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des lois nationales et communautaire

B. Les limites du droit sur la marque à raison de l’exigence d’usage

dans la vie des affaires

198. On pourrait partir du principe constitué par le Tribunal de grande instance de Paris selon lequel « pour être répréhensible, l'usage d'une marque doit être fait à des fins commerciales ou publicitaires ; qu'en

revanche, l'usage dans un but d'information ne constitue pas une

contrefaçon»416.

Certes, c’est la jurisprudence nationale et communautaire qui indiquent les instructions pour vérifier les conditions nécessaires pour constater une contrefaçon surtout par rapport à l’usage de la marque d’autrui.

199. Les lois nationales décrivent d’une part les exceptions au monopole conféré par le droit de marque concernant l’usage spécifique de la marque (p. ex. L.713-6 du CPI et l’article 156 de la LPI417), mais - d’autre part - elles évitent d’établir une sorte de règle générale concernant le caractère d’usage de la marque nécessaire à apparaître pour qu’on puisse constater la contrefaçon. C’est la jurisprudence qui vérifie donc cet aspect cas par cas et essaye de constituer les règles qui portent sur le caractère d’usage de la marque d’autrui.

Comme on peut observer, la tendance globale se dirige vers la thèse selon laquelle seul l’usage à des fins commerciales, dans la vie des affaires et pour fournir les fonctions de la marque, peut être constaté comme l’usage qui conduit à la contrefaçon de la marque.

415 CA Katowice, 18 mars 2005, I Aca 225/05.

416TGIàPa is,à àf .

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200. En France, ce sont les cas concernant la relation entre la liberté d’expression et l’usage de la marque d’autrui qui ont donné l’occasion de se prononcer sur la notion d’usage de la marque dans la vie des affaires. Pour les besoins de cette section, on ne va pas envisager le principe de la liberté d’expression et son influence sur les limitations du droit des marques. Ce problème va être décrit dans le troisième chapitre. Ici, il s’agit de présenter la relation entre l’absence d’usage de la marque dans la vie des affaires et l’atteinte au droit de marque.

201. La jurisprudence française confirme l’approche en vertu de laquelle il n’y a pas d’atteinte au droit de marque, lorsque le signe n’est pas utilisé dans la vie des affaires. L’utilisation à des fins de parodie ou dans un but polémique a été considérée comme un usage hors vie commerciale, hors vie des affaires. Plus particulièrement, cet usage résulte de la liberté d’expression et il ne sert pas à désigner, identifier ou promouvoir les produits. Les trois affaires très importantes de ce point de vue ce sont les affaires : Esso, Danone et Areva. Bien que les jugements rendus dans les affaires mentionnées ci–dessus restent tout-à-fait en droit interne français, leur importance a été notée aussi par la doctrine polonaise418.

202. On pourrait résumer les trois arrêts suivants comme voici Ś « dès qu'on quitte la sphère commerciale et qu'on entre dans l'espace de la liberté d'expression, une telle défense de la marque n'a plus lieu d'être : non

seulement, par hypothèse, le titulaire de la marque n'est pas en présence

d'un concurrent, mais encore il n'y a pas, par hypothèse encore, de «consommateur » à défendre, puisque les « services » offerts sont purement polémiques ou critiques. Mieux encore : interdire, au titre de la contrefaçon, l'utilisation de l'emblème d'une entreprise reviendrait, tout

simplement, à paralyser la liberté d'expression ; de même qu'on n'imagine

pas la critique d'un homme politique sans le nommer - ou sans le désigner

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par sa fonction -, de même n'imagine-t-on pas la critique d'une entreprise sans mentionner sa marque, c'est-à-dire son emblème»419.

M. Vivant souligne l’importance de la constatation que « l’usage polémique est étranger à la vie des affaires ». Par conséquent, le droit des marques n’assure pas au titulaire de la marque la réservation du signe « en soi », mais il protège la relation entre le signe et les produits et services dans la sphère marchande420.

203. Comme l’indique V. Ruzek, « tandis que deux affaires – Danone et Esso s’engageaient au plus mal pour les parodistes, une troisième – l’affaire Areva –débutait au contraire sous de meilleurs auspices »421.

Les faits dans l’affaire en l’espèce sont les suivants : la société des participations du Commissariat à l'énergie atomique (demanderesse) exerce son activité sous le nom commercial d’ARźVA et est titulaire des marques variées, et parmi elles Ś ARźVA, déposée à l'INPI le 10 août 2001 pour désigner notamment les services de la classe 38422.

