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LE CAS DU PROJET D’AGGLOMÉRATION FRANCO-VALDO-GENEVOIS

!

!

Sébastien Alcaix!

Université Lumière de Lyon

!Sise entre la France et la Suisse, la métropole genevoise, transfrontalière, élabore un projet de coordination des politiques d’aménagement à travers les différents territoires qui la compose au sein du bassin genevois. Elle valide le projet d’agglomération franco-valdo-genevois, support de ses projets, dans sa deuxième version (2012-2016).

L’objectif est de parvenir à définir une politique globale d’aménagement du territoire, qui a pour but de se décliner sur les différentes intercommunalités membres. Le canton de Genève dispose d’une longue tradition de planification. De leur côté, les collectivités françaises ont bâti leurs documents d’urbanisme plus

récemment, en parallèle d’une

réflexion intercommunale. L’important développement de l’agglomération genevoise dépasse aujourd’hui les frontières. Le premier projet

d’agglomération est validé en 2007 et s’inscrit dans un contexte géopolitique particulièrement complexe.

Le projet d’agglomération s’est élargi à des réflexions territorialisées, dans le cadre d’un urbanisme de projet. C’est dans ce sens que, parmi d’autres

thématiques, a été dressé un diagnostic paysager et élaboré un projet agricole.

Le paysage est un élément fort de la constitution du projet et tient une place importante en Suisse où un lien

étroit le relie à l’agriculture. Le

développement de Genève a nécessité de bâtir une agglomération commune avec une volonté de coordination et de rapprochement. Cette dynamique est très récente et se heurte à une méfiance réciproque entre les acteurs genevois et leurs voisins.

Cette contribution se propose d’évaluer comment la question paysagère peut constituer un élément fédérateur entre les différents territoires qui composent la métropole genevoise. Nous

formulons l’hypothèse que le paysage constitue un outil permettant d’établir des liens et de créer un sentiment d’appartenance. Dès lors, nous

pouvons parler de territoire commun et partagé pour pallier les difficultés propres à la frontière. Mais, plus encore, nous nous proposons d’identifier comment, à travers le paysage, les différents territoires, s’inscrivent dans cette dynamique où, au contraire, réagissent en réaction.

Enfin, le rôle de l’agriculture pose question.

Fédérer les territoires par le paysage est une dynamique forte, motrice, qui interpelle aujourd’hui, à l’heure de l’émergence des intercommunalités et des métropoles. La construction d’une identité territoriale à l’échelle du projet d’agglomération passe par

l’appropriation des populations de ce

! 28 ! territoire. Nous nous proposons de

voir comment cette identité, à travers l’étude des Schémas de cohérence territoriaux (SCoT), du Plan directeur cantonal (PDC) et du Projet

d’Agglomération, participe à leur réunion ou à leur construction.

Institués en 2000, les SCoT ont permis aux communes françaises, de réfléchir ensemble à un projet commun.

Cet urbanisme de projet a contribué à faire émerger la question paysagère au sein de la construction

intercommunale. Elle a permis de considérer les espaces agricoles sous un nouvel angle. L’analyse a porté sur les SCoT de Faucigny Glières et du Pays de Gex, complétée avec celle du PDC et du projet d’agglomération franco-valdo-genevois.

Nous proposons, dans un premier temps, de détailler notre approche en modélisant les liens entre l’agriculture et le paysage. Dans un second temps, nous donnerons des pistes de

définition d’une identité commune au territoire et du rôle que jouent les espaces agricoles en ce sens. Puis, nous montrerons de quelles façons le

paysage est mentionné dans les divers documents intercommunaux de planification et dans quels buts il est vecteur de territorialisation.

LA MODÉLISATION DE L’AGRICULTURE À TRAVERS LE PAYSAGE : NOTIONS DE DISTANCES ET DE REPRÉSENTATIONS L’attractivité économique genevoise induit un développement important, à la fois d’accueil d’entreprise et de population. Or, le canton de Genève demeure très attractif pour les

entreprises et le côté français pour les logements. Sa dynamique de

production de logements ne corrèle pas avec celle de l’accueil des entreprises.

