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Coincé entre le Togo et le Nigeria, le Bénin est l’un des pays les plus pauvres d’Afrique De nombreux acteurs de toutes nationalités y

Dans le document 92-93 : À quoi servent les bibliothèques ? (Page 111-113)

agissent pour monter des projets de développement solidaire.

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HAMMESH 1 « Vers un monde meilleur » en fait partie. Jeune ONG créée en 2014, elle est basée en France mais a un relais au Bénin, à 40 kilomètres au Nord-Ouest de Cotonou, sur la commune de Tori-Bossito. Cette commune rurale compte près de 60 000 habitants et ne dispose que de très faibles ressources. L’agriculture y est limitée aux besoins de subsistance et le manque d’emploi des jeunes entraîne un exode vers la capitale économique du pays.

1 https://tinyurl.com/mh-afrique P A R S O P H I E C O U R T E L

Un centre d’accueil de bénévoles a été construit et c’est ici que les pro- jets sont mis en place, en partena- riat très étroit avec les habitants. Les domaines d’action de l’ONG sont larges, de l’éducation à la santé, de la construction de forages à la sensi- bilisation à l’hygiène et à l’usage de l’eau, en passant par le financement d’un four à pain dans un orphelinat, lui permettant ainsi de dégager des res- sources propres. Chaque volontaire accueilli peut apporter une pierre à l’édifice, quelques que soient leur pro- fession ou leurs envies : le centre a vu ainsi défiler des professeurs, des ingé- nieurs, des médecins, mais aussi des

retraités et des étudiants. À chaque profil sa mission !

Étant bibliothécaire en lecture publique depuis quelques années, j’ai donc proposé mes services dans le domaine de la culture. L’un des axes d’action de SHAMMESH est en effet la lecture, à travers leur programme Livres en brousse qui propose des livres pédagogiques mais aussi des jeux éducatifs aux écoles partenaires. Mon bénévolat s’est déroulé au mois d’octobre 2017, pendant lequel j’ai passé 15 jours sur deux missions : remettre en ordre la bibliothèque du

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N O 9 2- 93 - JUIN 2 01 8

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L’ AFRIQUE FRANC OP HONE

centre (2 500 livres, dont une partie fournie par Bibliothèques sans fron- tières) ; mais aussi et surtout intro- duire une forme d’animation bien connue des bibliothécaires : la lecture de kamishibaï.

Mon temps était donc divisé ainsi : le matin dans des écoles primaires, où j’aidais d’abord l’enseignant avec les leçons, avant de terminer la mati- née par des lectures ; l’après-midi au centre où je cataloguais la petite bibliothèque destinée à être utilisée par les bénévoles ou répartie entre les différentes écoles et l’orphelinat par- tenaires de l’association.

Les matinées passaient comme un éclair : cours de français, cours de géographie, cours de mathématiques, pour qu’ensuite on puisse pousser les tables, et c’était parti !

Avant ma mission, j’ai préparé une sélection de quelques kamishibaï, pri- vilégiant les belles illustrations ainsi que les histoires qui seraient parlantes pour des enfants béninois. La forme du kamishibaï a très bien fonctionné avec des groupes d’enfants peu habi- tués à écouter des histoires : la média- tion avec le théâtre en bois permet au lecteur de s’effacer et de les laisser

s’immerger dans l’histoire. Je m’étais entraînée à lire ces histoires, mais je me suis rapidement rendu compte que j’allais trop vite : les enfants pas- saient du temps à décrypter chaque image, un support qu’ils ont peu l’ha- bitude de voir puisque les classes ne comptent que de rares livres. À la fin de chaque séance, je demandais à un enfant de raconter lui-même une his- toire à ses camarades. Les Fables de la Fontaine s’y prêtaient particuliè- rement bien car ils les connaissaient déjà. Enfin, à l’issue de la semaine, j’ai consacré une séance à leur faire créer leur propre histoire. Ils n’en avaient pas l’habitude et ont été un peu désarçonnés : ils ont finalement préféré la partie dessin ! Au final, j’ai rassemblé le petit groupe de ceux qui étaient moins à l’aise avec l’invention et nous avons créé une histoire tous ensemble, qu’ils ont pu illustrer par la suite. À cette occasion, je me suis rendu compte qu’ils se souvenaient parfaitement des histoires que j’avais racontées pendant la semaine car cer- tains en ont utilisé des éléments dans leurs propres créations !

Deux fois par semaine, les après-midi étaient consacrées à un orphelinat un peu éloigné du centre. Là-bas, les relations avec les enfants sont très

différentes. Ils quittent rarement l’orphelinat, ils y mangent, dorment et prennent leurs cours. Une grande solidarité s’y est développée entre les enfants. Lors des séances, j’ai amené les kamishibaï et les grands albums cartonnés édités par Le Seuil, avec le texte sur des rabats. Les racontées se sont un peu passées différemment car les enfants, âgés de 1 à 18 ans, ont des niveaux de français assez dispa- rates. Au final, les plus grands tra- duisaient les histoires aux plus petits qui regardaient, fascinés, les images défiler. Les enfants se sont montrés curieux, en me posant de nombreuses questions sur le déroulé de l’histoire, sur ce que représentait telle ou telle image. Nous étions également équi- pés de jeux, et surtout d’un vidéopro- jecteur pour regarder des films. Les enfants attendent donc impatiem- ment le mercredi et le samedi où les volontaires viennent jouer avec eux, avant que l’après-midi ne se termine par une séance de cinéma. Ce furent des moments magnifiques entre par- tages, rires et apprentissages. Cette expérience était ma première en Afrique et j’y ai beaucoup appris, à la fois humainement et profession- nellement : j’ai vu ce que l’on pou- vait apporter à des enfants éloignés de toute forme de culture ainsi que l’importance de bien sélectionner les textes qu’on leur lit afin qu’ils soient les plus adaptés possible. J’ai surtout vu leurs sourires à la découverte des histoires et des images, inoubliables. n

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L’EUROPE ET L’AFRIQUE

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