Les sites internet de l'association GREENPEACE, accessibles sur le territoire français aux adresses www.greenpeace.fr et www.greenpeace.org , informaient les internautes sur les actions menées par żRźźNPźACź à l'encontre de l'industrie nucléaire en les invitant à signer une pétition contre les déchets radioactifs et reproduisaient la lettre A stylisée et la dénomination ARźVA associées à une tête de mort et au slogan « STOP PLUTONIUM - L'ARRÊT VA Dź SOI» dont les lettres A reprennent le logo qu'elle a adopté.

419B.àEdel a ,àD oitàdesà a uesàetàli e t àd e p essio ,à‘e .àDallozà àp.à .

420M.àVi a tà di e tio ,àLesàg a dsàa tsàdeàlaàp op i t ài telle tuelle,àop. cit.

421V.à‘uzek,àLaàpa odieàe àd oitàdesà a ues,àP op.àI d.àN°à ,àa .à ,à tudeà .

422

38 - lesàse i esàsui a tsà:àt l o u i atio ,àse i esàdeà o u i atio àpa à seau àe t a et,à

i te etàouài t a etàetà o u i atio sà adiopho i ues,àt l g aphi uesàouàt l pho i uesàda sàlesà

do ai esà deà l' e gieà u l ai e,à deà laà o e ti ueà età deà l' le t o i ue ; communication par

te i au àd'o di ateu sàetàt a s issio àd'i fo atio sàda sàlesàdo ai esàdeàl' e gieà u l ai e,àdeà laà o e ti ueà età deà l' le t o i ueà ;à diffusio à età t a s issio à deà essages,à d'i fo atio sà età deà e seig e e tsàpa à seau àe t a et,ài te etàouài t a etàda sàlesàdo ai esàdeàl' e gieà u l ai eà

et de la connectique ;à seau à deà t a s issio à deà do esà età d'i fo atio sà e à Dist i utio à d' e gieà u l ai e.

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Par conséquent, żreenpeace Żrance et żreenpeace New Zetland ont été assignées devant les juridictions pour contrefaçon par reproduction et par imitation et pour avoir commis des actes fautifs distincts discréditant et dévalorisant l'image des marques litigieuses.

En analysant cet arrêt, il faut tirer les conclusions que la Cour n’a pris en considération que le caractère d’usage de la marque A et ARźVA. Les autres facteurs nécessaires à constituer la contrefaçon étaient hors de doute : les signes étaient reproduits pour les mêmes produits ou services. La Cour a cependant rejeté l’action en contrefaçon et énoncé le principe suivant Ś «en

l’état d’un différend étranger à la vie des affaires, à la compétition entre entreprise commerciale l’article L.713-3 du code de la propriété intellectuelle n’est pas davantage applicable ».

Il est utile de présenter deux conclusions principales qui ont conduit la Cour à un tel jugement Ś «associant les marques de la SPCEA à des têtes de mort, des poissons, des bombes nucléaires ou à un slogan en forme de jeu de mots dans les conditions ci-dessus décrites, les associations GREENPEACE montrent clairement leur volonté de dénoncer les activités de ladite société

dont elles critiquent les incidences sur l'environnement, sans induire en erreur le public quant à l'identité de l'auteur des messages » et « les

associations GREENPEACE n'ont pas vocation à promouvoir des produits et services de substitution à l'énergie nucléaire et ne proposent aucun produit

ou service aux particuliers de sorte que le consommateur ne peut être tenté de se détourner de la marque AREVA par l'effet de leur campagne ».

Il est utile de noter que, le cas échéant, la Cour a justifié l’usage de la marque d’autrui par le besoin de critique et de polémique. Par conséquent, un tel usage ne sert pas à promouvoir ou indiquer les produits ou services de celui qui les utilise. Dans la situation où il n’y a pas d’usage ayant pour but d’identifier ou de promouvoir les produits ou services, il n’y a donc pas de risque de confusion.

204. Pour compléter les observations sur l’usage de la marque dans la vie des affaires, on pourrait se référer encore à un arrêt de la CA de Paris, dans

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l’affaire Nutri Riche423 notamment. Selon la Cour, « l'usage dans la vie des

affaires, qui renvoie à l'univers économique, suppose l'existence d'un lien

avec un client et ne peut s'entendre de la circulation de marchandises entre

filiales appartenant au même groupe dans un but de gestion et d'organisation

interne».

205. Quant à la parodie, on pourrait indiquer encore un jugement où il y avait une parodie du journal Le Monde par une publication intitulée le Monte424. źn vertu de l’arrêt rendu par le TżI de Paris, « si, du fait de la

parodie, il existe une imitation du signe déposé, il convient de rappeler que

cette atteinte n’est pas réalisée contre un signe qui marque l’origine du

produit dans la vie des affaires, mais est circonscrite au seul domaine de la

liberté d’expression de sorte que la demande de contrefaçon de la marque n’est pas fondée».

