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Les machines de rotomoulage sont généralement de fabrication simple et sont contrôlées par très peu de paramètres opératoires. On peut distinguer la température du four ou du moule (pour les machines sans four), les vitesses de rotation de chaque axe et la pression interne.

2.3.1 Température

Le chauffage réel de la matière par rapport à l’énergie thermique dépensée possède un rendement faible et peut constituer le coût principal du procédé. Ce rendement est fonction de la qualité des différents transferts thermiques impliqués (convection, conduction et radiation) et sont estimés dans le Tableau 9. Le rendement est de l’ordre de 10 à 40 % pour un chauffage dans un four à convection et s’élève à plus de 80 % pour un moule équipé de canaux d’huile ou d’éléments électriques chauffants.

Source de chaleur Rendement

Four Gaz 50 %

Résistances électriques 10 à 40 %

Moule Canaux d’huile > 80 %

Eléments électriques intégrés > 80 %

Tableau 9 : Rendements des différentes sources de chaleur sur le chauffage de la matière [CRA 02]

Au-delà du coût énergétique, la source de chaleur employée ainsi que le design du moule impactent fortement l’homogénéité thermique de la matière. De manière générale, la température de la matière ne peut être gérée que par celle du moule. Or la température du four (ou du moule pour les machines sans four) est la seule contrôlable par l’opérateur. L’air interne stagnant dans la cavité du moule, étant très isolant, il apporte et extrait très peu de chaleur à la matière. La surface externe de la pièce subit alors des variations de température plus brutales que la surface interne. A contrario, pour le procédé réactif et dans le cas d'une polymérisation très exothermique, le cœur du matériau peut percevoir la plus grande variation de température. Ce phénomène limite souvent la masse injectée et exige une injection en multi-couches.

Pour le rotomoulage classique, la température du four est consignée largement au-dessus de celle désirée pour la matière. Cette différence permet d’accélérer le chauffage de la poudre chargée à température ambiante et de raccourcir les temps de cycle. Le moule est généralement sorti du four dès que l’air interne approche la température de dégradation du polymère [TCH 04’]. Les températures recommandées pour chaque polymère sont données dans le Tableau 10.

Polymère Température four (°C) Température max air interne (°C) HDPE 300 210 LDPE 275 210 XLPE 260 180 PP 325 240 PC 375 265 PVC 200 130 ABS 350 300 ETFE 325 290 PA6 325 230

Tableau 10 : Recommandations des températures du four et air interne max en fonction des polymères [CRA 93]

La température est le paramètre clé du rotomoulage car elle va déterminer la viscosité de la matière et ainsi sa capacité à fluer et se répartir sur les parois.

Pour la voie fondue, à une fréquence donnée, une température est associée à une seule viscosité. Ainsi, plus la température du polymère augmente plus sa viscosité à l’état fondu diminue. Pour les polymères de haute masse molaire, plus la fréquence de sollicitation est faible, plus la viscosité apparente est élevée (Figure 37). Comme le rotomoulage n’induit quasiment pas de cisaillement, cette viscosité est relativement élevée, stable en fréquence et ne dépend que de la température.

Dans le cas du rotomoulage réactif, il faut rajouter une nouvelle contrainte : l’exothermie de la réaction de polymérisation. En effet, cette chaleur est difficilement extractible par les parois du moule. Si elle est très élévée, le procédé devient contrôlé par l’exothermie et ne nécessite aucun apport calorifique supplémentaire. Le chauffage du moule ne sert alors qu’à activer la réaction. Attention quand même car plus l’activation est importante, plus l’exothermie est brutale.

Figure 37 : Viscosité à l’état fondu d’un polymère en fonction de la fréquence de sollicitation pour 5 températures

Cette exothermie peut provoquer de nombreuses conséquences sur le mélange réactionnel. Si la viscosité du mélange possède une thermo-dépendance élevée, la viscosité peut diminuer en dessous du seuil d’écoulement rotationnel de la matière sur le moule. Dans ce cas-là, la matière s’effondre au fond du moule et forme une flaque. Par effet de masse, l’exothermie augmente encore plus ce qui peut provoquer soit une dégradation des polymères thermosensibles soit une hausse brutale de la viscosité des polymères thermodurcissables (gélification). Dans le cas d’un thermodurcissable dont la polymérisation est très exothermique, il faut s’assurer que la viscosité du mélange ne descende jamais en deçà du seuil d’écoulement rotationnel. Si l’on ne peut éviter un tel évènement, il faut que la réaction soit suffisamment lente pour que la viscosité ne diverge pas brutalement et ainsi laisser le temps à la matière de se répartir à nouveau sur les parois du moule.

