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Partenariat entre Tinqueux et Boudry (Burkina Faso)

Dans le document 92-93 : À quoi servent les bibliothèques ? (Page 143-146)

P A R A R N A U D S E G A R D

des Poètes 2017, un enseignant slameur burkinabè a également été invité.

Les collectivités travaillent actuelle- ment sur un projet de bibliothèque municipale, très attendue du corps enseignant, et futur lieu de vie de 80 m² où les habitants de Boudry pourront s’initier à l’outil informa- tique, jouer aux jeux de société ou participer à différentes actions culturelles.

Dans cette perspective, la ville de Tinqueux s’engage par un appui tech- nique et financier et jouit du soutien du ministère des Affaires étrangères ainsi que de la Région Grand Est. Cette mission m’a permis de ren- contrer les acteurs locaux et de mieux comprendre les réalités éco- nomiques, culturelles ou sociales du pays. À cette occasion, une réu- nion a eu lieu à Ouagadougou où le Directeur Général du service du Livre et de la Lecture Publique a manifesté un soutien sans équivoque au projet.

Un comité de pilotage a également été créé à Boudry dans la perspective de répondre au plus juste aux attentes de la population et l’un des piliers du projet est de soutenir clairement la chaîne du livre burkinabè, et plus lar- gement l’économie locale.

Pour donner de la cohérence au projet Pierre Nikiéma, originaire de la ville de Boudry, est accueilli à la Médiathèque de Tinqueux depuis février 2018, pour une durée de 6 mois, en tant que volontaire interna- tional. Ce jeune collègue aura ensuite la lourde tâche de prendre en charge le fonctionnement de la bibliothèque dont l’ouverture est prévue à l’au- tomne 2018. n La future bibliothèque communale de Boudry Photo s : A rn aud Ség ar d Accueil chez le chef coutumier de Boudry (à gauche au premier plan)

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L’ AFRIQUE FRANC OP HONE

AIMONS L’AFRIQUE !

Ce focus sur l’Afrique francophone pointe sur de belles

et motivantes expériences, de réjouissants témoignages

et même sur des actions de grande envergure. En le

préparant, nous nous sommes rendus compte combien les

acteurs et les actrices de terrain sont investi-es et portent

une véritable vocation.

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es professionnel-les du livre sont en général dans une forme de combat pour « imposer » ce qui marche notamment les projets de terrain et d’échanges, de partenariat entre deux villes, entre deux bibliothèques (Nord Sud). Dans ces cadres, la transmission de la culture auprès des populations semble plus pérenne et fiable, de faible envergure donc simple à gérer sur le long terme.

Il semble que le problème le plus important auquel tous les profession- nel-les dans les domaines éducatifs, culturels et artistiques sont confron- té-es sur l’ensemble du continent, reste la recherche d’un meilleur posi- tionnement de leurs activités selon les enjeux du développement des pays. Là où une grande majorité des populations n’a pas d’argent pour autre chose que les besoins vitaux ; là où les gouvernements donnent plus d’importance aux questions de sécurité territoriale et étatique qu’à l’agriculture, l’élevage et pire encore aux questions de santé et d’éducation

nationale, comment faire remonter dans les priorités absolues l’éduca- tion et la culture ? Comment prioriser ce qui, sur le long terme, devrait per- mettre aux pays d’enclencher le com- bat pour un développement plus har- monieux et ancré un projet politique démocratique et collectif ? Telle est la part de défi à laquelle sont confron- tés localement tous les acteurs et les actrices culturel-les.

Lorsque les structures arrivent à mettre en place une action mobili- satrice avec la coopération d’insti- tutions étrangères ou le soutien des fonds d’aide, les projets avancent. Mais une fois terminés ces projets de la coopération, la relève au niveau des moyens financiers n’est quasiment jamais assurée et ce qui a été construit est détruit. Aussi, dans la plupart des cas, il ne reste plus en héritage aux agent-es formé-es et à présent aguer- ri-es pour mener à bien les actions que la bonne volonté et la motivation. Certain-es s’accrochent pour assurer

de petites actions et des opérations simples. À terme, les valeurs sûres migrent ou s’envolent avec leurs com- pétences vers d’autres secteurs et on rentre dans un cycle d’éternel recom- mencement. Il faut imaginer Sisyphe africain…

Mais au-delà donc des questions de moyens et de priorisation, il manque surtout aux gouvernements une volonté politique pour faire perdurer les projets que portent les différents réseaux de lecture publique, de for- mation et tout simplement d’alpha- bétisation. Toutes choses qui consti- tuent des éléments clefs à la base de tout processus de développement et d’émancipation.

