• Aucun résultat trouvé

Perception de l’évolution du territoire

3. Autres éléments pour appréhender le futur

3.4. Les dynamiques régionales vues par l’échantillon de ménages enquêtés pour l’étude

3.4.10. Perception de l’évolution du territoire

Lls chefs d’exploitation et les chefs de ménage ont été interrogés sur la manière dont ils perçoivent leur territoire et son évolution.

Une première série de questions portait sur les évènements, qui selon eux, ont impacté fortement les conditions de vie de leur famille au cours de ces 15 dernières années. Les évènements peuvent aussi bien avoir eu des impacts négatifs que positifs. Au total 195 personnes ont répondu (50% de CE, 24% de CMD et 26% de CM urbains). Il n’y a pas de différence significative dans le monde rural entre CMD et CE, c’est pourquoi ils ont été regroupés.

Les réponses données embrassent une large gamme qui va des accidents climatiques à des chocs économiques, mais d’une manière générale :

 ce sont essentiellement des évènements récents : 70% datent de moins de 5 ans (depuis 2011), 95% se sont déroulés dans les 15 dernières années (depuis 2000). Parmi les évènements anciens cités dominent les évènements climatiques (sécheresse) et les évolutions économiques (libéralisation) ;

 ce sont des évènements généraux qui ont impacté l’ensemble de la population, très peu de personnes ont cité des évènements personnels/familiaux, sauf un départ en migration, l’embauche d’un enfant, la construction de la maison et des problèmes fonciers (retrait d’une parcelle et conflits fonciers) ;

 ce sont des événements qui ont impacté la famille de manière négative (86% des évènements mentionnés). Les évènements avec des impacts positifs sont plus cités en zone rurale (17%) qu’en zone urbaine (6%). En zone rurale, ils concernent la création d’une nouvelle infrastructure : école, centre de santé ou forage (44% des réponses), l’arrivée d’un projet ou d’une ONG (33%), la hausse des prix agricoles (8%). En zone urbaine, les évènements positifs sont personnalisé (embauche d’un enfant, construction de la maison, etc.)

Tableau 63 : Types d'évènements du territoire qui ont impacté les familles dans le passé (% des réponses) selon le milieu des personnes interrogées

Les évènements les plus cités

concernent des chocs

climatiques : 46% de l’ensemble des réponses et surtout 57% en zone rurale. Ce sont pratiquement à égalité soit des pluies insuffisantes et la sécheresse soit trop de pluies et des inondations. Si l’on prend en considération les attaques de prédateurs ou de maladies (15%) les chocs qui impactent directement la production agricole concentrent 72% des réponses en zone rurale. En zone urbaine ce sont les problèmes d’insécurité qui ont été cités avec 47% des réponses qui concernent la menace djihadiste. En zone rurale, les problèmes d’insécurité n’ont pratiquement pas été cités (1% des réponses) et concernent seulement les vols d’animaux. Cette situation apparaît assez surprenante avec des villages en zone rurale qui paraissent peu concernés par l’actualité, alors que les djihadistes étaient installés dans la zone Office du Niger, qu’un mouvement fait explicitement référence au Macina et que les évènements ont été nombreux dans des zones proches du Nord de la région.

Rural Urbain Ensemble

Nombre de personnes 144 51 195

Nombre de réponses 208 70 278

Episodes climatiques 57% 14% 46%

Prédateurs ou maladies agricoles 15% 0% 11%

Chocs économiques 7% 16% 9% Insécurité 1% 47% 13% Démographie 0% 1% 1% Nouvelle opportunité 7% 1% 5% Politique / gouvernance 0% 4% 1% Foncier 1% 7% 3% Infrastructures 8% 0% 6% Total 100% 100% 100%

Les évènements économiques (hausse ou baisse des prix) concernent 9% des réponses, avec une plus grande importance en zone urbaine où les CM citent la hausse des prix des denrées alimentaires. En zone rurale, il y a quelques (3) réponses qui positives qui concernent la hausse des prix agricoles, mais c’est la baisse des prix agricoles et en particulier la baisse des prix du coton qui est la plus citée. Parmi les autres évènements cités, les problèmes fonciers et les évènements politiques (élections, changement de gouvernement) mais qui sont cités en zone urbaine uniquement.

