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2.2 Détection indirecte : les scintillateurs et photodétecteurs

2.2.2 Le photodétecteur

Le photodétecteur est l’élément de la chaîne de détection situé juste après le scin- tillateur. Il permet de détecter les photons de scintillation issus du scintillateur, et de les convertir en signal électrique de charge proportionnelle au nombre de photons de scintilla- tion incidents. Il existe toute une gamme de photodétecteurs, basés (à un exemple près) sur deux technologies distinctes : la technologie du vide et la technologie des semi-conducteurs. Nous allons ici brièvement présenter les différentes technologies et leur fonctionnement.

a La technologie du vide Le tube photomultiplicateur (PMT) est l’application de la technologie du vide la plus répandue à l’heure actuelle. Comme illustré sur la Figure III.6, le PMT est composé en premier lieu d’une photocathode, permettant de convertir un photon incident en un électron, puis d’une série de dynodes, qui multiplient le nombre d’électrons, et enfin d’une anode, qui récolte le signal électrique final. Entre la photocathode et l’anode est appliquée une différence de potentiel, typiquement de l’ordre de 1 kV, afin de créer un champ électrostatique pour attirer les électrons vers l’anode.

Figure III.6 – Schéma d’un tube photomultiplicateur typique, composé d’une photocathode, d’une

série de dynodes et d’une anode (source : [ Knoll 2010 ])

La photocathode : conversion de photon en photoélectron

Lorsqu’un photon de scintillation atteint la photocathode (avec une énergie typique de 3 eV pour une longueur d’onde dans le bleu), il a une probabilité non nulle de transférer son énergie à un électron. Cet électron va alors migrer vers la surface de la photocathode, puis s’échapper de la photocathode et ensuite suivre le processus d’amplification. Pour que l’électron puisse s’échapper de la photocathode, il doit atteindre la surface avec une énergie suffisante. Or, durant la migration de l’électron jusqu’à la surface, il va perdre de l’énergie par collisions successives avec les électrons du milieu. Donc, la photocathode ne doit pas être trop épaisse, sans quoi les électrons n’atteignent jamais la surface avec l’énergie nécessaire à l’échappement. À l’inverse, plus la photocathode est épaisse (et donc opaque), plus un photon de scintillation a de chances d’interagir et donc de transférer son énergie à un électron. Il y a donc un compromis à trouver, qui limite le rendement quantique (nombre de photoélectrons émis sur le nombre de photons incidents) de la photocathode. Typiquement, une photocathode semi-transparente est d’une épaisseur de l’ordre de 25 nm, qui est un compromis fréquemment utilisé, pour un rendement

quantique de l’ordre de 25 % dans le bleu.

La focalisation et la collection

Les photoélectrons créés doivent ensuite être focalisés et collectés. Des électrodes permettent alors de focaliser les photoélectrons jusqu’à la première dynode, afin d’être collectés efficacement. La dispersion dans le temps de transit des photoélectrons est alors un point critique concernant la résolution temporelle du photomultiplicateur.

Les dynodes et l’anode : amplification et récolte du signal

Suite à la photocathode vient donc le processus d’amplification, avec la série de dynodes. Comme illustré sur la Figure III.6, des électrodes permettent de focaliser les photoélectrons émis par la photocathode sur la première dynode. Vient alors le processus d’amplification, par la création et l’émission, pour chaque électron touchant une dynode, d’électrons secondaires eux-mêmes accélérés jusqu’à la prochaine dynode. Finalement, les électrons sont récoltés sur l’anode, créant ainsi un signal électrique mesurable avec un gain de l’ordre de 106, proportionnel au nombre de photons incidents sur la photocathode. En pratique, selon l’agencement des dynodes (linéaire, circulaire, etc...), il existe plu- sieurs types de PMTs, avec des caractéristiques relativement semblables. Ce processus de photodétection est à l’origine de fluctuations statistiques (au niveau de la photocathode et de son rendement quantique, de la focalisation et la collecte des photoélectrons, et de l’amplification au niveau des dynodes) à l’origine d’une dégradation par la suite de la résolution en énergie.

