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3. Expérience de la mise en place d’un jeu pédagogique

3.3 Prise d’importance des jeux Humanis

Les premiers à avoir eu connaissance des créations du FIRC (hors Humanis) sont l’AGIRC et l’ARRCO. L’AGIRC (Association Générale des Institutions de Retraite Complémentaire des cadres) gère comme son nom l’indique le régime de retraite complémentaire des cadres du secteur privé, tandis que l’ARRCO (Association pour le Régime de Retraite COmplémentaire des salariés) gère celui de l’ensemble des salariés du secteur privé (sauf exception), cadres compris. C’est lors d’une réunion qui visait à organiser un séminaire regroupant toutes les Institutions de Retraite Complémentaire que leurs furent présentés les créations du FIRC, ainsi que la politique de formation de l’ICR associée.

L’atelier Trajectoire Relation Client eu lieu le 17/10/13. Il avait pour objectif une présentation des jeux conçus par le FIRC, en vue d’une éventuelle mutualisation de ceux-ci au sein des autres Institutions de Retraite Complémentaire. Organisé par l’AGIRC/ARRCO, il s’est tenu dans les locaux du groupe Humanis sur le site de Montreuil. Ce fut l’occasion, comme le rappelle la Gazette21 du 8/11/13 de présenter l’approche de l’Interlocution Client et du développement des compétences des conseillers envisagés par Humanis. « Les jeux

pédagogiques ont été très remarqués comme moyen de mieux s’approprier les bons comportements ‘client’ ». L’article continue en précisant que « l’approche pédagogique par le jeu permet l’apprentissage par essais (répétitions des situations) et erreurs, dans une dynamique constructive ». Ont ainsi été présentés les trois jeux mentionnés dans cet écrit : le

Jeu de l’oi(e), A la Pursuit de la Relation Client et Vive la Vie ! qui (ce dernier) « modélise

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Note d’information mensuelle distribuée par l’AGIRC/ARRCO, faisant un état lieu des nouveautés liées à la formation au sein de l’AGIRC/ARRCO et des Institutions de Retraite Complémentaire.

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des parcours de vie différents pour conduire le stagiaire à une analyse d’expert ». Ces jeux

s’intègrent, comme le décrit le compte rendu de l’Atelier, dans une démarche plus globale de Gestion des Compétences « désormais acceptée dans son ensemble même si le stress lié à

l’évaluation persiste » chez les correspondants client. Il a été dit que les jeux pédagogiques

facilitent ainsi « la mémorisation et l’apprentissage par l’erreur en permettant au formateur

de mesurer les acquis de la formation et aux stagiaires de se positionner dans ses compétences acquises ».

Au-delà du fait d’aborder la formation sous un autre angle, le compte rendu rapporte que « les jeux pédagogiques permettent également aux managers de détecter des leviers

managériaux dans le comportement de ses équipes ».

Lors de ce séminaire les jeux ont été testés par les représentants des Institutions de Retraite Complémentaire : tous ont joué. Il est dit dans le compte rendu que « ce fut

l’occasion de découvrir leur intérêt professionnel et leur aspect ludique et pratique ». De cet

intérêt et du bon accueil que reçurent les jeux, ressort une évidente envie de mutualiser les jeux pédagogiques présentés, à l’ensemble des Institutions du secteur de la Retraite Complémentaire. Le compte rendu du séminaire rappelle néanmoins « que la réussite d’une

telle démarche globale en interne » (de la création du FIRC à la création des jeux de

formation) repose sur trois facteurs. Tout d’abord, « une volonté stratégique de la Direction », « un positionnement de l’équipe pédagogique en opérationnel et en lien avec le service RH », et enfin « une dynamique et une synergie durable entre les acteurs : RH - équipe pédagogique

– Ligne hiérarchique au sein des Directions « clients » et « métiers » – référents internes ».

Pascale Lépinay, responsable de cet Atelier qualifie les jeux d’ « aboutissement d’une

réflexion approfondie sur une problématique métier précise liée à un contexte particulier ».

Elle précise par ailleurs que le Centre22 « a vocation de promouvoir ce type de réalisations et

de l’adapter à des demandes spécifiques » (Gazette), et « est prêt à travailler » (compte rendu

du séminaire) avec les Institutions de Retraite Complémentaire intéressées « pour trouver

ensemble comment mutualiser l’approche pédagogique et les réalisations proposées par l’équipe du FIRC Interlocution Client Retraite Humanis ».

68 Ces deux dernières parties, théorique et pratique, nous permirent une analyse complète de l’utilisation du jeu en formation d’adultes mais également de tous les mécanismes qui lui sont liés. Ont ainsi été appréhendés des notions et concepts tels que la motivation, l’intérêt, l’apprentissage, le lude etc. auxquels ont été rapportés des éléments factuels issus de l’expérience d’ingénierie développée par le FIRC. Notre problématique vise à savoir de quel intérêt il s’agit quant à l’action de se former en entreprise via le jeu pédagogique. Cette analyse serait donc incomplète si elle ne permettait pas à différents acteurs de la formation d’exprimer leurs points de vue. Voici ce à quoi s’attache cette quatrième et dernière partie : contribuer à notre problématique en présentant les avis de plusieurs intervenants sur le fait d’effectuer une action de formation à l’aide d’un jeu pédagogique.