On a ainsi, en caricaturant, une zone rurale qui apparaît (ou qui veut apparaître) autocentrée sur la vie agricole, peu concernée par les autres évènements et une zone urbaine plus ouverte sur la vie politique du pays et très préoccupée par les évènements récents.

Interrogé sur les évènements qu’ils craignent ou souhaitent pour leur famille, les CE, CMD et CM urbains répondent en citant de manière très proche les évènements qui ont impacté leur famille dans le passé. Ainsi, ce sont les évènements climatiques qui sont le plus redoutés par les populations, en zone rurale avant tout (49% des réponses, soit un peu moins que par le passé), mais aussi en zone urbaine avec 27% des réponses, ce qui est nettement plus élevé que par le passé (ces évènements ne concernaient que 14% des réponses). Les personnes interrogées, marquées par les accidents climatiques du passé qui ont impacté sévèrement la région, pensent que ces évènements vont se reproduire et seront toujours aussi importants pour la région, peut être en lien avec le changement climatique très présent dans les médias.

Avec 11% des réponses totales, l’insécurité est moins citée, même si elle augmente légèrement en milieu rural et diminue fortement en milieu urbain (passant d’environ 1 réponse sur 2 à seulement un peu plus de 1 réponse sur 4). Les personnes interrogées en zone urbaine pensent elles que les problèmes rencontrés ont déjà trouvé des solutions et qu’elles seront moins impactées que par le passé ?

Tableau 64 : Types d'évènements sur le territoire qui devraient impacter les familles dans le futur (% des réponses) selon le milieu des personnes interrogées

Parmi les évènements plus souvent cités que pour le passé, il faut mentionner : (i) les évènements économiques cités en rapport avec des hausses ou des baisses de prix, mais aussi, dans quelques cas avec l’emploi ou la pauvreté ; (ii) la démographie quasi absente des évènements qui ont marqué le passé est quelque fois citée ici (4% des réponses) en lien avec la croissance ou les migrations ; (iii) les nouvelles opportunités (projet, ONG, filière, etc.) qui devraient avoir des effets positifs sont cités par plus d’une personne sur 10.

Mais globalement, il n’existe pas de forte différence entre passé et futur, les personnes semblent penser que les évènements passés se reproduiront (sauf pour l’insécurité liée au djihadisme qui devrait reculer pour les urbains). L’écart entre rural et urbain persiste, même s’il est atténué.

Rural Urbain Ensemble

Nombre de personnes 123 47 170

Nombre de réponses 186 62 248

Episodes climatiques 49% 27% 44%

Prédateurs ou maladies agricoles 10% 0% 7%

Chocs économiques 9% 19% 12%

Insécurité 6% 27% 11%

Démographie 4% 6% 4%

Nouvelle opportunité économique 14% 10% 13%

Politique / gouvernance 1% 3% 1%

Foncier 3% 0% 2%

Infrastructures 4% 3% 4%

Autres 1% 3% 1%

La vision de l’avenir est plutôt pessimiste, puisque 78% des réponses sont des évènements avec des effets négatifs pour la famille de l’intéressé. Parmi les évènements avec des effets positifs attendus l’arrivée d’un projet ou d’un ONG dans la zone ou la construction d’une nouvelle infrastructure sociale, mais aussi, pour quelques-uns, une amélioration durable de la situation climatique.

Les CE et CM urbains ont été interrogés sur les « filières » ou activités porteuses du développement actuellement, et quelles seraient ces filières dans l’avenir. Sur la situation actuelle 96 % ont donné une réponse, pour l’avenir 90% seulement ont répondu. Il était demandé un classement selon l’importance, qui sur le terrain n’a pas été appliqué, nous donnons donc les résultats en fonction des réponses données (il pouvait y avoir jusqu’à 4 réponses, seuls 6 personnes ont utilisé les 4 possibilités en situation actuelle et seulement 2 pour le futur).

Les réponses données ne font que confirmer l’importance des activités agricoles aujourd’hui pour les ménages des zones étudiées ; importance qui devrait se poursuivre selon les personnes interrogées. Ainsi, l’agriculture, au sens de production végétale, est pour une très large majorité des réponses l’activité la plus importante pour le développement : 72% des réponses pour décrire la situation actuelle et 63 % des réponses pour l’avenir. Les réponses pour les activités agricoles décroissent légèrement, notamment pour les urbains, ce qui profite d’abord à l’élevage et à la transformation agroalimentaire pour les ménages urbains ; et au commerce pour les ruraux.