Les jugements et les remarques présentés ci–dessus montrent la tendance pour exclure la possibilité de contrefaçon dans le cas où l’usage de la marque se produit hors vie des affaires. Par la suite, il est nécessaire d’analyser la situation où l’usage de la marque reste dans la vie des affaires, mais il ne fournit pas les fonctions de la marque.

423

CA Paris, 4 e ch., 1 juin 2005. Les faits du litige sont les suivants : souhaitant uniformiser la commercialisation de ce produit sous l'appellation « NUTRI-RICHE »,àlaàso i t àLáNCÔMEàaà o stat à

ueàlaàso i t àdeàd oitàholla daisàBUTT‘E““àBVàa aitàd pos àe àF a eàlaà a ueà« NUTRI-RICH »àleà

à aià ,àe egist eà sousàleàNº ,à e ou el eàlesà à aià à età à a sà ,àpou à

d sig e àe à lasseà àlesà« huiles pour les soins de la peau »,àLáNCÔMEàaàd pos à àl'I stitutà atio alà

deà laà p op i t à i dust ielleà laà a ueà « NUTRI-RICHE »à leà à o e ,à e egist eà sousà le

,à pou à d sig e à e à lasseà à lesà «p oduitsà os ti uesà à sa oi à as uesà pou à leà

visage »àetàelleàa,àpa all le e t,àassig àleà àja ie à ,àlaàso i t àBUTT‘E““àBVàe àd h a eàdeà

ses droits sur la marque « NUTRI-RICH ».à BUTT‘E““à BVà aà fo à u eà de a deà e à o t efaço à deà

a ue.à Ilà taità o fi à u au u à l e tà eà d o t eà u eà uel o ueà o e ialisatio à ouà

iseàsu àleà a h àe àF a eàd'u à as uedeà eaut à e tuàdeàlaà a ueà« NUTRI-RICHE »à;

Qu'ilà està e tesà ta lià età o à o test à ue laà so i t à “ICO“à o ditio eà e à F a eà età d tie tà desà p oduitsà e tusàdeàlaà a ueà« NUTRI-RICHE »àe à ueàdeàleu àe po tatio àfi aleà e sàdesàfilialesàduà

g oupeàL'O‘ÉáLàsitu esàda sàdesàpa sàtie sàoùàilsàso tàli ite e tà o e ialis s.

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§ 2. L’usage du signe à titre de marque

206. Lorsqu’il est possible de constater que la marque d’autrui est utilisée par un tiers dans la vie des affaires que les autres conditions de la contrefaçon, comme la reproduction ou l’imitation des marques, sont fournies, il reste toujours à répondre à la question de savoir si cela suffit pour admettre une atteinte au droit de marque ?

Bien que la jurisprudence communautaire qui va être présentée ci-dessous influence les lois nationales, la réponse à cette question n’est pas toujours claire et exacte. Dans cet aspect, il est utile d’analyser deux approches possibles : (1) le droit de marque ne confère la protection que contre un usage qu’on peut qualifier d’usage à titre de marque, soit (2) le droit de marque protège le titulaire aussi contre les autres formes d’usage de sa marque425.

Dans la doctrine polonaise prévaut la première approche, dans la doctrine française on souligne que le juge français applique la loi interne conformément aux décisions de la CJUź426. Il reste donc à présenter et analyser les plus importants des jugements de la CJUź dans la matière pour voir aussi leur influence sur la jurisprudence nationale. Ensuite, il faudrait vérifier, si la thèse selon laquelle l’atteinte du droit de marque la marque suppose l’usage à titre de marque peut trouver sa justification.

Certainement, la problématique en question pose beaucoup de questions et demeure le domaine dont la CJUź s’occupe intensivement en essayant de trouver la meilleure solution427.

425

K. Szczepanowska-Kozło ska,àP a dopodo ieńst oà p o adze iaà à łądà àeu opejski àp a ieà

z ak àto a o h,àEP“à à / .

426 J. Szmidt-Szalewski, op. cit.

427W.àWłoda z k,àUż a ieàoz a ze iaà à ha akte zeàz akuàto a o egoà ào ze z i t ieàET“ ,op.

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Tout d’abord il est utile de s’occuper de l’interprétation de la notion d’usage à titre de marque (A). Par la suite il faudrait envisager les limites du droit sur la marque à raison de l’exigence d’usage à titre de marque (B).