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I.3 Outils de caractérisation des couches minces

I.3.6 Nanoindentation

La nanoindentation est une des techniques les plus utilisées dans le cadre de la carac- térisation mécanique des couches minces déposées. Il s’agit d’une réduction d’échelle de l’indentation instrumentée développée à l’échelle macroscopique dans les années 1970. Contrairement à l’indentation classique, où seule la taille de l’empreinte et/ou l’enfonce- ment maximal du poinçon sont mesurés, lors d’un essai d’indentation instrumentée l’évo- lution de la charge P en fonction de la profondeur de pénétration du poinçon h au cours du chargement et du déchargement est enregistrée et analysée. La figureI.3 - 10représente une courbe typique d’un essai de nanoindentation.

Plusieurs formes de poinçons peuvent être utilisées en nanoindentation : sphères, cônes et pyramides. Le poinçon Berkovich, qui est de type pyramidal à 3 faces, est le plus fréquemment utilisé en nanoindentation contrairement aux poinçons pyramidaux à quatre faces utilisés classiquement lors des essais de micro- ou macro-indentation. Cette géométrie particulière est induite par la difficulté de fabriquer des poinçons à quatre faces de taille réduite présentant une faible erreur géométrique sur le défaut de pointe (apex). Les poinçons Berkovich présentent un angle de 65,03 ˚. Il s’agit d’un poinçon autosimi- laire, c’est-à-dire que ses sections transversales (hors défaut d’apex) sont homothétiques les unes par rapport aux autres. Il présente la même fonction d’aire que le poinçon Vickers et ils peuvent tous les deux être modélisés par un poinçon conique d’angle 70,3 ˚. La du- reté, les propriétés élastiques et certaines propriétés plastiques peuvent être caractérisées par nanoindentation.

I.3.6.1 Dureté

La dureté H du matériau représente l’écoulement de la matière autour du poinçon. La figureI.3 - 11montre l’influence des phénomènes d’enfoncement et de bourrelet sur le calcul de l’aire de contact Ac. Elle se définit comme :

H = P

Ac(hc)

I.3. OUTILS DE CARACTÉRISATION DES COUCHES MINCES ܲ௠ S ܹ௖ ൌ ܹ௣൅ ܹ௘ ܹ௣ ܹ௘ ݄௠ ݄௥

FIGUREI.3 - 10 – Schéma d’une courbe de chargement-déchargement lors d’un essai de dureté instrumenté. ܨ Bourrelet Enfoncement ݎ௖ ݄௖ ݄ ݎ௖ ݄௖ ݄

FIGUREI.3 - 11 – Illustration des deux phénomènes qui peuvent apparaître lors d’un essai d’in- dentation suivant la nature du matériau : l’enfoncement et le bourrelet. Ces phénomènes ont

une influence sur la mesure de la hauteur de contact hc et sur le rayon de contact rcqui sont

où Ac(hc) est l’aire de contact déduite de la profondeur de contact hc pour l’application

d’une charge P .

La hauteur de contact hc est déterminée à partir de la mesure du déplacement de la

pointe h suivant deux méthodes :

— celle proposée par Oliver et Pharr [Oliver 92,Oliver 04] :

hc = h ε

P

S (I.3.14)

où ε = 2

π (π 2) 0,75 pour un poinçon conique. Bien que très utilisé, ce modèle

présente un domaine d’application relativement restreint dans le cadre de l’étude de matériaux métalliques [Bolshakov 98,Cheng 04],

— celle proposée par Loubet :

hc = α1  hm+ Pmax S  (I.3.15)

où hmreprésente la profondeur de pénétration maximale atteinte [Bucaille 03]. Une

valeur de 1,2 a été proposée par Hochstetter pour le paramètre α1[Hochstetter 99].

Il est à noter que ces travaux sont tous deux basés sur ceux de Doerner et Nix portant sur la profondeur de contact [Doerner 86].