Dans la représentation des activités les plus porteuses aujourd’hui et dans le futur sur le territoire, l’agriculture reste prépondérante, y compris chez les urbains, même si pour ces derniers l’élevage pourrait être plus porteur dans l’avenir (plus porteur qu’actuellement). Et parmi les spéculations agricoles les plus porteuses, pas de surprise : le riz et les productions maraichères sont les plus citées et leur importance devrait augmenter dans le futur.

Tableau 65 : Filières porteuses actuellement et dans l'avenir selon le milieu

Activités/filières Actuellement Dans le futur

1Rural 2Urbain Total 1Rural 2Urbain Total

Agriculture 77% 60% 72% 69% 49% 63%

Elevage 15% 18% 16% 14% 21% 16%

Autre agricole 1% 3% 2% 1% 1% 1%

Transfo Agro alimentaire 0% 3% 1% 0% 14% 4%

Commerce 7% 8% 8% 13% 5% 10%

Autres 0% 7% 3% 4% 10% 6%

Total 100% 100% 100% 100% 100% 100%

Filières productions végétales

Riz 16% 14% 15% 20% 14% 18% Maraichage 8% 1% 6% 12% 1% 9% Echalote 8% 0% 5% 9% 0% 6% Mil 7% 0% 5% 4% 0% 3% Sésame 5% 0% 4% 3% 0% 2% Arachide 5% 0% 3% 5% 0% 3% Coton 4% 0% 3% 2% 0% 1% Niebe 3% 1% 2% 2% 0% 1% Pomme de terre 1% 2% 2% 1% 0% 0% Maïs 1% 0% 1% 2% 0% 1% Fonio 0% 0% 0% 0% 0% 0%

On note que les activités de pêche, pisciculture et de foresterie, ne sont pratiquement jamais citées. La transformation agro-alimentaire devrait prendre de l’importance mais seuls les urbains citent cette activité. Enfin, les activités « autres » occupent une place non négligeable pour les ménages urbains

avec une grandes diversité de réponses qui intègrent par exemple l’éducation (création d’école privée), le transport, la migration, la santé privée, etc.

Donc, un poids très fort des activités agricoles comme moteur du développement pour les chefs de ménages interrogés, poids qui devrait perdurer selon eux dans l’avenir.

Interrogés pour savoir s’ils ressentent des changements dans le climat, 62% des chefs d’exploitation ou de ménage (103) répondent que oui, 22% considèrent qu’il n’y pas de changement et 15% disent ne pas savoir.

Tableau 66 : Changements climatiques ressentis selon les chefs de ménage

Sans surprise les changements le plus fréquemment cités sont liés à la pluie avec une insuffisance de pluviométrie et la sécheresse pour 31% des réponses et des retards de pluie (démarrage tardif de la saison des pluies) ou des irrégularités dans les pluies pour 19% des réponses. Les chaleurs excessives sont également fréquemment citées (30%).

Interrogés pour savoir si ces changements les avaient amenés à modifier leurs pratiques, presque tous ont répondu par l’affirmative mais les réponses données ont concerné beaucoup plus les conséquences : baisse de rendement, déforestation, désertification, maladies, difficultés pour travailler, etc. Quelques-uns cependant ont répondu qu’ils avaient adapté les techniques culturales : abandon de certaines variétés/cultures, adoption de nouvelles variétés, semis hâtifs et/ou semis sans labour.

Enfin, les chefs d’exploitation et de ménage ont été interrogés sur les menaces qui pèsent le plus, selon eux, sur l’avenir du territoire et quelles sont au contraire les perspectives positives qui peuvent améliorer la situation de leur famille et de leur communauté. Les réponses, quelquefois difficiles à synthétiser, montrent encore une fois l’importance de l’agriculture qui reste la préoccupation principale avec des menaces fortes en termes de :

 insécurité alimentaire : 27% des réponses avec certains qui ont évoqué la crainte de la famine ;  risque climatique : 25% des réponses avec la crainte de la sècheresse qui est largement

majoritaire 20% et avec la crainte des inondations 5% ;

 manque de terre pour cultiver (5%), menace citée presque exclusivement en zone Office du Niger ;

 maladies sur les cultures ou maladies des animaux (4%).

