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Polynômes de Chebyshev

Dans le document ANALYSE HILBERTIENNE (Page 64-72)

L’application θ 7→ cosθ est une bijection continue de (0, π) sur (−1,1) et donc à chaque fonctionF continue sur(0, π)on associe de façon univoque la fonction f continue sur(−1,1)par la relation

F(θ) =f(x) avec x= cosθ De plus

Z π

0 |F(θ)|2dθ = Z 1

−1|f(x)|2 dx

√1−x2

On en déduit, (voir le théorème de prolongement en annexe), que l’applica-tion qui à une foncl’applica-tion F de C(0, π) fait corres-pondre la fonction f de C(−1,1), se prolonge en une bijection isométrique de l’espace de Hilbert L2((0, π), dθ) sur l’espace de Hilbert L2((−1,1), ω(x)dx) des (classes de) fonctions de carré sommables sur(−1,1)pour la mesure de densitéω(x) = 1/√

1−x2 par rapport à la mesure de Lebesgue, c’est-à-dire vérifiant kfk2ω =

Z 1

−1|f(x)|2 dx

√1−x2 <∞ Le produit scalaire associé sera notéh,iω :

hf, giω = Z 1

−1

f(x)g(x)

√1−x2dx, pour f, g∈L2((−1,1), ω(x)dx)

On est en situation d’appliquer les résultats du paragraphe 1. La famille {1, x, . . . , xn, . . .}est totale dans l’espace L2((−1,1), ω(x)dx)et le procédé d’orthogonalisation de Gram-Schmidt permet d’en fabriquer une base hil-bertienne. Cependant, l’isomorphisme mis en évidence plus haut permet de retrouver rapidement cette base hilbertienne, en effet les fonctions définies par φn(θ) = cosnθ forment une base orthogonale deL2((0, π), dθ)et on a

Z π 0

φn(θ)φm(θ)dθ =

((π/2)δnm, sin, m6= 0; πδ0n, sinon.

Il en résulte que les fonctions Tn(x) = cos(narccosx) forment une base orthogonale de L2((−1,1), ω(x)dx) et on a

hTn, Tmiω = π

nm si n, m6= 0 hTn, T0iω =πδ0n n ≥0

On sait que cosnθ s’exprime par un polynôme en cosθ. Il en résulte que

Le développement d’une fonction f de L2((−1,1), ω(x)dx) suivant cette base s’écrit 1.4.7 (chapitre I), on peut énoncer :

Théorème 2.3.1. La suite des polynômes de Chebyshev(Tn) est une base orthogonale de l’espace L2((−1,1), ω(x)dx) et pour tout f dans cet espace, on a

On peut en déduire la propriété de minimisation suivante.

Corollaire 2.3.2. Soit f ∈ L2((−1,1), ω(x)dx). Dans l’espace vectoriel des polynômes P d’une variable réelle et de degré inférieur ou égal àn ≥0, le polynôme

Démonstration. Les polynômes Tn étant deux à deux orthogonaux, avec degTn =n pour tout n, on en déduit que {T0, T1, . . . Tn} est une base de l’espace vectoriel des polynômes de degré inférieur ou égal àn. Le polynôme Tnf n’est autre que la projection orthogonale def sur cet espace vectoriel.

6Le mathématicien russe Pafnoutiy Lvovitch CHEBYSHEV (1821-1894) a contribué à la Théorie Constructive des Fonctions et l’étude des Probabilités. Ses travaux sur la Théorie de l’Approximation restent des classiques de ce sujet.

-1

1 0

1

4

2

3

-1 1

Fig.2.4 –

Exemple 2.3.3. -Soitf la fonction définie pourxdans(−1,1)parf(x) =

√1−x2. Considérons l’approximation de f par des sommes partielles de son développement suivant les polynômes de Chebyshev. Après changement de variables, on trouve hf, T0i= 2 et pour n≥1

hf, Tniω = Z π

0

sinθcosnθ dθ =

(2/(1−n2), si n est pair ;

0, sinon.

