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Longueur dépouillée (mm) 8,47 7,22 8,16 Profondeur moyenne de

4.3.7. Effet de la nature et de la désorientation des joints de grains sur la fissuration

par CSC

Quel que soit le milieu d’essai, les fissures de CSC observées sont toutes intergranulaires. L’effet de la nature des joints de grains sur la sensibilité à l’amorçage de fissures de CSC semble avoir été peu ou pas étudié pour les aciers inoxydables non irradiés en milieu primaire REP, y compris en milieu nominal. En revanche, de précédentes études ont montré que la nature des joints de grains a une influence sur l’amorçage de fissures de CSC, pour un acier inoxydable irradié testé en milieu primaire nominal à 350°C (Le Millier, 2014), ou encore dans de l’eau supercritique désaérée à 500°C (West et al., 2009). Les joints de grains généraux fortement désorientés (> 15°) sont sensibles à la fissuration dans ces deux cas, tandis que les joints de grains Σ3 et les joints faiblement désorientés y sont résistants. Pour les joints de grains spéciaux hors Σ3, la tendance est moins claire : ils peuvent présenter une meilleure résistance à la CSC que les joints de grains généraux (Le Millier, 2014) ou non (West et al., 2009).

Effet de la nature des joints de grains

L’effet de la nature des joints de grains sur la sensibilité à l’amorçage a donc été étudié pour les trois milieux d’intérêt de ces travaux. Pour ce faire, les fissures observées dans les zones cartographiées par EBSD ont été corrélées à la nature du joint de grains. Les surfaces analysées sont de l’ordre de 0,8 mm² pour les essais en milieu nominal et avec transitoires oxygénés, et de seulement 0,3 mm² pour l’essai en milieu aéré.

Les joints de grains sont classés en quatre catégories :

- Joints de grains généraux fortement désorientés (désorientation  ≥15°) ; - Joints de grains faiblement désorientés (5° ≤  < 15°);

- Joints spéciaux Σ3 ;

- Autres joints spéciaux (3 < Σ ≤ 29).

La Figure 87 montre que l’essentiel des joints fissurés sont des joints généraux, avec respectivement 85%, 73% et 78% du nombre total de joints fissurés en milieu nominal, aéré, et avec transitoires, respectivement. La même tendance est obtenue en termes de longueur de joints de grains fissurés : les joints de grains généraux représentent respectivement 86%, 70% et 81% de la longueur totale de joints de grains fissurés en milieu nominal, aéré, et avec transitoires oxygénés. Le nombre de joints fissurés pour chaque classe est nettement plus faible en milieu aéré sur la Figure 87 car la surface dépouillée est plus faible (0,3 mm² contre 0,8 mm²).

Toutefois, la caractérisation initiale du matériau (voir partie 3.1) a révélé que les joints de grains généraux et les joints Σ3 représentaient respectivement 52% et 39% de la longueur totale de joints de grains. Afin de tenir compte de la distribution de joints de grains au sein de la microstructure initiale, la fraction de joints de grains fissurés est calculée pour chaque classe de joints de grains en utilisant l’Équation 5 ci-dessous. Les résultats sont présentés en Figure 88.

Équation 5 :

𝐹𝑟𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒 𝑗𝑜𝑖𝑛𝑡𝑠 𝑑𝑒 𝑔𝑟𝑎𝑖𝑛𝑠 𝑓𝑖𝑠𝑠𝑢𝑟é𝑠 (%) = 100 ×𝑙𝑜𝑛𝑔𝑢𝑒𝑢𝑟 𝑡𝑜𝑡𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑒 𝑗𝑜𝑖𝑛𝑡 𝑑𝑒 𝑔𝑟𝑎𝑖𝑛𝑠 𝑓𝑖𝑠𝑠𝑢𝑟é𝑠 𝑙𝑜𝑛𝑔𝑢𝑒𝑢𝑟 𝑡𝑜𝑡𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑒 𝑗𝑜𝑖𝑛𝑡 𝑑𝑒 𝑔𝑟𝑎𝑖𝑛𝑠

Figure 87 a) Nombre de joints de grains fissurés en fonction de la nature et de la désorientation des joints, pour les essais N2, A2 et T1 ; b) Détail de l’histogramme a), correspondant au cadre noir.

