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L’objectif final de cette thèse est de déterminer le rôle de la réactivité des argiles dans l’intégrité des couvertures en conditions de SGC. En d’autres termes, de démontrer que la fraction argileuse fait des couvertures des barrières chimiques efficaces et sûres face à la migration de fluides enrichis en CO2, quelles soient argilo-gréseuses ou argilo-carbonatées.

Dans les modélisations numériques simulant l’injection de CO2 et sa migration dans le réservoir, la couverture est souvent assimilée à une couche limite imperméable, n’autorisant ni le transport, ni la réactivité. Cependant, cette modélisation simplificatrice du contexte de stockage est limitée à l’étude de l’injectivité dans les réservoirs. Dans l’étude de l’intégrité des couvertures, la minéralogie et la réactivité doivent être prise en compte à partir des caractérisations expérimentales réalisées sur des échantillons de couvertures argileuses de sites potentiels d’injection.

Les modélisations réalisées sur l’évolution de couvertures en conditions de SGC simplifient la composition de la roche, notamment du fait de la composition en minéraux argileux, de leurs propriétés intrinsèques et des phénomènes susceptibles de se produire à court, moyen et long terme (Johnson et al..2005 ; Gaus et al., 2005 ; Gherardi et al., 2007).

D’autres auteurs considèrent la complexité de la fraction argileuse et notamment la présence d’interstratifiés illite/smectite (I/S) en introduisant de l’illite et de la smectite (Xu et al., 2005). Dans les études réalisées sur le stockage géologique de déchets radioactifs, les modèles de roche argileuse encaissante du Callovo-Oxfordien (dans le Bassin de Paris à Bure) intègrent mieux cette complexité physico-chimique (modèles d’échange d’ions, protonation/déprotonation, site de surface) liée à la richesse en minéraux argileux (Gaucher et al., 2009).

Après la détermination et certaines quantifications des grands chemins réactionnels des minéraux argileux, silicatés et carbonatés dans les parties 1 et 2 de cette étude, les travaux de modélisation de cette troisième partie présentent une intégration des données phénoménologiques et cinétiques expérimentales au sein de simulations numériques à grandes échelles spatiales et temporelles. Le transport réactif de CO2 par diffusion aqueuse en conditions de stockage géologique profond est traité suivant deux scénarios : un scénario pénalisant (cas de sûreté : diffusion d’une solution très acidifiée et renouvelée) et un scénario nominal (cas de référence : diffusion d’une solution acidifiée et tamponnée).

Deux grands modèles de roches de couverture argileuse homogènes sont étudiés: un modèle argilo-gréseux, appelé « Couverture-Si » (Chapitre 5), construit à partir des caractéristiques de l’échantillon de Chinle (Partie 1 – Chapitre 1), et un modèle argilo- carbonaté, appelé « Couverture-CC » (Chapitre 6), proche de l’échantillon de Charmotte (Partie 1 – Chapitre 2).

Chronologiquement, lorsque la bulle de CO2 atteint le toit du réservoir et entre en interaction physico-chimique avec la formation de couverture, quatre grandes évolutions (Figure 30) du système peuvent être considérées (Bildstein et al., 2009):

A. La bulle de CO2(SC) entre en contact avec la couverture et l’eau porale résiduelle est dissoute dans le CO2. Dans ce cas, les minéraux sont en interactions géochimiques directes avec la phase CO2(SC). C’est un cas monophasique où roche et phase supercritique sont en contact. Ce scénario est un cas de sûreté considéré cependant comme peu probable. En effet, il représenterait une injection de CO2 risquée, trop proche de la couverture.

B. La bulle de CO2(SC) perce la couverture en dépit des forces capillaires (pression de CO2 > Pression d’entrée capillaire) mais de l’eau résiduelle reste présente dans les pores. C’est le cas diphasique où roche, gaz et eau interagissent simultanément. Ce cas de figure est considéré comme probable et constitue un scénario dégradé pour l’étude de sûreté.

C. La bulle de CO2(SC) n’entre pas (i.e., Pression d’entrée capillaire > Pression de CO2) mais du CO2 dissous dans la solution saline diffuse dans le réservoir (effet tampon) puis dans la couverture et interagit avec la roche. Dans ce cas monophasique, roche et eau riche en CO2(aq) sont en interaction. Ce scénario nominal pour l’étude de sûreté constitue le cas de référence exposé dans cette thèse.

D. La bulle de CO2(SC) n’entre toujours pas mais le CO2 est dissous dans la solution saline et renouvelé (apport infini en CO2 dissous) à l’interface avec la couverture (pas d’effet tampon du réservoir)et interagit avec la roche. Ce scénario pénalisant constitue le cas de sûreté exposé dans cette thèse.

E. La bulle de CO2(SC) n’entre pas dans la matrice poreuse de la couverture mais pénètre par les fissures. Ce cas de figure est considéré comme probable et constitue un scénario altéré pour l’étude de sûreté.

Profondeur: ≥ 1000 m T ≥ 40°C P ≥ 80 bars

COUVERTURE

ZONE DE TRANSITION

RESERVOIR

A

A

B

+ D

E

E

D

A :

Profondeur: ≥ 1000 m T ≥ 40°C P ≥ 80 bars COUVERTURE

ZONE DE TRANSITION

RESERVOIR Profondeur: ≥ 1000 m T ≥ 40°C P ≥ 80 bars COUVERTURE

ZONE DE TRANSITION

RESERVOIR

A

A

B

+ D

E

E

D

A :

Figure 30: Scénarios d’évolution des interactions des fluides enrichis en CO2 à l’interface réservoir/couverture

Nos modélisations sont focalisés sur la diffusion aqueuse en configuration monophasique où le CO2 est dissous dans l’eau interstitielle de réservoir (Figure 30; n°C et D), et migre dans une colonne 1-D de roche de couverture. Ce phénomène sera le premier à se dérouler dans le temps lorsque la bulle atteindra la zone de transition réservoir/couverture. Proche de la bulle, le pH de la solution pourra atteindre 3,4 (scénario pénalisant). Plus loin de la bulle, le pH de la solution acidifiée ayant migré à travers le réservoir atteindra 4,7 à 80°C (scénario nominal).

D’autre part, des phénomènes physico-chimiques inhérents aux argiles comme l’échange d’ions sont encore introduits pour tester en particulier leur effet-tampon sur le système acidifié, complémentaire de celui des minéraux carbonatés.

Pour être représentatives des échelles spatiale et temporelle de transport réactif, les modélisations sont réalisées avec un maillage d’une dizaine de mètres de roche argileuse de couverture. L’évolution du système est simulée sur une période de 10.000 ans en accord avec le critère temporel de sûreté d’un SGC (Bildstein et al., 2009a et 2009b) et le temps de résidence satisfaisant pour un SGC efficace pour la lutte contre les émissions de CO2 vers l’atmosphère (IPCC, 2005).

Ces travaux de modélisation représentent finalement une étude opérationnelle et dynamique de la migration d’un fluide acidifié enrichi en CO2(aq) au sein d’une roche de couverture en interaction avec la solution interstitielle dans la perspective d’une intégration à l’évaluation de performance et de sûreté du système.

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5.. MODELE DE REACTIVITE D’UNE ROCHE DE COUVERTURE

ARGILO-GRESEUSE « COUVERTURE-SI »