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1.2 Propriétés des polyépoxydes

1.2.3 Diluant réactif

1.2.4.2 Polyétherimide (PEI)

Le polyétherimide communément appelé PEI, est classé comme un polymère de haute performance. C'est un thermoplastique amorphe de très haute Tg avec d'excellentes propriétés mécaniques jusqu'à plus de 200°C. Il est l'un des thermoplastiques les plus employés pour le renforcement des polyépoxydes notamment dans les composites pour l'aéronautique et l'aérospatiale. Le PEI commercial Ultem® 1000 a donc été testé afin d'améliorer la ténacité de nos formulations.

Il est obtenu sous forme de granulés transparents ambrés. Afin d'étudier ses propriétés, une plaque de PEI de 2 mm d’épaisseur a été fabriquée par thermocompression des granulés à 50 bars entre des plateaux chauffés à 250°C pendant 5 minutes. Les éprouvettes de traction et de perméation ont été poinçonnées à l'emporte pièce dans la plaque. Les propriétés chimiques, thermiques, mécaniques et barrière du PEI ont été analysées et sont récapitulées dans le Tableau 36.

Les valeurs de Tg et de densité obtenues correspondent parfaitement aux valeurs commerciales. Les masses molaires sont relativement faibles en raison d'une synthèse par polycondensation. Les mesures de perméation à l’hydrogène indiquent que le PEI est nettement plus perméable que le PEA6. En effet, le coefficient de solubilité est approximativement multiplié par 10, celui de diffusion par 2 et celui de perméation par 20. Cette nette différence peut s’expliquer par le fait que le PEI est complètement amorphe et moins hydrophile que le PEA6. En effet, le taux à saturation en eau du PEI n’est que de 1,25% (23°C, 50% RH). De même, le PEI s’avère bien plus perméable que les polyépoxydes analysés.

Méthodes d’analyse Propriétés Valeur mesurée

DSC Tg 216°C

Balance de Mohr Densité 1,27

SEC (dichlorométhane) Mn 26 kg/mol Mw 47 kg/mol Ip 1,8 Perméation H2 Pe 35.10-16 mol.m-1.Pa-1.s-1 D 6,5.10-11 m²s-1 S 5,5.10-5 mol.m-3.Pa-1 Traction uniaxiale E 3200 ± 100 MPa σY 102 ± 7 MPa εY 5,6 ± 0,4 % σR 80 ± 10 MPa εR 8 ± 1 %

Tableau 36 : Propriétés analysées du PEI utilisé comme agent renforçant

Les valeurs de module et de contraintes à l’écoulement et à rupture sont très proches des valeurs données par le fournisseur (3200, 105 et 85 MPa respectivement). Cependant, l’allongement à rupture mesuré paraît faible. Il est généralement enregistré vers les 60%. Cette différence peut s’expliquer par des amorces de rupture sur les éprouvettes. En effet, la plaque est très rigide et donc très difficile à poinçonner proprement. Il est inefficace d’essayer de chauffer la plaque pour l’assouplir car le PEI préserve son fort module jusqu'à sa Tg. Une autre explication possible à ce faible allongement est le mode de transformation du PEI par thermocompression. Ce procédé fortement cisaillant a pu provoquer une anisotropie dans l’orientation des chaînes macromoléculaires.

Les granulés de PEI (seulement solubles dans les hydrocarbures halogénés) sont dissous dans le dichlorométhane sous agitation à 35°C en moins d’1 heure. Le mélange est maintenu dans un bécher fermé afin d’éviter l’évaporation du solvant (Téb = 40°C). Quand la solution est de couleur ambrée et transparente, la résine DER 332 est rajoutée au mélange dans les proportions désirées (1, 2, 5 et 10 pcr). Une fois le mélange homogénisé, le solvant est éliminé au Rotavap® dans un bain marie à 70°C. Aucune évolution n’est constatée sur la Tg de la résine car le PEI n’est miscible qu’au-delà de l’UCST (upper critical solution temperature). Cette UCST varie entre 40 et 50°C suivant la proportion en PEI.

La fabrication des éprouvettes à base de résine modifiée avec les différents durcisseurs s’avère difficile en raison de la haute viscosité des systèmes. En effet, les durcisseurs diminuent la miscibilité du PEI et augmente l’UCST des mélanges. Or, en dessous de cet UCST, les mélanges se présentent sous la forme d’un gel physique opaque. Ce gel ne permet pas de faire fluer la formulation aux faibles températures. Ainsi, l’homogénéité du mélange et la qualité des éprouvettes peuvent être mis en doute. Les essais ont donc été limités à des faibles taux d’incorporation. Contrairement aux formulations modifiées par le PEI rapportées dans la littérature, les notres sont trop réactives pour pouvoir élever la température afin de passer au dessus de l’UCST sans fortement activer la réaction. L’analyse rhéocinétique de ces systèmes modifiés est détaillée au prochain chapitre.

