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A l’aide de simulations et d’expériences, nous avons étudié dans ce chapitre la stabilité d’un focus formé par un système d’optimisation itérative du front d’onde. La compréhension de cette stabilité est importante dans la perspective de faire de la microscopie de fluorescence avec des photons diffusés refocalisés par un système de contrôle du front d’onde. Elle nous renseigne sur le temps disponible pour former une image de fluorescence par balayage du focus.

Dans un premier temps, nous avons observé expérimentalement qu’en régime de diffusion multiple pour un milieu diffusant dynamique homogène, le focus présente en moyenne la même stabilité que le speckle comme cela est prédit dans la littérature [120].

93 Néanmoins, nous avons montré en outre que les réalisations individuelles d’un focus peuvent présenter une large distribution de temps de decorrélation autour de cette valeur moyenne.

Dans un deuxième temps, nous avons décrit deux situations expérimentales où nous avons pu montrer que la stabilité du focus obtenu par optimisation du front d’onde était significativement plus stable que le speckle.

Dans la première situation, nous avons étudié un milieu diffusant statique (en régime de diffusion multiple) suivi d’un milieu où la propagation à travers les diffuseurs dynamiques s’opérait en régime de diffusion faible. Pour des billes de petites tailles (paragraphe 4.5.2.2), la stabilité des séquences de diffusion dynamique était trop faible pour que notre système puisse la corriger. Le focus résultant est donc beaucoup plus stable que le speckle car il n’utilise alors que les séquences de diffusion statique. Pour des billes plus grandes (paragraphe 4.5.3), notre système est suffisant rapide pour optimiser toutes les séquences de diffusion, néanmoins il privilégie quand même les séquences les plus stables. Dans de tels milieux, le focus résultant de l’optimisation est stable, puisque principalement formé par des photons diffusés par le milieu statique et qui traversent balistiquement la solution dynamique. Ces expériences semblent indiquer que l’optimisation privilégie les séquences de diffusion stables quand deux gammes distinctes de temps de stabilité existent : très stable (balistique à travers le milieu dynamique) et peu stable (diffusé par le milieu dynamique).

Nous avons observé dans un second temps un résultat similaire à travers une tranche de cerveau de souris qui présente des temps de décorrélations multiples, dans un régime de diffusion intermédiaire entre la diffusion simple et multiple. En particulier, la dynamique complexe du milieu présente des séquences de diffusion relativement stable (~10s) et nous avons observé que ce sont ces chemins qui semblent sélectionnés pendant le façonnage du front d’onde. Comme précédemment, le processus d’optimisation permet d’obtenir un focus ayant une stabilité temporelle augmentée par rapport au speckle.

L’élément clé pour obtenir un focus plus stable que le speckle semble être la largeur de la distribution des temps de stabilité des séquences de diffusion. Plus cette distribution est large, plus il semble possible de privilégier les séquences de diffusion stable. A l’inverse, une distribution étroite (voir paragraphe 4.4) ne permet pas, à une optimisation itérative du front d’onde, de distinguer les différentes stabilités des séquences. Un deuxième élément clé pour obtenir cet effet est la vitesse à laquelle l’optimisation est faite. Si l’optimisation est trop

94 rapide par rapport au temps de décorrélation du milieu, cet effet n’apparait pas (comme en DOPC). Dans notre cas, si le temps d’optimisation est de l’ordre des temps de stabilité présents dans le milieu, un focus plus stable que le speckle peut apparaitre. L’influence de ces deux paramètres reste difficile à analyser expérimentalement. Des études numériques poussées pourront aider

De plus, une étude plus poussée de l’impact de l’algorithme d’optimisation sur la stabilité du focus pourrait mettre en avant des stratégies d’optimisation susceptibles de favoriser d’autant plus les modes de propagation stables.

Nous pensons que des résultats similaires peuvent être obtenus à travers d’autres systèmes :

- Pendant l’imagerie in vivo d’un cerveau de souris (le crâne ayant été enlevé et remplacé par une lamelle de verre), une partie la lumière traversera des vaisseaux sanguins imposant alors une décorrélation très rapide du speckle. Malgré cela, un système de correction du front d’onde devrait être capable de focaliser les photons diffusés par des structures statiques ou ayant une dynamique lente (cellules …), si la fraction de lumière diffusée dynamiquement reste faible. Si celle-ci augmente, elle agira comme un bruit supplémentaire sur le processus d’optimisation qui sera d’autant plus perturbé que la fraction sera grande.

- Une imagerie résolue à travers le crâne est aussi envisageable. Le crâne serait alors un diffuseur fixe et le tissu cérébral serait le diffuseur dynamique. A priori, dans ce cas-là, le système de correction du front d’onde corrigera préférentiellement la diffusion par le crâne.

- Un dernier cas intéressant est la correction du front d’onde en présence d’un front d’onde balistique mais aberré à l’intérieur d’un tissu. Les photons diffusés le sont de manière dynamique alors que les photons aberrés seront relativement stables. Une correction du front d’onde corrigerait alors préférentiellement les aberrations.

Une perspective serait d’étendre cette étude expérimentale à la focalisation de d’impulsions lasers à travers un milieu dynamique. La propagation d’un pulse optique court à travers un milieu diffusant induit une élongation temporelle du pulse en transmission selon la distribution des temps de vol. Une mesure interférométrique réalisée avec un tel pulse allongé (pour focaliser par exemple) donnera plus de poids au centre du pulse allongé. Ainsi, Mounaix et al [58] ont montré que la focalisation d’un pulse optique court à l’aide du matrice

95 de transmission unique recompressait temporellement le focus obtenu par rapport à la courbe de temps de vol. Pour des milieux diffusants homogènes, cela revient à favoriser les séquences de diffusion courtes. Une mesure d’optimisation semblable avec des impulsions optiques pourrait confirmer l’existence de cet effet pour la focalisation à travers un milieu diffusant statique puis dynamique. Si tel est le cas, dans le cas du milieu dynamique, le focus obtenu serait plus stable que le speckle.

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V Correction du front d’onde avec des déflecteurs

acousto-optiques

Dans ce chapitre, nous allons montrer qu’un système de déflecteurs acousto-optiques (AODs) peut être utilisé comme un modulateur rapide de front d’onde. Nous allons dans un premier temps rappeler le fonctionnement d’un dispositif acousto-optique puis nous allons expliquer comment l’utiliser pour moduler le front d’onde.

Dans un deuxième temps, nous allons décrire un système de correction de front d’onde basé sur deux AODs croisés couplés à une électronique rapide. Ce système nous permettra de focaliser rapidement la lumière à travers un milieu diffusant à l’aide d’un algorithme d’optimisation continu du front d'onde avec un taux d'optimisation par mode de 3.6 kHz. Tout d’abord, nous allons mettre en avant les spécificités du façonnage du front d’onde avec ce système puis nous allons démontrer sa vitesse de focalisation à travers des milieux diffusants statiques.