• Aucun résultat trouvé

2.3 Irrégularités de la période

2.3.1 Observations de  soubresauts

G, (2.17)

ou, de manière équivalente, par Pdiss & 1023 W (Bhattacharya et al., 1992;

Faucher-Giguère & Kaspi,2006). Au terme de leur phase de ralentissement, les pulsars traversent

alors cette  ligne de mort  et cessent donc d'émettre en radio (on parle de  cimetière des pulsars , voir Fig.2.6). Cependant, certaines étoiles à neutrons membres de systèmes binaires entrent ensuite dans une nouvelle phase pendant laquelle elles accrètent de la matière depuis leur compagnon (phase de binaires X), ce qui conduit à augmenter leur vitesse de rotation et à diminuer leur champ magnétique. Une fois le processus d'accrétion terminé, ces étoiles pourraient à nouveau émettre en tant que pulsars radio, d'où le terme de pulsars recyclés. Ce modèle est supporté par le fait que la grande majorité des pulsars millisecondes sont observés dans des systèmes binaires (voir Fig.2.6) et qu'ils ont tendance à être plus massifs que les pulsars normaux.

2.3 Irrégularités de la période

2.3.1 Observations de  soubresauts 

Nous venons de décrire en détails le lent ralentissement des pulsars radio au cours du temps, selon un processus associé à la magnétosphère de ces astres. Cependant, on observe parfois de minuscules irrégularités dans l'évolution temporelle de la vitesse de rotation d'un pulsar, appelées glitches (ou  soubresauts ), pendant lesquelles le pulsar accélère soudainement, avant de relaxer sur des temps beaucoup plus longs, de l'ordre du jour ou même de l'année (voir Figs.2.7 et 2.8). Les premiers glitches ont été détectés dès 1969 dans les pulsars de Vela (Radhakrishnan & Manchester, 1969; Reichley & Downs,

1969) et du Crabe (Boynton et al., 1969; Richards et al., 1969). Depuis lors, ces pulsars emblématiques ont respectivement rencontré (au moins) 19 et 25 épisodes de glitches.

Figure 2.7  Deux glitches observés dans un magnétar. Évolution de la fréquence de rotation de l'AXP 1RXS J1708−4009 en fonction du temps (en jours juliens modiés). Les amplitudes des glitches observés sont ∆Ω/Ω = 5, 5 × 10−7 et 4, 2 × 10−6. On peut noter la diérence entre les phases de relaxation des deux glitches, respectivement asso-ciées à ∆ ˙Ω/ ˙Ω = 0, 01 (sans décroissance exponentielle) et ∆ ˙Ω/ ˙Ω = 0, 55 (décroissance exponentielle sur 50 jours). Figure adaptée deKaspi & Gavriil (2003).

Jusqu'à présent, on a observé 482 glitches dans 168 pulsars1 (Espinoza et al., 2011), y compris dans des magnétars et des pulsars millisecondes, avec des fréquences de rotation ν = f = Ω/(2π)comprises entre 0,09 Hz et 327 Hz (voir, par exemple, la base de données

ATNF2; Manchester et al. (2005)). La grande quantité de données recueillies sur ces

événements permet de mettre en évidence les tendances générales suivantes.

Amplitudes. Les glitches sont associés à une brusque accélération du pulsar carac-térisée par une amplitude relative ∆Ω/Ω s'étendant entre ∼ 10−11 et ∼ 10−5 (Wong

et al., 2001; Espinoza et al., 2011). Une analyse récente des glitches du Crabe suggère

une amplitude minimum située autour de ∆Ω/Ω ∼ 10−9, sensiblement supérieure à la limite de résolution des détecteurs (Espinoza et al., 2014). L'étude des glitches de faible amplitude est particulièrement délicate car ceux-ci sont généralement contaminés par un autre type d'irrégularité, appelée bruit de synchronisation (voir section 2.3.3). Les glitches sont parfois accompagnés d'une variation abrupte de leur taux de ralentissement, ∆ ˙Ω/ ˙Ω∼ 10−4

− 10−2.

Phase de montée. Comme on le voit très clairement sur la gure 2.8, un glitch est composé de deux phases associées à des temps caractéristiques très diérents. La phase de

1. http://www.jb.man.ac.uk/pulsar/glitches.html. 2. http://www.atnf.csiro.au/research/pulsar/psrcat.

Figure 2.8  Glitch observé dans le pulsar du Crabe. Résidus en fréquences ν(t) − ν0(t), où ν0(t) est un modèle d'évolution ajusté sur le ralentissement du pulsar pendant 300 jours avant le glitch, en fonction du temps (en jours juliens modiés). La relaxation, ajustée sur la loi (2.18) (trait plein), indique une amplitude ∆Ω/Ω = 9 × 10−9, une augmentation du taux de ralentissement ∆ ˙Ω/ ˙Ω = 3×10−3 et une relaxation exponentielle avec un temps caractéristique de 2,9 jours. Il est intéressant de remarquer une seconde accélération (30 jours après le glitch), ainsi qu'un changement en ˙ν apparaissant au bout de ∼ 150 jours. Ce dernier semble lié au phénomène de bruit de synchronisation. Figure tirée deWong et al. (2001).

10-21 10-18 10-15 10-12 10-9 0.001 0.01 0.1 1 10 100

P

.

