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ETUDE EMPIRIQUE DE L’EVOLUTION D’UNE PRATIQUE DE MESURE DE LA PERFORMANCE DANS UNE ENTREPRISE 

Section 1. Nature des données collectées 

La collecte des données a connu deux phases principales. La première est exploratoire et débute en Octobre 2009 et se termine en Juin 2010. Elle concerne le secteur des entreprises sociales, de façon générale. Une deuxième collecte s’est réalisée et se concentre uniquement sur l’insertion par l’activité économique, de Février 2011 à Avril 2013.

1.1. Une première phase exploratoire : de Octobre 2009 à Juin 2010 

Le but était de me familiariser avec les acteurs de l’entreprenariat social. J’étais davantage orienté vers une catégorie d’entreprises sociales, les social-business (ex : Grameen Danone). Devant la carence des données, j’ai ainsi marqué une pause. Sandberg et Tsoukas (2011) mentionnent que les liens entre sujets et objets sont ponctués de phase de “temporary breakdown” (:344), c’est-à-dire des pauses ou arrêts, à certains moments. Ces temporary brakdown sont différents des “complete breakdown” (: 344). Leur durée s’avère être plus longue. Pour revenir à notre première phase exploratoire, ce sont plus des “temporary breakdown” auxquels j’ai été confronté. C’est ainsi que les premières propositions de questions de recherche commençèrent à émerger.

J’ai eu des moments de doute lors de cette phase sur la viabilité de mon sujet. Dans ces moments de doute, la lecture de nouveaux concepts permettant de relier des concepts théoriques à des observations. Je suis très vite tombé dans une intoxication intellectuelle, en passant d’un concept à un autre sans limite. Certains auteurs (Tracey et al., 2011) mentionnent la notion de “snowball” pour évoquer cette phase. Comme une boule de neige qui se nourrit au fur et à mesure de sa descente, j’ai débuté mon exploration du monde de l’entreprise sociale de façon aléatoire, et de

nouveaux savoirs se sont, au fur et à mesure, accumulés, sans connaître la direction finale.

J’ai été surpris par une catégorie d’acteurs sous-représentée dans ces débats ou présentations des social business, les travailleurs sociaux. En effet, les personnes les plus représentées étaient les entrepreneurs sociaux, décrits précédemment. De plus, la littérature en sciences de gestion laisse peu d’espace à ces travailleurs sociaux (assistance sociale, éducateurs, formateurs…), qui depuis plus d’un siècle travaillent au quotidien avec ce public en difficulté. Une des notes que j’ai pu prendre était la suivante, lors du meeting Convergences 2015, qui rassemble les grands acteurs de l’ESS (Economie Sociale et Solidaire), tous les ans à la Mairie de Paris:

“ Convergences 2015, HDV Paris, Mai 2010: Il n’y a que les cadres supérieurs de Danone, Veolia… interrogés et présents, mais peu de personnes travaillant au contact des personnes en difficulté sont mis en avant, alors qu’ils connaissent en détail ces problèmes sociaux. A creuser…”

Wolcott (1982) mentionne que l’observation du contexte, de ses logiques, des règles internes et externes (Miles & Huberman, 1994), sont la base de tout travail pour le chercheur. J’assimile donc ma première année de doctorat à cette phase d’exploration du monde de l’entreprise sociale. En Septembre 2010, devant la carence de mes données qualitatives, je devais changer de terrain de recherche. Ces carences concernent le manque d’entretiens et surtout l’échantillon peu significatif des acteurs investis dans le social business. Cette première phase m’a permis de me familiariser avec la tension d’associer logique sociale et commerciale. Présentons à présent la deuxième phase de collecte des données chez Ares.

1.2. Collecte de données principales chez Ares : de Février 2011 à Mai 2013 

A partir de Février 2011, une autre phase de collecte de données a débuté, concentrée uniquement sur les entreprises d’insertion. Des entretiens informels ont permis de réaliser que ce secteur était très lié aux subventions publiques. La figure 1.

représente les liens entre organisations publiques et les Structures de l’Insertion par l’Activité Economique (SIAE). L’objectif ici, n’est pas d’expliciter en détails tous les acteurs publics, intervenant dans le secteur de l’IAE (Insertion par l’Activité Economique), mais surtout de montrer la complexité des relations entre chaque partie. Les circuits de décision sont lourds administrativement. En tant que petite PME de l’IAE, il n’est pas évident de survivre avec une administration lourde. De plus, des injonctions paradoxales existent entre la gestion des salariés en insertion avec des problématiques sociales lourdes, répondre aux demandes des pouvoirs publics, avoir les autorisations pour obtenir l’agrément de recruter des publics en difficulté, et développer une activité économique viable…

La lecture de magazines de vulgarisation (Alternatives Economiques…) a été une étape importante, pour tenter de connaître les enjeux pratiques et des exemples d’actions en insertion. Le magazine Alternatives Economiques avait notamment dédié un numéro spécial sur l’ESS, où était abordé le thème de l’insertion. D’autres revues spécialisées ont été très utiles dans l’acquisition de premières informations, autour de l’IAE (Lettre du Groupe SOS, brochures de l’Union Régionale des Entreprises d’Insertion). Certaines entreprises traditionnelles s’intéressent aussi à l’IAE, en créant des filières d’insertion. Vinci Insertion ou Adecco Insertion sont des exemples significatifs. Le Groupe Ducasse permet aussi chaque année à des travailleurs immigrés, avec peu d’éducation, d’intégrer pendant un an les meilleures cuisines du monde comme commis. Les meilleurs salariés, pendant ce contrat d’un an, se voient offrir un contrat à durée indéterminée dans le même groupe.

Une formation théorique pour mieux appréhender ce domaine a été nécessaire. L’UREI (Union Régionale des Entreprises d’Insertion) organise une fois par mois, une demi-journée de formation destinée aux particuliers, souhaitant créer leurs propres entreprises d’insertion. Ma participation à cette formation était indispensable pour connaitre les fondamentaux, en termes de subventions publiques et les cadres juridiques pour mettre en place une entreprise d’insertion. Enfin, le Groupe SOS, entreprise sociale française, m’a permis de rencontrer le Directeur des Ressources Humaines, afin de déterminer si une recherche commune pouvait être possible. Même si le projet avait avorté, cela m’a permis d’échanger avec une entreprise

d’insertion, qui a débutée sur un modèle purement social et qui a évoluée vers une dimension plus entrepreneuriale. Leur chiffre d’affaires s’évalue en millions d’euros et recrute plus de 10 000 personnes avec des croissances externes, ce qui est assez rare pour le monde du social. Ces trois mois, de Février à Mai 2011, ont donc favorisé une première appréhension avec le monde des entreprises d’insertion, sous la forme majoritairement de collecte de données secondaires. La partie suivante va traiter cette période, entre Mai 2011 et Octobre 2012 chez Ares.

Figure 1. L’insertion par l’activité économique en France (source, Manfred

Mack)

En bleu: SIAE En orange: Organismes publics

La figure 1. présente les principaux acteurs du secteur de l’IAE. Le but est de comprendre dans quel contexte s’inscrit ARES. Deux principaux acteurs composent ce secteur. Le premier concerne les organismes publics (Pôle Emploi, Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine…), en charge de l’octroi des subventions à la deuxième catégorie d’acteurs, les Structures de l’Insertion par l’Activité Economique (SIAE). Les SIAE représentent l’ensemble des organisations favorisant le 1

Acteurs de l insertion en France :