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L’importance de l’architecture scolaire sur le besoin d’intimité, de sécurité et d’hospitalité des enfants

Dans le document ET DE L ’ ADOLESCENCE (Page 106-110)

« Il y a une fonction hôtelière de l’école, une dimension physique de l’accueil, qui prédispose au travail, qui préstructure l’ambiance. » Jacques Pain, 2000228

227 Le défenseur des droits, 2019, op. cit.

228 Pain J., 2000, La violence institutionnelle ? Aller plus loin dans la question sociale, Nouvelle revue de l'AIS, n° 12.

L’environnement physique, qui comprend le confort, l’adaptation aux besoins d’enseignement et d’apprentissages, et l’esthétique est un facteur important de la qualité de vie à l’école.

Une étude portant sur 544 collégiens provenant de deux collèges sur leur ressenti dans les bâtiments229 pointe du doigt un espace scolaire qui se comprends à l’intérieur comme devant le collège, répartis en espaces « sûrs » et espaces « dangereux ». Par exemple, les salles de classe, le gymnase et la cantine sont considérés comme « surs », au contraire de la cour de récréation, les toilettes, le devant du collège, les escaliers et le vestiaire d’EPS.

Ainsi, les collégiens ressentiraient de l’insécurité dans les espaces en dehors (devant le collège et l’arrêt de bus), les espaces d’intimité (toilettes et vestiaires), les espaces de circulation (escaliers et couloirs) et enfin l’espace de détente (cour de récréation). Ces lieux théoriquement surveillés restent donc considérés comme moins sécurisants.

Encourager la participation des élèves aux décisions concernant le collège comme cadre de vie

Certains sujets récurrents de santé et de bien-être à l’école au sens large pourraient mobiliser toute la communauté éducative, et notamment les personnels de santé et sociaux, en donnant une place centrale aux collégiens dans le choix des thèmes à prioriser et l’identification de préconisations. L’important étant que les acteurs les identifient comme une priorité dans leur collège, s’en emparent, et les traitent en partenariat, par exemple les toilettes (accès, propreté, sécurité, pathologies…), les rythmes (lever/coucher, heure de début des cours, emplois du temps, écrans…), le bruit (en classe, au réfectoire, dans les espaces de circulation), etc.

Les enquêtes de victimation en France et à l’international montrent que 95 % des faits de violence à l’école sont commis entre pairs, cependant celles des élèves envers le corps enseignant ne doivent pas être ignorées. Dans le cadre des travaux sur le climat scolaire, la Degesco a mené une enquête en 2016 auprès des 550 000 adhérents de la fédération syndicales des autonomes de la solidarité230 afin de donner plus de visibilité aux agressions dont les enseignants disent avoir été la cible. Parmi les 26 000 répondants, 6 % des enseignants disent avoir été physiquement agressés par un élève au cours de leur carrière et 30 % avoir été insultés par un élève au cours de l’année écoulée.

229 Hébert T. et Dugas E., Quels espaces scolaires pour le bien-être relationnel ? Enquête sur le ressenti des collégiens français, Éducation et socialisation [En ligne], 43 | 2017, mis en ligne le 1er février 2017, consulté le 8 février 2021. URL : http://journals.openedition.org/edso/1904 ; DOI: https://doi.org/10.4000/edso.1904.

230 Enquêtes baromètre de climat scolaire, FAS, voir aussi Debarbieux É., 2016, L'école face à la violence.

Décrire, expliquer, agir, Armand Colin, « U », 256 p. ISBN : 9782200616083. DOI : 10.3917/arco.debar.2016.01.

URL : https://www-cairn-info.iepnomade-1.grenet.fr/l-ecole-face-a-la-violence--9782200616083.htm.

Focus : Sortir du déni des besoins naturels, d’intimité, de sécurité des élèves Les toilettes constituent un problème récurrent qui semble insoluble en milieu scolaire, quel que soit l’âge des enfants. Les constats, décennies après décennies se répètent : Un tiers des élèves craignent d’aller aux toilettes (Guimard, Bacro, Ferriere, Florin, Gaudonville, 2016) avec des conséquences négatives sur la santé, l’hygiène, l’apprentissage et la reconnaissance du besoin d’intimité et le rapport au corps de l’autre. 72 % des établissements déclarent avoir des problèmes de dégradation des sanitaires, 62 % des problèmes d’approvisionnement en produits d’hygiène.

Or la puberté renforce le fait que les sanitaires sont des espaces sensibles voire anxiogènes pour les élèves (Hebert et Dugas, 2017) : pour les filles l’arrivée des règles rend cette question particulièrement aiguë, et taboue, et pour les garçons, sous d’autres formes notamment dans les rapports de groupes, de comparaisons, d’intimidation...

