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A PPROCHE THEORIQUE PAR LES INSTRUMENTS : STRUCTURE TERNAIRE ET APPROPRIATION DES OUTILS DE GESTION

b Asymétrie du déploiement du Système de management par la qualité par les managers et les agents

A. A PPROCHE THEORIQUE PAR LES INSTRUMENTS : STRUCTURE TERNAIRE ET APPROPRIATION DES OUTILS DE GESTION

L’approche théorique par les instruments est marquée par la rupture classique entre la conception et les usages des outils de gestion. Depuis la décennie 1990, la vision portée sur les outils de gestion a connu une évolution marquante. Initialement centrées sur une vision « représentationniste » des outils (Lorino, 2005), les approches théoriques reposent à présent sur une vision sociocognitive. Les outils de gestion sont alors perçus comme une représentation du réel. Ils sont aussi considérés comme un vecteur d’apprentissage. En se centrant sur les usages des outils de gestion, plusieurs chercheurs proposent de dépasser l’opposition conception-usage et de s’intéresser à :

- la conception à l’usage (Lorino et Teulier, 2005 ; de Vaujany et Grimand, 2005 ; Bourmaud et Rétaux, 2002) ;

- la dynamique continue de l’action collective (Lorino, 2005) ;

1. La structure ternaire des outils de gestion

Hatchuel et Weil (1992) ont montré que les outils de gestion sont constitués de trois éléments en interaction dans leur mise en œuvre, le substrat technique, une philosophie gestionnaire et une vision simplifiée de l’organisation (simplification du système des rôles). Ainsi, selon Boussard et Maugeri (2003), les dispositifs de gestion doivent être compris comme une articulation d’objets mais aussi de « niveaux de réalité ». La nature complexe et stratifiée des dispositifs de gestion se traduit par l’entrelacement des dimensions discursives, mélange de représentations et de constructions symboliques, et des dimensions concrètes, mélange d’outils de nature et d’étendue variables.

Le substrat technique est l’élément concret véhiculant des symboles de représentation sur lequel est établi l’instrument et lui permettant de fonctionner (Martineau, 2008). Il s’agit de « l’abstraction qui permet à un outil de gestion de fonctionner » (David, 1996). La question qui en émerge est : Comment le Système de management de la qualité est-il mis en pratique ? Est-ce de l’appropriation ou une stratégie de contournement ? En plus de constituer un élément diffuseur de la stratégie de la direction, l’outil de gestion est un vecteur controversé d’apprentissage, ce qui souligne sa dimension de substrat technique. Dans le cadre de la démarche qualité de Pôle emploi, le substrat technique du Système de management par la qualité renferme des objets divers et des abstractions tels que les mesures d’évaluation (indicateurs, contrôle interne), bases de connaissances dans l’intranet, repères des contenus des activités avec les fiches processus, les fiches de bonnes pratiques pour rendre plus productives les pratiques d’usages à l’image de l’organisation scientifique du travail de Taylor, etc.)

La philosophie gestionnaire correspond à l’esprit dans lequel le maniement de l’outil est envisagé (Martineau, 2008). Il s’agit du « système de concepts qui désigne les objets et les objectifs qui forment la cible de la rationalisation » (Hatchuel et Weil, 1992). La question qui en émerge est : Comment Pôle emploi articule-t-il ce Système de management par la qualité avec sa stratégie ? La gestion est un véritable enlacement de niveaux discursifs formulant des principes généraux, une philosophie, des représentations conceptuelles ou symboliques de l’organisation en plus du niveau technique, mélange de savoirs théoriques, pratiques et d’outils les incorporant (Boussard, 2008). La philosophie gestionnaire est ce qui confère à l’outil de gestion une signification gestionnaire (David, 1996). L’outil de gestion est donc perçu par certains auteurs comme permettant de déployer un mode de gestion favorisant le déploiement de la stratégie de la direction,

d’autres le considèrent comme un élément de mise sous contrôle des activités et des actes métiers des salariés.

S’agissant de la troisième dimension de l’outil de gestion, la vision simplifiée, elle permet d’entrevoir les principaux acteurs et leurs rôles autour de l’instrument. La vision simplifiée d’une organisation, c’est la « scène primitive » associée à l’outil et qui lui confère une « vertu mobilisatrice » (Hatchuel et Weil, 1992). La question qui en émerge est : comment le Système de management par la qualité peut-il contribuer à redéfinir ou coproduire les identités professionnelles et fonder une culture commune ? Selon Berry (1983), en analysant de l’intérieur un outil de gestion, les travaux menés contribuent à la construction des rapports sociaux dans les organisations, à partir des représentations et significations cristallisées en eux : c’est donc une vision simplifiée de l’organisation. En codant et simplifiant le réel, les outils de gestion déterminent des jeux d’acteurs qui se développent selon les logiques implicites imposées par ceux-là. Tout outil de gestion articule des objets et des discours. Tout au long de leur histoire, les outils de gestion font l’objet de succès, d’échec, de traductions, d’adoptions et d’adaptations. Ils sont représentés en idéal d’ordre et de rigueur. Pourtant, en décomposant leur construction, leur développement et leur utilisation, tout cela peut être démystifié (Boussard et Maugeri, 2003). L’outil de gestion est également porteur des objectifs de l’institution et donc du discours de la direction. Cette articulation d’objets et de discours permet d’orienter l’action collective vers les objectifs de performance recherchés.