En 2012, plus de 75 000 travailleurs dans le canton habitent de l’autre côté de la frontière (statistiques cantonales), où le rythme des constructions s’y accroît beaucoup plus rapidement.

Les populations venues de la ville urbanisent davantage les territoires périurbains, malgré la frontière. Elle se produit, à travers les constructions, mais aussi en fonction des

représentations des urbains et de leur rapport à la campagne. Les espaces agricoles y sont fortement impactés.

La question de leur nouveau rôle dans l’aménagement de l’espace est posée.

Ils constituent des éléments incontournables et participent pleinement à la construction d’une identité partagée, à travers le paysage.

Il existe, des deux côtés de la frontière, des liens très étroits entre les

perceptions paysagères et les espaces agricoles. Ils sont, pour les urbains, des supports contre des problèmes de

natures différentes. Lors d’un entretien, Sébastien Beuchat, chef de projet, établit clairement un lien entre paysage et agriculture : «c’est en voulant

garantir cette trame des espaces

ouverts que l’on a commencé à se dire que nous avions les espaces ouverts, le lac, les forêts, les cours d’eau, etc., mais aussi les espaces agricoles». Selon lui, les agriculteurs genevois «sont devenus plus rapidement urbains que ne le sont devenus les agriculteurs français que je vois encore actuellement. Maintenant ils sont tous [les agriculteurs genevois]

convaincus que chaque mètre carré de terre agricole n’a pas qu’une fonction, il y a toujours plein de fonctions, la fonction biodiversité, la fonction paysagère, etc. Alors que quand je vais dans la vallée de l’Arve, mais même pas très loin, […] la notion chez les agriculteurs est que l’espace, c’est chez

nous et que ce n’est pas un espace que l’on partage». Dans l’analyse urbaine, le paysage est un réel outil

d’appropriation de l’espace.

LE PAYSAGE COMME UNE IDENTITÉ DU TERRITOIRE ET ÉLÉMENT FORMATEUR La méthodologie employée se veut ascendante. Elle part de l’analyse de documents d’urbanisme pour expliquer des situations et des volontés

d’aménager l’espace à travers une réflexion sur le paysage. Quatre documents ont servis de support à l’analyse : le diagnostic paysager du Projet d’agglomération franco-valdo-genevois, élément du projet

d’agglomération en cours de validation, la partie «Nature, paysage et espaces agricoles» du Schéma directeur (SD) 2015 du Canton de Genève, le

diagnostic paysager du SCoT du Pays de Gex et celui du SCoT de Faucigny-Glières.

Le paysage, dans l’agglomération franco-valdo-genevoise, s’appuie sur des éléments relatifs à la topographie et les politiques publiques le

reconnaîssent comme des éléments de territorialisation (Lussault, 2007). La notion d’emblème est très forte et est employée dans l’agglomération franco-valdo-genevoise. Le sentiment

identitaire est recherché. L’agriculture tient un rôle particulier. Elle contribue à distinguer et à ouvrir les vues sur eux.

Donner une identité commune au territoire est le but du diagnostic paysager entreprit dans le cadre du projet d’agglomération franco-valdo-genevois. Elle s’inscrit comme un long processus qui est activement recherché par les acteurs, pour justifier que la population vit bien sur un même territoire, ou pour justifier son existence.

Situé au centre du projet

d’agglomération, le canton de Genève constitue le cœur du bassin genevois, à la croisée du lac Léman, du Rhône et de l’Arve. À l’échelle du canton, ce sont les «espaces ruraux» et ses

composantes paysagères qui forment l’identité du territoire. Le bassin genevois y tient une place importante dans l’identification et l’attractivité du territoire. Dans ce contexte, les liens entre le cadre naturel, l’agriculture et le paysage dans la formation de l’identité du territoire sont clairement affirmés.

L’identité s’appuie sur les éléments du socle, mais aussi sur les espaces ouverts, en particulier agricoles, ce qui peut paraître paradoxal dans un territoire très fortement urbanisé. En outre, le canton s’identifie à des éléments structurants tels que le lac Léman, le Rhône et l’Arve, ainsi que le Jura et le Salève, deux derniers éléments hors de son territoire, mais vus et appropriés par la population.

