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Particularités des projections du système olfactif: anatomie du système olfactif

le conditionnement de peur

4.1. Pourquoi la modalité olfactive ?

4.1.2. Particularités des projections du système olfactif: anatomie du système olfactif

L'anatomie détaillée du système olfactif a fait l'objet de nombreuses revues de synthèse (Hildebrand et Shepherd, 1997; Mori, 1987; Shipley et Ennis, 1996). Toutefois, pour la suite de cet exposé, je ne retiendrai que les éléments nécessaires et n'entrerai dans les détails que lorsque cela sera utile à la compréhension des travaux de cette thèse.

Le système olfactif se compose de deux sous-systèmes distincts qui traitent en parallèle des informations chimiques différentes: les composés volatiles sont détectés par les neurorécepteurs de l'épithélium olfactif qui se projettent sur le système olfactif principal. En revanche, les composés odorants non volatiles, telles les phéromones (Mori, 1987), sont détectées par l'organe voméronasal dont les neurones se projettent sur le système olfactif accessoire. Ma thèse étant axée sur le système olfactif principal, je ne traiterai que celui-ci.

Les molécules odorantes sont piégées par le mucus de la cavité nasale et sont captées par les neurorécepteurs de l'épithélium olfactif. Cet épithélium tapisse la cavité nasale, qui est plus ou moins circonvoluée selon les espèces: ainsi, le rat a un épithélium particulièrement circonvolué ce qui augmente grandement sa surface de captation des odeurs.

Les axones des neurorécepteurs se regroupent pour former le nerf olfactif, traversent la lame criblée de l'ethmoïde et se projettent alors sur le premier relais de l'information olfactive, le bulbe olfactif (BO).

4.1.2.1. Le bulbe olfactif

Le rat possède un système olfactif développé et a donc un BO particulièrement volumineux comparativement à la taille de son cerveau. (voir Figure 4.1). Il est donc aisément accessible à l'expérimentateur.

Le BO présente une organisation laminaire formée de six couches de cellules concentriques avec, de la périphérie vers le centre: la couche des nerfs olfactifs, la couche glomérulaire, la couche plexiforme externe, la couche des cellules mitrales, la couche plexiforme interne et la couche des cellules granulaires. Les axones des neurorécepteurs font synapse sur les dendrites de plusieurs types cellulaires au niveau de la couche glomérulaire: les cellules mitrales et les cellules à panache, cellules relais du BO, et les cellules périglomérulaires (voir Figure 4.2). Les différentes synapses se font au niveau de sous-unités fonctionnelles du BO, les glomérules. Les glomérules sont des structures sphériques de 80 à 160 µm de diamètre qui sont délimités par les corps cellulaires des neurones juxta-glomérulaires, principalement les neurones périglomérulaires, les cellules à panache et les cellules à axone court (Pinching et Powell, 1971, 1972). Les cellules mitrales forment des synapses réciproques dendrodendritiques avec deux classes d'interneurones, les cellules périglomérulaires au niveau du glomérule et les cellules granulaires. Les axones des cellules mitrales et à panache forment le tractus olfactif latéral.

L'une des particularités anatomiques principales du système olfactif est que le BO se projette directement et sans relais thalamique sur de nombreuses structures limbiques et corticales. L'ensemble de ces structures est connu sous le vocable cortex olfactifs primaires (pour revue, voir Cleland et Linster, 2003). Pour la suite, je ferai une séparation entre les structures limbiques et non-limbiques.

Figure 4.1 Photo d'un cerveau de

rat. Le bulbe olfactif est cerclé de jaune.

4.1.2.2. Projections du bulbe olfactif sur les structures

non-limbiques

Tout d'abord, le BO se projette massivement sur le cortex piriforme, le noyau olfactif antérieur, et le tubercule olfactif (De Olmos, Hardy et Heimer, 1978, pour revue, voir Cleland et Linster, 2003) (voir Figure 4.2 p.118).

De toutes ces structures, le cortex piriforme est celle qui reçoit la plus forte innervation en provenance du BO (Haberly, 1973). Ce cortex est un paléocortex simple à trois couches. La couche I ou couche plexiforme est celle où se fait la majorité des synapses sur les dendrites des cellules pyramidales de ce cortex. Dans la couche Ia se font les synapses entre les cellules pyramidales et le tractus olfactif latéral, tandis que dans la couche Ib se fait la majorité des synapses d'un dense système de fibres d'association. Les couches II et III, plus profondes, contiennent les corps cellulaires des cellules pyramidales et non-pyramidales.

