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2. Taxonomie des principaux agents infectieux des MVT

2.2. Agents pathogènes des principales co-infections transmises par les tiques

2.2.2. Principal agent parasite : Babesia sp

Les tiques sont également vectrices de parasites tels que Babesia et Theileria. Nous allons uniquement nous intéresser aux piroplasmes appartenant au genre Babesia ; Theileria ayant essentiellement un impact économique en santé vétérinaire.

Babesia, voisin du Plasmodium49, est un protozoaire piriforme ou annulaire obligatoire des globules rouges qui se transmet majoritairement par les tiques Ixodes. Sa multiplication dans les

48 http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infectieuses/Zoonoses/Tularemie/Donnees-

epidemiologiques/Tularemie-Donnees-epidemiologiques-2016

49 Babesia sp. appartiennent au phylum Apicomplexa avec l’agent du paludisme (Plasmodium sp.) mais aussi de la

hématies de ses hôtes entraînant la lyse de ces dernières, engendre la piroplasmose chez les animaux et la babésiose chez les humains (188).

La tique femelle, infectée lors de son repas sanguin, voit sa descendance contaminée par transmission trans-ovarienne, puis trans-stadiale50, sur au moins deux générations (189). Par ce biais, l’infection peut alors se maintenir quelques années dans la population d’Ixodes, sans avoir à recourir à un hôte vertébré. La prévalence de Babesia dans les tiques est comprise entre 5 et 20 % en Europe (190,191), elle est parfois plus élevée aux États-Unis (192).

La babésiose humaine peut également se transmettre, mais plus rarement, par transfusion de sang contaminé (193) et par voie transplacentaire ou périnatale (194). Ces autres modes de transmission, insuffisamment documentés en Europe, apparaissent préoccupants dans certains États des États-Unis, principalement pour les transfusions sanguines (195).

En dehors des piroplasmoses bovines, équines et des animaux de compagnie, deux espèces zoonotiques de Babesia sont reconnues depuis longtemps : B. divergens, en Europe, transmis par I.

ricinus et B. microti, majoritairement aux États-Unis mais aussi retrouvée en Europe, transmis par I. scapularis (196–198).

Les deux taxons se différencient par leurs hôtes ainsi que par leur sévérité. B. divergens, dont le réservoir repose sur les bovins, peut avoir de sévères conséquences sur la santé humaine, en particulier chez les immuno-déprimés (environ 84 %) avec 42 % de mortalité tandis que B. microti, plus fréquent, est présent chez les rongeurs et entraîne habituellement une affection asymptomatique mais pouvant être mortelle dans 5 à 20 % des cas (188).

Toutefois, les cas de babésiose humaine en Europe dus à Babesia sp. restent rares, ils sont actuellement de l’ordre d’une cinquantaine environ (195). Jusqu’alors uniquement trouvée chez les immunodéprimés, des cas ont récemment été décrits chez des patients non splénectomisés en France (199).

À l’image des autres agents infectieux transmis par les tiques, on découvre, grâce aux progrès de la technicité moléculaire, un certain nombre d’autres espèces potentiellement pathogènes pour l’homme (200,201).

C’est le cas, par exemple, de B. venatorum, anciennement nommée Babesia sp. EU1, pour lequel on enregistre depuis 2003 de plus en plus de cas humains européens (202,203), coïncidant avec sa détection plus fréquente dans les I. ricinus et les ruminants sauvages tels que les chevreuils en zone forestière périurbaine (204,205). Cette particularité constatée par les chercheurs démontre l’expansion de son aire de répartition (206).

Concernant la fréquence de la babésiose chez l’homme, des microbiologistes allemands ont mis en évidence à la fin des années 1990 des séroprévalences humaines moyennes de 5,4 % et de 3,6 %, respectivement pour B. microti et B. divergens dans le centre-ouest de l’Allemagne. La population étudiée se voulait assez représentative de la population générale avec des donneurs de sang sains, des patients atteints de la borréliose de Lyme (souffrant d’un érythème migrant), certains asymptomatiques mais possédant une sérologie de borréliose positive, d’autres ayant des antécédents de piqûre de tique, etc.

Ainsi, les résultats qu’ils ont obtenus montrèrent non seulement que les infections à Babesia dans la population humaine allemande sont plus fréquentes qu’ils ne le pensaient auparavant mais ils fournirent également des preuves d’infections concomitantes avec les espèces Borrelia burgdorferi et

Babesia chez les humains exposés aux tiques (207).

D’autres recherches effectuées au nord-ouest de la Pologne sont venues confirmer cette propriété en rapportant que presque 1 % des tiques récoltées étaient co-infectées à Babesia microti et Borrelia

burgdorferi sensu lato (208). De même, qu’environ 4 % le furent à deux ou trois pathogènes

simultanément dont Anaplasma phagocytophilum qui s’ajoute aux deux micro-organismes précédents (190).

50 La transmission trans-stadiale se définit par la transmission d’un agent infectieux d’une stase de tique à une autre au cours

50

En 2005, une étude française observa que pratiquement 21 % des tiques examinées transportaient Babesia et que presque 8 % d’entre elles étaient co-infectées par au moins deux pathogènes parmi Babesia sp., Bartonella sp. et B. burgdorferi sensu lato. Un seul spécimen comportait les trois microbes (191).

On découvre au fur et à mesure des années l’importance croissante de la babésiose humaine dans différentes régions du monde, nouvellement impliquées pour certaines.

Ce phénomène peut en partie s’expliquer par l’augmentation du nombre de patients immunodéprimés et de voyageurs. Le petit nombre actuel de cas humains documentés est probablement dû à un manque de connaissance de la maladie et de disponibilité d’outils diagnostiques adaptés (195).

À cela s’ajoute le fait que ce ne soit pas une maladie à déclaration obligatoire, contrairement à la maladie de Lyme aux États-Unis, ainsi le nombre de cas déclarés de babésiose est inférieur à celui de la borréliose. Malgré tout, au cours des années 1990, l’incidence de l’infection à Babesia avoisina celle de la borréliose de Lyme dans les sites endémiques de l’Est des États-Unis (209).

De plus, les symptômes cliniques engendrés par la babésiose sont non spécifiques, facilement confondus avec une maladie virale et très hétérogènes allant des cas asymptomatiques aux cas graves et mortels. Par exemple, la survenue d’une co-infection à B. burgdorferi et B. divergens fut fatale en 2004 pour un patient finlandais, n’ayant pas subi de splénectomie, ce qui rendit le cas inhabituel (210).