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Prévenir l’exposition des préadolescents à des risques dans l’espace numérique

Dans le document ET DE L ’ ADOLESCENCE (Page 123-126)

Considérés comme un moyen de garder le lien avec ses proches, de rompre l’isolement, les réseaux sociaux numériques (RSN) permettent une fluidité dans les liens sociaux des adolescents. Certaines recherches262 avancent qu’ils peuvent « renforcer la capacité mentale d’inférer des états mentaux à soi-même et à autrui et de les comprendre »263. Néanmoins, les usages permanents et pour tout du numérique peuvent également avoir des effets de banalisation des frontières entre l’espace public et la vie privée. Ce qui génère, comme déjà souligné plus haut, une banalisation ludique et narcissique de l’exposition de l’intimité, du corps, voire de la sexualité. Pour les adolescents, ils peuvent induire l’accès ou la diffusion de contenus inappropriés, de photos ou données personnelles qui peuvent s’avérer préjudiciables, situations de honte, manipulations, parfois harcèlement et jusqu’à des formes de prédation. La toile est une sphère aux bords flous entre le privé et la voie publique.

Pour rappel le rapport du Conseil de l’enfance du HCFEA 2020, « Les enfants, les écrans et le numérique »264, expliquait les biais de la construction identitaire au travers de la socialisation numérique (p. 28), et l’urgence de l'accompagnement des parents et des éducateurs de l’enfance, par l’information, la formation, le soutien, les services (p. 37). Les dix orientations adoptées par Conseil visaient la connaissance, la protection, l’initiation, et la socialisation numérique. S’y ajoutent une vigie éthique et des mesures d’égalités entre tous les enfants quels que soient leur genre et leur situation personnelle, sociale ou médicale, face à l’expérience numérique de l’amitié et des relations romantiques (p. 77 à 86). Certaines orientations du HCFEA ont trouvé échos dans des mesures éparses, d’autres restent d’actualité.

Face à leurs questionnements sur la sexualité, la plupart des adolescents se tournent vers Internet au détriment des « figures tutélaires d’éducation ». Les parents, sont amenés à assumer une protection parentale d’un nouveau genre, qui les convoque à être eux-mêmes des internautes avertis, tout en restant des interlocuteurs capables de lever les tabous pour permettre une confiance et un dialogue respectant la pudeur de chacun, mais rompant l’isolement des adolescents en cas de difficulté rencontrée. C’est aussi la position des fédérations de parents d’élèves qui privilégient l’axe éducatif, sachant que les parents ne

262 Étude conduite en 2019 auprès de 409 adolescents, âgés de 13 à 18 ans.

263 « théorie de l’esprit » qui permet de prédire, d’anticiper et d’interpréter le comportement des pairs dans une situation donnée, cf. Elodie Gentina, Facebook, Snapchat, Instagram : les réseaux sociaux font aussi du bien aux adolescents ! The Conversation, mars 2020.

https://theconversation.com/facebook-snapchat-instagram-les-reseaux-sociaux-font-aussi-du-bien-aux-adolescents-132887.

264 HCFEA, (2020) rapport du Conseil de l’enfance et de l’adolescence, Les enfants, les écrans et le numérique, adopté le 6 mars 2020, https://www.hcfea.fr/IMG/pdf/dossier_enfantsecransnumerique.pdf.

peuvent confier à l’école l’ensemble de la charge d’éducation au numérique et à ses travers, et insistent sur le fait de commencer dès l’âge du primaire, avant donc les années collèges.

Le fonctionnement des datas et la recherche par mots clefs exposent les préadolescents à des contenus inappropriés. En 2017, un sondage réalisé par l'Ifop pour l’OPEN (Observatoire de la parentalité et de l’éducation au numérique) montre un premier visionnage de plus en plus précoce. A 14 ans la moitié des adolescents a déjà vu un film X, et 55 % considère avoir eu cette première expérience trop jeune. L’accès des sites à caractère pornographiques gratuits et simples d’accès facilite cette pratique ; 84 % de ces premiers visionnages ont eu lieu sur des sites internet, dont 9 % des garçons et 8 % des filles de 11 à 12 ans, (vs support TV)265.

Dans le cadre d’une action interministérielle, un protocole d’engagements « pour la prévention de l’exposition des mineurs aux contenus pornographiques en ligne » a ainsi été signé au début de l’année 2020266 appelant à la mobilisation des acteurs signataires (fournisseurs d’accès à Internet, opérateurs mobiles, moteurs de recherche, éditeurs de contenus, réseaux sociaux, constructeurs de terminaux, systèmes d’exploitation et associations engagées en faveur de la protection de l’enfance) afin, en particulier, de favoriser l’utilisation des outils de contrôle parental par les foyers français.

