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Nature de l’indemnisation L‟indemnisation accordée aux minoritaires est elle un prix ou une indemnité ?

a) Les clauses de sortie prioritaire

82. Nature de l’indemnisation L‟indemnisation accordée aux minoritaires est elle un prix ou une indemnité ?

Pour répondre à cette question, Il faudra d‟abord définir ce qu‟est une indemnité afin de ne pas la confondre avec la notion de prix231, et de comprendre les différentes situations qui peuvent se poser dans le cadre de la cession des droits sociaux.

L‟indemnité au sens du vocabulaire juridique est une somme d‟argent destinée à dédommager une victime, à réparer le préjudice qu‟elle a subi du fait d‟un délit ou de

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Paris 30 mai 2000, Rev. sociétés 2000. 547, obs. ROBINEAU, D. 2000. 643 ; Dr. Aff. 344, BOIZARD ; JCP E 2000, 1646, VIANDIER ; Bull. Joly Bourse 2000, p. 354, DESCOURS, RTD com 2000. 978

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Le prix entendu comme la contrepartie équitable d‟un bien ou d‟une prestation correspondant à sa valeur normale. G. CORNU, Vocabulaire Juridique, Association Henri CAPITANT, p. 481

l‟exécution d‟un contrat par attribution d‟une valeur équivalente qui apparaît tout à la fois comme la réparation d‟un dommage et la sanction d‟une responsabilité232

.

En effet, en droit des sociétés, il est un principe selon lequel un associé a un droit acquis de ne pas être exclu sans compensation233, soit qu‟il obtienne une indemnisation juste et préalable [qui] permet de compenser l‟atteinte à la propriété (…) »234

. Les dommages et intérêts reçus par l‟associé exclu sont ainsi à la fois une nécessité et un besoin, mais également un remède à toutes les situations susceptibles de léser cet associé.

L‟autre principe repose sur la réparation intégrale, en cas de manquement à une obligation légale, en l‟occurrence, l‟obligation d‟information.

Dans le cadre de la cession de ses droits sociaux, l‟associé minoritaire, peut ainsi recevoir un prix ou une indemnité sous forme de dommages et intérêts.

L‟article 237- 8 alinéa 2 du Règlement général de l‟AMF évoque « un prix proposé pour l‟indemnisation » par l‟initiateur dans le cas d‟une offre publique de retrait. L‟autre exemple est donné dans l‟affaire Sidel235

, où certains associés se sont vus proposer la somme de 20 euros par action en contrepartie de l‟abandon des poursuites judiciaires suite à la révélation de l‟inexactitude des comptes.

De même, Il résulte des dispositions de l‟article L. 433-4, II du Code monétaire et financier236 que l‟autorité de marchés doit apprécier « si l‟initiateur propose une indemnisation juste et équitable aux actionnaires minoritaires (…) » 237

. Ces articles donnent au lecteur une impression de confusion qui naît de la référence cumulative de la notion de prix à celle d‟indemnité qui sont pourtant antinomiques. Le choix terminologique effectué par le législateur a-t-il une portée juridique quelconque pour le minoritaire ?

La réponse à cette question est nuancée, selon que la cession est volontaire ou forcée, ou si elle intervient dans le cadre d‟une société cotée ou non cotée.

232

G. CORNU, ouvrage précité p. 433. 233

CA Paris, 7 juin 1988, Rev. sociétés 1989, p. 246, note S. DANA-DEMARET 234

M. FRANGI, « Constitution et droit privé, les droits individuels et les droits économiques », Coll. Droit public positif, Economica, PUAM, 1992

235

T. corr. Paris, 11è ch. , 1ère sect. 12 sept. 2006, Bull. Joly Bourse 2007, p. 37 et s. 236

De même le règlement général évoque l‟indemnisation des minoritaires dans ses articles 237-1, al. 1 et 237-7, 237- 9, 237-10, 237-11, 237-14, 237-18 et 237-19

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En cas de cession forcée, le législateur reconnaît à un associé exclu par une clause de rachat forcé le droit d‟obtenir « une juste indemnité » c'est-à-dire soit le remboursement de ses droits sociaux, soit des dommages et intérêts, car la cession forcée est considérée comme une expropriation pure et simple238.

La lecture de la jurisprudence relative aux offres publiques nous révèle une situation différente dans les sociétés cotées. Faisant référence à l‟arrêt Sogenal du 16 mai 1995239, la Cour de Cour de cassation a admis qu‟une même valeur serve de prix offert dans l‟offre publique de retrait et d‟indemnité dans la seconde procédure, c'est-à-dire le retrait obligatoire., or les deux procédures répondent à des critères différents.

Malgré l‟utilisation du mot « indemnité » par le législateur, c‟est bien un prix qui est versé lors de la mise en œuvre du retrait obligatoire et par des dommages et intérêts car selon la jurisprudence et une partie de la doctrine, « l‟obligation faite aux actionnaires minoritaires de céder leur actions au groupe majoritaire (…) moyennant un prix en rapport avec la valeur du bien dans un cadre légitime d‟ordre social et économique répond à l‟utilité publique (…) »240

. L‟analyse de la jurisprudence nous fait croire que la contrepartie offerte à l‟associé minoritaire n‟a pas les traits d‟une indemnité, mais d‟un prix. Ce prix ne vient aucunement réparer un quelconque préjudice subi par l‟associé minoritaire du fait de son expropriation. Ce prix est déterminé selon le dernier cours coté. Dans le cas d‟une offre publique de retrait suivie immédiatement d‟un retrait obligatoire, le législateur considère qu‟il existe un rapport d‟interdépendance entre les deux procédés boursiers. Ainsi si le prix proposé dans le cadre d‟une offre publique de retrait est acceptable par le marché et considéré comme raisonnable par le juge et l‟expert, il peut parfaitement correspondre à l‟indemnité offerte à l‟associé minoritaire si l‟offre publique de retrait est suivie d‟un retrait obligatoire241, et ce n‟est pas la simple nuance de définition qui viendra jouer dans la variation du montant accordé à l‟associé minoritaire.

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Y. REINHARD, note sous CA Paris 7 juin 1988, RTD. com 1989, p. 684 239

CA Paris 16 mai 1995, Bull. Joly Bourse 1995, p. 395, JCP E 1995, I. n) 475, spéc. n° 13 obs. A. VIANDIER et J-J CAUSSAIN. Dans cet arrêt, la Cour de Paris a formellement rejeté, suivant l‟avis majoritaire de la doctrine et la pratique du conseil des marchés, la thèse des minoritaires selon laquelle l‟indemnité du retrait obligatoire doit par principe être fixée à un montant supérieur au prix des offres publiques auxquelles il se rattache

240

Cass. com., 29 avril 1997, D. 1998. 334, note FRISON –ROCHE et NUSSENBAUM ; LPA, 28 novembre 1997 n° 143, P. 35 David D. BOCCARA

241

En principe si aucun facteur nouveau n‟intervient dans la mise en œuvre des deux procédures. V : Cass. com., 29 avril 1997 LPA, 28 novembre 1997 n° 143, P. 35 David D. BOCCARA ; Arrêt du 9 avril 2002, Bull. Joly bourse 2002, p. 543 ;

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