A partir d'observations anatomiques et fonctionnelles sur lesquelles nous reviendrons plus loin dans ce manuscrit, le cortex piriforme peut être divisé en deux parties distinctes, le cortex piriforme antérieur (CPa) et postérieur (CPp) (Chabaud et collaborateurs, 2000;

Figure 4.2 Schéma représentant les différentes couches cellulaires du bulbe olfactif

Chabaud, Ravel, Wilson et Gervais, 1999; Haberly, 1973; Litaudon, Datiche et Cattarelli 19973; Mouly, Fort, Benboutayab et Gervais, 2001; Mouly et Gervais, 2002). Anatomiquement, Haberly (1973) a montré que le BO est fortement connecté au CPa comparativement au CPp tandis qu’un réseau intrinsèque plus dense de fibres d’association existe dans le CPp, qui est plus fortement interconnecté aux structures associatives, tels le CPF et le cortex orbitofrontal (Haberly, 2001) (voir Figure 4.3).

4.1.2.3. Projections sur le système limbique

En plus de sa projection directe sur le cortex piriforme, le BO se projette en peu de synapses sur deux structures clef de la mémoire en général et du conditionnement de peur en particulier: l'amygdale et l'hippocampe (voir Figure 4.3).

Concernant l'hippocampe, le BO se projette d'abord sur le cortex entorhinal latéral qui se projette ensuite sur l'hippocampe. De nombreuses études ont montré l'importance fonctionnelle de cette structure dans les apprentissages olfactifs sur le rat vigile (par exemple, voir Kay et Freeman, 1998; Mouly, Fort, Benboutayab et Gervais, 2001). Le cortex entorhinal

Figure 4.3 Schéma des principales voies de projections du bulbe olfactif

ACo: noyau cortical de l'amygdale; BLA: complexe basolatéral de l'amygdale; BO: bulbe olfactif; CEL: cortex entorhinal latéral; COF: cortex orbitofrontal; CPa, CPp: cortex piriforme antérieur et postérieur; CPF: cortex préfrontal; Hip: hippocampe; PAC: cortex périamygdalien, TOL: tractus olfactif latéral

latéral est la voie d'entrée majeure de l'hippocampe (pour revue, voir Cleland et Linster, 2003). Ainsi, les informations olfactives atteignent l'hippocampe en deux synapses.

Concernant l'amygdale, une seule synapse suffit: le BO se projette massivement sur le PAC et l'ACo, qui font partie des noyaux corticaux de l'amygdale (McDonald, 1998; Price, 1973). D'ailleurs, selon Swanson et Petrovich (1998), l’ACo serait un prolongement amygdalien du cortex piriforme. Ainsi, à la différence des systèmes visuel et auditif, le premier noyau amygdalien atteint par les afférences olfactives n'est pas le BLA. Il n'est atteint que secondairement, via l'ACo et le PAC, ce dernier s'y projetant de façon massive (Savander, LeDoux et Pitkänen 1996; Swanson et Petrovich, 1998). Comme pour les systèmes visuel et auditif, le système olfactif peut également atteindre le BLA indirectement via des structures corticales. Seulement, le BLA ne reçoit que de faibles afférences du cortex piriforme (Krettek et Price, 1978; Luskin et Price, 1983a; Ottersen, 1982; pour revue voir Otto, Cousens et Herzog, 2000). La voie corticale principale est via le cortex périrhinal antérieur, qui est fortement et réciproquement connecté au LA (Burwell, Witter et Amaral, 1995). Des voies plus indirectes existent également: le BO se projette sur le cortex piriforme et le cortex entorhinal latéral, qui se projettent à leur tour sur le cortex périrhinal (revue dans Otto, Cousens et Herzog, 2000). Cependant, bien que le BLA ne soit pas le premier noyau amygdalien atteint, il répond fortement aux odeurs puisque Cain et Bindra (1971) ont montré que 42% de ses neurones sont activés par la présentation d'odeurs, soit une proportion à peine plus faible que dans l'ACo (46%).

Ainsi, dans le système olfactif, les projections au niveau de l'amygdale ne se font pas directement au niveau des noyaux classiquement décrits comme impliqués dans le conditionnement de peur à des stimuli non olfactifs. Ces projections sont monosynaptiques et sans relais thalamiques, c'est-à-dire que le système olfactif se projette rapidement sur les structures impliquées dans la mémoire et les émotions. Au vu de ces particularités anatomiques, on peut se demander si le circuit mis en évidence dans le conditionnement de peur au son est également valide dans le cas d'un conditionnement de peur à l'odeur.