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Palais des Congrds de Montr€al 10-11-12 d€cembre 1997

Dans le document eu treEc SYMPOSIUM (Page 165-171)

LA PREVENTION : LES APPORTS DIFFUS / P|ETTE BAT|I

Animateur

Monsieur Baril, la parole est i vous, maintenant.

M. Pierre Baril

Bonjour d tous. Je vais vous parler d'un probldme o0 on n'a pas trouvd de professeur d'universite pour vous l'expliquer, car trop complexe : en fait, je vais vous parler des pollutions d'origine diffuse. Aprds vous avoir fait faire un tour d'horizon sur le phdnomdne, je vais aborder les principes de pr6vention par rapport d ces sources de contamination que sont les pollutions d'origine diffuse. Je vais vous parler ensuite de strat6gie i privil6gier pour essayer des pr6venir; et puis enfin, je vais me permettre d'6laborer une prospective et une conclusion.

La pollution d'origine diffuse s'explique ainsi : c'est la pluie qui tombe sur le sol; elle martdle les surfaces, elle d6tache les particules. A un moment donn€, le sol devient satur6 et s'accumulent des volumes d'eau. Lorsqu'il y a une pente, un ruissellement et une 6rosion sont provoqu6s entrainant les particules qui ont €t€ d6tach€es; pour rejoindre les foss6s, les canalisations et les rividres. Ce problime a une particularit€: c'est qu'il y a de grandes variabilit€s spatio-temporelles. ll est r€parti al€atoirement sur le territoire et il apparait surtout i diff€rentes p6riodes de I'ann6e bien particulidres;

c'est un phEnomdne €v6nementiel. ll est possible, 6galement, de distinguer deux types d'apports de contaminants reli6s d ce processus. Monsieur Carignan les a bien soulign€s tout d I'heure : les excds d'azote et de phosphore qui sont, en fait, des El€ments naturels dans I'environnement mais qui, lorsqu'en excds, provoquent des d6sdquilibres qui perturbent la vie; et les bact6ries, les pesticides et les m6taux lourds, sont consid6r€s comme des micro-polluants parce qu'ils n'ont pas besoin d'€tre en trds grande quantit6 pour perturber les cycles de vie.

Les principales sources d'origine diffuse peuvent €tre cat6gorisGes en 4 classes: les sources natureiles et foresti€res, en fait, le bruit de fond qui anive dans les rividres i I'amont (il y a, bien s0r, quelques inconv6nients reli6s A I'exploitation forestidre, mais encore ld, les matidres en suspension et le carbone dissous sont consid€rds comme des apports mineurs). ll y a 6galement les surfaces urbaines et industrielles qui, par ruissellement, transportent les 6l6ments disponibles en surface; mais en g6n€ral, ces eaux rejoignent vite un r6seau de drainage ou de canalisation artificiel. Bien que le processus soit le m€me pour toutes les eaux de surface, les strat6gies de pr6vention sont plut6t reli6es i celles du ponctuel, parce qu'on rejoint une canalisation traitable.

Je vais surtout parler, cet aprBs-midi, de la source de contiamination majeure li6e aux apports diffus:

les apports d'origine agricole. L'occupation du sol, la quantit6 d'intrants et les pratiques agricoles effectudes sur une surface cultiv6e d6termine, en fait, la disponibilitE des €l6ments d €tre entrain€s.

Ces 6l6ments vont €tre plus ou moins adsorb6s sur la matrice de sol. La teneur en matidre organique, le pH, les types de sol, et l'argile, sont parmi les paramdtres qui d6crivent les conditions de disponibilit6 de ces 6l€ments. Une fois libres, ils sont disponibles, ils sont transport€s par l'Erosion et le ruissellement et dgalement au lessivage dans le cas de I'infiltration dans le sol. Les facteurs qui conditionnent ce transport sont nombreux: le potentiel d'6rosion, la pente, la v€gdtation, bref, c'est un amalgame complexe qui d6termine s'ily a dEpart ou non d'6l6ments.

Ce qu'on constate au Qu6bec, dans les grands bassins versants agricoles, c'est une augmentation de la saturation des sols en phosphore. Une fois que le sol est satur6'en phosphore, m€me si vous en remettez, les plantes ne pousseront pas plus. Ce sont donc des 6l€ments pr€ts d €tre entrain€s. On assiste €galement A une hausse des teneurs en azote, dans les eaux des grandes rivi€res, au Qu6bec. On s'apergoit, de plus, d'une pr6sence de pesticides et de bact6ries dans les eaux

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Symposium sur la gestion de l'eau au Qu6bec I 10-11-12 d6cembre 1997 IMontr6al

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souterraines. C'est essentiellement d0 A I'intensification que subie l'agriculture depuis les 30 dernidres ann€es, entrainant notamment une surfertilisation. On applique deux fois plus d'azote et de phosphore, dans la plupart des grands bassins agricoles, au Qu6bec, que ce dont les plantes ont besoin; parfois, jusqu'd 4 fois.