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4. Discussion

Pour introduire cette partie ô combien importante pour l’écrit, appuyons-nous sur une citation de Brandenburger et Nalebuff (1996, p.55) : « toute analyse d’un jeu doit tenir

compte non seulement de ses perceptions, mais aussi des suppositions que fait chaque joueur sur les perceptions des autres ». Bien qu’ils n’appliquent leur propos qu’à l’analyse d’un seul

jeu, nous pensons que cette affirmation vaut aussi bien lorsqu’il s’agit d’étudier le jeu d’une façon plus globale, voire même d’étudier toute action de formation quelle que soit sa nature… Pourquoi ? Autour d’une action de formation, plusieurs individus gravitent. Ils se différencient les uns des autres en fonction de leur rapport à cette même action de formation : nous avons le décisionnaire, le concepteur, le formateur, l’apprenant etc. Chacun y va de sa propre perception (cf. supra. partie 1.5, p. 26) et chaque perception est indispensable pour appréhender le plus finement possible l’objet qui leur est commun : l’action de formation. C’est comme dans un jeu, où chaque individu serait le joueur. Brandenburger et Nalebuff ajoutent pour accoter ce propos que « tout jeu est inséparable de la façon dont les joueurs

l’appréhendent » (op.cit.)…

Les personnes dont nous confronterons les propos ont été choisies pour leur diversité de « rôles » dans l’univers formation. Les entretiens ont tous été effectués sur rendez-vous et en face à face, sauf pour Romain pour qui la distance imposa le recours au téléphone. Il n’existe pas d’uniformité temporelle dans la durée de ces échanges, le plus court étant en effet de six minutes tandis que le plus long en avoisine les soixante-dix. Tous les intervenants ont autorisé l’utilisation d’un enregistreur vocal pourvu que leurs propos restent anonymes et confidentiels. Ces enregistrements permirent une retranscription intégrale de chaque entretien23 : la moindre idée émise par l’un des acteurs a ainsi pu être mise en avant et intégrée à cet écrit.

Cette discussion s’inscrit dans la droite ligne de ce début de mémoire, c’est-à-dire qu’elle est la résultante d’une démarche purement inductive, ne laissant pas de place aux présupposés. Lors des entretiens donc, la règle était de faire le moins d’ingérence possible pour laisser exprimer au maximum les points de vue des interviewés, vierges de toute

70 influence extérieure. Ont ainsi été interrogées deux salariées d’Humanis, correspondantes client de leur état, Chaïma et Elodie24. Elles ont toutes deux participé à une ou plusieurs formations animées par un jeu pédagogique conçu par le FIRC. Ensuite, c’est un correspondant client référent (Lionel), formateur à l’occasionnel qui a été interrogé. Il connaît également les jeux conçus par le FIRC. La responsable du département Interlocution Client Retraite (ICR) (duquel dépend pour rappel le FIRC) est la quatrième personne à avoir été interrogée. A travers elle nous aborderons un point de vue plutôt « décisionnaire » d’une action de formation. Elle connait elle aussi (pour en avoir été dans une certaine mesure l’instigatrice) les jeux pédagogiques proposés par le FIRC. Inès, cinquième personne à avoir été interrogée est une consultante dans un cabinet externe de conseil en ingénierie pédagogique et de formation de la région lilloise. Enfin, Romain est chargé de cours dans une université francilienne en Master de psychologie sociale, et travaille depuis quelques années avec le jeu en formation. De par la temporalité de ce mémoire, et du travail de recherche effectué en amont, il n’a pas été choisi d’interroger un plus grand échantillon de personnes. Pour rappel, cet écrit ne porte aucune prétention d’exhaustivité, mais cherche seulement à comprendre, à travers les expériences de quelques personnes, si l’action de se former en entreprise via le jeu pédagogique peut avoir un intérêt ou non, et si oui duquel il s’agit.

A travers les lectures effectuées et rapportées ci-dessus, plusieurs notions, concepts et objets associés de près ou de loin au jeu pédagogique ont été mis en avant. Qu’il s’agisse entre autres du second degré qui rend toute compétition irréelle et qui annihile le risque et le danger (cf. supra. partie 2.1.2, p. 32), qu’il s’agisse de la frivolité qui s’oppose au « sérieux » et qui annule toute introjection (cf. supra. partie 2.1.2, p. 32), qu’il s’agisse du lude qui favorise le flow et qui suppose un subtil dosage entre prise de risque et mise en confiance tout en s’agaçant autour de l’agôn et de l’aléa (cf. supra. partie 2.1.3, p. 33), ou qu’il s’agisse enfin de motivation intrinsèque dans laquelle le joueur peut percevoir une liberté de choix (cf. supra. partie 2.2.1, p. 37), tous seront précisément abordés en fonction des points de vue exposés par nos six individus. Après avoir détaillé les quatre atouts du jeu pédagogique qu’ils mettent en avant, nous aborderons leurs perceptions de chacune des étapes du processus global de conception d’un jeu de formation : conception, animation, évaluation. Seront ensuite précisés les points de vigilance mis en avant, qui concernent aussi bien le jeu en tant que tel que les seuls apprenants. Quelque fois, certaines références bibliographiques viendront

71 s’ajouter aux propos recueillis par nos six acteurs, et aideront à les structurer, à les étayer. Pour finir enfin, nous croiserons dans une ultime partie les notions et/ou concepts qui ressortent d’une part de la discussion, mais aussi d’autre part de l’apport théorique. Nous pourrons alors proposer une réponse à la problématique qui structure cet écrit.