Les toilettes scolaires apparaissent comme un « lieu inadapté ». Certains chiffres sont alarmants : 4 enfants sur 10 ne vont aux toilettes à l’école qu’en dernier recours et lorsqu’ils ne peuvent pas faire autrement et la moitié d’entre eux déclarent se retenir d’aller aux toilettes à l’école231.

Les dégradations et l’approvisionnement en produit hygiéniques provoquent le mécontentement dans plus d’un établissement du second degré sur deux,232. Plus d’un tiers de chefs d’établissement considère que les toilettes sont en nombre insuffisant, et 16 % d’entre eux ont eu connaissance de problèmes d’insécurité dans celles-ci. L’étude menée auprès des élèves de deux collèges révèle notamment que les garçons ont plus peur de s’y rendre que les filles233.

Par ailleurs, les toilettes constituent aussi, à partir du collège, un espace de discipline pour les élèves, comme le souligne Anne Dizerbo, enseignante chercheuse en sciences de l’éducation : « On est dans l'injonction, notamment à partir du collège, а être autonome par rapport à ses besoins naturels. Ceux-ci ne doivent pas troubler les espaces d'apprentissage »234.

Manque d’intimité, mauvais état, nombre insuffisant, difficile d’accès en dehors des temps de récréation… les toilettes cristallisent plusieurs problématiques et sont ainsi un espace

231 Rapport Essity : https://www.essity.fr/media/communiques-de-presse/rules-at-school-double-the-penalty-for-girls/.

232 https://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2017/10/170929_Note_QdeVie_VF.pdf.

233 Hébert T. et Dugas E., 2017, Quels espaces scolaires pour le bien-être relationnel ? Enquête sur le ressenti des collégiens français, Éducation et socialisation [en ligne], n° 43|2017, mis en ligne le 1er février 2017, consulté le 8 février 2021, URL : http://journals.openedition.org/edso/1904, DOI : https://doi.org/

10.4000/edso.1904.

234 http://www.slate.fr/story/199461/regles-college-eleves-intimite-toilettes-salete-distributeurs-protections-hygieniques.

qui nécessite d’être repensé. Ainsi, lors de son rapport d’information sur les menstruations, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les femmes235 recommande d’agir pour améliorer impérativement l’état des toilettes en milieu scolaire, en s’assurant que les jeunes filles qui ont leurs règles, comme l’ensemble des élèves, disposent des produits nécessaires. Ce dernier recommande également d’intégrer de manière systématique un travail de réflexion quant à l’utilisation des sanitaires et la prise en compte des problématiques de tous les enfants, lors de la conception de nouveaux bâtiments à usage scolaire.

235 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/ega/l15b2691_rapport-information#_Toc256000038.

VII. D

U BESOIN D

UN AILLEURS POUR QUE

«

JEUNESSE SE FASSE

»

A LA CONSCIENCE DU RISQUE

« Il faut accepter le besoin des ados d'être reconnus et appréciés par les autres et d'appartenir à un groupe. »

Le collège des enfants du HCFEA, 4 mars2021 Le groupe, « les copains », le regard des autres, les relations filles-garçons, les affiliations, sont les piliers de la construction des identités sociales à la prime adolescence. Ce besoin d’affiliation et de conformité au groupe de référence, avec les règles, codes et hiérarchies de sa génération, négocie avec une autre aspiration, « être soi-même », se particulariser.

Cet ensemble permet au jeune de se sentir reconnu dans son milieu. Et, portés par ce mouvement vers le monde, filles et garçons cherchent leurs places respectives dans

« l’espace public » qui caractérise à leur yeux la liberté, leur époque et la jeunesse.

Lors de cette transition entre enfance et jeunesse, le mouvement centrifuge de l’adolescence porte vers des modèles externes via la rue, les initiations, les cultures

« jeunes » hors du regard et du contrôle familial, qui plus est avec les outils numériques dont cette génération dispose. En première ligne, la vie amicale, des passions, des initiations, mais aussi des engagements collectifs. D’où le besoin des adolescents de disposer d’espaces et de temps pour entretenir ces investissements, pour se construire, en encourageant la solidarité et la parole entre eux, les projets collaboratifs, créatifs en dehors des cadres institutionnels et familiaux et développer leur champ des possibles au profit de leur maturité. Ici se confirme la valeur déterminante de l’accès à des TLT de qualité, des temps et lieux tiers hors maison et hors école tels que proposés par le HCFEA dès 2018236.

Des filles et des garçons qui s’observent en train de grandir :

Dans le document ET DE L ’ ADOLESCENCE (Page 106-110)

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