Le développement de f en série suivant les polynômes de Chebyshev est donc

2 π − 4

π

X

n=1

1

4n2−1T2n(x)

Une application de la formule de Parseval donne dans ce cas π2

8 = 1 + 2

X

n=1

1 (4n2−1)2

Les premières approximations de f dans L2((−1,1), ω(x)dx)sont : T0f(x) = 2

π, T2f(x) = 2

3π(5−4x2), T4f(x) = 2

15π(23−4x2−16x4), etc...

-1 1 1

Fig.2.5 –

Nous avons représenté sur la figure 2.5 les graphes def, de T2f et de T4f. Exemple 2.3.4. - Considérons maintenant la fonction f définie par

f(x) =





−1, pour−1≤x <0; 0, pourx= 0; 1, pour0< x <1.

Il est facile de voir que pour tout entier n≥0,

hf, T2ni= 0 et hf, T2n+1i= (−1)n 2 2n+ 1

Le développement en série de f suivant les polynômes de Chebyshev est donc

4 π

X

n=0

(−1)n

2n+ 1T2n+1(x)

La figure 2.6 représente le graphe de f et les graphes de T5f etT11f indi-qués respectivement par 5 et 11. On remarque que dans l’exemple 3.3, le développement en série ne contient que les polynômes de Chebyshev d’in-dice pair, alors que celui de l’exemple 3.4 ne contient que ceux d’ind’in-dice impair. Cela tient au fait que les fonctions considérées sont respectivement paire et impaire et au fait que Tn a la parité de n.

11 5

-1 1

-1 1

Fig.2.6 –

A présent, nous allons dégager les principales propriétés des polynômes de Chebyshev, dont certaines ont un caractère général (voir le paragraphe 1 de ce chapitre).

Proriétés des Polynômes de Chebyshev (1) Parité. Pour tout n∈N, on a :

Tn(1) = 1 et Tn(−x) = (−1)nTn(x)

(2) Relation de récurrence. De l’identité trigonométrique cos(n+ 1)θ+ cos(n−1)θ = 2 cosθcosnθ

on déduit que les polynômes de Chebyshev vérifient la relation de récurrence suivante

Tn+1(x) +Tn−1(x) = 2xTn(x)

Cette relation montre que le coefficient dexn dans l’expression deTn(x)est 2n−1. Elle permet aussi de calculer Tn par récurrence à partir deT0(x) = 1 etT1(x) =x.

(3) Fonction génératrice. On cherche une fonction de deux variables (x, z)telle que

G(x, z) =

X

n=0

Tn(x)zn

En posant x= cosθ, on a G(x, z) = 1

2

X

0

eimθ+e−imθ

zm, |z|<1

= 1 2

1

1−ez + 1 1−e−iθz

G(x, z) = 1−xz 1−2xz+z2

(4)Équation différentielle. Pour toutn∈N, le polynôme de Chebyshev Tn vérifie l’équation différentielle du second ordre suivante

(1−x2)Tn′′−xTn +n2Tn= 0

Pour le voir, il suffit de poser x= cosθ et d’utiliser le fait que la fonction cosinus vérifie cos′′(nθ) +n2cosnθ= 0.

(5) Racines et extremums de Tn. Les racines de Tn se calculent facile-ment. En effet, puisque cos(nx) = 0 si x= (2k−1)π/(2n),

xk = cos

2k−1 2n

π, avec 1≤k≤n

sont les n racines de Tn. Elles sont toutes réelles, simples, distinctes et appartiennent à l’intervalle [−1,1]. D’autre part, la relation

Tn(x) = n

√1−x2 sin(narc cosx)

montre que Tn(x) = 0 si x = xk = cos(kπ/n), où 1 ≤ k ≤ n−1. On en déduit rapidement queTnatteint ses extremums sur l’intervalle[−1,1], aux points xk et qu’en ces points

Tn(xk) = coskπ= (−1)k, 1≤k ≤n−1 de plus

Tn(x0) =Tn(1) = 1 et Tn(xn) =Tn(−1) = (−1)n

On peut remarquer que les racines de Tn sont symétriques par rapport à 0 et que pourn grand, elles sont plus denses aux extrémités qu’au centre de l’intervalle[−1,1]. Ces racines sont souvent utilisées comme points d’inter-polation pour des fonctions continues sur [−1,1].

