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Revue bibliographique

2. R EVUE BIBLIOGRAPHIQUE

2.2. E FFET DE L ’ OXYGENE DISSOUS SUR L ’ OXYDATION ET LA CSC DES ACIERS INOXYDABLES

2.2.2. Oxydation en milieu REB NWC et HWC

2.2.2.1. Oxydation en milieu REB NWC

En milieu REB NWC, avec une teneur en oxygène dissous inférieure à 500 ppb, plusieurs études montrent que l’oxyde de surface est sous forme d’une double couche, de morphologie analogue à celle formée en milieu primaire REP nominal, mais dont la composition est différente (Chen et al., 2009 ; Kim, 1995 ; Kuang et al., 2012 ; Kumai et al., 2007 ; Miyazawa et al., 2006).

La plupart de ces études (Tableau 25) fait état d’une couche externe constituée d’un mélange de cristallites individuelles d’hématite (α-Fe2O3) et de maghemite (γ-Fe2O3), forme métastable de Fe2O3, de structure cubique primitif. Chen et al observent plutôt un oxyde de type spinelle et de formule NiFe2O4 en couche externe (Chen et al., 2009). Kuang et al ont étudié la morphologie et la nature des cristallites externes en fonction de la teneur en oxygène dissous, pour un milieu REB désaéré (< 5ppb), ou contenant 30, 300 ou 3000 ppb d’oxygène dissous (Kuang et al., 2012). En milieu REB désaéré, des cristallites facettées de magnétite sont observées ; elles contiennent essentiellement du fer mais également un peu de nickel. Avec 30 et 300 ppb d’oxygène dissous, des cristallites d’hématite, aux arêtes plus émoussées, coexistent avec les cristallites de magnétite. Pour une teneur plus élevée (3 ppm), seules les cristallites de structure corindon sont observées.

Figure 37 Micrographies MEB en surface d’échantillons oxydés en milieux aqueux avec différentes teneurs en oxygène dissous : (a) 3 ppm - 388h, (b) 300 ppb - 400h, (c) 30 ppb - 365h et (d) en milieu hydrogéné pendant 400h) (Kuang et al., 2012).

La couche interne est de structure spinelle, et contient du fer et du chrome. La proportion de chrome, parmi les éléments métalliques de la couche interne, varie entre 20% et 40% selon les auteurs (Chen et al., 2009 ; Kim, 1995 ; Miyazawa et al., 2006). Un enrichissement en chrome de la couche interne à l’interface oxyde / alliage est rapporté par plusieurs auteurs (Chen et al., 2009 ; Miyazawa et al.,

2006) et pourrait conduire, localement, à la formation d’un oxyde de structure corindon du type (Fe,Cr)2O3 (Miyazawa et al., 2006). Une relation d’épitaxie entre la couche interne d’oxyde et le métal sous-jacent est mise en évidence par Chen et al (Chen et al., 2009). Dans cette étude, l’oxyde à l’interface est de structure spinelle. Enfin, certaines observations mettent en évidence la présence de pores entre certaines cristallites de la couche externe, ainsi que dans la couche interne, à proximité de l’interface avec l’alliage (Chen et al., 2009).

Figure 38 Composition des couches d’oxyde de surface formées en milieu REB NWC déterminées par MET-EDS : a) d’après (Chen et al., 2009), 500 ppb O2 et b) d’après (Miyazawa et al., 2006), 200

ppb O2.

2.2.2.2. Oxydation en milieu REB : effet d’un changement de la chimie du milieu en cours d’oxydation

Comparaison milieux REB NWC/HWC

A notre connaissance, la nature des oxydes formés en milieu REB HWC, sans pré-exposition aux conditions REB NWC, n’est rapportée que dans une seule étude (Kim, 1995). La couche interne formée dans ces conditions ne semble pas présenter de différence significative de structure et de composition par rapport à celle formée en milieu REB NWC. En revanche, la couche externe n’est plus constituée d’un mélange de cristallites d’hématite et de maghémite, mais uniquement de cristallites de magnétite Fe3O4, ce qui correspond aux observations de Kuang et al en milieu REB désaéré et déshydrogéné (Kuang et al., 2012).

En revanche, plusieurs études se sont intéressées à la nature des oxydes formés après un ou plusieurs changements de chimie du milieu REB (Kim, 1995 ; Kumai et al., 2007 ; Watanabe et al., 2013). Dans les trois cas, la première exposition a lieu en conditions REB NWC. Les durées d’exposition dans chaque milieu est de 336h pour Kim et al(Kim, 1995). Cette période dure 24h pour Kumai et Devine, et la teneur en oxygène dissous pour le milieu REB NWC augmente d’un cycle à l’autre, de 4 ppb (premier cycle) à 208 ppb (8e et dernier cycle) (Kumai et al., 2007). Enfin, pour Watanabe et al, on a simplement une exposition de 1104h en milieu REB NWC (2 ppm d’oxygène dissous) suivie d’une exposition de 840h en milieu REB HWC (450 ppb d’hydrogène dissous) (Watanabe et al., 2013).

Sans détailler les résultats, ces trois études montrent que la principale différence entre les conditions NWC et HWC est la nature de la couche externe. Les conditions NWC (oxygénées) favorisent la présence de maghémite et d’hématite dans la couche externe, en plus des cristallites de structure spinelle (magnétite et/ou FeNi2O4), par rapport aux conditions HWC. La structure de la maghémite

n’est mise en évidence dans aucune des trois études en conditions HWC, tandis que de l’hématite est détectée en conditions HWC par Kim et al, mais pas par les deux autres auteurs.