En milieu primaire nominal, et avec transitoires oxygénés, environ 16% des joints de grains généraux fortement désorientés sont fissurés. Les fractions de joints spéciaux hors Σ3 fissurés sont équivalentes à celles des joints fortement désorientés dans ces deux milieux, avec 14,3 % en nominal et 17,3% avec transitoires oxygénés. De même, les fractions de joints faiblement désorientés fissurés sont un peu plus faibles que pour les joints fortement désorientés (environ 3,5% en milieu nominal, et 8,7 % avec transitoires), mais restent du même ordre de grandeur. En revanche, les joints Σ3 sont très peu fissurés par rapport aux autres classes de joints de grains, avec 0,3% en milieu nominal, et 1,1% avec transitoires oxygénés. Une vigilance particulière s’impose pour les résultats concernant les joints faiblement désorientés, du fait du faible nombre de joints de cette classe dans la microstructure initiale, et parmi les joints fissurés (respectivement 4 et 8 joints fissurés en milieu nominal et avec transitoires), ce qui induit une incertitude importante pour les résultats de cette classe.

En milieu aéré, les fractions de joints de grains fissurés sont beaucoup plus faibles, pour toutes les classes à l’exception des joints Σ3. Ceci est cohérent avec la quantification du réseau de surface, qui montre que la densité et la longueur moyenne des fissures sont deux à trois fois plus faibles dans ce milieu. Même si la fraction de joints généraux fortement désorientés fissurés n’est plus que de 4 % dans ce milieu, elle reste supérieure à la fraction de joints Σ3 fissurés (1,7%). Ainsi, les joints Σ3 restent très peu fissurés, mais ce résultat ne semble pas affecté par le milieu d’essai. Enfin, moins de 3 joints faiblement désorientés et spéciaux hors Σ3 sont fissurés pour ce milieu, ce qui est trop faible pour pouvoir en tirer une conclusion.

Figure 88 a) Fraction de joints de grains fissurés par CSC en fonction de la nature et de la désorientation des joints de grains, pour les essais de CSC N2, A2, et T1 ; b) Détail de l’histogramme a), correspondant au cadre noir.

Effet de la désorientation des joints de grains généraux

Pour les joints de grains généraux fortement désorientés, l’effet de la désorientation a également été étudié. Pour cela, ces joints ont été répartis en 10 classes selon leur désorientation. Chaque classe représente une plage de désorientation de 5°, entre 15° et 65°. Les fractions de joints fissurés pour chaque classe de désorientation sont présentées en Figure 89. En milieu primaire nominal et avec transitoires oxygénés, 10 à 20% des joints généraux sont fissurés, pour les désorientations comprises entre 20° et 55°. Ces fractions sont légèrement supérieures : pour la classe 55-60° (22,4 et 26,3% en milieu nominal et avec transitoires, respectivement) et un peu plus basses, de l’ordre de 5 à 10 %, pour les classes de désorientation 15-20° et 60-65°. Pour rappel, sur l’ensemble des joints de grains généraux, toutes désorientations confondues, environ 16% des joints sont fissurés.

En milieu aéré, toutes désorientations confondues, environ 4% des joints généraux sont fissurés. En fonction de la désorientation, les fractions de joints généraux sont comprises entre 1,6 et 8,7%, si l’on écarte les classes pour lesquelles aucun joint n’est fissuré. Là encore, les écarts ne sont donc pas très importants par rapport à la valeur moyenne, surtout en tenant compte de la superficie plus faible de la zone analysée pour ce milieu.

Figure 89 Fraction de joints de grains fissurés par CSC en fonction de la désorientation, pour les joints de grains généraux fortement désorientés et pour les essais de CSC N2, A2, et T1.

Dans l’ensemble, les proportions de joints de grains généraux fissurés sont donc du même ordre de grandeur quelle que soit la désorientation. Les différences d’une classe de désorientation à l’autre ne sont pas suffisamment importantes pour pouvoir mettre en évidence une sensibilité ou une résistance particulière à la fissuration en fonction de la désorientation.

Ces analyses ont donc permis de montrer que dans les trois milieux d’intérêt, l’essentiel des joints fissurés (à la fois en nombre et en longueur) sont des joints de grains généraux, et qu’au contraire les joints Σ3 sont très peu fissurés. Ces résultats sont en accord avec ceux de la littérature (Le Millier, 2014 ; West et al., 2009).

En milieu primaire nominal, et avec transitoires oxygénés, les joints spéciaux d’indice différent de 3 ne sont pas moins sensibles à la CSC que les joints de grains généraux. En revanche, les joints de grains faiblement désorientés présenteraient une sensibilité à l’amorçage de fissures de CSC intermédiaire entre celles des joints généraux et des joints Σ3. Une analyse incluant un plus grand nombre de joints de cette classe serait toutefois nécessaire pour le confirmer.

Enfin, en milieu aéré, la surface analysée est trop faible pour pouvoir conclure sur les joints de grains faiblement désorientés et spéciaux hors Σ3.