I.3.6.2 Propriétés élastiques

Le module d’élasticité réduit ERdu couple matériau-poinçon est défini comme :

1 ER = (1 ν 2) E + (1 ν2 i) Ei (I.3.16)

où E et ν sont le module d’élasticité et le coefficient de Poisson du matériau testé tandis que Ei et νi représentent le module d’élasticité et le coefficient de Poisson du poinçon.

Dans le cas d’un poinçon en diamant, Ei et νivalent respectivement 1 147 GPa et 0,07. ER

est alors calculé grâce à la formule de Sneddon :

ER= π 2 1 β S Ac (I.3.17)

où β est un coefficient correcteur de l’asymétrie de la pointe et S la raideur de contact entre le poinçon et la matière. Le coefficient β a été introduit par Bulychev et al. afin d’étendre la solution proposée par Sneddon au problème du contact entre un milieu quasi-infini et un poinçon pointu axisymétrique à des poinçons pointus ne présentant pas de symétrie de révolution[Bulychev 75,Sneddon 65]. Ce facteur vaut 1,034 pour un poinçon Berkovich. Cependant, plusieurs auteurs ont montré que ce coefficient peut varier en fonction du

I.3. OUTILS DE CARACTÉRISATION DES COUCHES MINCES

matériau constitutif de l’éprouvette et que ces variations peuvent avoir une influence non- négligeable sur les propriétés mécaniques mesurées [Vlassak 94,Oliver 04,Jha 11].

I.3.6.3 Propriétés élasto-plastiques

Dans le cas de l’indentation d’un matériau parfaitement plastique (n = 0) par un poin- çon autosimilaire, Tabor établit la relation suivante[Tabor 48] :

H = 3σy (I.3.18)

où σy représente la limite d’élasticité.

Cependant, lorsque le matériau n’est pas parfaitement plastique, la pénétration du poinçon induit un écrouissage non homogène sous le poinçon, qui modifie localement le seuil d’écoulement plastique. Dans ce cas, Tabor propose d’associer une déformation εT qui serait représentative de l’essai d’indentation. Le niveau de contrainte σT associé à

cette déformation vaut alors :

H = 3σT (I.3.19)

Dans le cas d’un poinçon Berkovich, cette déformation représentative est comprise entre 8 et 10 % [Tabor 48]. Ainsi pour un couple poinçon autosimilaire-éprouvette donné, le résultat macroscopique de l’essai d’indentation sera un couple (εT, σT) caractéristique

quelque soit la profondeur de pénétration. De ce fait, connaissant le module d’élasti- cité du matériau à caractériser, le résultat brut d’un essai de nanoindentation (courbe chargement-profondeur d’indentation) ne sera pas suffisant pour décrire complètement la loi contrainte-déformation du matériau, comme illustré par la figureI.3 - 12.

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FIGUREI.3 - 12 – Illustration de la relation de Tabor pour un matériau élasto-plastique. Le mo-

dule d’élasticité du matériau est calculé à partir de la relationI.3.16. Le seul autre point connu

sur la courbe contrainte-déformation est le couple (σT, εT), ce qui est insuffisant pour recons-

Les poinçons sphériques n’étant pas autosimilaires, ils permettent théoriquement d’obtenir une infinité de couples (εT, σT) et donc de décrire l’ensemble de la courbe

contrainte-déformation du matériau étudié. Cependant, il est difficile d’obtenir des poin- çons sphériques exempts de défauts à l’échelle microscopique. De plus, leur plus grande surface de contact fait que, à faible profondeur, ce type de poinçon est plus sensible aux défauts de rugosité que les poinçons pointus. Enfin, la zone sollicitée est plus grande dans le cas des poinçons sphériques que pour les poinçons coniques ou pyramidaux, ce qui limite leur utilisation à des éprouvettes de dimension suffisamment grande.

I.3.7 Récapitulatif des techniques de caractérisation des couches