Ainsi, 61% des réponses pour les craintes se rapportent à l’agriculture et aux risques qui menacent la production agricole. Logiquement, les perspectives qui pourraient améliorer la situation sont également en rapport avec la production agricole (44%) :

 le développement agricole cumule 38% des réponses mais rassemble des réponses assez différentes ; ainsi 21% citent directement le développement de l’agriculture comme perspective sans donner de précision, 9% précisent que cela passe par une amélioration de l’accès aux intrants (baisse des prix, accès facilité, etc.) ; sont également cités le développement des productions maraichères et de l’élevage, de nouvelles techniques ou variétés, l’accès au matériel, etc.

 l’extension des aménagements hydroagricoles représentent 6% des réponses (à l’intérieure des 35% infrastructures).

Manifestation Nbre de

réponses %

Pluie insuffisante / sècheresse 51 31%

Chaleur 49 30%

Pluie irrégulière / retard de pluie 32 19%

Vents 6 4%

Froid 7 4%

Autres 20 12%

Parmi les menaces les maladies occupent 19% des réponses avec pour les maladies humaines (15%) et pour les animaux ou les plantes 4%. Face à cette crainte des maladies, les infrastructures de santé (16% des réponses, 45% des réponses liées aux infrastructures) constituent la réponse souhaitée. Parmi les autres infrastructures citées, celles concernant l’eau potable (forage notamment) sont aussi importantes que les aménagements hydroagricoles (6% de l’ensemble des réponses). Les infrastructures d’éducation ne représentent elles que 4% des réponses. Mais globalement, pour les chefs de ménage, les infrastructures avec 35% des réponses constituent une des options pour améliorer la situation des familles sur les territoires, alors que les infrastructures n’ont été que faiblement citées comme un évènement qui devrait impacter les familles dans le futur (4%, voir tableau ci-dessus).

Tableau 67 : Craintes et perspectives selon les chefs de ménage

Menaces Nbre / % Perspectives Nbre / %

Nombre de personnes 150 Nombre de personnes 146

Nombre de réponse 200 Nombre de réponse 207

Insécurité alimentaire 27% Développement agricole 38%

Sècheresse ou inondation 25% Infrastructures 35%

Maladies 15% Gouvernance et cohésion sociale 9%

Insécurité 8% Emploi 6%

Pauvreté 8% Planning familial / réduction natalité 2%

Manque de terre 5% Sécurité 2%

Maladies agricoles 4% Autres 8%

Manque d'emploi pour les jeunes 2%

Désertification 2%

Autres 6%

100% 100%

Face aux menaces d’insécurité (8%), liées aux djihadistes ou aux bandits, les perspectives sont plus dans la bonne gouvernance et dans des actions pour améliorer la cohésion sociale que dans des mesures qui renforceraient la sécurité. Il en est de même avec les menaces de pauvreté (8%) qui sont contrebalancées par une gouvernance, des politiques pour développer l’emploi et autres (nouveau projet de lutte contre la pauvreté, développement du commerce, etc.). Les politiques démographiques (planning familial, réduction de la natalité) ne sont presque jamais citées, par contre quelques personnes ont cité des politiques pour développer l’emploi (souvent en précisant pour les jeunes). Comme analysé précédemment, il existe des différences entre les réponses faites en milieu rural et celles faites en milieu urbain. En ce qui concerne les menaces, en zone urbaine la sécurité, la maladie (des hommes) et le manque d’emplois représentent au total 44% des réponses, contre seulement 15% en milieu rural où l’insécurité alimentaire et les accidents climatiques cumulent près de 60% des réponses et le manque de terre regroupe 7% des réponses, presque autant que les maladies humaines et plus que l’insécurité. Pour les perspectives, si les infrastructures sont autant citées dans les deux milieux (35% des réponses), ce ne sont pas les mêmes types qui sont mentionnés puisque en zone urbaine santé et école cumulent 75% des infrastructures contre moins de 50% en zone rurale. Si le développement agricole est largement cité en zone urbaine (moins de 25% des réponses) son score est nettement supérieur en zone rurale (46%). Mais la principale différence provient du taux de réponse de la bonne gouvernance et la cohésion sociale, les politiques d’emploi et de sécurité qui cumulent 42% des réponses en milieu urbain contre seulement 4% en milieu rural. Enfin, le planning familial et la réduction de la natalité n’ont été cités qu’en milieu rural.