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Les autres fonctions de la marque

Section 2. La f onction de garantie de la qualité

Section 2. La fonction de garantie de la qualité

138. Selon le dictionnaire Larousse, le terme « qualité» signifie : (1) ce qui rend quelque chose supérieur à la moyenne, (2) chacun des aspects positifs de quelque chose qui font qu'il correspond au mieux à ce qu'on en attend. La définition qui fonctionne dans le langage du marketing est particulièrement intéressante et très utile par rapport au sujet de cette section ś La qualité : «un produit ou service de qualité est un produit dont les caractéristiques lui permettent de satisfaire les besoins exprimés ou

implicites des consommateurs» .La qualité est donc une notion relative, basée sur le besoin330.

329 A. Tischner, op. cit.

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źn conséquence, il existe une définition objective de la qualité ainsi qu’une définition subjective. Selon cette dernière, la qualité est toujours liée avec les attentes et les besoins du client. Prenant en considération la matière de ce chapitre, c’est l’approche subjective de la qualité - déterminée aussi comme qualité du point de vue de l’utilisateur du produit - qui est un postulat adressé au fabricant331. Dans ce sens, la qualité est toujours en rapport avec les attentes du consommateur.

139. Il reste à savoir quels attributs du produit vont être considérés pour déterminer sa qualité. Parmi eux, on peut mentionnerŚ (1) fonctionnalité, (2) durabilité, (3) esthétique, (4) valeurs gustatives, valeurs nutritives, etc.332. Par rapport aux marques, le schéma est le suivant : le consommateur a des besoins et des attentes déterminés à l’égard du produit, la marque reflète ces attentes et besoins et symbolise pour le consommateur l’ensemble de ces attributs. Par conséquent, la marque garantit au consommateur que le produit possède ces attributs333.

140. La doctrine polonaise est d’accord pour dire que la fonction de la garantie ne peut pas être considérée comme la garantie indiquée dans le code civil334. źn vertu du droit civil, l’idée de la garantie c’est la responsabilité du garant pour les défauts physiques de la chose vendue pendant la durée de la garantie. En France, cette opinion est aussi soutenue ś la marque n’est pas une garantie juridique de la qualité du produit335. Tous les deux ordres juridiques prévoient une exception à cette règle – ce sont les marques collectives de certification336.

331C.àŻuła ska,àG a a jaàjakoś ià–studiu àp a e,à)esz.àNauk.àW“E,àK ak à .

332

J. Koczanowski, op. cit. 333

U.àP o ińskaà d. ,àop. cit. 334

J. Koczanowski, op. cit.;àU.àP o ińskaà d. ,àop .cit. 335

A. Chavanne, J.-J. Burst, op. cit.

336 Ibid. Lesà auteu sà i di ue tà e à plusà u e à deho sà desà a uesà olle ti esà deà e tifi atio ,à desà

la elsàag i olesàetàdesà e tifi atsàdeà ualifi atio ào ga is s,à ota e tàpa àlaàloiàduà àja ie à ,àà

121

D’après Ż. K. Beier, « la fonction de qualité (ou de garantie) n’est que dérivée

de la fonction de garantie de provenance. Sa seule signification est que, pour

les consommateurs, une même provenance implique souvent une qualité constante du produit de marque. Toutefois, cette attente n’est pas protégée

par le droit des marques. La protection contre les fraudes en matière de qualité est l’affaire du droit de la concurrence déloyale ou du droit pénal »337. On peut trouver aussi des opinions très directes selon lesquelles la marque en droit français n’a pas pour rôle de contrôler l’origine ou la qualité des produits ou des services338.

141. La compréhension du terme «fonction de garantie» a changé et évolué, sans doute, avecle temps. J. Koczanowski a repris la définition exprimée dans la doctrine allemande339 et a indiqué que la fonction de garantie c’est la capacité de la marque à «forcer» le fabricant d’un produit marqué d’assurer et de maintenir la qualité de ses produits au même niveau340. Selon cette opinion, la réalisation de cette fonction est possible, lorsque le fabricant tient à conserver une bonne opinion du public sur la marque.