Pays de Gex est composé d’une moitié ouest (le Jura), uniquement reliée aux autres communes par le col de la Faucille et d’une moitié est, constituée de la plaine du bassin genevois. Il est fait mention de la situation

transfrontalière. L’identité s’inscrit à l’opposé de Genève, autour du Jura.

Nous avons pu constater que les références à Genève et au Genevois étaient couramment mentionnées, mais beaucoup moins que celles relatives au Jura. Le lac Léman l’est très peu. Alors que les ouvertures de vues vers la vallée de l’Arve et la chaîne du Mont-Blanc sont tout à fait

remarquables, les mentions autour d’elles sont inexistantes. L’état initial de l’environnement valorise le

territoire à travers l’agriculture. Elle est mentionnée directement, mais aussi

! 30 ! indirectement, pour des enjeux de

valorisation du patrimoine. Elle est toutefois clairement indiquée comme une entité structurante. L’identité gessienne passe par l’agriculture et son cadre de vie. Ce lien est clairement établi. La notion d’identité pour le Pays de Gex semble plutôt s’appuyer plutôt sur un repli sur soi, alors que, paradoxalement, l’influence de Genève est particulièrement grande.

L’agriculture semble être utilisée comme une référence dans ce but et ce à travers le paysage.

Établie aux pieds du Môle et au cœur de l’Arve, la Communauté de

communes Faucigny-Glières semble s’inscrire dans une logique de vallée lorsqu’elle fait état de son

environnement paysager. La pression genevoise se lit moins que pour le Pays de Gex car moins forte. Les mentions faites sont celles de la vallée de l’Arve et de deux emblèmes : le Môle et la Pointe d’Andey. Ancrée dans une logique de vallée, l’analyse du site semble tourner son regard vers le Mont-Blanc, mentionné bien que non visible depuis le territoire, au

détriment, là aussi, de la dynamique des flux dominants, orientée vers Genève. Les espaces agricoles sont constamment évoqués dans leur rôle d’entretien des espaces ouverts, pour dégager les vues. Mais, l’état initial de l’environnement identifie un lien clair entre la valorisation de l’identité d’un site et l’entretien de ses ouvertures par l’agriculture. L’agriculture contribue à poser des limites claires à l’urbanisme diffus, voire confus. Elle semble servir à justifier les contours d’un territoire, tourné autour de Bonneville.

Autre territoire émergent, le projet d’agglomération franco-valdo-genevois dresse son diagnostic paysager. L’un

des objectifs, clairement affiché, est de donner une identité au territoire. Il reconnaît, lui aussi, un rôle important à l’agriculture à cette logique

identitaire, directement ou

indirectement. Il établit un lien très étroit entre l’agriculture et la

construction d’une identité. Cette logique s’inscrit dans la tradition suisse qui a marqué son territoire (Walter, 2011). Pour affirmer sa logique, le diagnostic paysager du projet

d’agglomération franco-valdo-genevois souhaite produire un territoire, à

travers le paysage.

L’agglomération

franco-valdo-genevoise est constituée de plusieurs territoires dont beaucoup sont en émergence et ressentent le besoin de s’affirmer. Le paysage, à travers les espaces agricoles, est un vecteur puissant d’affirmation. L’agriculture, malgré son ancrage actuel dans la modernité, conserve toujours une image d’activité traditionnelle dont les acteurs font référence en réaction au développement urbain et à la

modernité. Il est encore difficile de dégager une identité commune et partagée à l’échelle du bassin genevois.

La logique d’identité demeure

paradoxale car, si elle peut être utilisée pour fédérer des territoires autour d’un bassin géographique commun, elle peut également l’être dans une logique de séparation et d’affirmation

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LES DIFFÉRENTES MENTIONS DU PAYSAGE DANS LES DOCUMENTS D’URBANISME

Dans cette partie, nous avons croisé des critères précis, dans une analyse comparative des différents documents d’urbanisme : les éléments d’appui à l’analyse paysagère (mots et analyses syntaxiques), ceux utilisés pour

valoriser le paysage et ceux mentionnés lorsqu’est fait le lien entre agriculture et paysage. Ce travail s’appuie sur des éléments qualitatifs pour établir des comparaisons. Il est à noter que la comparaison entre ces différents

documents d’urbanisme ne saurait être réellement objective. En effet, leurs portées réglementaires sont différentes.

