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y relatifs (B).

A. Notion de « conflits parentaux »

Une définition générale des conflits parentaux est esquissée (1) et l’un de ses aspects – les conflits à haute intensité – est détaillé (2).

1) En général

Au sens étymologique, le terme conflit signifie « combat, lutte, bataille »8. Ainsi, les parents mènent un véritable combat dès leur séparation pour obtenir notamment la garde des enfants9.

Reprenant ce sens étymologique, la littérature en psychologie classifie les conflits en fonction de l’attitude adoptée par les parents. Lorsqu’il y a des cris, des insultes violentes, du mépris verbal qui se déroulent devant les yeux des enfants, le tout sans aucune retenue de la part de l’un des parents envers l’autre, il s’agit d’un conflit parental dit ouvert ou agressif-hostile10. Par contre, le conflit est appelé latent ou passif-agressif lorsque le parent (ou les deux), tout en ne lâchant rien quant à la position adoptée face au conflit, entreprend des actions « silencieuses »11. Par exemple, l’un des parents profite d’avoir ses enfants le week-end pour leur demander de transmettre des messages (désagréables) à l’autre parent.

Nonobstant cette classification des conflits, une autre catégorisation est ici proposée.

Trois niveaux d’escalade12 sont distingués selon l’intensité, la fréquence et la durée des affrontements des parents : les conflits légers, les conflits moyens et les conflits à haute intensité.

8 Le terme conflit vient de conflictus, dérivé de confligere (combattre) [https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/conflit/18127] (consulté le 20.03.20).

9 Ne sont retenues dans le présent travail que les hypothèses de la garde des enfants et, en cas de garde partagée, le droit aux relations personnelles (droits de visite) des enfants avec le parent non gardien.

10 BODENMANN, p. 90.

11 BODENMANN, ibidem.

12 Ces explications résultent d’une synthétisation des diverses lectures effectuées.

Les conflits légers se caractérisent par des « fronts temporairement durcis et concernent des thèmes limités »13 ; par exemple la garde des enfants durant les vacances scolaires.

Parfois, les moments conflictuels alternent avec des périodes plus calmes14. Les parents sont conscients de l’importance d’une relation positive pour le bien-être de l’enfant, c’est pourquoi des stratégies de désescalade du conflit sont mises en place, notamment au travers de la communication. Le conflit finit par se désamorcer par les ex-époux15 dans les deux ou trois ans suivant la séparation16.

Lorsque les conflits s’intensifient, le moindre sujet est bon pour « s’affronter ». Le niveau des conflits moyens est alors atteint. Les droits de visite deviennent difficilement praticables, car l’enfant est amené à prendre parti pour l’un des parents – souvent pour le parent gardien – et refuse de voir l’autre parent17. Les tiers (famille, amis, conseillers) aussi sont impliqués et instrumentalisés par les parents18. Toutefois, le calme finit par revenir et les conflits par s’apaiser, même si cela prend parfois plus d’une dizaine d’années. A cet égard, le témoignage19 d’une jeune étudiante de 23 ans, prénommée Morgane, fait écho à ces éléments théoriques. En effet, cette dernière a confié que ses parents se sont séparés, une première fois en 2001, puis en 2003, avant de divorcer alors qu’elle avait 9 ans (en 2006). La garde a été confiée à la mère de Morgane. « Jusqu’en 2017-2018, il y a eu des conflits en continu avec ma mère » raconte la jeune étudiante.

Aussi ajoute-t-elle qu’« actuellement les choses se sont calmées ». Ainsi, il a fallu plus d’une décennie pour que les conflits entre les parents de Morgane se calment. Ce n’est toutefois pas un cas isolé. En effet, environ 70 % des séparations entraînent ce type de conflits (moyens)20.

Néanmoins, le niveau de conflits le plus préoccupant est celui dit des conflits à haute intensité ou « hochstrittige Konflikte » en allemand. Cette catégorie est développée plus amplement dans ce qui suit.

2) En particulier : les conflits à « haute intensité »

Il n'existe pas de définition uniforme de ce type de conflits. La préférence est donnée aux explications de COTTIER ET AL., selon lesquels il s’agit « de couples séparés dont les conflits durent depuis longtemps, qui sont répétés et reposent sur des désaccords chroniques autour des enfants (éducation, soins, garde, etc.) […]. Les ex-conjoints sont,

13 ALBERSTÖTTER, p. 83 : « Die Fronten sind nur zeitweilig und nur in begrenzten Themengebieten verhärtet ». 


14 KILDE, N 570 : « Es wechseln sich akute Spannungen mit ruhigeren Phasen ab ».

15 BANHOLZER, p. 548 : « Gleichzeitig stehen den Eltern deeskalierende Strategien zur Verfügung, sie wissen um die Wichtigkeit einer beidseitigen positiven Eltern-Kind-Beziehung im Interesse des Kindes.

Die gedankliche Trennung von Paar-und Elternebene ist auf dieser Stufe meist klar gegeben. Beide Parteien hoffen, durch Gespräche Spannungen zu lösen ».