La fonction de garantie est appelée aussi dans la doctrine polonaise fonction de qualité. Selon R. Skubisz, la fonction de qualité sert à informer les consommateurs de la qualité du produit marqué. źn résultat, le consommateur reçoit par l´intermédiaire de la marque l’information que tous les produits signés par cette marque représentent le même niveau d’attributs de la qualité341. Par conséquent, le consommateur est conscient du fait que les produits signés, dont l’origine est la même, sont de haute qualité. Dans ce sens, la fonction de la qualité est liée indissolublement avec la provenance des produits. Cette dernière constatationconfirme l’opinion selon

337

F. K. Beier, La territo ialit àduàd oitàdesà a uesàetàlesà ha gesài te atio au ,à .

338

J.-C.àGallou ,àD oitàdeàlaàp op i t ài dust ielle,àDallozà

339

G. Riehle, Markenrecht und parallelimport, Stuttdart 1968 ; Storkebaum-Kraft : Warenzeichengesetz, Springer Verlag 1967 ; A. Troller, Immaterialguterrecht, Band I, Basel 1959.

340 J. Koczanowski, op. cit.

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laquelle la fonction de la qualité est une fonction dérivée de celle d’indiquer l’origine du produit, parce que c’est la même provenance des produits signés qui garantit la qualité attendue par le consommateur342.

Il est aussi utile de noter que les consommateurs jouent un rôle primordial compte tenu de la fonction de garantie. Ce sont leurs attentes qui sont satisfaites par le produit désigné par la marque. C’est donc grâce aux consommateurs que le goodwill343 du titulaire, entendu comme l’ensemble des attentes et des options des consommateurs sur le produit désigné par une marque, peut se produire344.

Il faut indiquer, comme on le souligne souvent dans la littérature polonaise du sujet, que la fonction de la qualité est particulièrement importante par rapport aux marques renommées. Dans le cas de ce type de marques, une liaison avec ses attributs de la qualité est primordiale345. źn référence aux marques renommées, on peut se demander si la fonction de qualité ne concerne que les marques qui jouissent d’une réputation ou, peut–être, les marques « normales» peuvent aussi fournir cette fonction ? Considérant l’idée mentionnée ci-dessus, selon laquelle la fonction de la qualité signifie que la marque représente une certaine qualité attendue par le consommateur, on peut argumenter que chaque marque qui remplit certaines conditions peut garantir au consommateur la qualité des produits signés.

Dans mon opinion, c’est la relativité de la qualité reflétant les attentes et les besoins du client qui rend possible aux marques, pas nécessairement renommées, de fournir la fonction de qualité. Néanmoins, il faut signaler que dans la littérature polonaise il n’y a pas de réponse exacte à cette question. Par contre, certaines conditions doivent être réunies pour que la marque puisse garantir aussi la qualité des produits. Ces conditions concernent tout d’abord le temps de la présence de la marque sur le marché. On souligne

342

U.àP o ińskaà d. ,àop. cit. 343

„Good ill àpeutàseàt adui eà o e: the value of a business entity not directly attributable to its tangible assets and liabilities. This value derives from factors such as consumer loyalty to the brand.

344 A. Tischner, op. cit.

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que la possibilité pour la marque de garantir la qualité d’un produit exige tout un ensemble des activités appropriées de la part du fabricant au cours d’une période de temps346.

Pour ce qui est de la fonction de garantie, on pourrait aussi se poser la question de savoir dans quel moment il y a besoin de protéger cette fonction ? Il y a une opinion selon laquelle ce besoin apparaît dans le cas d’atteinte au droit de marque (contrefaçon). Lorsqu’un tiers commence à introduire sur le marché des produits contrefaits qui sont d’une qualité inférieure, cela cause au titulaire des dommages en image et goodwill. Cette circonstance peut avoir une signification devant la cour dans une affaire concernant la contrefaçon347.

Dans la doctrine française, la référence à la fonction de garantie comme une fonction dérivée est omniprésente. Cette fonction est aussi appelée indirecte348.

142. Il faut souligner le rôle de la CJUź dans la reconnaissance de nouvelles fonctions de la marque hormis la fonction essentielle. Déjà dans l’arrêt mentionné auparavant (du 12 novembre 2002, Arsenal Żootball Club 206/01), la cour a constaté que le droit exclusif prévu à l’article 5 par. 1 sous a) de la Directive permet d’assurer que la marque puisse remplir ses fonctions propres et que, dès lors, l’exercice de ce droit doit être réservé aux cas dans lesquels l’usage du signe par un tiers porte atteinte, ou est susceptible de porter atteinte, aux fonctions de la marque.

