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Polynômes de Legendre

Dans le document ANALYSE HILBERTIENNE (Page 72-82)

Prenons I = (−1,1) et ω = 1. La famille {xn; 0≤ n} est totale dans l’espace de Hilbert L2(I;dx) et le procédé d’orthogonalisation de Gram-Schmidt donne

p0(x) = 1,

p1(x) =x, car h1, xi= 0

p2(x) =x2−1/3, car h1, x2i= 1/3, k1k2 = 2 et hx, x2i= 0 p3(x) =x3−(3/5)x, car hx, x3i= 2/5 et kxk2 = 2/3

La formule suivante, dite formule de Rodrigues, donne l’expression de pn

pour tout entier n≥0.

Théorème 2.4.1. Pour tout entiern, pnest un polynôme unitaire de degré n et on a

pn(x) = n!

(2n)!

dn

dxn (x2−1)n

Démonstration. Il est clair que la formule de Rodrigues est vraie pour p0

et p1. D’autre part, comme (x2 −1)n est un polynôme de degré 2n, sa dérivée d’ordre n est un polynôme de degré n, qui a la même parité que n et on vérifie facilement que le coefficient n!/(2n)! a été choisi de façon que son terme de plus haut degré soit xn. Compte tenu de l’unicité, il reste à démontrer que les polynômes définis par le second membre sont orthogonaux deux à deux, ce que l’on vérifie par intégrations par parties successives. En effet, pour deux entiers n > m,

hpn, pmi= (n!)(m!) (2n)!(2m)!

Z 1

−1

dn

dxn (x2−1)n dm

dxm (x2−1)m dx

= (−1)n (n!)(m!) (2n)!(2m)!

Z 1

−1

(x2−1) dn+m

dxn+m (x2−1)m dx

= 0, car n+m >2m

La formule de Rodrigues est ainsi prouvée.

Notons que pour tout n, pn(1) = 2n(n!)2/(2n!).

Les polynômes de Legendre7, que nous désignerons dans la suite par une

7Adrien Marie Legendre (1752-1833), mathématicien français né et mort à Paris. Le premier ouvrage qui rendit célèbre Adrien Marie Legendre a pour titre “Eléments de géométrie” (1794). Il représente un des premiers essais de formalisation rigoureuse de la géométrie, et il devait exercer une très grande influence sur les mathématiciens de son temps (vingt éditions de son vivant). Mais Legendre n’est pas uniquement connu comme géomètre et les domaines de ses recherches furent des plus variés : équations différentielles, calcul numérique, théorie des fonctions, théorie des nombres. Il a introduit les polynômes qui portent son nom en 1785, pour résoudre l’équation de Laplace en coordonnées sphériques.

lettre majuscule Pn, sont proportionnels aux polynômes pn et normalisés

Démonstration. En effet, un calcul simple d’intégrales donne Z 1

oùRn est un polynôme de degré strictement plus petit quen, on en déduit que hPn, Rni= 0 et par suite Le théorème 1.4.7 (chapitre I) s’énonce comme suit

Théorème 2.4.3. La suite des polynômes de Legendre (Pn) est une base orthogonale de l’espaceL2((−1,1), dx). Toute fonctionf deL2((−1,1), dx) se développe de façon unique sous la forme

f = où la convergence de la série a lieu en moyenne quadratique

Nlim→∞

0

5

4 6

1 1

Fig.2.7 – On a de plus l’égalité de Parseval

Z 1

−1|f(x)|2dx = 2

X

n=0

|cn(f)|2 2n+ 1

On notera que le polynôme de Legendre de f, de degré n, donné par

Lnf(x) =

n

X

k=0

ck(f)Pk(x)

réalise la meilleure approximation en moyenne quadratique de f par des polynômes de degré inférieur ou égal à n.

On notera aussi que si f est paire (resp. impaire), son développement ne fera intervenir que les polynômes de Legendre d’indice pair (resp. impair).

Exemple 2.4.4. - Considérons la fonction f(x) = |x|. C’est une fonction paire. Son développement ne fera intervenir que les polynômes de Legendre d’indice pair et est donc de la formeP

n=0c2nP2n. En utilisant la parité et

la formule de Rodrigues, on a

La première intégrale du dernier membre est nulle alors que la deuxième donne

En développant (x2−1)2n suivant la formule du binôme, on montre que le seul terme qui contribue dans le calcul dec2nest celui pour lequelk =n+1, d’où

Par exemple la meilleure approximation en moyenne quadratique de|x|par des polynômes de degré inférieur ou égal à 6 est donnée par le polynôme

L6f(x) = 1

Exemple 2.4.5. - Considérons la fonction f définie par

f(x) =

C’est une fonction impaire et son développement ne fera intervenir que les polynômes de Legendre d’indice impair. Calculons son polynôme de

0.2 0.4 0.6 0.8 1

-1 1

Fig.2.8 – Legendre de degré 5 :

c1(f) = 3 2

Z 1

−1

f(x)P1(x)dx= 3 Z 1

0

x dx= 3 2 c3(f) = 7

2 Z 1

−1

f(x)P3(x)dx= 7 2

Z 1 0

(5x3−3x)dx=−3 2 c5(f) = 11

2 Z 1

−1

f(x)P5(x)dx= 11 8

Z 1 0

(63x5−70x3+ 15x)dx= 11 16 On en déduit que L5 est donné par

L5f(x) = 3

2P1(x)−7

8P3(x) + 11 16P5(x)

Sur la figure 2.9 on a représenté les graphes de f, de L5f et de L7f. Nous dégageons maintenant les principales propriétés des polynômes de Legendre.