Les différentes technologies

Sur cette base fonctionnelle, il existe nombre de variantes permettant de répondre à des besoins et des situations différents, élargissant ainsi le champ d’applications des PMT. Il existe par exemple des PMT qui encodent la position des photons de scintillation arrivant sur la photocathode (PSPMT pour Position Sensitive PMT). C’est particulièrement utile en imagerie médicale ou en physique des particules par exemple, lorsque la connaissance de la position offre une meilleure résolution spatiale sur l’image finale. Plusieurs types de technologies offrent une telle possibilité, notamment les MCP-PMT (MicroChannel Plate PMT) qui sont constitués d’une multitude de canaux d’amplification linéaire, les HPMT (Hybrid PMT) qui utilisent une photocathode couplée à un détecteur d’électrons semi- conducteur, ou encore les MAPMT (Multi-Anode PMT) qui utilisent le principe du PMT classique parallélisé sur plusieurs voies.

Les détecteurs basés sur la technologie du vide sont largement utilisés encore aujour- d’hui. Ils ont l’avantage d’être une technologie maîtrisée et d’offrir des performances rela- tivement bonnes. En revanche, ils sont plutôt encombrants (plusieurs centimètres d’épais- seur), nécessitent une haute tension d’alimentation (de l’ordre du kV), sont fragiles et ont pour la plupart des performances dégradées sous un champ magnétique (en raison d’une mauvaise collecte des électrons sur les dynodes). Pour ces raisons, dans nombre d’applications, les photomultiplicateurs basés sur la technologie des semi-conducteurs ont de nombreux avantages, avec des contreparties, que nous présentons dans le paragraphe suivant.

b Les semi-conducteurs L’autre technologie utilisée pour la détection de photons de scintillation est basée sur les semi-conducteurs. On peut distinguer principalement trois représentants dans cette catégorie, utilisés avec un scintillateur : les photodiodes, les APD (pour Avalanche PhotoDiode) et les SiPM (pour Silicon Photomultiplier). Toutes

ces technologies sont basées sur une jonction PN, exploitée dans des conditions et régimes différents.

Les photodiodes

Les photodiodes ont basiquement un gain électronique de l’ordre de l’unité. Les pho- todiodes sont basées sur une jonction PN, avec création d’une paire électron-trou pour un photon incident. Sous un champ électrostatique (créé par une différence de potentiel), les électrons et les trous vont dériver, créant un courant électrique, proportionnel au nombre de photons incidents. Le rendement quantique est élevé, de 60 à 80 ou 90 % dans le visible selon la longueur d’onde. Mais leur très faible gain électronique les rend difficilement exploitables à des niveaux de lumière en dessous de la centaine de photons.

Les APD

Les APD sont basées sur le même principe que les photodiodes (à quelques évolutions près dans les couches de semi-conducteur), mais avec une différence de potentiel plus éle- vée. Ainsi, un photon incident va créer un nombre fini de paires électron-trou, typiquement une centaine, d’où un gain de l’ordre 100. Encore une fois, les électrons et les trous vont dériver, créant un courant électrique proportionnel au nombre de photons incidents. Le gain plus élevé que pour une photodiode classique permet de détecter des plus bas niveaux de lumière, jusqu’à une dizaine de photons. Ceci est vrai pour une tension d’alimentation inférieure à la tension de claquage.

Au-delà de la tension de claquage, l’APD fonctionne en mode Geiger, et le champ est si élevé que l’avalanche est auto-entretenue. Dans ce cas, l’APD ne répond plus de façon linéaire au nombre de photons incidents, mais plutôt de façon binaire : aucune événement rien n’a été détecté, soit quelque chose a été détecté. En revanche, le gain est beaucoup plus élevé : de l’ordre de 106, comparable aux traditionnels PMT. Ce gain considérable permet alors de détecter des niveaux de lumière très faibles, jusqu’au photon unique.

Ces trois régimes de fonctionnement sont résumés sur la Figure III.7.

