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latéral et neurones intercalés

3.4. Le conditionnement de peur au contexte: importance de l'hippocampe

3.4.1. L'hippocampe, une structure majeure

L'acquisition d'une peur conditionnée au contexte relèverait de l'apprentissage spatial d'une part, c'est-à-dire la capacité de mémoriser l'emplacement des différents indices contextuels, et de l'apprentissage configural, c'est-à-dire la capacité à lier entre eux des éléments disparates d'un contexte pour en avoir une perception unifiée (Sutherland et Rudy, 1989;Nadel et Willner, 1980). Fanselow (1986; 1990) a montré qu'un animal n'apprenait pas le contexte de conditionnement s'il recevait des chocs immédiatement après avoir été placé dans la cage, c'est-à-dire sans avoir eu le temps nécessaire pour associer entre eux les différents éléments qui forment ce contexte. En revanche, Barbelivien et collaborateurs (2006) ont montré que des animaux élevés dans des environnements enrichis (à l'aide de tunnels, roues, chaînes, jouets, échelles…) montrent une augmentation des capacités à apprendre le contexte de conditionnement qui arrive à diminuer les capacités d'apprentissage du SC sonore. L'enrichissement de leur environnement de vie leur permet d'améliorer leurs capacités d'analyse des indices contextuels.

Il a été montré que l'hippocampe est la structure la plus appropriée pour sous-tendre l'apprentissage de peur au contexte. Ainsi, plusieurs études ont montré que la lésion de l'hippocampe dorsal entraînait une amnésie rétrograde (pour revue, voir Anagnostaras, Gale et Fanselow, 2001; Holland et Bouton, 1999). La lésion de cette structure peu de temps après le conditionnement (un jour pour Kim et Fanselow (1992) et Anagnostaras, Maren et Fanselow (1999), un à vingt-huit jours pour Maren, Aharonov et Fanselow (1997)), entraîne un sévère

déficit rétrograde. En revanche, la même lésion faite à des délais plus longs, c'est-à-dire portant sur une mémoire plus ancienne et donc plus consolidée (vingt-huit jours pour Kim et Fanselow (1992), cent jours pour Maren, Aharonov et Fanselow (1997) ou cinquante jours pour Anagnostaras, Maren et Fanselow (1999)), est sans effet sur l'expression de peur conditionnée au contexte. Ces résultats, en accord avec ceux de Maviel, Durkin, Menzaghi et Bontempi (1997) qui montrent un désengagement de l'hippocampe au cours du temps, dans une tâche d'apprentissage spatial chez la souris, corroborent ceux chez l'homme concernant l'implication de cette structure dans la mémoire (Squire et Alvarez, 1995). Plus précisément, l'hippocampe serait primordial dans la consolidation d'une mémoire récente, ce qui expliquerait les effets délétères de sa lésion peu de temps après l'apprentissage. En revanche, les mémoires anciennes et bien consolidées seraient devenus indépendantes de l'hippocampe, ce qui expliquerait que la lésion de l'hippocampe reste sans effet sur l'expression de ces apprentissages anciens. Dans le cas particulier du conditionnement de peur, le premier rôle de l'hippocampe serait de consolider la représentation spatiale du contexte dans les aires corticales (Maren, Anagnostaras et Fanselow, 1998, Young, Bohenek et Fanselow 1994).

En plus d'entraîner une amnésie rétrograde, certains auteurs ont noté que la lésion de l'hippocampe induisait également une amnésie antérograde, c'est-à-dire une incapacité à acquérir de nouveaux apprentissages. Ainsi, à l'aide de lésions de l'hippocampe avant le conditionnement, de nombreuses études ont montré que les rats manifestaient des déficits d'apprentissage du contexte (Kim, Rison et Fanselow, 1993; Maren et Fanselow, 1997; Phillips et Ledoux, 1992; Young, Bohenek et Fanselow 1994). Par une autre approche, Rudy (1993) a fait le même constat. Il a mentionné que l'association unique entre un son et un choc dans un contexte nouveau entraîne un apprentissage à la fois du stimulus conditionnel et du contexte de conditionnement chez de jeunes rats âgés de vingt-sept jours. En revanche, de plus jeunes ratons de dix-huit jours, chez qui l'hippocampe est immature, qui subissent le même conditionnement apprennent bien à associer le SC au choc mais montrent un déficit d'apprentissage du contexte. Dans une étude électrophysiologique effectuée sur des souris vigiles, Desmedt, Garcia et Jaffard (1998) ont montré que l'apprentissage de peur au contexte s'accompagne de plasticité synaptique dans l'axe hippocampe/septum. Cette série de résultats montre que l'hippocampe semble être nécessaire à l'acquisition d'un apprentissage contextuel dans le conditionnement de peur.