On assiste, 6galement, i un probldme de d6gradation des sols, par cette intensification d'agriculture.

Erosion, com-paction, salinisation provoquent des situations d plus grand risque, par rapport aux d6parts. Le drainage et I'artificiaiisation des cours d'eau acc6ldrent le transport des 6l€ments Jeiacnes; rejoignent-les r6seaux de drainage et plus rapidement les cours d'eau' On reldve aussi des utilisations non rationnelles de pesticides. Un petit exemple, ici (photo d'6pandeur d lisiers)' d'application : vous n'avez pas l'odeur, mais vous pouvez vous imaginer que,. parfois, les situations sont' assez complexes. Une fois, dpandu en trop grande quantit6, 9a rejoint des r6seaux de canalisation et de foss€s souvent d6grad6s. Au Qu€bec, les foss6s, les cours d'eaux municipaux, les zones exploit$es pour l'agriculture, ont 6t6 faites et travaill6es 'pas toujours' dans les rdgles de l'art de la conservation de la ressource.

Les grands principes de pr6vention reli6s d ce type de contamination sont de 3 ordres : la gestion des intraits, un contr6le de l'6rosion et du ruissellement, puis, enfin, lorsqu'on n'est plus capable d'agir en amont, on peut utiliser des techniques de mitigation. La gestion des intrants passe par des bilans d'azote et de phosphore €quilibr€s, donc par.des plans de fertilisation qui ajustent les quantit6s d'azote et, surtout, les doses qu'on alloue aux plantes. Quand on n'est plus capable, quand o.l en a trop, on doit penser d exporter les surplus. On parle, 6galement, de contr6le biologique relie d la reduction d'utilisation des pesticides. Surtout , ce sur quoi j'insiste: les pratiques d'6pandage ad€quates. Gela conditionne souvent la disponibilit€ des 6l6ments. Qu'est-ce qu'on met sur le sol ? Quand le met-on ? Combien en met-on ? Comment le met-on ? Et puis, o0 le met-on ? En fait, ces questions sont dEterminantes et influencent les 6rosions et le ruissellement d'6l6ments fertilisants et des pesticides.

Le deuxidme grand principe est reli6 au contr6le de l'€rosion et du ruissellement. En amdliorant la propri6t6 des sols, on am6liore I'infiltration, donc, on rdduit le ruissellement: En ayant une couverture v6g€tale, on a souvent un objectif de 30% de couverture v6g6tale, on r6duit nettement le d6tachement.

Puis enfin, lorsqu'on a agi au maximum sur la parcelle, on peut agir par des proc6d6s reli6s directement d des contrflles de ruissellement de surface, A des banquettes, des diguettes, des terrasses, diff6rents proc6d6s qu'on appelle m6caniques. Une fois qu'on a agi au maximum de ce qu'on pouvait faire en amont, il est €videmment possible d'utiliser des filtres v6g6tatifs, du type bandes riveraines, qui diminuent encore l'impact ponctuel i un site donn€. Ou, 6ventuellement, on parle d'utilisation de marais, de zones humides, qui combinent souvent d'autres usages, exemple: habitats fauniques, et qui, en m€me temps, traitent un rejet qui peut €tre d'origine agricole.

Les strategies i privildgier, par rapport I ces grands principes. Une dEmarche m6thodologique bien

$tablie: un inventaire, un diagnostic, une conception; on implante, et puis on suit. On doit 6galement adapter les stratOgies aux dchelles d'intervention : la parcelle, l'entreprise agricole, l'unit6 hydrologique El€mentaire qui forme le bassin versant, puis, Eventuellement, la r6gion. Cela provoque des logistiques trds diff6rentes et des moyens dgalement difi€rents pour rdgler le probldme.

Enfin, un ll€ment qui est pour moi la cl6, par rapport i la prEvention de ces types de contamination, c'est l'€valuation de la capacit6 de support d'un territoire pour I'agriculture. La dCfinition trds large de la capacit6 de support, Cest la capacit6 des sols cultivEs d'un tenitoire donn6 i recevoir la charge fertilisante des engrais de ferme. En g€n6ral, tout le monde est pas mal d'accord lidessus: on est

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capable de la calculer en utilisant toutes sortes de paramdtres et d'6quations. Cependant, il y a beaucoup de discussions sur les objectifs environnementaux. Les gens n'ont pas tous les m€mes objectifs, €videmment. Trois concepts sont sous-jacents, par rapport i la d€finition de la qualitE du soi : la capacit6 d'un sol d promouvoir la croissance des plantes, A prot6ger les bassins versants et i pr6venir la pollution de l'eau et de l'air, en tamponnant l'effet des sources potentielles de contaminants. C'est tir6 de la Sol/ Science Society of Ameica.