Les trois études s’accordent sur le fait que la structure de la couche interne n’est pas affectée par la teneur en oxygène dissous dans le milieu REB : c’est un oxyde de structure spinelle dans tous les cas. Dans le cas de l’étude de Kim et al, des analyses EDS montrent que la composition de la couche interne varie peu en fonction de la composition du milieu REB (Figure 39). La teneur en chrome (respectivement, en fer) au sein de la couche est un peu plus élevée (respectivement, faible) après une exposition en milieu REB HWC, par rapport au milieu REB NWC. Ce résultat est cohérent avec le fait que la couche interne formée après une seule exposition en milieu REB NWC ou HWC sont sensiblement identiques en termes de nature et de composition (Kim, 1995). Dans le cas de cette étude, la teneur en oxygène dissous est de 200 ppb en conditions NWC, avec 150 ppb d’hydrogène dissous en conditions HWC.

Ces résultats suggèrent une réversibilité de la nature des couches d’oxyde caractéristiques des conditions milieux REB NWC et HWC, ce qui est cohérent avec la réversibilité des potentiels décrite précédemment (paragraphe 2.2.1.1), d’autant plus que les différences portent essentiellement sur la couche externe, qui est en contact direct avec le milieu d’essai.

Figure 39 Composition de la couche interne formée sur un acier 316 en milieu REB NWC ou HWC, déterminée par MET-EDS. Chaque cycle est constitué d’une exposition de 336 heures en milieu NWC puis de 336h en milieu HWC. D’après (Kim, 1995).

Comparaison milieu REB désaéré/milieu REB fortement oxygéné

L’effet d’un changement très important de la teneur en oxygène dissous en cours d’oxydation sur la nature de la couche d’oxyde formée en surface d’un acier 304 a été étudié par Kuang et al à 290°C (Kuang et al., 2012).

Lorsque le matériau est exposé à un milieu désaéré (et non hydrogéné) après une première exposition de 100h à un milieu fortement oxygéné ([O2] = 3 ppm), des cristallites facettées de structure spinelle apparaissent à côté des cristallites d’hématite formées lors de la première étape. Leur densité augmente avec la durée d’oxydation en milieu désaéré jusqu’à un recouvrement total de la surface.

Lorsque le matériau est exposé à un milieu oxygéné ([O2] = 3 ppm) après une première exposition de 100h en milieu désaéré, des cristallites de magnétite, formées lors de la phase d’exposition en milieu désaéré, sont observées quelle que soit la durée d’exposition ultérieure en milieu aéré. En revanche, des cristallites d’hématite ne sont présentes que pour l’échantillon exposé pendant 200h supplémentaires en milieu oxygéné. Pour des durées d’exposition au milieu aéré supérieures à

200h, aucune cristallite d’hématite n’est observée.

La composition de l’oxyde obtenue par XPS après 30 secondes d’abrasion est présentée en Figure

40, pour des échantillons ayant été exposés à un milieu fortement oxygéné puis désaéré (Figure 40-

a) et inversement (Figure 40-b). Les conditions d’analyse sont telles que les compositions sont probablement tirées de l’analyse d’un mélange de signaux provenant de la partie supérieure de la couche interne et d’une partie de la couche externe résiduelle. Malgré cela, ces résultats permettent probablement de détecter des modifications de la composition chimique de la couche interne. Après une première exposition de 100h en milieu REB fortement aéré (3 ppm), la couche interne s’enrichirait progressivement en chrome et en nickel (et s’appauvrirait en fer) au cours de l’exposition au milieu désaéré. Toutefois, elle n’atteindrait pas la composition chimique obtenue après une exposition au milieu hydrogéné seul, y compris après 600h d’exposition (Figure 40-a).

De même, après une première exposition de 400h au milieu REB désaéré, la teneur en Cr de la couche interne diminuerait fortement (alors que sa teneur en Ni augmenterait) au cours de l’exposition en milieu fortement oxygéné (Figure 40-b). Dans ce cas également, la composition chimique de la couche interne resterait sensiblement différente de celle obtenue après exposition au milieu fortement oxygéné seul. Ces différences suggèrent que la composition de la couche interne obtenue après deux expositions successives à un milieu primaire aéré puis désaéré (et inversement) est différente de celle obtenue en milieu désaéré (respectivement aéré) seul. La réversibilité des couches d’oxyde valable pour les alternances REB HWC/REB NWC ne semble donc plus valable lorsque la teneur en oxygène dissous est importante (3 ppm).

Toutefois, ces résultats sont sujets à caution, car ils sont basés sur l’hypothèse que l’épaisseur de la couche externe ne varie pas significativement d’un échantillon à l’autre. Dans le cas contraire, la contribution des signaux provenant de la couche interne varie et les résultats ne sont alors plus comparables. Différentes profondeurs de la couche interne, voire uniquement de la couche externe, si celle-ci est très épaisse, pourraient être analysées. Des profils de composition de la couche interne seraient donc nécessaires pour confirmer ces résultats.

Figure 40 Composition de la couche d’oxyde par XPS, après 30 s de pulvérisation, pour des échantillons oxydés : a) En milieu oxygéné (3 ppm O2, 100h) puis désaéré (<5 ppb O2, 200, 400,

600h). b) En milieu désaéré (<5 ppb O2, 400h) puis oxygéné (3 ppm O2, 200, 400, 600h). Les

résultats obtenus après 100h et 388h en milieu oxygéné (3 ppm) et 400h en milieu désaéré sont également présentés pour comparaison. D’après (Kuang et al., 2012).