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6.3. État III Les transformations du XVI e siècle, le palais de justice

6.3.4. Phase 4 Surélévation de la tour d’escalier (1584)

Sur les murs de la première tour d’escalier, haute de 11,10 m (459 m NGF) et sa dernière marche la plus haute (456,05 m NGF), l’étude montre que l’ensemble de l’ouvrage a été surélevée (ill. 18). À l’intérieur de la cage, cette reprise de chantier se caractérise par l’usage de marche plus grande et un changement d’outil et de façonnage (fig. 22). Notons tout de même que les maçons ont pris soin de conserver le même type de molasse garantissant une certaine unité dans la construction. La surélévation de l’escalier atteint 1,86 m de haut (457,91 m NGF). Les neuf marches ajoutées donnent accès au comble du palais, via la porte (B106). Elles ferment en revanche, sur 1,22 m, l’accès à la porte (B107) du comble des archives (fig. 48 et 7d). Cette superposition des aménage- ments a été réglé par la création d’un emmarchement étroit se développant dans l’embrasure de la porte et empiétant dans la cage d’escalier.

À l’extérieur, en dépit des restaurations de 1900 et celles de 1982-1985, l’étude des parements révèle que la surélé- vation se fait à partir d’une arase parfaitement horizontale identifiée à 11,10 m de haut sur la façade ouest (459 m NGF) (fig. 18-19 et 49-50). Cette reprise n’a pas pu être repérée sur les autres murs masqués par les toits des corps de bâtiments adjacents. Elle indique cependant que la tour a été surélevée de 4,15 de haut (463,15  m  NGF). Cette mesure peut être rapprochée d’une source mentionnée par Robert Gabion qui évoque qu’en 1584 « les conseillers de la Chambre des comptes passent un contrat avec le maître-ar- tisan Étienne Brigand pour eslever le viorbe, de douze pieds, à

pierre de molasse63 ».

63. Gabion (R.) 1961, p. 24

N S

0 5m

XVIe s.

État III - phase 4

ill. 18. Palais de justice vers 1584 - Mur OUEST - Surélévation

6 - Les résultats de l’étude archéologique I

L’étude de l’élévation supérieure de la tour d’escalier apporte quelques précisions sur le déroulement des travaux. Elle a permis de dégager deux césures verticales sur les murs sud et nord de la tour à proximité des chaînes d’angle. Elles ont été produites par la liaison entre la construction avant de la tour (les 3/4 ouest) et sa partie arrière (1/4 est). Ce découpage est le résultat d’un chantier qui s’est déroulé depuis deux zones de travail. La forme suivit par la césure et l’organisation des moellons qui la délimite suggèrent que la partie arrière de la tour d’escalier a été construite en premier. Cette partie arrière englobe l’intégralité du mur est (UM8) et les deux portions des murs sud (UC6.3) et nord (UC7.1) compris entre les chaînes d’angle et les césures. Les maçons ont manifestement ouvert le chantier de surélévation à partir d’un échafaudage relativement simple dressé à l’intérieur même de la tour. L’escalier pouvait éventuellement leur servir à hisser les matériaux en haut des murs. Le chantier de la partie avant de tour d’escalier apparaît nettement plus complexe à mettre en place (UC4.11, 6.2, 7.4). Il a nécessité la réalisation d’un échafaudage beaucoup plus important. Ce dernier a été construit en U dressé contre le mur ouest et se retournant sur les toitures situées au sud et au nord de la tour d’escalier. L’absence de trous de boulin dans la surélévation ouest indique que les perches soutenant les plateaux de travail reposaient de plain-pied sur le sol de la cour et sur les toits. Les trous aménagés lors de la construction de la partie inférieure de la tour d’escalier ont peut-être été réutilisés pour amarrer l’échafaudage de 1584.

Les travaux commandés à Étienne Brigand en 1584 ont été réalisés avec le même type de maté- riaux que la partie basse de la tour. Si les restaurations de 1983 ont consisté à reconstruire com- plètement les chaînes d’angle, on sait par les documents relatifs à ces travaux et aux photographies anciennes qu’elles avaient été construites en molasse par le maître-artisan. Ce dernier a cherché à surélever la tour d’escalier sans se démarquer de la partie inférieure érigée quelques décennies plus tôt. La chaîne d’angle sud/est (fig. 51) épargnée des restaurations de 1983 montrent toutefois que dans cette partie cachée par les toitures, l’artisan a également utilisé ici du tuf. Ce matériau est nettement plus dur et résistant, notamment à l’eau et au gel, que la molasse employée pour le prolongement des chaines de la façade ouest. Les blocs de tuf de la chaîne d’angle mesurent entre 25 et 35 cm de haut et jusqu’à 65 cm de long. Cette attention portée au choix des matériaux se retrouve aussi au niveau du couronnement de la tour. Les corniches ont, en effet, été réalisées en tuf. Les dalles de corniches en molasse appartiennent à la restauration de 1900. Celles d’origines présentent le même profil que celles déjà mises en œuvre sur les murs du Palais, construits ou

reconstruits au XVIe siècle. Les dimensions mesurées correspondent aussi, autour de 16 cm de haut

et de 40 cm à 1 m de long.

Sur les chantiers menés à l’arrière de la tour comme à l’avant, ont été essentiellement employés des moellons irréguliers et de nombreux cailloux qui n’ont fait l’objet d’aucun travail de taille. Les pierres sont brutes de carrière et très rarement dressées sur une face. Les plus importantes mesurent 16 par 40 cm. Quelques fragments de tuiles, des moellons de tufs et des galets sont également pris dans cette maçonnerie de tout-venant. La lecture du parement laisse voir plusieurs assises de réglage réalisées à partir de cailloux et de bouts de tuile. Ce dispositif a été mis en évidence au moins une fois sur chacun des parements de la tour. Plus inattendu, on a repéré cinq assises de réglage sur la surélévation du mur ouest. Elles correspondent à des arrêts de chantier indiquant que sur ce côté de la tour, le chantier a progressé plus lentement.

Le mortier, largement utilisé pour cette surélévation, se caractérise par sa couleur grise, sa gra- nulométrie fine à moyenne avec des inclusions de graviers et de nombreux nodules de chaux. Il est d’une assez bonne tenue et comble des joints profonds et épais. Dans cette maçonnerie, les trois fenêtres visibles au sommet des façades principales ont toutes été largement restaurées entre 1982- 1985. Seule, la vue de la façade sur le plan de 1760 suggère que des ouvertures existaient avant les

restaurations du XXe siècle (fig. 4). La surélévation de la tour d’escalier marque la fin d’une série de travaux relativement importants qui se sont déroulés dans la partie ouest du palais dans le dernier

tiers du XVIe siècle. Les résultats de l’étude archéologique laissent envisager qu’un dernier chantier

a été ouvert à l’est du Palais.