Figure III.7 – Les différents régimes de fonctionnement d’une jonction PN : la photodiode à

basse tension (gain de l’ordre de l’unité), l’APD (gain de l’ordre de 100) et l’APD en mode Geiger au-delà de la tension de claque avec perte de proportionnalité (gain de l’ordre de 106)

Les SiPM

Le SiPM, quant à lui, prend justement parti de ce haut gain, tout en résolvant le problème de la perte de proportionnalité du signal. Un SiPM est composé d’une multi- tude d’APD en mode Geiger, en parallèle, arrangées spatialement comme une matrice. Le nombre de photons détecté est alors déterminé à partir de la somme du nombre de

cellules APD touchées. Cela permet alors d’avoir un gain élevé, et un signal proportionnel au nombre de photons incidents (dans la limite du nombre d’APD en parallèle). Nous traiterons plus en détails du fonctionnement d’un tel système par la suite.

B

Principe du détecteur élémentaire

Après avoir passé en revue les interactions du rayonnement gamma avec la matière, ainsi que la détection de tels rayonnements, nous allons présenter le principe de base de MoniPET : la localisation de l’interaction du gamma dans le scintillateur par division de lumière. Après en avoir expliqué le principe, nous allons préciser la nature des choix instrumentaux effectués pour MoniPET, depuis le scintillateur jusqu’à l’électronique de lecture, en passant par le photodétecteur.

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Principe de la localisation par division de lumière

Comme exposé dans le chapitre II, MoniPET exploite la division de lumière dans un barreau scintillateur pour localiser longitudinalement l’événement gamma. Cette méthode consiste à lire simultanément la lumière collectée aux deux extrémités d’un long cristal scintillateur, pour en déduire la position longitudinale d’interaction d’une particule.

1.1 Le concept original de la localisation par division de lumière

La localisation par division de lumière a été proposée dès 1952 par [ Yuan et Poss 1952 ]. À l’aide d’un scintillateur liquide cylindrique de 8 pouces de long (' 20 cm) et 2.5 pouces de diamètre (' 6 cm) lu par un PMT à chaque extrémité, ils ont obtenu des traces du trajet de particules cosmiques. Le modèle utilisé ne prenait en compte que les effets d’angle solide (et donc les surfaces étaient absorbantes tout le long du cylindre). L’observation des signaux sur un oscilloscope en mode XY se résumait alors à une droite. La position d’interaction est alors obtenue avec la pente de la droite, et l’énergie absorbée par le scintillateur avec l’amplitude de cette dernière. Les mesures étaient donc d’ordre qualitatif. En 1982, toujours pour des applications de télescope gamma, il est proposé cette fois une méthode beaucoup plus précise, sur un barreau scintillateur de NaI de 50x5x5 cm3 [ Carter et al. 1982 ]. Au lieu d’avoir des bords absorbants et de prendre en compte l’angle solide, l’approche inverse est choisie : les bords sont maintenant réfléchissants, et seule l’atténuation lumineuse le long du cristal est prise en compte. Une résolution spatiale de l’ordre de 2 à 2.5 cm est alors obtenue à 662 keV, accompagnée d’une très bonne linéarité de la réponse spatiale. Mais surtout, le modèle utilisé et les simulations associées sont en bon accord avec les résultats expérimentaux. Une dizaine d’années plus tard, toujours pour des applications de télescope gamma, des barreaux de CsI de 15 cm de long lus par des photodiodes à chaque extrémité sont étudiés [ Labanti et al. 1991 ]. Mais surtout, pour la première fois, différents revêtements optiques sont testés, offrant des résolutions spatiales différentes. Une résolution spatiale de l’ordre 1.6 cm est obtenue à 662 keV.

1.2 L’application à l’imagerie PET

L’imagerie PET requiert un grand nombre de voies de lectures ainsi qu’une mesure de position précise. Le concept de division de lumière a ainsi été naturellement transposé au PET. Parallèlement au développement de photodétecteurs compacts, le concept de la division de lumière pour l’imagerie PET a été étudié, tant pour des configurations PET petit animal que PET humain. Du point de vue instrumental, la division de lumière est utilisée pour deux applications : la mesure de la profondeur d’interaction (DOI) et de la position axiale.