Les outils de gestion sont aussi le théâtre de jeux d’interactions, de pouvoir et d’interdépendance. Dans la perspective interprétativiste où nous nous inscrivons, la structure organisationnelle n’existe pas indépendamment de la conscience humaine et des interactions sociales. Les réalités organisationnelles émergent au travers du travail et des interactions que les individus ont avec les autres et avec les ressources matérielles qui les entourent. Les structures sont perçues comme des créations humaines et constituent des projets en cours d’élaboration qui émergent des interactions sociales et d’une production collective de sens (Hatch et Cunliffe, 2009). Selon Weick (1979), les structures sociales sont des systèmes voués à l’organisation et au contrôle des interactions et des relations sociales. Ce sont les pratiques quotidiennes des membres de l’organisation qui construisent les véritables modèles d’organisations qui guident les actions.

A Pôle emploi, la démarche qualité vise à rechercher une amélioration du fonctionnement du Système de management par la qualité en rationalisant les relations des acteurs dans une vision simplifiée des relations organisationnelles.

La structure ternaire de l’outil associée à une contextualisation de son déploiement, permettent de se pencher sur la dynamique de l’outil en question. Le schéma qui suit, inspiré des travaux de Oiry (2010), permet de définir les axes de recherche de l’étude.

Schéma 9 : Représentation des axes de recherche.

Source : les travaux d'E. Oiry en 2010 sur la dynamique des instruments de gestion

En référence aux travaux de Oiry (2010), cette schématisation permet de remonter dans le processus de recherche jusqu’à l’idée de départ qui a reposé sur le secteur public en quête de performance à l’appui d’outillage de gestion. Dans ce contexte, le questionnement part de l’articulation entre l’outil de gestion et l’action collective dans les organisations de ce secteur. En s’interrogeant sur la mise en acte des outils de gestion, l’interrogation glisse vers les dimensions de légitimité et d’appropriation de l’outil de gestion dans l’organisation, à l’usage des acteurs. Les ajustements susceptibles de s’opérer se traduisent par une régulation conjointe entre les acteurs et les règles de l’organisation. Le questionnement sur les effets de l’outil sur l’organisation et les acteurs nous ramène à deux

Donne des éléments pour

comprendre Outil Système de management par la

qualité :

Référentiel des activités métiers (managers)

Engagements de service aux clients (agents)

Questionnements pour

Ce e et o p e d e les effets de l’outil SMQ su les di e sio s : - Organisationnelles (dynamiques de changement,

d’i ovatio

- Processuelles (adaptation, apprentissage) - Institutionnelles (légitimité)

Interrogation de départ : Articulation entre les outils de gestion

et l’a tio olle tive da s u environnement fortement institutionnalisé (secteur public)

Cad e d’a al se de la ise e a te des outils de gestio à l’usage Les instruments donnent-ils du se s à l’a tio olle tive

(identités professionnelles, culture commune) pa des appo ts de l giti it , d’app op iatio et d’ajuste ents

ip o ues ave l’o ga isatio et les a teu s

Permet de réinterpréter

dimensions supplémentaires de l’ordre de l’adaptation et de l’apprentissage dans le processus d’implantation de l’outil de gestion Système de management par la qualité.

Ensemble, ces cinq dimensions que sont la régulation, l’appropriation, la régulation, l’adaptation et l’apprentissage constituent un fil conducteur théorique de nos investigations auprès des acteurs dans la collecte de données discursives. Le guide des entretiens est établi à partir des questions de recherches et des cinq dimensions de la diffusion du changement par l’outil de gestion qualité. Ces concepts théoriques doivent permettre, à l’appui du questionnaire semi-directif, de valider ou infirmer le cadre théorique. Ainsi, l’encadré qui suit permet de faire ressortir les dimensions préalablement définies pour le questionnaire semi-directif : adaptation, apprentissage, appropriation, légitimation, régulation. La philosophie gestionnaire du Système de management par la qualité veut garantir la qualité du service rendu en le légitimant auprès des personnels et en le valorisant auprès des partenaires de l’institution. Pour ce faire, les processus métiers doivent s’adapter et apprendre. Une régulation doit s’opérer progressivement en interne au niveau des différents services supports et de production autour de valeurs et d’engagements de service réciproques.

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