Bon nombre d’articles que nous publions sont positifs, motivés et déterminés mais le manque de sup- ports financiers mine les plus grands enthousiasmes et émousse les enga- gements les plus sincères. D’où cette pointe d’amertume qu’on repère

Oli vi a de l a P anne ter ie Oli vi a de l a P anne ter ie

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chez certain-es et qui frôle parfois le découragement.

Mais tout n’est pas perdu ! Certains gouvernant-es sont globalement conscient-es que pour améliorer l’avenir de leur pays, il faut une popu- lation éduquée. La bibliothèque est l’outil culturel idéal pour transmettre, pour jouer un rôle de passeur de savoirs, pour soutenir l’énergie des jeunes. Même si ce constat n’est pas un acquis garanti partout, c’est fon- damentalement un lieu d’échanges et de culture ouverts à toutes et à tous sans discrimination. Néanmoins en Afrique les enjeux sont encore plus étendus dans certaines zones, vu qu’il y a plusieurs positionnements qui se chevauchent. Cette Afrique, berceau de l’humanité, empreinte d’une tra- dition de l’oralité qui garde une puis- sance sans pareille ! Et maintenant cette jeunesse en quête d’émanci- pation et connectée sur les réseaux sociaux. Mais aussi l’Afrique est riche d’un patrimoine écrit encore trop

peu valorisé. Dans la grande zone sahélo-saharienne, il y a par exemple d’une part ce fonds ancien de manus- crits de Tombouctou non encore tota- lement décryptés. Et encore l’Afrique marquée par la pesanteur des mouve- ments religieux et le poids des tradi- tions qui ne promeuvent pas l’éduca- tion des filles

Pourquoi ne pas de mettre en lumière tous les éléments de ce continent pluriel, et s’en inspirer pour générer une passerelle entre la transmission livresque et celle orale ?

Au Nord, on parle de la bibliothèque 3e lieu et parfois même du 4e. Cette notion est assez récente et évolutive. La bibliothèque comme lieu de vie, lieu social où on peut s’informer, inno- ver, confabuler, co-construire, ren- contrer, découvrir et aussi se révéler, créer du lien.

L’immense travail de reconstruc- tion de la médiathèque de Zinder au Niger inaugurée par le président et l’ambassadeur de France est un exemple qui permet d’espérer que

le gouvernement ne va pas lâcher au-delà de la cérémonie.

Et si avant de remplir les rayon- nages d’une bibliothèque au fin fond du Burkina ou du Bénin, on ouvrait les portes en grand d’un lieu qu’on dirait culturel et social où les popu- lations pourraient d’abord trouver une écoute, des échanges... dans l’intergénérationnel, des idées sur tout et dans tous les domaines, pour enrichir et embellir leurs quotidiens, leurs vies, leurs rêves. La bibliothèque deviendrait un arbre à palabres géant qui serait vecteur d’histoires bien sûr mais surtout de cultures... Ce sera aussi un reflet de cette Afrique comme on la vit et qui bouge : magni- fique, puissante, innovante, opti- miste malgré certaines de ses fragili- tés. Un champ nouveau où les espoirs et les rêves trouveront leur place et des échos. On voit là qu’il y a tout un champ d’opportunités et de possibi- lités qui existe, qui reste à définir et à explorer. Apprenons à connaître ce continent et restons optimistes ! n

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L’ AFRIQUE FRANC OP HONE P A R V I V I A N A Q U I Ñ O N E S

PARTENARIATS :

LES BONNES PRAT IQUES

Dans le document 92-93 : À quoi servent les bibliothèques ? (Page 143-146)