143. Comme l’a indiqué la CJUź dans l’arrêt de 18 juin 2009 (affaire C -487/07, L’Oréal c. Bellure), parmi ces fonctions figurent non seulement la fonction essentielle de la marque, qui est celle de garantir aux

346

J. Koczanowski, op. cit. 347 A. Tischner, op. cit.

348J.à Passa,à Leà d oità deà laà p op i t à i dust ielle,àop. cit.;à P.à Math l ,à Leà d oità f a çaisà desà sig esà

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consommateurs la provenance du produit ou du service, mais également les autres fonctions de celle-là, comme notamment celle consistant à garantir la qualité de ce produit ou de ce service, ou celles de communication, d’investissement ou de publicité349

.

Dans l’affaire résultant de la prononciation de l’arrêt mentionné ci–dessus, un tiers a fait - sans autorisation - usage des marques enregistrées dans les tableaux de concordance des parfums qui ont pour but d’informer quels parfums de Bellure correspondent à des parfums de tiers. Cet usage n’avait pas pour objet ou effet de créer un risque de confusion parmi les consommateurs et il n’a donc pas porté atteinte à la fonction essentielle – garantie de l’identité d’origine. La CJUE, sans donner la définition des autres fonctions, n’a constaté que cet usage porte atteinte au moins à l’une d’entre elles.

À l’occasion de cet arrêt, il est loisible de se poser la question déjà mentionnée au début de ce chapitre. Il s’agit de savoir comment sont protégées les autres fonctions de la marque, hormis la fonction de garantir l’identité d’origine. Autrement dit, est-ce que l’atteinte aux autres fonctions peut avoir lieu, si la fonction essentielle de la marque, soit la fonction de garantir l’identité d’origine du produit, n’est pas enfreinte ? źst-ce qu’il est possible aussi d’accepter l’approche selon laquelle, comme les autres fonctions de la marque ont un caractère secondaire, dérivé par rapport à la fonction essentielle, elles ne peuvent pas être protégées de façon autonome. Prenant en considération l’arrêt dans l’affaire L’Oréal c. Bellure, on pourrait constater que la protection des autres fonctions est bien indépendante de la protection de la fonction essentielle.

Sur ce problème ayant trait à la fonction de qualité exprimée dans cet arrêt, J. Passa s’est prononcé comme suitŚ «Il est absolument évident que la marque n’exerce aucune fonction, autonome, de garantie de qualité ; si elle

exerce cette fonction, ce n’est à la rigueur qu’en fait, à travers la fonction de

125 garantie de l’identité d’origine, la constance de la provenance garantissant,

en principe, néanmoins pas nécessairement - une constance de qualité. Si la fonction de qualité constitue un aspect ou démembrement de la fonction de

garantie de l’identité d’origine, comme le fait au demeurant apparaître très

clairement la jurisprudence de la Cour sur le reconditionnement des produits

marqués, pharmaceutiques en particulier, pourquoi l’avoir distinguée de cette

fonction en lui reconnaissant une autonomie ? Au reste, la Cour qualifie de

fonction essentielle la seule fonction de l’identité d’origine. Faut–il en déduire que les autres fonctions sont secondaires parce qu’elles en découlent ? »350

.

Afin d’essayer de répondre à la question posée ci–dessus, on pourrait suivre les observations de J. Passa sur la différence entre l’application de l’article 5 par. 1 a) et l’article 5 par. 1 b) de la Directive351. L’article 5 par. 1 a) de la Directive est applicable en cas d’usage par un tiers d’un signe identique à la marque pour des produits ou services identiques. L’article 5 par. 1 b) est applicable lorsqu’il existe entre les marques, produits ou services la similarité qui peut causer un risque de confusion dans l’esprit du public qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque. Dans le cas d’identité des marques et des produits ou des services, la protection ne dépend pas de l’existence d’un risque de confusion, il suffit tout simplement que les marques ainsi que les produits ou les services soient identiques352.