A l'inverse, de nombreuses études ont montré que l'absence de l'hippocampe est sans effet sur l'apprentissage de peur au contexte chez ces animaux. Ainsi, Maren, Aharonov et Fanselow (1997) ont montré que la lésion après apprentissage entraîne une amnésie rétrograde

mais que la même lésion une semaine avant cet apprentissage n'empêche aucunement les animaux d'apprendre à associer le contexte de conditionnement aux chocs électriques. De même, Phillips et LeDoux (1994) ont testé les effets de la lésion de l'hippocampe dorsal dans trois conditions: la première où le SC et le SI sont appariés, la deuxième où ils ne le sont pas et la troisième où les animaux ne reçoivent que des chocs sans SC. Ces deux auteurs ont montré que cette lésion n'a d'effets que sur l'apprentissage en condition appariée, c'est-à-dire quand le contexte est un élément en arrière plan du SC. La lésion de l'hippocampe dorsal reste sans effet lorsque le contexte est l'élément saillant, c'est-à-dire lorsque les stimuli conditionnel et inconditionnel ne sont pas appariés ou lorsque les chocs électriques sont donnés seuls. Frankland, Cestari, Filipkowski, McDonald et Silva (1998) ont montré que la lésion de cette structure n'empêche aucunement l'apprentissage contextuel mais entraîne des problèmes de discrimination de contextes chez les animaux lésés. Ces résultats corroborent ceux de Cho, Friedman et Silva (1999) qui montrent un effet de cette lésion uniquement sur les apprentissages spatiaux, pas sur le conditionnement de peur. Cette deuxième série de résultats va à l'encontre des premiers et laisse supposer que l'hippocampe n'est pas indispensable dans l'apprentissage des indices contextuels lors d'un conditionnement de peur.

Pour expliquer la disparité de ces résultats, Anagnostaras, Gale et Fanselow (2001) proposent que pour apprendre un contexte, deux stratégies sont offertes à l'animal:

- d'abord, celle que les auteurs appellent la solution représentationnelle unifiée (voir Figure 3.9 A). Dans ce cas, les élément du contexte (forme et couleur de la cage, texture du sol et des parois, indices visuels divers…) sont unifiés et représentés comme un tout grâce à l'hippocampe. Lors du conditionnement, le son qui est présenté à chaque arrivée de chocs électriques est fortement associé à eux et devient donc un bon indice pour l'animal. Par ailleurs, le contexte, traité comme un tout, est également fortement associé au stimulus inconditionnel. Lors du test de rétention, les animaux montreront un comportement de peur conditionnée à la fois au SC mais aussi au contexte. La lésion de l'hippocampe peu de temps après le conditionnement, alors que la mémoire n'est pas consolidée et n'est pas devenue indépendante de l'hippocampe, détruit la représentation unifiée du contexte qu'a l'animal. Ainsi, lors du test de rétention du contexte, il ne manifestera plus de peur conditionnée,

- la deuxième est la solution élémentaire (voir Figure 3.9B). Dans le cas où l'hippocampe est lésé, le SC va continuer à être fortement associé aux chocs électriques et entraînera donc un fort comportement de peur conditionnée. En revanche, l'absence d'hippocampe empêche d'unifier les indices contextuels en un tout. Chacun de ces éléments contextuels disparates est traité indépendamment par l'animal et sera donc faiblement associé

aux chocs électriques lors du conditionnement, sans nécessiter l'hippocampe. Ainsi, selon la saillance des éléments contextuels individuels au moment de l'acquisition et donc la force avec laquelle ils pourront être associés aux chocs électriques, leur représentation lors du test de rétention sera ou non suffisante pour entraîner une réaction de peur conditionnée chez l'animal. Ce dernier point explique que selon les études, l'hippocampe soit ou non délétère sur l'acquisition de l'apprentissage.