Le refroidissement est une étape clé notamment pour les polymères semi-cristallins. En effet, leurs caractéristiques mécaniques telles que le module d’Young ou la résistance à l’impact sont fortement influencées par la vitesse de refroidissement imposée pendant leur cristallisation (Tableau 11) [PIC 06].

Taille des sphérolites -

Module d’Young - Résistance à rupture - Allongement à rupture + Résistance à l’impact + Résistance à la fissuration + Transmission de la lumière +

Tableau 11 : Effet d’une augmentation de la vitesse de refroidissement sur les propriétés d’un polymère semi-cristallin

Le Tableau 12 donne les vitesses de cristallisation de polymères communs 30°C en-dessous de leur fusion [ELI 84]. On note aisément que le PE cristallise beaucoup plus vite que les autres polymères. Ainsi, il peut être refroidi à très grande vitesse sans trop

impacter la morphologie cristalline finale. Le PE rotomoulé est couramment refroidi par un spray d’eau sur le moule. Les autres polymères tendent à être refroidis plus lentement à l’air ambiant ou sous un flux d’air sur le moule.

Polymère Densité Gamme de cristallinité

(%) Vitesse de cristallisation (µm/min) PE 0,91 à 0,97 35 à 90 5000 PA 66 1,15 50 à 60 1200 PA 6 1,14 40 à 50 150 PP 0,92 à 0,94 45 à 55 20 PET 1,13 à 1,45 0 à 40 10

Tableau 12 : Propriétés de cristallisation des thermoplastiques semi-cristallins [ELI 84] Un refroidissement trop brutal sur un semi-cristallin provoque une structure macromoléculaire métastable. Si le polymère est employé au dessus de sa Tg, il verra sa morphologie évoluer vers l’équilibre. Cette post-cristallisation engendre souvent un gauchissement et une distorsion du matériau au cours du temps.

Lors du refroidissement, le gradient thermique au sein de l’épaisseur de la pièce est inévitable car la surface en contact avec le moule réagit plus vite que la surface interne écrantée par le polymère et l’air interne. Ainsi, les pièces épaisses possèdent un gradient de morphologie caractéristique. Plus on se rapproche de la surface interne, plus les sphérolites sont peu nombreuses mais de grandes dimensions car la croissance est favorisée. Inversement, en surface externe, la nucléation provoque une forte concentration de petites sphérolites [CRA 98]. Plus le refroidissement est rapide, plus le gradient thermique est important, plus ce gradient morphologique s’opère (Figure 38).

Figure 38 : Effet de la vitesse de refroidissement sur la taille des sphérolites du PP. Gauche : refroidissement à l’air, droite : refroidissement à l’eau [CRA 98]

La masse de la pièce est un paramètre fondamental directement relié à la température. En effet, plus la masse est élevée, plus elle est longue à chauffer ou à refroidir. Pour le rotomoulage classique en suivant le nombre de Fourier, le temps de chauffe et de refroidissement doit augmenter proportionnellement au carré de l’épaisseur finale du matériau.

Pour le rotomoulage réactif, ce même phénomène rentre en jeu. Cependant, il faut en plus rajouter l’effet de masse liée à l’exothermie de la réaction. En effet, l’exothermie de réaction est proportionnelle à la masse. Comme la chaleur est difficilement

extractible du cœur de la matière, elle s’accumule par auto-accélération de la réaction favorisant le risque de prise en masse de la flaque. Ainsi pour le procédé réactif, il est très difficile de prédire les temps de cycle lors d’une modification de la masse. Des augmentations de masse s’accompagnent bien souvent d’une diminution des températures de consigne afin de pouvoir dissiper la chaleur de réaction au cours du temps.

