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6.1. État I Les constructions du XIV e siècle

6.1.2. Phase 2 L’atelier monétaire (1355-1392)

Le corps de bâtiment sud est considéré comme l’ancien atelier monétaire qui s’installa sur l’Isle après que l’empereur Charles IV ait accordé au comte de Genève le droit de battre monnaie. L’atelier

fonctionna pendant le règne des comtes Amédée III (1356 à 1362) et Pierre (1374-1392)44. L’étude

de l’ensemble des parements extérieurs de ce bâtiment sud démontre que seulement deux unités de construction appartiennent probablement à l’atelier monétaire originel (ill. 8 et 9).

44. Duparc (P.) 1961, p. 16.

Cour des prisons Cour du palais Le Thiou l'I sle de Passage Le Thiou N XIVe s. État I - phase 2 0 5m E W Le Thiou 0 5m XIVe s. État I - phase 2

ill. 8. Vestiges de l’atelier monétaire vers 1355 (?) - Plan - État I - phase 2 - (éch. 1/300).

ill. 9. Vestiges de l’atelier monétaire

vers 1355 (?) - Mur SUD - État I -

phase 2 - (éch. 1/300).

Cour des prisons Cour du palais Le Thiou l'I sle de Passage Le Thiou N XIVe s. État I - phase 2 0 5m

Cour des prisons Cour du palais Le Thiou l'I sle de Passage Le Thiou N XIVe s. État I - phase 2 0 5m

Ces deux unités sont visibles sur le parement extérieur du mur sud (UC2.6, 2.16) longeant le petit bras du Thiou (fig. 14 et 15). La première se trouve dans l’extrémité ouest du mur tandis que le seconde est conservée dans l’extrémité est. Cette dernière (UC2.6), la plus importante (446,50- 455 m NGF), comprend tout d’abord quatre assises qui se développent, depuis le lit du Thiou, sur environ 9,50 m de long et sur 1,60 m de haut. Au-dessus, l’élévation forme une bande verticale de maçonnerie, de pratiquement 10 m de haut par 3 m de large. Elle se trouve au droit de l’escalier rampe sur rampe qui se développe à l’intérieur du bâtiment. À ce niveau, le mur est d’ailleurs particulièrement épais, entre 1 m et 1,80 m, pour former la cage et porter les marches. L’appareil extérieur se compose de pierres de taille en calcaire blanc dont le parement présente des traces de pic. Les assises sont comprises entre 35 et 65 cm de haut. Les modules les plus importants sont concentrés en partie basse. Au sommet, les trois derniers rangs présentent quelques désordres.

Ces assises ont probablement été ébranlées lors de la reconstruction du mur au XVIIIe siècle. De

même, les pierres situées à proximité des deux césures verticales ont souvent été retaillées pour être adaptées aux reprises. Les observations menées à l’intérieur de la cage montreraient que l’escalier

est complètement modifié aux XVIe et XVIIIe siècles, d’après Louis Blondel45. Son parement ne

présente pas le même type de trace d’outil, et les marques lapidaires qu’il présente ne se retrouvent pas sur le parement extérieur. De ce côté, la reprise des joints lors d’une phase de travaux récents n’a pas permis d’analyser le mortier de pose et de pouvoir le comparer avec celui des murs de la cage. Quoi qu’il en soit, il apparaît évident que cette élévation a été épargnée des reconstructions parce qu’elle appartient ou appartenait à un escalier antérieur à la cage qui l’enferme. Selon Louis Blondel, cet escalier se trouvait contenu dans un corps de bâtiment de plan carré accolée à la mai- son-forte (ill. 5 supra). Pour lui, il appartiendrait à une phase de travaux qui précède la construc- tion de l’aile de la monnaie plus à l’ouest. À notre sens, la césure verticale située à l’ouest et celle située l’est du mur de l’escalier conservé correspondent à des arrachements. Ce qui laisse à penser que la cage était prise dans œuvre en façade, c’est-à-dire comprise dans l’élévation du mur d’un bâtiment. L’aile de la monnaie ? Si elle avait été contenue dans un plan massé autour de l’escalier, des chaînes d’angles ou des modules de ces chaînes d’angle auraient été conservés. Les quatre premières assises situées au-dessus du lit du Thiou confortent cette hypothèse. Elles se prolongent, en effet, sur près de 3 m au-delà l’emprise de l’escalier, sans être interrompues par un dispositif d’angle, en besace ou en harpe. De plus, l’étude montre que l’on retrouve dans l’extrémité ouest du mur, une maçonnerie (UC2.16) très proche de celle du mur de l’escalier, nature de la roche, module et trace d’outil (pic). Elle comprend trois assises de 30 à 40 cm de haut qui se développent sur 1,12 à 1,50 m de long. Aucun mortier n’est observable en raison de l’étroitesse des joints et parce qu’à ce niveau, ils ont été refaits à de multiples reprises. En outre, on constate, malgré les 12,50 m qui séparent les deux maçonneries anciennes, que leurs assises sont parfaitement alignées à 447 m, 447,5 et 447,90 m NGF. Tout semble dire que ces vestiges appartenaient à une même élé-

vation que l’on peut rapprocher de l’atelier monétaire qui fait l’objet de travaux à partir de 135646.

On notera aussi, à l’est du parement extérieur de l’escalier (UC2.6), juste au-dessus du niveau du Thiou, la présence d’un bloc en surplomb du nu du mur, juste au-dessus du niveau du Thiou, à la limite du mur sud de la cour. S’agit-il du sommier d’un pont, ou d’un autre aménagement ? L’étude de la façade méridionale du corps de bâtiment sud a permis de mettre en évidence les ves- tiges d’un mur ancien associé au parement extérieur d’un escalier érigé dans œuvre en façade d’un

45. Blondel (L.) 1961, p109.

46. Les comptes de travaux, mentionnés par Pierre Duparc à propos de cette construction, concernent essentiellement les aménagements intérieurs. Duparc (P.) 1961, p. 16.

6 - Les résultats de l’étude archéologique I

bâtiment. Ces constructions pourraient appartenir à l’ancien atelier monétaire sans que l’on puisse en amener la preuve. Cependant, il s’agit, du point de vue de la chronologie générale du site, des maçonneries les plus anciennes du corps de bâtiment sud. Le type de construction et le choix de la pierre de taille rompent radicalement avec la maçonnerie en blocage employé pour la maison-forte.

Les reconstructions du XVIIIe siècle condamnent la possibilité de retracer tout le périmètre de

l’atelier monétaire. Louis Blondel superpose cet atelier au corps de bâtiment sud notamment à partir des aménagements intérieurs. L’étude de ces derniers permettrait peut-être d’en apprendre davantage sur l’atelier monétaire qui fonctionna sous les comtes de Genève jusqu’à la toute fin du

XIVe siècle qui marqua la fin de l’ancienne maison de Genève47. Par la suite, la maison de l’Isle fût

inféodée à la famille de Monthouz Amédée VIII de Savoie après que celui-ci ait, en 1401, acheté le Genevois. Il est habituel de penser, qu’hormis des travaux de menuiserie conduits en 1395 sous le chancelier Guillaume Julien, les réaménagements de la maison de l’Isle n’ont eu lieu que dans la

seconde moitié du XVe siècle.