Comme je vous le disais, on peut aborder le probldme d diffErentes 6chelles. Comme ici (cartes de parcelles et de types de sol), on l'a abord€ au niveau de la parcelle, o0 on combine les types de sol avec le r6seau de parcelles pour en d6terminer, i l'aide des paramdtres, un minimum de rejet reli6 i une parcelle; alors, on dit que cette parcelle ne doit pas rejeter plus que 'x' kilos de phosphore d l'hectare. On peut Egalement l'€tudier sur un bassin versant, oU les normes de rejet sont d6termin€es par des usages d I'exutoire. lci (bassin versant de la rividre B6lair), une municipalit6 qui tirait son eau potable des eaux de surface; on a d€termin€ la capacit6 de support du milieu amont i g6rer un minimum d'azote et de phosphore, de bact6ries et diff6rents 6l6ments, pour que la municipalitd puisse jouir de l'usage de l'eau en aval. Enfin, on peut faire €galement des analyses €gionales de cette capacit€ de support. tci, on a 6valu6, dans une r6gion, un surplus de 1 200 000 mo de fumier et lisier de toute origine A g6rer. Puis, en fonction de diffErents sc€narios : le sc6nario 1 est le comblement du besoin des plantes en azote seulement; le scEnario 2 comporte le comblement de l'azote ou du phosphore moyen des sols; et le sc6nario 3 r6cup€re le comblement de I'azote ou du phosphore, mais avec les teneurs r6elles, dans le sol, en phosphore. Vous voyez qu'i ce moment-ld, on calcule des 6l6ments en surplus, de plus en plus importants.

En r6sum6, l'analyse concomitante, avec des objectifs parcellaires, d'entreprises agricoles, de bassins versants et de r6gions, doit €tre privil6gi6e. ll faut toujours remettre la parcelle dans une perspective plus large. Les actions doivent int6grer tous les aspects, technique, 6conomique, environnemental (pas toujours facile) et puis il doit y avoir un minimum de coh€rence entre les autres facteurs:

169lementaire, financier, 6conomique, social, et politique.

En prospective, je vous dirais que la r6duction de la pollution diffuse va passer par diff6rentes phases.

Une premidre phase, oU c'est simplement l'application des rdgles de I'art agronomique et du g6nie:

faire le m6nage dans la cour agricole par de la vulgarisation, de la sensibilisation, des services conseils adapt6s, et vous allez d6jd avoir une faible r€cup6ration des usages. Vous avez vu, tout d l'heure, qu'on 6tait dans une agriculture trds intense; on est presque i parler de 'trop intense', par rapport au milieu.

La deuxi€me phase de r€duction est celle ou on va int€grer les rdgles de I'art environnemental en plus des rdgles de I'art agronomique. Alors lA, on aura des objectifs qui vont €tre n6goci6s, on assistera i l"extensiftcation', puis on aura surtout d internaliser les co0ts environnementaux i I'int6rieur des systdmes de production agricole. A ce moment-ld, on pourra esp6rer une forte r6cupEration des usages de I'eau des grands cours d'eau et des grands bassins agricoles. La vitesse de I'implantation de ces r€gles va d6pendre d'une combinaison de facteurs. Est-ce que les lois et les r€glements sont en place et sont-ils appliquds ? Est-ce qu'il y a des programmes incitatift qui vont aider les gens i faire ce virage ? Est-ce qu'il y aura des taxes, des redevances, des systdmes d'aide financidre ? Est-ce que les gens seront responsables, est-ce qu'ils admettent qu'lls ont des probldmes ? Et enfin, est-ce que les contraintes externes n'auront pas trop d'influence, par exemple, pour l'ouverture des march€s ext€rieurs ?

Le deuxidme 6l6ment qui va influencer la vitesse d'implantation, c'est la forme de support i I'agriculture de l'6tat. L'6tat va toujours supporter I'agriculture, mais selon la forme de ce support, on aura plus ou moins un virage vert et rapide. Enfin, cela sera combin€ avec la revendication des

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usages de I'eau non agricoles dans les grands bassins versants agricoles. Je vous laisse, en conilusion, en disant que tes relations de cause d effet, les principes et les strat6gies de prEvention, de m€me que les principaux acteurs €tant connus, le maintien et la rdcup€ration des usages de l'eau reli6s d la pollution diffuse est une question de volont€ et d'application des comp6tences. Je vous remercie de votre attention.

Animateur Merci beaucoup.

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L'ETAT DE L'EAU AU OUEBEG

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