Proriétés des polynômes de Legendre

(1) Parité. Pour tout entier natureln et pour tout x, on a Pn(−x) = (−1)nPn(x), en particulier Pn(−1) = (−1)n C’est une conséquence du corollaire 1.8.

7 5

1

-1

-1 1

Fig.2.9 –

Ainsi pour n pair, Pn(x) ne contient que des puissances paires de x et pourn impair,Pn(x) ne contient que des puissances impaires dex.

(2) Représentation intégrale et majoration de Pn. Pour tout entier n, on a

Pn(x) = 1 2π

Z 0

(x+i√

1−x2sinθ)ndθ, en particulier |Pn(x)|<1 pour toutx dans l’intervalle ]−1,1[.

Ce résultat, souvent employé dans les applications, est une conséquence de la formule de Rodrigues que l’on écrit, grâce à la formule de Cauchy, sous la forme

Pn(x) = 1 2n

1 2πi

Z

γ

(z2−1)n (z−x)n+1 dz oùγ désigne le cercle de centrexet de rayon√

1−x2. La représentation in-tégrale s’obtient alors en faisant, dans l’inin-tégrale précédente, le changement de variable z =x+i√

1−x2e. De plus, puisque

|x+i√

1−x2sinθ|2 =

x2 + (1−x2) sin2θ2

≤1 on en déduit la majoration |Pn(x)≤1, pour tout −1≤x≤1.

(3) Relation de récurrence.

n+ 1

2n+ 1Pn+1(x) + n

2n+ 1Pn−1(x) =xPn(x)

Pour démontrer cette relation on remarque quexPn(x)est un polynôme de degré n+ 1 et admet donc un développement sous la forme

xPn(x) = X

j≤n+1

anjPj(x) avec anjkPjk2 =hxPn, Pji

Comme anjkPjk2 =ajnkPnk2, il en résulte que anj = 0 pour j < n−1(et pour j > n+ 1). En posant ann+1 = αn, ann = βn et ann−1 = γn, on en déduit que

xPn(x) =αnPn+1(x) +βnPn(x) +γnPn−1(x)

En examinant la parité des deux membres, on voit queβn= 0 et en faisant x = 1, il vient αnn = 1. Enfin, en comparant les termes de plus haut degré dans chacun des deux membres, on trouve

(2n)!

2n(n!)2n

(2n+ 2)!

2n+1((n+ 1)!)2 d’où il résulte que

αn= n+ 1

2n+ 1 et par suite γn = n 2n+ 1 ce qui termine la preuve.

(4) Fonction génératrice.

√ 1

1−2xt+t2 =

X

n=0

Pn(x)tn, |t|<1,|x| ≤1

On désigne le premier membre par u(x, t)et le second membre par v(x, t).

On a

ut(x, t) =−1

2(1−2xt+t2)32(−2x+ 2t) = (x−t)(1−2xt+t2)32 oùut désigne la dérivée partielle de u par rapport àt. Il en résulte que

(1−2xt+t2)ut(x, t) = (x−t)u(x, t)

D’autre part, puisque |Pn(x)| ≤1, pour toutn ∈N et toutx∈[−1,1], on peut dériver par rapport à t terme à terme la série du second membre. Il vient

vt(x, t) =

X

n=1

nPn(x)tn−1

On en déduit que

(1−2xt+t2)vt(x, t) =

X

n=1

nPn(x)tn−1

X

n=1

2xnPn(x)tn

+

X

n=1

nPntn+1

Le coefficient de tn dans le second membre de l’égalité ci-dessus est (n+ 1)Pn+1(x)−2xnPn(x) + (n−1)Pn−1(x), il est justement égal à xPn(x)− Pn−1(x)d’après la formule de récurrence. Par suite

(x−t)v(x, t) = (1−2xt+t2)vt(x, t)

Ainsi, les fonctions u et v vérifient, par rapport à t, la même équation différentielle (de degré 1) ; comme elles coïncident en t= 0, elles sont donc égales.