À propos des dispositions de l’article 5, la CJCź, dans l’arrêt L’Oréal c. Bellure, a dit que « la protection conféréeà l’article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive 89/104 est ainsi plus étendue que celle prévue au même article 5, paragraphe 1, sous b), dont la mise en œuvre exige l’existence d’un risque de confusion et donc la possibilité d’une atteinte à la fonction essentielle de la marque (...). En effet, en vertu du dixième considérant de la

directive 89/104, la protection conférée par la marque enregistrée est

350

J. Passa, Les nouvelles fonctions de la marque dans la jurisprudence de la Cour de justice :

po t e?àUtilit ?, Propr. Indust. No ,àJui à ,à tudeà .à

351 Ibid.

352M.àMazu ek,àNa usze ieàp a aàzà ejest a jiàz akuàto a o egoàp zezàuż ieàide t z egoàz aku

126 absolue en cas d’identité entre la marque et le signe et entre les produits ou

services, alors que, en cas de similitude entre la marque et le signe, ainsi

qu’entre les produits ou services, le risque de confusion constitue la condition

spécifique de la protection»353. Cette opinion a été complétée par l’arrêt Google354 en vertu duquel « (...) [en vertu des] articles 5, paragraphe 1, sous

a), de la directive 89/104 et 9, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94,

où l’usage par un tiers d’un signe identique à la marque est fait pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, le titulaire de la marque est habilité à interdire cet usage si celui -ci est susceptible de porter atteinte à l’une des fonctions de la marque, qu’il s’agisse de la fonction d’indication d’origine ou de l’une des autres

fonctions. »355.

Par conséquent, prenant en considération les observations de la CJUź exprimées dans ces deux arrêts, on constate que, dans le cas prévu par l’article 5 par. 1 sous a) de la Directive, l’atteinte à l’une des fonctions de la marque suffit pour que le titulaire interdise cet usage, tandis que l’article 5 par. 1 sous b) de la Directive oblige tout d’abord à ce que la fonction de la garantie de l’identité d’origine soit enfreinte356.

144. En ce qui concerne la protection des autres fonctions de la marque, c’est aussi la jurisprudence nationale qui se prononce. En regard avec la Pologne, on pourrait rappeler l’arrêt de la CA de Wrocław357

dans lequel la Cour a jugé la contrefaçon de la marque qui jouit de la renommée décrite dans l’article 296 par. 2 point 3 de la LPI358. La Cour a constaté que, à la

353Poi tà àdeàl a t.

354

CJUE, 23 mars 2010, C-236/08.

355Poi tsà àetà àdeàl a t.

356

J. Passa, Les nouvelles fonctions de la marque dans la jurisprudence de la Cour de Justice :

po t e?àUtilit ? Op. cit. 357

CáàdeàW o ła ,à ào t.à ,àIàá aà / .

358 Art. 296 par. 2 point 3) de la LPI :à o stitueàu eà o t efaço àl usageàda sàlaà ieàdesàaffai esàd u à sig eà ide ti ueà ouà o pa a leà à laà a ueà pou à desà p oduitsà ouà desà se i es qui ne sont pas

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différence des marques qui ne jouissent pas d’une renommée, l’application de l’article 296 par. 3 point 3 de la LPI ne dépendait pas de l’occurrence du risque de la confusion, mais qu’il suffisait seulement qu’il y eût possibilité d’association de la marque postérieure avec la marque renommée. źnsuite, la Cour a confirmé que la protection de la marque qui jouit d’une renommée, dépassait la limite de la spécialisation. Dans ce cas–là, l’objet de la protection ce sont les fonctions publicitaires et celles consistant à garantir la qualité et non pas la fonction de garantir l’identité d’origine (de distinction). Prenant en considération l’opinion exprimée par la CA de Wrocław dans l’arrêt en question, les fonctions publicitaires et de garantie de la qualité sont protégées indépendamment de la fonction de l’indication d’origine dans le cas de la marque renommée. źn plus, dans le cas des marques renommées, ce sont justement les fonctions ci-dessus qui sont spécialement protégées par la loi et, partant, la reconnaissance de la contrefaçon ne dépend pas de l’atteinte à la fonction de garantir l’identité d’origine du produit.