P (s)

glitching pulsars

Figure 2.9  Position des pulsars présentant des glitches dans le diagramme P − ˙P. Figure réalisée à partir des données recueillies par l'ATNF Pulsar Database.

montée est généralement trop rapide pour être résolue par les radiotélescopes actuels et les glitches apparaissent donc souvent sous la forme de sauts de fréquence. Certains glitches du Crabe partiellement résolus ont mis en évidence des temps de montée de l'ordre de τr ' 0, 5 − 2 jours (Lyne et al., 1992; Wong et al., 2001). Cependant, il a été suggéré que ces glitches  mous  pourraient avoir une origine diérente des glitches habituels1. Actuellement, la meilleure contrainte que l'on a sur τrprovient de l'observation des glitches de Vela (en 2000 et 2004), conduisant à la limite : τr . 30− 40 s (Dodson et al., 2002,

2007). La détermination des temps de montée est particulièrement ardue, car elle nécessite d'une part un suivi en continu du pulsar et, d'autre part, de disposer de temps d'arrivée (TOAs) extrêmement précis sur de très courtes durées (inférieures au temps de montée). Toutefois, on peut espérer que le radiotélescope LOFAR (Low Frequency Array,Stappers

et al.(2011)) et le futur SKA (Square Kilometer Array, Watts et al.(2015)) apporteront

des contraintes beaucoup plus fortes sur le temps de montée τr.

Phase de relaxation. On dispose de beaucoup plus de données observationnelles sur la phase de relaxation. Cette phase est généralement décrite par une loi du type

ν(t) = ν0(t) + ∆νp+ ∆ ˙νpt +X

i

∆νiexp (−t/τi) , (2.18) où ν0(t)représente l'évolution de la fréquence de rotation du pulsar lors de son ralentisse-ment (i.e. en l'absence de glitch) et t = 0 correspond à l'instant où le glitch est déclenché (sans tenir compte de la brève phase de montée). Les quantités ∆νp et ∆ ˙νp correspondent à des sauts de fréquence et de taux de ralentissement  permanents , tandis que les termes ∆νireprésentent des contributions exponentiellement décroissantes, associée chacune à un temps caractéristique τi. L'amplitude totale du glitch est alors donnée par

∆Ω Ω = ν(0)− ν0(0) ν0(0) = ∆νp+P i∆νi ν0(0) , (2.19)

tandis que la variation du taux de ralentissement est dénie par : ∆ ˙Ω ˙ Ω = ˙ν(0)− ˙ν0(0) ˙ν0(0) = ∆ ˙νp−P i∆νii ˙ν0(0) . (2.20) En général, la mesure de ∆ ˙Ω/ ˙Ω est assez imprécise, car elle dépend fortement de l'échan-tillonnage des mesures prises au voisinage du glitch (la mesure n'étant pas exactement réalisée à t = 0, certaines contributions exponentielles peuvent avoir déjà disparu). En outre, on dénit également le paramètre de relaxation (healing factor) par la relation

Q = P i∆νi ∆νp+P i∆νi = 1∆νp ∆νp+P i∆νi, (2.21) an de quantier le degré de relaxation du glitch.

1. Ces temps de montée étant bien supérieurs aux limites de résolution, il peut paraître surprenant de ne pas observer de glitches se déroulant sur des temps plus courts (avec τr ∼ 0, 01 − 0, 1 jour, par exemple), que l'on attendrait en plus grande quantité (Melatos et al.,2008;Haskell & Melatos,2015).

L'évolution de la vitesse de rotation lors de la phase de relaxation varie d'un pulsar à un autre, et peut même être diérente entre deux glitches d'une même étoile. Pour certains pulsars, la relaxation peut être convenablement ajustée par des simples sauts de fréquence et de dérivée de la fréquence, mais cela est souvent lié à l'imprécision des mesures qui ne peuvent rendre compte de contributions exponentielles associées à des temps trop courts. Pour d'autres pulsars, tels que le Crabe ou Vela, la qualité des mesures permet de décrire cette phase avec une grande précision. Ainsi, certains glitches de Vela, très précisément résolus, nécessitent jusqu'à quatre termes exponentiels (par exemple, τi ∼ 1 min, 0,3 jour, 2,1 jours et 26 jours, voir Dodson et al. (2007)). Les observations montrent une grande variété de valeurs du paramètre de relaxation Q allant de ∼ 10−4 à ∼ 1 (Lyne et al.,

2000; Yu et al., 2013). Les glitches de grande amplitude sont généralement associés à

des petites valeurs de Q, typiquement Q ∼ 0, 01. Les grandes valeurs de paramètre de relaxation sont davantage observées pour des petits glitches, mais également pour les glitches géants détectés dans les magnétars. Bien que la relaxation des magnétars soit similaire à celle des RPPs, beaucoup présentent de larges augmentations du taux de ralentissement (∆ ˙Ω/ ˙Ω ∼ 0, 5), qui persistent sur des périodes de plusieurs semaines ou mois.

Activité et âge caractéristique. Moins de 10 % de la population totale de pul-sars présente des glitches. Ces événements sont principalement observés dans des pulpul-sars jeunes, comme on peut le voir sur la gure2.9(voir également la gure2.6pour les courbes d'âge caractéristique constant). On quantie communément le comportement d'un pulsar par son activité moyenne A, dénie à partir des amplitudes de glitches cumulées

A = 1 Tobs X j ∆Ωj, (2.22)

où la sommation est réalisée sur les diérents glitches rencontrés par le pulsar et Tobs désigne la durée d'observation considérée. Par exemple, on obtient A ' 2, 25 × 10−14 s−1

pour Vela (voir Fig.2.10), tandis que A ' 1×10−16s−1pour le Crabe (Wong et al.,2001). En général, ce sont les pulsars avec un âge caractéristique tc ∼ 104 ans qui glitchent le plus. L'activité décroît avec l'âge, les vieux pulsars présentant des glitches d'amplitude plus faible (Haskell & Melatos, 2015).