16 WEIZENEGGER/CONTIN/FONTANA, p. 883 : « meistens beruhigen sich akute Konflikte der Eltern […]

innerhalb von zwei bis drei Jahren nach der Trennung ».

17 KILDE,N571 : « …ein übliches Besuchsrecht kaum mehr durchführbar ist ». 


18 BANHOLZER, p. 548 : « Personen (Familie, Freunde, Berater), wobei Dritte für eigene Zwecke instrumentalisiert werden ».

19 Les échanges (par courriel et par téléphone) avec cette courageuse jeune femme ont eu lieu entre le 27 avril et le 4 mai 2020. Pour de plus amples détails, cf. Annexe.

20 KILDE, ibidem : « Als Erwachsenenkonflikt mit 71% die häufigste Gefährdungslage dar ». 


dans ces situations, particulièrement hostiles vis-à-vis l'un de l'autre, cherchant à se dénigrer mutuellement et à s'attribuer l'enfant »21.

Plusieurs études américaines, reprises par les auteurs en Suisse, semblent accréditer la thèse selon laquelle une charge psychopathologique n’est pas plus élevée chez les parents en situation de conflit à haute intensité que chez ceux concernés par un conflit léger ou moyen22.

Toutefois, il n’est pas évident de comprendre la raison pour laquelle certaines séparations sont plus touchées par ce type de conflits. Ce qui est en revanche observable, c’est l’objectif poursuivi par les parents pris dans une séparation hautement conflictuelle : nuire à l’autre parent « à tout prix ». Par exemple, un parent accuse, de manière avérée ou non, l’autre parent d’attouchements sexuels sur les enfants ou de comportements violents23. La haine extrême et réciproque peut aussi conduire les parents à s’agresser physiquement24 ou à un enlèvement des enfants25 au sens de la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants26. A cet égard, une avocate de Lausanne27 explique que l’ex-femme d’un de ses clients a emmené ses deux filles en France, sans prévenir personne. Le père, qui avait un droit de visite le week-end, a requis une ordonnance de retour des enfants, rendue par un juge vaudois. Revenue en Suisse, la mère a accusé le père d’attouchements sexuels sur l’une de ses enfants. Après une expertise pédopsychiatrique de la fillette, les accusations de la mère se sont révélées fausses. Pourtant, cette dernière qui cultive une haine extrême envers son ex-mari, continue à user de tous les stratagèmes possibles et imaginables pour que ses fillettes « ne soient qu’à elles » selon les dires de l’avocate lausannoise. Par exemple, la mère a récemment accusé le père d’être atteint du coronavirus et a demandé à ce que ce dernier soit empêché d’approcher ses filles pour ne pas les contaminer. De telles allégations rendent l’exercice des droits aux relations personnelles des enfants avec le parent non gardien difficilement praticable.

Cet exemple de conflit parental à haute intensité n’est pas le seul. Selon divers auteurs, ces conflits concernent 5 à 15% des séparations28. Paradoxalement, les parents pris dans un tel type de conflit mobilisent une part disproportionnée des ressources judiciaires et extrajudiciaires (professionnels psychosociaux, médicaux, etc.), et ce malgré que le

21 COTTIER et al., p. 49 et références citées.

22 JABAT/BANHOLZER, p. 137 : « In neueren US-amerikanischen Studien fanden sich keine generellen Unterschiede zwischen Hochkonflikthaften und weniger konflikthaften Teilnehmern […] ».

23 KILDE, N 572 et références citées : « Begleiterscheinungen liegen in häuslicher Gewalt oder sexuellem Missbrauch, resp. entsprechenden Anschuldigungen ». 


24 WEIZENNEGER/CONTIN/FONTANA, ibidem : « […] möglicherweise physicher Gewalt schaffen […] ». Les violences domestiques sont mentionnées, mais non développées dans la présente étude. Pour de plus amples explications à ce sujet, cf. DÉPARTEMENT FÉDÉRAL DE LINTÉRIEUR, (DFI), Feuille d’information 2, Causes de la violence dans les relations de couple et facteurs de risque.

25 KILDE, ibidem.

26 RS0.211.230.2.

27 L’avocate interrogée n’a pas souhaité que son identité soit dévoilée dans ce travail. Les explications qu’elle a fournies sont très sommaires.

28 Les estimations des auteurs sont les suivantes : 5%selonJABAT/BANHOLZER, p. 138 ; 5 à 10 % pour JENZER/STALDER/HAURI, p. 428 ; 7 à 15 % pour SCHREINER, Scheidung, N 240.

recours à une aide (juridique, médiatrice ou autre) semble inutile29, car tout tiers (grands-parents, professionnels, amis, etc.) intervenant dans le conflit est instrumentalisé30. Le développement des enfants pris dans un conflit parental à haute intensité est très menacé. Les répercussions négatives de ce niveau de conflit, ainsi que celles des conflits légers et des conflits moyens sont analysées dans ce qui suit.

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