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La décorrélation du speckle dans le temps et la diminution d’intensité du focus après optimisation du front d’onde ont pour origine le même phénomène physique : le déplacement des inhomogénéités d’indices optiques au sein du milieu diffusant. La question posée pour ce chapitre est la suivante : est-ce que, après une optimisation itérative du front d’onde, certaines séquences de diffusion sont privilégiées ? Finalement, est-ce que le focus formé à travers un milieu diffusant présente une stabilité accrue par rapport au speckle environnant ?

En plus d’offrir plus de temps pour balayer le focus après optimisation, une stabilité accrue du focus présenterait d’autres avantages. Un focus plus stable pourrait signifier que plus de modes de SLM participent au focus impliquant alors un gain de focalisation plus important. De plus, à travers une solution colloïdale monodisperse, un focus plus stable serait alors formé de séquences de diffusion plus courtes. Comme montré par M. Kadobianskyi et al [125], des séquences de diffusion plus courtes induisent un effet mémoire plus grand.

Dans la littérature, nous pouvons trouver des expériences similaires en DOPC [104,120] et en optimisation [126] où les focus formés présentent la même stabilité que le speckle vis-à-vis du phénomène de décorrélation. Nous allons décrire, dans les prochains paragraphes, ces expériences afin de mettre en avant la différence qui nous a

78 poussée à envisager qu’un focus plus stable que le speckle pouvait être formé après optimisation itérative du front d’onde.

4.2.1 Cas de la conjugaison de phase optique digitale

Dans les études de M. Jang et al [120] et de Y. Liu et al [104], la stabilité du focus après focalisation à travers un milieu diffusant dynamique a été comparée théoriquement et expérimentalement à la stabilité du speckle. Il a été démontré que la fonction de corrélation temporelle en intensité g2(t), utilisée pour quantifier la stabilité du speckle, est proportionnelle à l’évolution temporelle de l’intensité Ifocus(t) après conjugaison de phase :

𝐼𝑓𝑜𝑐𝑢𝑠(𝑡) ∝ 𝑔2(𝑡) (4.3)

Dans l’étude de M. Jang et al [120], la vérification expérimentale de l’équation 4.3 a été réalisée en focalisant un laser par une technique de conjugaison de phase optique digitale à travers un gel d’agar diffusant se solidifiant. Des mesures de g2(t) et F(t) à différentes étapes de solidification du gel sont présentées sur la figure 2. Ces mesures montrent, que pour une expérience de conjugaison de phase optique digitale, le focus présente la même stabilité que le speckle.

La même expérience a été conduite à travers des tissus biologiques (ici la peau dorsale d’une souris) conduisant au même résultat.

Dans le cas de la conjugaison de phase optique digitale, nous pouvons considérer que la focalisation est quasiment instantanée (limitée par le temps d’intégration de la caméra, donc de quelques dizaines à quelques centaines de microsecondes), au contraire de notre optimisation itérative du front d’onde. De fait, aucune séquence de diffusion particulière n’a pu être avantagée dans cette situation.

79 Figure 2. Mesures simultanées de la fonction de corrélation temporelle du speckle g2 et de la

décroissance du focus F après focalisation par DOPC à travers un gel d’agar diffusant se solidifiant. (a) En rouge : temps de décroissance caractéristique du speckle. En bleu : temps

de décroissance caractéristique du focus pour différents états de solidification du gel. Les fonctions g2 et F présentent les mêmes temps caractéristiques. (b1-b3) Les fonctions d'autocorrélation du speckle (en bleu) et l’intensité du focus après focalisation (en rouge) à

différents temps de durcissement. Pour différentes échelles de temps, les deux courbes montrent un accord étroit dans leur évolution temporelle. Adapté de [120]

4.2.2 Cas de l’optimisation

Une mesure similaire a été réalisée en optimisation par le groupe de A. Mosk [126]. L’expérience est la suivante : un montage standard d’optimisation du front d’onde est utilisé pour focaliser en transmission un laser monochromatique à une fréquence ω0 à travers un milieu diffusant statique. Après focalisation, la longueur d’onde du laser incidente est modifiée de ω0 à ω0+Δωinduisant une décorrélation du speckle. Dans ce papier, il a alors été démontré expérimentalement et théoriquement que l’intensité du focus Ifocus0+Δω) est proportionnelle à la fonction de corrélation spectrale en intensité du speckle <I(ω0)I(ω0+Δω)>, ce qui est équivalent à dire que comme précédemment il n’y a pas de changement de distribution des chemins entre le focus et le reste du speckle.

De manière analogue aux mesures en DOPC, l’expérience de focalisation a été réalisée sur un milieu statique en lumière monochromatique, ce qui explique pourquoi il n’y a pas de sélection sur la longueur des chemins.

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4.2.3 Motivation

Nous allons dans ce chapitre étudier expérimentalement la relation entre la fonction de corrélation temporelle du speckle et la persistance du focus après une expérience d’optimisation du front d’onde en milieu dynamique. La différence principale avec les techniques utilisées dans les expériences décrites précédemment est donc le caractère itératif des techniques d’optimisation couplé à une dynamique des diffuseurs : l’optimisation et la décorrélation du speckle se produisant simultanément, nous avons voulu voir si la stabilité relative du focus peut être affectée. Nous verrons en particulier par la suite comment cela peut aider, dans certaines conditions, à former un focus plus stable que le speckle environnant.

Nous avons mené une première série d’expériences à travers une solution colloïdale en régime de diffusion multiple (la même qu’au chapitre précédent). Nous allons retrouver en essence le même résultat que les expériences de DOPC, La fonction g2(t) et la moyenne de Ifocus(t) sur de nombreuses réalisations semblent identiques, en tout cas avec les algorithmes utilisés et les constantes de temps en jeu. Cependant nous allons également voir que pour une réalisation donnée de l’expérience de focalisation, la décroissance du focus peut différer significativement de la fonction de corrélation temporelle.

Nous avons mené une deuxième série d’expériences à travers des milieux diffusants présentant des distributions de stabilité larges de différentes natures : dans un premier cas, une partie de la lumière n’est pas diffusée de manière dynamique (solutions colloïdales en régime de diffusion simple, avec une contribution significative de lumière balistique) ; dans un second cas, celui des échantillons biologiques, la distribution de temps de décorrélation semble présenter deux temps caractéristiques dominants (tranches de cerveaux). A travers ces milieux, le focus formé après optimisation est plus stable que la fonction de corrélation du speckle. Ces résultats semblent indiquer que sous certaines conditions l’optimisation itérative tend à utiliser les séquences de diffusion les plus stables pour former le focus.