Le projet d’agglomération franco-valdo-genevois constitue un document de projet. En outre, les SCoT et le diagnostic paysager du projet

d’agglomération franco-valdo-genevois ont été réalisés par l’appui technique de bureaux d’études différents.

Secteur par secteur, entité par entité, le diagnostic paysager du projet

d’agglomération franco-valdo-genevois reprend les éléments emblématiques qu’il utilise pour poser les contours de l’agglomération. Les SCoT étudiés énumèrent ceux qui se trouvent dans leur territoire. Seul le SDC mentionne la référence du Salève. Les Genevois perçoivent les montagnes et toutes se situent en France. Dans tous les documents étudiés, le paysage est analysé en premier lieu à travers le socle physique. Seul le Canton de Genève ne s’appuie pas sur des éléments topographiques dans son analyse du paysage. Elle n’est pas utilisée comme un élément structurant de leur territoire. Chaque diagnostic reprend la notion de repère, de motif permettant de s’identifier dans le territoire pour se reconnaître.

En revanche, l’analyse paysagère ne s’appuie que relativement peu sur les éléments du bâti. Ils donnent

l’impression de mettre en avant certains sites particuliers. La

dimension territoriale n’apparaît pas mise en lumière, excepté pour décrire des éléments patrimoniaux, culturels et

historiques. Pourtant, leur pouvoir structurant, dans les territoires, est très fort et sert de repères visuels. Force est de constater qu’ils ne sont pas mis en exergue dans le cadre des SCoT, où ils ne sont pas mentionnés comme étant des éléments incontournables.

Néanmoins, le regard qui y est donné

— le paysage — est pleinement d’origine anthropique. L’habitant décrit et analyse le paysage de son territoire en se basant sur des motifs paysagers qu’il n’a pas même conçu.

Quelles sont les raisons qui le poussent vers eux ? Pourquoi tourner le dos à ces éléments vernaculaires ?

À l’inverse, les espaces ouverts font partie des thèmes valorisés dans l’ensemble des documents. Ils sont repris à la fois pour décrire le paysage, mais aussi — et c’est là le point

particulier — comme élément de valorisation. Après les éléments du socle, ce sont les espaces ouverts qui sont valorisés et mentionnés comme étant structurants. L’approche

anthropique est ici beaucoup plus présente que pour le bâti, notamment à travers l’agriculture et les trames bocagères et arborées, unanimement mentionnées. À travers les espaces agricoles se lit surtout la prédominance de l’ouverture des espaces et de la trame bocagère. L’agriculture contribue à être vue, mais aussi à donner à voir le territoire. À noter qu’elle est souvent mentionnée pour structurer le territoire et qu’elle est un support des représentations

, ce qui conforte ses liens avec le paysage.

CONCLUSION

Le paysage est un outil de

représentation du territoire pour les urbains. Il peut être pris sous

! 32 ! différentes formes. Dans l’urbanisme,

il émerge véritablement avec la naissance des intercommunalités.

L’analyse des documents étudiés nous a permis de dégager différents aspects de son appropriation par les acteurs urbains. En effet, le paysage est un élément important pour dessiner des contours à l’urbanisation et justifier les limites d’un territoire.

Le paysage fédère, par des vues lointaines et des ouvertures sur le bassin genevois et les montagnes. Les vues dégagées sont, à travers le paysage, le moyen pour l’habitant de prendre conscience qu’il habite son territoire.

Face à l’attractivité genevoise et la pression qui se dessert sur l’hinterland, les intercommunalités françaises, à travers nos deux exemples, utilisent le paysage comme un rempart. La notion de partage est beaucoup moins

affirmée et les éléments du socle sont valorisés. L’analyse paysagère semble porter son regard en retrait, lorsque les flux dominants sont orientés vers Genève. À travers ses dimensions patrimoniales, c’est une logique d’identification qui s’impose.

