitique et biopouvoir. Autrement dit, il ne faut pas réduire la spécificité du concept foucaldien de biopolitique à celle dřun concept de vie qui sřélaborerait à partir dřune analyse épistémologique de la biologie. En outre, dans le contexte biopolitique, la vie cesse de jouer le rôle dřun quasi-transcendantal. Ce que la biopolitique nous permet dřarticuler est lřaspect politique de la vie et ses effets stratégiques qui informent les corps individuels et le corps populationnel.

Une fois dégagé la dimension épistémologique de la construction du concept de vie chez Foucault, une question persiste : y a-t-il un concept de vie spécifiquement politique chez Foucault ? Nous avons vu quřil faut distinguer le concept de vie, convoqué par la notion de biopolitique, du zoon politikon dřAristote, compris comme animal politique. Du coup, notre question se précise et nous pouvons nous demander si la spécificité politique du concept de vie chez Foucault réside non pas dans une analyse de la zoe, mais plutôt dans une certaine interprétation du bios, qui donne sa racine au mot biopolitique. Dans son livre Empire, ainsi que dans un article intitulé La production biopolitique, A. Negri nous dit que si «nous avions demandé à Foucault, qui (ou ce qui) dirige le système, ou plutôt ce quřest le « bios », sa réponse eût été inaudible ou inexistante»112. Contrairement à Negri nous allons

soutenir quřun concept opératoire de bios est bien présent chez Foucault. Dans ce sens, il

112 « En fait, si, parvenus à ce point, nous avions demandé à Foucault, qui (ou ce qui) dirige le système, ou

plutôt ce quřest le « bios », sa réponse eût été inaudible ou inexistante. En fin de compte, ce que Foucault ne réussit pas à appréhender, cřest bien la dynamique réelle de la production dans la société biopolitique. » (Hardt et Negri, 2000a : 22). À ce sujet, voir aussi (Hardt et Negri, 2000b : 28).

faudrait rappeler que H. Arendt et G. Agamben ont montré, chacun à sa manière, que la distinction entre zoe et bios est cruciale pour penser la vie dans sa dimension politique.

À partir de sa lecture dřAristote, H. Arendt insiste sur lřexistence dřune tension entre un concept proprement politique de bios et un concept apolitique de zoe113. Les concepts de bios et zoe chez Aristote sont pensés comme étant en opposition par Arendt. Précisément, ces concepts reprennent dřautres distinctions cruciales dans son œuvre comme public-privé ou pouvoir-violence. « In this distinction between what we would today call the private and the public spheres, Aristotle only articulates current Greek public opinion, according to which « Řevery citizen belongs to two orders of existenceř, because Řthe polis gives each individual…besides his private life a sort of second life, his bios politikosř. (…) Both orders were forms of human living-together, but only the household community was concerned with keeping alive as such and coping with the physical necessities involved in maintaining individual life and guaranteeing the survival of the species. In characteristic difference from the modern approach, care for the preservation of life, both of the individual and the species, belonged exclusively in the private sphere of the household, while in the polis man appeared as an individual personality, as we would say today. As living beings, concerned with the preservation of life, men are confronted with and driven by necessity. Necessity must be mastered before the political Řgood lifeř can begin, and it can be mastered only through domination. Hence the freedom of the Řgood lifeř rests on the domination of necessity. » (Arendt, 1961 : 117). On voit bien ici que la vie au sens général dř« être ensemble » sřentend à partir dřune distinction entre bios politikos, comme personnalité individuelle, qui donne forme à la vie politique, et une vie générique, comme maintien privé de la survie individuelle et de lřespèce, qui relève de la maîtrise de la nécessité. Ajoutons que cette distinction entre zoe et bios est aussi formulée par dřautres commentateurs de lřœuvre dřArendt. Dans la Préface de la Condition de l’homme moderne, P. Ricoeur écrit ceci : « (...) naître, c'est accéder à un monde durable, au lieu de simplement surgir au sein de la répétition sempiternelle de la nature et mourir, c'est se retirer d'un tel

monde durable. C'est au milieu d'un monde humanisé que l'homme naît et meurt. Pour la même raison, le laps de temps entre la naissance et la mort mérite d'être appelé 'bios' et non plus 'zoe'». (Arendt, 1983: 22). Cette position de P. Ricœur, est partagée également par J.

Taminiaux qui oppose chez Arendt bios compris comme un «qui» - «la vie de quelquřun»- à la zoe, comprise comme quid générique anonyme, au croisement du travail et de la nature.

