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4.4 Développement d’un modèle d’interface acier-béton

4.4.1 Philosophie de modélisation

D’un point de vue numérique, comme détaillé au Chapitre 2, l’utilisation d’une in-terface volumique est ici retenue pour la modélisation du comportement de l’inin-terface acier-béton. La modélisation d’une armature et de son interface associée suit le schéma présenté sur la figure 4.14-a. L’armature est modélisée en éléments finis 1D de type barres. Celle-ci est entourée par une zone d’interface volumique (de section égale à la section réelle de l’armature), en contact avec le béton environnant. La modélisation des essais d’arra-chement est présentée sur la figure 4.14-b. La longueur d’adhérence, de l’armature de diamètre d avec le béton environnant, est égale à 5d. La zone d’interface volumique est introduite sur cette zone.

Concrete Interface

Rebar

(a) (b)

Fig. 4.14 Modélisation de l’interface volumique acier-béton : (a) principe général, (b) modélisation de l’essai d’arrachement.

Les travaux de [Kolani, 2012] et [Leroux, 2012] ont alloué à cette zone d’interface un comportement plastique, avec critère de Von Mises ou Drucker-Prager, permettant de reproduire le glissement entre l’armature et le béton, ainsi que la contrainte maximale d’adhérence. En négligeant l’effet du confinement latéral sur le comportement de la liaison

dans nos applications, en considérant des chargements monotones statiques, un critère de Von Mises avec écrouissage négatif peut être retenu. Celui-ci suit l’équation définie ci-après :

I

eq = K

dK = Hdp , (4.4.1)

avec ‡eqla contrainte équivalente de Von Mises, K le seuil plastique initial, H le paramètre régissant l’écrouissage et p la déformation plastique équivalente cumulée.

Pour un chargement de cisaillement pur dans le plan (1,2), la plastification apparaît pour une contrainte de cisaillement ·12,plas = K/Ô3. Un écoulement associé induit un compor-tement linéaire ·12 - ‘12 en phase plastique. L’écrouissage positif ou négatif est régi par le signe de H. Afin d’identifier l’influence de l’interface acier-béton, un essai d’arrachement avec HA12 est simulé et comparé avec les essais expérimentaux présentés précédemment. Le béton est modélisé comme un matériau élasto-endommageable aux propriétés homo-gènes définies au Chapitre 2. L’acier est considéré comme élastique, de module de Young défini au Chapitre 2. Une interface volumique est maillée sur la zone d’ancrage de 5d (Figure 4.14-b). À la différence d’une modélisation avec interface parfaite, ne faisant pas intervenir de contrainte maximale d’adhérence, la modélisation avec interface volumique permet de reproduire la contrainte maximale d’adhérence ·maxet l’adoucissement post-pic (Figure 4.15-a). Le module de Young de l’interface est considéré comme égal à celui du matériau béton. Les paramètres K et H sont identifiés par analyse inverse par rapport aux essais expérimentaux. La perte de rigidité observée en phase pré-pic est due à la dégradation progressive quasi-uniforme de l’interface acier-béton (Figure 4.15-b). Néan-moins, il semble difficile de représenter la perte de rigidité expérimentale, et implicitement le glissement entre l’acier et le béton au pic de contrainte.

Une solution est issue des travaux de [Sellier et al., 2013c]. Les auteurs complexifient la surface d’écoulement plastique, considérée alors comme multi-linéaires sur la base des modèles analytiques de [Eligehausen et al., 1983]. Il convient de souligner le nombre plus important de paramètres à identifier pour la caractérisation de l’interface.

Nous proposons dans ces travaux un développement supplémentaire à la modélisation volumique présentée en premier lieu. La proposition se base sur la dégradation physique de l’interface acier-béton, définie au Chapitre 1. Après la perte d’adhérence chimique entre les deux matériaux à faible charge, la transmission d’efforts de l’acier vers le béton ne s’opère qu’au droit des crénelures. Une fissuration conique apparait localement, accompagnée d’une perte de rigidité globale de la liaison, jusqu’à atteindre la résistance maximale de l’interface. Partant de ces observations, la philosophie de la modélisation développée peut être décomposée en trois étapes :

1. Avant tout chargement extérieur sur la zone d’interface, la liaison acier-béton peut être considérée comme parfaite et non-endommagée. L’adhérence chimique globale entre les deux matériaux à faibles charges est assurée. La zone d’interface peut ainsi être considérée dans son ensemble comme élastique avec les propriétés du matériau béton environnant.