Dans ce contexte, l’agriculture est traitée sous l’angle de l’entretien du territoire. Elle n’est pas reconnue par ses capacités à produire le paysage, à agir sur eux, mais plutôt comme une activité figée. Qui plus est, elle est valorisée via le patrimoine. Depuis des siècles, l’agriculture du bassin genevois contribue à l’approvisionnement de Genève. L’activité se modernise, s’adapte continuellement aux

évolutions des demandes sociétales.

Pourtant, même si elle peut être parfois reconnue sous ces aspects, elle n’est valorisée que par ceux orientés vers le passé. Le paysage doit aider l’agriculture à s’inscrire dans le

nouveau contexte intercommunal pour l’aider à aller de l’avant et non glisser vers des représentations dépassées.

Fédérer les territoires dans le bassin genevois n’est pas chose aisée et le paysage n’est qu’un outil. Comment inclure également les éléments

vernaculaires structurants que sont le bâti et les voies de communication ? Le paysage ne semble se saisir que de quelques aspects sans prendre en compte le territoire transfrontalier dans son ensemble. L’agriculture, dont il est constamment fait référence, a un défi à relever et semble être un élément indispensable de la constitution d’une agglomération transfrontalière.

BIBLIOGRAPHIE

LUSSAULT M. 2007. L’homme spatial, La construction sociale de l’espace humain. Paris, Le Seuil.

DIAGNOSTIC paysager du Projet

d’agglomération franco-valdo-genevois, élément du projet d’agglomération franco-valdo-genevois en cours de validation. Partie «Nature, paysage et espaces agricoles» du Schéma Directeur (SD) 2015 du Canton de Genève, dans sa dernière version approuvée.

DIAGNOSTIC paysager du SCoT du Pays de Gex, dans sa version approuvée au 12 juillet 2007, DIAGNOSTIC paysager du SCoT de Faucigny-Glières, dans sa version approuvée au 16 mai 2011.

WALTER F. 2011. La Suisse, Au-delà du paysage.

Paris, Gallimard.

PAYSAGE DANS LES POLITIQUES

!La mobilisation du paysage évolue avec la montée des préoccupations

environnementales. Ces

préoccupations, qui influencent la planification urbaine, la conduite des projets et la forme des aménagements, convoquent le paysage d’un double point de vue. La nature est invitée en ville, pour les services écologiques qu’elle rend. Parallèlement, le paysage devient un des leviers de l’action environnementale. Qu’est-ce qui motive ces évolutions ? Quels rôles joue le paysage ? De quel paysage parle-t-on ?

Ces questions renvoient à une articulation entre environnement et paysage qui ne va pas de soi. Alain Roger a souligné leur irréductibilité théorique : entre notion scientifique dérivée de l’écologie et notion

culturelle dérivée de l’esthétique (Roger, 1998 : 126-144). Cette partition se comprend au regard d’un développement naturaliste de l’écologie qui a eu tendance à exclure l’homme (Barbault, 2006). L’homme, considéré comme une arme de destruction

massive, est devenu progressivement un acteur dans la protection des écosystèmes. Un lien s’est établi entre écologie et bien-être humain (MEA, 2005). Ce contexte redessine les frontières entre environnement et paysage. L’environnement, au sens biophysique, ne peut être dissocié de ce qui constitue notre environnement,

au sens commun, et dans lequel se déploie notre expérience paysagère.

Augustin Berque le souligne, en

définissant le paysage comme la forme d’un environnement, tel que celui-ci est concrètement vécu, perçu et conçu par une certaine société (Berque, 2006 : 856-858). La relation de l’homme à son environnement est paysagère ou esthétique, mais aussi écologique et technique ; avec des croisements possibles.

Cela nécessite de comprendre la coloration que prend l’environnement passé au filtre d’un regard paysager. Il met en avant une composante

esthétique qui vient compléter une part biophysique, traduite en qualité de l’air ou de l’eau. La dimension esthétique du paysage a été longtemps le domaine réservé de l’histoire de l’art. Alain Roger l’a élargie à l’action à travers l’artialisation (Roger, 1998 : 16-20), mais sans l’associer au quotidien.

Nathalie Blanc et Jacques Lolive le convoquent, en considérant

l’esthétique comme une expérience sensible, nécessaire pour rendre

l’esthétique comme une expérience sensible, nécessaire pour rendre