(5) Équation différentielle. Pour tout entier naturel n, on a (1−x2)Pn′′(x)−2xPn(x) +n(n+ 1)Pn(x) = 0

On peut établir cette équation de la manière suivante ; on part de l’égalité d

dx{(1−x2)Pn(x)}= (1−x2)Pn′′(x)−2xPn(x)

Le deuxième membre est un polynôme de degrén, on peut donc le décom-poser suivant la base {Pi; i≤n}

d

dx{(1−x2)Pn(x)}=

n

X

j=0

αiPi(x) (⋆)

La propriété d’orthogonalité implique αikPik2 =

Z 1

−1

Pi(x) d

dx{(1−x2)Pn(x)}dx deux intégrations par parties successives donnent

αikPik2 = Z 1

−1

Pn(x) d

dx{(1−x2)Pi(x)}dx

Or la dérivée de (1−x2)Pi(x) est un polynôme de degré i, on en déduit que αi = 0, ∀i < n et la relation(⋆)peut maintenant s’écrire

(1−x2)Pn′′(x)−2xPn(x) =αnPn(x)

En comparant les coefficients des termes de plus haut degré dans chacun des membres, on trouve immédiatementαn =−n(n+ 1). L’équation diffé-rentielle cherchée s’en déduit.

(6) Propriété de minimisation. Les polynômes de Legendre sont carac-térisés par la propriété de minimum suivante : Parmi tous les polynômes unitaires de degré n, pn (défini au théorème 4.1) est l’unique qui réalise le minimum de la distance quadratique à 0, c’est-à-dire que pour tout poly-nôme unitaire q de degré n,

Z 1

−1|pn(x)|2dx≤ Z 1

−1|q(x)|2dx et l’égalité a lieu si et seulement si q=pn.

Cela résulte du fait que tout polynôme unitaire qde degrén s’écrit sous la forme q(x) =pn(x) +Pn−1

k=0akpk, donc Z 1

−1|q(x)|2dx= Z 1

−1|pn(x)|2dx+

n−1

X

k=0

|ak|2 Z 1

−1|pk(x)|2dx

Il est alors clair que le second membre atteint son minimum lorsque ak= 0 pour0≤k ≤n−1.

EXERCICES

1. Soit f ∈L2(−1,1)et soitfN(x) =PN

0 anxn telle quekf−fNk2 est minimale. Montrer que

hf, Pmi= 0, ∀m > N 2. Montrer que hxPn, Pni= 0 pour tout entier n.

Solution. CommePn a la parité de n, le polynômexPn2(x)est impair et son intégrale sur [−1,1] est donc nulle.

3. Trouver la constante an de façon que

xn=anPn(x) +Qn−2(x)

oùQn−2 est un polynôme de degré inférieur ou égal à n−2.

En déduire que

hxn, Pni= 2n+1(n!)2

(2n+ 1)!, hxPn−1, Pni= 2n

(2n+ 1)(2n−1)

Solution.L’expression dexnrésulte du fait que le coefficient du terme de plus haut degré dans l’expression de Pn(x) est (2n)!/(2n(n!2)), et

des considérations de parité. Compte tenu de l’orthogonalité, on en déduit que

hxn, Pni= 2n(n!)2

(2n)! kPnk2 = 2n+1(n!)2 (2n+ 1)!

La relation de récurrence que vérifient les polynômes de Legendre, permet d’écrire

hxPn−1, Pni=hPn−1, xPni= n

2n−1kPnk2 Le résultat se déduit alors du théorème 4.2.

4. Soit f une fonction de L2(−1,1) et désignons par cn(f) ses coeffi-cients de Legendre. Montrer que

xf(x) =

X

n=0

n+ 1

2n+ 3cn+1(f) + n

2n−1cn−1(f) Pn(x) 5. Par intégration par parties, montrer que

hPn+1 , xmi= 1 + (−1)m+n, m−1< n+ 1 En déduire que

hPn+1 −xPn, xmi= 0, 0≤m < n et conclure qu’il existecn, que l’on calculera, tel que

Pn+1 −xPn =cnPn

6. En utilisant l’expression de la fonction génératrice des polynômes de Legendre, montrer l’égalité suivante

√ 2

5−4x =

X

0

1 2nPn(x)

Solution. Il suffit de poser t = 1/2 dans l’expression de la fonction génératrice des polynômes de Legendre.

7. Montrer que les relations suivantes ont lieu pour tout|t|<1 : Z 1

−1

√ dx

1−2xt+t2 = 2, Z 1

−1

√ xdx

1−2xt+t2 = 2 3t Z 1

−1

x4dx

√1−2xt+t2 = 1

315(16t4 + 72t2+ 126)

8. En utilisant la formule de récurrence vérifiée par les polynômes de Legendre, montrer la formule suivante dite de Christoffel-Darboux

n

X

k=0

(2k+ 1)Pk(x)Pk(y) = (n+ 1)Pn+1(x)Pn(y)−Pn+1(y)Pn(x) x−y

On pose Kn(x, y) = 12Pn

k=0(2k + 1)Pk(x)Pk(y) . Montrer que la fonction y 7→ Kn(x, y) est d’intégrale 1. Le noyau Kn est à rappro-cher du noyau de Dirichlet. Montrer que pour toute fonction f ∈ L2((−1,1), dx), le polynôme de Legendre de degré n def est donné par

Lnf(x) = Z 1

−1

f(y)Kn(x, y)dy

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