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 0 5 10 15 Glissement [mm] C o n tra in te d’a dh ´ere nc e [MP a ] Exp : 3 tests

Num : interface parfaite avec ´el´ements barres Num : interface VM, K = 45 MPa, H = -50 MPa

(a) (b)

Fig. 4.15 Essai numérique d’arrachement HA12 : (a) évolution de · à faibles glissements, (b) champ d’endommagement à l’interface acier béton dans le cas interface VM, à · = 8 MPa.

2. La perte d’adhérence chimique survient à un certain niveau de chargement. Sans la présence de crénelures sur l’acier, la transmission d’efforts entre les deux matériaux n’est assurée que par frottement. Il en résulte un glissement important de l’acier à charge constante. Cette observation peut être modélisée par une interface plastique parfaite. Un critère de von Mises est imposé de manière globale à cette zone :

I

eq = K1

dK1 = 0 . (4.4.2)

Une hypothèse forte est ici faite en négligeant l’effet du confinement latéral sur la contrainte limite d’adhérence chimique dans nos essais. L’effet d’un confinement actif [Tran et al., 2007] ou passif [Eligehausen et al., 1983] peut être cependant pris en compte via un critère de Drucker-Prager : ajout du terme – Tr(‡) au critère de von Mises ; la composante en trace du tenseur de contraintes influant sur le seuil plastique.

3. La présence de crénelures sur l’acier induit, quant à elle, un gain de résistance de la liaison. Ceci s’apparente à un maintien en position géométrique. L’effort est repris principalement de manière locale au niveau des crénelures, l’espace inter-crénelures pouvant être considéré comme une barre lisse. Il serait donc intéressant, couplé au critère défini à l’équation 4.4.2, de prendre en compte l’influence locale des nervures sur le comportement de la liaison. Il n’est ici pas question de mailler explicitement la géométrie réelle de l’armature, mais bien de modéliser de manière implicite le gain local de résistance apportée. Ainsi, en complément du critère 4.4.2, on ajoute

périodiquement un autre critère local de von Mises, écrit comme :

I

eq = K2

dK2 = H2dp , (4.4.3)

avec K2 > K1 et H2 < 0 pour permettre un comportement adoucissant local, après avoir atteint le seuil K2. La périodicité du critère local doit correspondre à la géométrie réelle de la barre d’armature considérée.

La géométrie des différentes armatures est analysée. Présentant le même profil global, une unique géométrie idéalisée est proposée pour tous les diamètres (Figure 4.16). En accord avec cette dernière, la Figure 4.17 schématise la modélisation proposée précédemment

L = 8 mm

lr = 4 mm

hr = 0.5 mm

(a) (b)

Fig. 4.16 Géométrie des armatures : armature de diamètre d = 12 mm (a), géométrie idéalisée (b). K2 K1 L

K

K

1

K

2

rebar axis

L

l

r finite elements 0 H2 L

H

H

2

rebar axis

L

l

r finite elements

Fig. 4.17 Modélisation globale-locale de l’interface acier-béton avec prise en compte im-plicite des crénelures d’acier.

Il est à noter que la modélisation choisie demande une grande finesse de maillage. Il n’est donc pas envisageable de l’utiliser pour des calculs de structures massives (enceintes

suite pour simuler les différents tests de la campagne expérimentale (essais d’arrachement, essais tirants, essais sur poutres). Ce fait nous informe sur la viabilité numérique, en termes de convergence ou de temps de calcul par exemple, de la modélisation proposée. Il serait aussi envisageable de l’utiliser dans des calculs de structures massives, de manière locale dans une zone d’intérêt particulière. Le nombre de paramètres du modèle peut aussi être mis en avant. Au total, quatre paramètres doivent être identifiés : Module de Young, K1, K2, H2. Le module de Young de la zone d’interface est considéré comme égal à celui du béton. Le seuil K1 peut être défini par rapport à des essais de la littérature sur l’adhérence chimique acier-béton [Ouglova et al., 2008]. On retiendra que seuls deux paramètres restent finalement à être identifiés. On propose par la suite une identification sur les essais d’arrachement et une validation ultérieure sur les essais tirants.