Dans la Condition de l’homme moderne, Arendt mentionne trois types de vie fondés en liberté (bioi) chez Aristote Ŕ la vie consacrée à ce qui est beau et aux plaisirs du corps, la vie de contemplation et la vie politique. Le concept de bios prend sens en suivant sa lecture dřAristote à partir de la qualification politique de lřagir (praxis) et de la parole (lexis) du citoyen grec à lřintérieur de la polis. « De toutes les activités nécessaires existant dans les sociétés humaines, deux seulement passaient pour politiques et pour constituer ce qu'Aristote nommait bios politikos: à savoir l'action (praxis) et la parole (lexis) d'où provient le domaine des affaires humaines (ta tôn anthrôpôn pragmata selon l'expression de Platon), lequel exclut rigoureusement tout ce qui ne serait que nécessaire ou utile. » (Arendt, 1998: 61-62). Le travail et lřœuvre instrumentale, qui sont des formes dřutilité et de nécessité, sřopposent à la vie politique (bios politikos) qui est selon Arendt, une forme de vie libre, autonome et authentiquement humaine (Arendt, 1998 : 13). Du coup, lřanalyse dřArendt ne rencontre pas le sens du zoon politikon114 que Foucault mobilise dans la Volonté de savoir. Pour elle, cřest le concept de bios politikos, véritable «mode de vie du citoyen» (Arendt, 1998 : 20), qui donne sens à ce quřelle appelle vie active (vita activa) qui sřoppose à la fois à la vie contemplative (vita contemplativa ou bios theoretikos) et à la vie du despote, qui est comprise comme étant non-libre, ou bien comme appartenant à lřordre

114 Nous lřavons vu, Foucault insiste sur ce concept de zoon politikon comme animal vivant qui est de plus

capable dřexistence politique. Lřactivité politique se ferait selon lui dans le prolongement de la vie générique de lřespèce. Chez Arendt, nous pouvons saisir la même interprétation quand elle montre que la vie de lřespèce qui se déroule à lřintérieur de l’oikos - véritable foyer de domination - joue comme une infrastructure qui soutient lřactivité politique. Mais, Arendt ajoute quelque chose qui est absent chez Foucault, à savoir que le concept de zoon politikon chez Aristote est associé au concept dřêtre vivant capable de parole (zoon logon ekhon) qui sřoppose au domaine privé de l’oikos. « La définition aristotélicienne de l'homme, zôon politikon, n'était pas seulement étrangère, voire opposée à la société naturelle vécue dans la maisonnée; on ne la comprend pleinement qu'en y ajoutant la seconde et non moins célèbre définition donnée par Aristote de l'homme, zôon logon ekhon ("un être vivant capable de langage")" (Arendt, 1998: 64). Aussi, on peut ajouter que nous avons chez Arendt une distinction radicale entre vie générique (zoe) et vie politique (bios). Cette distinction est absente du vocabulaire de Foucault.

de la nécessité (Arendt, 1998 : 13-14). En outre, la vie politique chez Arendt ne se définit pas seulement par les activités de la praxis et la lexis, mais elle est aussi lřactivité même de la mémoire ou encore la capacité événementielle de sřinscrire dans un temps raconté. Autrement dit, bios est aussi biographie, ou bien trace psychique dřordre temporel qui sřinscrit dans la durée115 et qui donne la forme dřune vie qualifiée politiquement.

Pour sa part, G. Agamben réactive cette distinction arendtienne à partir dřun problème posé au départ par Foucault. Avec lui, nous sommes en présence dřun concept politique et non- vitaliste de vie, forgé à son tour à partir dřune lecture dřAristote. Dans son livre Homo sacer I, le pouvoir souverain et la vie nue (Agamben, 1998), il reprend la distinction entre zoe et bios qui est cruciale pour sa thèse dřune problématique biopolitique définie par lřémergence du pouvoir souverain. Ce pouvoir souverain nřest pas simplement assimilé à la loi monarchique, mais il est plutôt compris dans une veine schmittienne comme celui qui décide de lřétat dřexception. Selon cet auteur, et sur ce point il suit largement Arendt, la notion aristotélicienne de zoe, la vie biologique ou naturelle partagée par tous les vivants (animaux, hommes, dieux) est assimilée à la simple vie reproductive de l’oikos et sřoppose au bios entendu comme forme-de-vie des groupes ou des singularités qui participent à la vie bonne de la communauté politique. Ici, bios est compris comme forme-de-vie particulière, ou comme manière de vivre spécifiquement politique.

Chez Agamben, le concept de vie joue comme une composante originaire de la politique qui émerge précisément à partir des concepts aristotéliciens de zoe et bios. Lřindistinction de la zoe et du bios est, selon lui, le point de réactivation de ce quřil appelle vie nue. « The present inquiry concerns precisely this hidden point of intersection between the juridico- institutional and the biopolitical models of power. What this work has had to record among its likely conclusions is precisely that the two analyses cannot be separated, and that the inclusion of bare life in the political realm constitutes the original Ŕ if concealed Ŕ nucleus

115 « The chief characteristic of this specifically human life, whose appearance and disappearance constitute

worldly events, is that it is itself always full of events which ultimately can be told as a story, establish a biography […] » (Arendt, 1998 : 97).

of sovereign power. It can even be said that the production of a biopolitical body is the original activity of sovereign power. » (Agamben, 1998 : 6). Par excellence objet du souverain, dont le pouvoir est toujours biopolitique, la vie nue sřarticule comme zone