Le comité de suivi des engagements du protocole, piloté conjointement par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et l'Autorité de régulation des communications électronique (Arcep), s’est réuni tout au long de l’année 2020 afin d’assurer la conception :

- d’un baromètre permettant d’évaluer le niveau d’utilisation des outils de contrôle parental ; - d’une plateforme d’information sur les outils de contrôle parental, destinée à leur promotion auprès des parents. Cette plateforme dénommée « Jeprotegemonenfant.gouv.fr » vise à inciter les parents à utiliser les outils de contrôle parental existants et à leur fournir des conseils et des ressources pratiques pour mieux les informer afin qu'ils protègent leurs enfants contre l’exposition aux contenus pornographiques en ligne. Elle a été mise en ligne le 9 février 2021.

Le CSA a par ailleurs été saisi par l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation au numérique (Open) associé à l'Unaf (Union nationale des associations familiales) et au Cofrade (Conseil français des associations pour les droits de l'enfant) pour dénoncer la situation de certains sites pornographiques sans véritable système de filtrage et de vérification de l’âge de l’internaute. L’accès précoce à la fiction pornographique mobilise les pouvoirs publics depuis plusieurs années, pour des raisons évidentes de protection, d’éducation et de formation de la personne qu’est l’enfant, notamment sur la fonte de la distinction entre l’intime et le public du corps et de la sexualité.

265 Sondage IFOP « Les adolescents et le porno : vers une « Génération Youporn » ? », 2017.

266 https://www.csa.fr/Informer/Pole-numerique-Arcep-CSA/Protection-des-mineurs-contre-la-pornographie-en-ligne.

Sur cette question, le Conseil de l’enfance et de l’adolescence a pris le parti d’une approche équilibrée dans son rapport de mars 2020 « Les enfants, les écrans et le numérique ».

Approche à la fois positive du numérique dans la vie des enfants, tout autant que protectrice.

Il réitère, face aux constats confirmés sur les dérives et le mésusage de la communication numérique, ses propositions.

PROPOSITION 30– POUR SECURISER LES ADOLESCENTS DANS LES ESPACES NUMERIQUES

Les leviers de la lutte contre la vulnérabilité des mineurs reposent sur l’écoute, l’information sur les relations filles-garçons, la sexualité, le respect du corps et de la volonté de l’autre, le refus des influences et des manipulations infligées ou subies. Pour cela, les adolescents doivent se sentir en confiance pour refuser et, avec les adultes tutélaires, pour questionner, ou signaler des circonstances ou des actes qui portent préjudice.

PROPOSITION 30.1 – PROTEGER LES ADOLESCENTS DES MESUSAGES DE LA SOCIALISATION NUMERIQUE, DANS LA SUITE DU RAPPORT ENFANTS ECRANS ET NUMERIQUE ET DE SES PROPOSITIONS (HCFEA2019267) :

« Proposition 2 : Vigie éthique : considérer la dimension éthique en jeu dans le numérique et mettre en place une corégulation efficace entre pouvoirs publics, industriels et société civile, avec un projet d’éducation critique et citoyenne.

Proposition 3 : Déplacements d’activités : faire en sorte que les tout-petits, enfants et adolescents aient la possibilité et la liberté d’accès à d’autres sources de plaisir et d’intérêt que les activités numériques.

Proposition 4 : Inégalités : réduire l’impact du numérique sur le creusement des inégalités : repérer et prévenir.

Proposition 5 : Contradictions institutionnelles : dans les services de l’enfance, réduire les contradictions entre l’utilisation du numérique dans les pratiques et les injonctions en directions des enfants (injonctions et conduites paradoxales).

Proposition 6 : Violences et intimité : lutter contre les violences numériques, le cyberharcèlement, les fake news, la pédocriminalité et une mauvaise utilisation des réseaux sociaux grâce à une mobilisation des enseignants, un renouvellement et un renforcement de l’éducation aux médias.

Proposition 7 : Vie affective et sexuelle : créer les conditions d’une approche positive de la sexualité : développer un discours de prévention et de sensibilisation, sans naïveté, face aux risques liés aux pratiques numériques des enfants.

Proposition 8 : Espace public : espaces tout public, pour l’enfant aussi. Penser un espace public sécurisé et aménagé en considérant la présence des enfants, y compris en terme d’écrans et d’affichage numérique public.

267 HCFEA, 2020, Les enfants, les écrans et le numérique, op. cit.

Proposition 9 : Connaissances : développer la recherche et des connaissances mieux ciblées sur les usages et contenus numériques des enfants, en fonction de l’âge.

Proposition 10 : Droits de l’enfant : mettre en œuvre les recommandations de l’ONU et de la Cide ».

Proposition 30.2 – Nécessité d’une présence adulte dans les espaces numériques fréquentés par les adolescents :

 Soutenir les moyens du secteur associatif expert, et légitimer leur action, impliquer les parents de manière constructive : renforcer, le dispositif « Promeneurs du Net ».

 Développer et y adjoindre les « Ambassadeurs des MDA ».

Il est nécessaire pour les parents de protéger dans un premier temps leurs enfants face aux risques d’internet grâce à des outils de contrôle parentaux, mais aussi de lever le tabou sur la sexualité et l’intimité en échangeant avec leurs adolescents sur le sujet.

Au-delà des mauvaises rencontres, prévenir, reconnaître les

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