Les formulations réticulées DER 332 + MXDA et Jeffamine EDR148 modifiées à 1 pcr deviennent translucides et ne possèdent qu’une seule Tg identifiable (Tableau 37). Le faible taux d’introduction en PEI ne modifie quasiment pas la Tg∞ des deux systèmes.

Durcisseur PEI Apparence

initiale Tg (°C)

Apparence finale

MXDA 1 pcr Gel opalescent 124 Translucide

Jeffamine EDR 148 1 pcr Gel opalescent 91 Translucide

Jeffamine D400 5 pcr Gel opaque 42 / 34+212 Sédimenté

10 pcr Gel opaque 44 / 41+209 Sédimenté

Tableau 37 : Apparence et Tg des systèmes époxy à base de DGEBA modifiés par le PEI Le gel opaque formé lors du mélange avec la Jeffamine D400 est moins visqueux que pour les autres systèmes et permet d'augmenter la proportion en PEI introduit. Cependant, un phénomène particulier se produit lors de la fabrication des éprouvettes avec cette formulation. En effet, au fur et à mesure de la cuisson, une fraction de la phase riche en époxy migre hors du gel sous forme d’un liquide transparent. Cette ségrégation à grande échelle a été photographiée sur la Figure 80 une fois réticulée. Aucun changement des conditions de cuisson n'a semblé stabiliser suffisamment la dispersion pour prévenir cette migration. De toute évidence, ce phénomène n’apparait que pour cette formulation en raison de sa faible réactivité et ne saurait être évité même par rotomoulage car le cisaillement induit est bien trop faible. Un échantillon a été prélevé dans chaque zone afin d’étudier les Tg par DSC. La zone transparente ne contient qu’une seule Tg correspondant à l’époxy-amine alors que la zone opaque en contient deux : la phase riche en époxy-amine et la phase riche en PEI. La frontière très marquée entre les deux zones laisse à penser que des interactions de faibles énergies se produisent entre le précurseur et le PEI mais sont limitées à une faible proportion. Toutes les Tg mesurées s’avèrent plus faibles que pour les systèmes non modifiés. L’hypothèse la plus vraisemblable est que la migration provoque un défaut de stoechiométrie entre l’époxy et l’amine dans les deux phases.

Figure 80 : Migration observée lors de la réticulation du système DER 332 Jeffamine D400 modifié par 5 pcr de PEI

Le Tableau 38 résume les propriétés mécaniques en traction uniaxiale et la résilience (Rs) en choc Charpy sur éprouvettes non entaillées. Une diminution du module et de la contrainte d’élasticité σY est notée avec l'ajout du thermoplastique. Cette baisse de σY inversement proportionnelle à KIc peut induire une augmentation de la ténacité [KIN 80][HUA 92]. Néanmoins, à 1 pcr de PEI aucun effet n’est noté sur la résilience. De plus, les faciès de rupture sont quasiment identiques aux systèmes non modifiés DER 332 MXDA ou Jeffamine EDR 148 (Figure 81). En ce qui concerne le système DER 332 Jeffamine D400 induisant une ségrégation par migration de la phase riche en époxy, la résilience augmente nettement. Le faciès de rupture montre d’ailleurs une augmentation de la rugosité dans la zone riche en PEI.

Durcisseur PEI E (GPa) σY (MPa) Rs (J/cm²)

MXDA 0 3,3 ± 0,1 90 ± 1 0,82 1 pcr 3,1 ± 0,1 83 ± 3 0,86 Jeffamine EDR 148 0 2,9 ± 0,1 74 ± 1 1,18 1 pcr 2,7 ± 0,1 62 ± 1 1,16 Jeffamine D400 0 3,2 ± 0,1 66 ± 1 1,33 5 pcr 2,9 ± 0,1 41 ± 3 1,48 10 pcr 3,0 ± 0,1 47 ± 3 1,45

Tableau 38 : Propriétés mécaniques des formulations époxy modifiées par le PEI

DER 332 Jeffamine D400 + 10 pcr de PEI PEI

Figure 81 : Faciès de rupture du PEI et des polyépoxydes modifiés par le PEI (traction à 1 mm/min)

Les polyépoxydes ont été modifiés par des thermoplastiques tels que le PMMA et le PEI afin d’augmenter leur ténacité. Si le PMMA est parfaitement miscible dans les systèmes initiaux étudiés, le PEI quant à lui provoque un phénomène d’UCST limitant son taux d’incorporation. Le PMMA sépare de phase pendant la réaction de polycondensation ce qui induit des morphologies nodulaires micrométriques avec la mise en évidence d’une sous–structure plus complexe. A faible concentration en PEI, aucune séparation de phase a été observée dans les systèmes DGEBA + MXDA ou Jeffamine EDR148. Cependant, pour le système peu réactif DER 332 Jeffamine D400, la phase riche époxy suinte hors du gel initial ce qui se traduit par une ségrégation à grande échelle. Bien que la présence d’une phase dispersée induit des mécanismes de renforcement de la ténacité des époxys, la haute Tg de ces thermoplastiques ne permet pas une contribution majeure sur la résistance à l’impact.