(6) Propriété de minimisation. Les polynômes de Chebyshev jouent un rôle important en théorie de l’approximation. Cela tient à ce que, comme

l’a montré Chebyshev, ce sont là les polynômes s’écartant le moins de zéro sur le segment[−1,1]. Autrement dit, si l’on désigne par Pn l’ensemble des polynômes de degré n unitaires (c’est-à-dire dont le terme de plus haut degré est xn), on a

∀q ∈ Pn, sup

|x|≤1|q(x)| ≥ sup

|x|≤1

1

2n−1|Tn(x)|= 1 2n−1

EXERCICES

1. En se reportant aux expressions des polynômesT0,T2 etT4, montrer par substitution que le monômef(x) =x4 s’écrit

x4 = (3/8)T0(x) + (1/2)T2(x) + (1/8)T4(x)

En déduire sans calcul les quantitéshf, Tni, pour 0≤n ≤4. Trouver la combinaison linéaire P = c0T0 + c1T1 + c2T2 + c3T3 qui réalise la meilleure approximation en moyenne quadratique du monôme x4 dans l’espaceL2((−1,1),(1−x)−1/2dx).

2. Soit f la fonction définie parf(x) = |x|. Montrer quehf, T0i = 2 et que pour n≥1,

hf, Tni=

((−1)k4k22−1, sin = 2k; 0, sin = 2k+ 1.

En déduire le développement en série de|x|suivant les polynômes de Chebyshev et montrer que la convergence versf a lieu non seulement dans l’espace de HilbertL2((−1,1), ω(x)dx), mais aussi uniformément sur(−1,1).

3. Soit f(x) = xn. Calculer le produit scalaire hf, Tki. Montrer que xn = 1

2n−1

Tn(x) + n

1

Tn−2+ n

2

Tn−4+· · ·

le dernier terme dépendant de la parité de n.

Solution.On part de la relation(cosθ)n= (e+e−iθ)net on développe le second membre grâce à la formule du binôme.

4. Démontrer la relation suivante (dite relation de Dirichlet) 1

2 +T1(x) +· · ·+ 1

2Tn(x) = Tn(x)(1 +x) 2n

Solution. Posonsx= cosθ et désignons le premier membre par S(x),

il vient

S(x) = 1 + cosnθ 2 +ℜe

e1−ei(n−1)θ 1−e

= 1 + cosnθ

2 + (cosθ−1−cosnθ+ cos(n−1)θ) 2(1−cosθ)

= cos(n−1)θ−cosθcosnθ

2(1−cosθ) = (1 + cosθ) sinnθ 2 sinθ

D’autre part, en tenant compte de la relation x = cosθ, on voit que Tn(x) = nsinnθ/sinθ. La relation cherchée s’en déduit alors immédiatement.

5. Soit Tn le polynôme donné par Tn= (1/2n−1)Tn, n ≥1.

(a) Montrer que Tn est un polynôme unitaire de degré n.

(b) Montrer que le maximum de|Tn(x)|sur[−1,1]est égal à1/2n−1 et que ce maximum est atteint(n+ 1) fois aux points xk= coskπ/n, k = 0,1. . . , n.

(c) Montrer que pour tout polynôme punitaire et de degré n sup

|x|≤1|p(x)| ≥ sup

|x|≤1

1 2n−1

6. Les polynômes de Chebyshev de second espèce sont définis par Un(x) = sin(n+ 1)θ

sinθ , x= cosθ, n= 0,1. . . Démontrer que Un(x)est un polynôme de degré n et que l’on a

Z 1

−1

Um(x)Un(x)√

1−x2dx= π 2δmn Un+1(x) +Un−1(x) = 2xUn(x), n≥1.

Solution. Compte tenu du changement de variables x = cosθ, on peut voir que Tn(x) = nsinnθ/sinθ. En développant le numérateur de l’expression définissant Un, on voit que

Un(x) = sinnθ

sinθ cosθ+ cosnθ = 1

nxTn(x) +Tn(x)

Il est alors évident que Un est un polynôme de degré n. Les autres propriétés se démontrent facilement.

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