2.3.2 Vitesses des axes

La vitesse des axes est le second paramètre variable sur une rotomouleuse. Il est tout d’abord nécessaire de différencier la vitesse relative de l’axe secondaire (v2) de sa vitesse absolue (v2abs) somme de la vitesse primaire (v1) et secondaire (v2). Suivant la machine (ou l’emplacement du tachymètre), il peut être donné soit l’une soit l’autre. Le ratio des deux vitesses est toujours quant à lui calculé sur la vitesse relative tel que :

r = v1 / v2 avec v2 = v2abs – v1

L’effet de la rotation sur le procédé n’a été étudié que de façon empirique et peu d’influence lui a été accordée sur le procédé classique. D’ailleurs, les premières machines étaient vendues avec un ratio vitesse primaire sur secondaire fixé à 4 pour 1. Il a été montré par la suite que l’épaisseur répartie sur les différentes surfaces de la paroi dépendait de la régularité de chaque passage de ces surfaces dans la flaque. Aujourd’hui, toutes les machines comportent une indépendance des vitesses sur les 2 axes augmentant la versatilité des géométries des pièces. Mc Neill Akron Co a donné quelques recommandations pour les ratios suivant la forme des pièces rotomoulées (Tableau 13). Ces recommendations ne sont cependant justifiées par aucune démarche scientifique et ne s’appuient que sur l’expérience.

Ratio Forme de la pièce

8/1 Oblongues, tubes droits (monté horizontalement)

5/1 Tuyaux

4/1 Cubes, balles, boites rectangulaires

2/1 Anneau, pneus, mannequins

1/3 Parallélépipèdes, valise

1/4 Tuyaux courbés

1/5 Cylindres (monté verticalement)

Tableau 13 : Ratios des vitesses recommandés suivant la forme de la pièce (Mc Neill Co.) Les vitesses appropriées ne dépendent pas que du ratio. La répartition est aussi contrôlée par la vitesse tangentielle V telle que V = Rω avec R la distance entre le moule et le centre des 2 axes et ω la vitesse angulaire. La différence entre la vitesse des axes et la vitesse tangentielle attribuable à la vitesse locale de la matière explique pourquoi l’épaisseur de matière aux coins extérieurs est toujours plus importante que celle aux angles rentrants. En effet, plus on s’éloigne du centre des 2 axes, plus la vitesse tangentielle augmente et plus l’épaisseur répartie augmente à viscosité constante. Ainsi, les rayons de courbure et la position du moule par rapport au centre des 2 axes peuvent impacter très sérieusement l’uniformité de l’épaisseur.

2.3.3 Pression dans le moule

Le rotomoulage ne nécessite pas de pression de fermeture du moule particulière. Ainsi, l’étanchéité du moule n’est généralement assurée par les moulistes que pour le matériau le moins visqueux utilisé. Le moule n’est donc que très rarement étanche aux gaz.

Néanmoins, si aucun évent n’est utilisé, la répartition de la première couche de matière enferme une quantité finie d’air. Comme cette répartition a généralement lieu à haute température, le refroidissement provoque une sérieuse dépression au sein de la pièce. Ce phénomène peut provoquer un effondrement de la pièce voire une déformation du moule dans les cas extrêmes.

Afin d’éviter cette dépression, plusieurs méthodes ont fait leur preuve. L’utilisation d’un évent reste la plus simple. Cet évent peut être sous la forme d’un tube traversant le moule suffisamment entrant pour que la matière ne puisse y ressortir. Cet évent est également utilisé pour introduire la matière lors du rotomoulage d’une seconde couche. Le cylindre de l’évent tend à être surmoulé par la matière dans cette configuration. Une autre méthode consiste à charger la poudre de polymère avec de la neige carbonique. La sublimation du CO2 permet de compenser la dépression et en plus de limiter l’oxydation à la surface interne du matériau.

A présent, les nouvelles rotomouleuses étanches, possèdent des bras creux équipés en gaz permettant une régulation positive de la pression à l’intérieur du moule. Une surpression est poussée jusqu’à +0,4 bar pendant la cristallisation afin de limiter le retrait. Au-delà de la stabilité dimensionnelle, le contact maintenu entre le moule et la pièce améliore le transfert thermique et diminue les temps de cycle. Pour les polymères thermosensibles, un gaz neutre (dioxyde de carbone, azote ou plus rarement argon) est balayé dans la cavité du moule.

Au-delà du refroidissement, l’usage d’une surpression ou d’une dépression lors des périodes de chauffe est un usage courant chez les industriels. En effet, une surpression permet d’augmenter le taux de saturation en gaz du polymère fondu et ainsi d’éliminer les porosités visibles. Cependant, le polymère se retrouve sursaturé en gaz ce qui peut diminuer ces propriétés mécaniques. C'est pourquoi certains industriels préfèrent la méthode inverse. En effet, le vide augmente dans un premier temps le diamètre des bulles mais ces dernières remontent et peuvent coalescer avec la surface libre. Cette méthode s’avère efficace sur les formulations suffisamment fluides pour permettre la diffusion des porosités. La mise en dépression du moule permet ainsi d'augmenter la densité des pièces.