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1 Une naissance secondaire d’un Etat

A) Considérations sur la théorie des éléments constitutifs

Traditionnellement perçue comme un phénomène exogène à la sphère du droit, la question de la naissance de l’Etat a, depuis déjà fort longtemps, provoqué au sein de la doctrine un certain malaise, trouble qui ne s’est que très légèrement dissipé au cours de ces dernières années. C’est la raison pour laquelle elle provoque une certaine crainte chez les membres de la société internationale. En outre, l’Etat ne forme pas une catégorie homogène mais c’est une notion disparate dans ses formes. L’on ne s’attardera point sur celles des Etats appelés « fantaisistes »310, formule employée en droit international pour qualifier ces entités créées par quelques entreprises individuelles (plus farfelues les unes que les autres)311. Hors le cas très spécifique de cette terminologie, la question de la naissance de l’Etat catalyse de nombreuses difficultés.

Anté-juridique pour certains auteurs, extra-juridique ou encore métajuridique pour d’autres, ces expressions témoignent de cette difficulté commune et persistante d’appréhension ou de théorisation de la formation de l’Etat. Selon le droit international, elle constitue une question de fait s’imposant à lui et, nous avise Carré de Malberg, “ne peut être considérée que comme un pur fait”312. L’acception doctrinale classique de ce

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Ch. Rousseau, Droit international public, t. III, p. 518.

311 L’on peut penser à la proclamation, au début du XXe siècle, de l’Empire du Sahara par le sucrier Lebaudy, ou à celle plus récente, opérée en 1968par l’annonce de l’Etat libre des Roses traduite de l’espéranto “Liberto Territorio de la Insulo de la Rosaj” constitué uniquement d’une plate-forme d’acier à 12 kilomètres au large de Rimini. In Ch. Rousseau, Chronique des faits internationaux, RGDIP 1969, pp. 189-190. Il y a aussi celle de la République de Minerva en 1972. In Chronique des faits internationaux, RGDIP 1973, pp. 533-534. 312 Carré de Malberg, Contribution à la Théorie générale de l’Etat spécialement d’après les données fournies par le Droit constitutionnel français, Sirey, Paris, 1922, t. 2, pp. 490-491. Il précise sa pensée quelques lignes

phénomène, qui s’approchant de l’alchimie, donc empreint d’un mystère toujours non élucidé dans sa manière de combiner ses différents éléments constitutifs, a fluctué entre une approche privilégiant les données tantôt historiques313, tantôt sociologiques. Les seuls auteurs qui ne partagent pas cette vue se retrouvent parmi les plus hauts représentants de l’école autrichienne – dont Hans Kelsen et Alfred Verdross – pour lesquels la naissance de l’Etat est un processus juridique réglementé par le droit international314 alors même que, nous explique Charles Rousseau, la notion d’Etat précède logiquement et historiquement celle de droit international315.

Dionisio Anzilotti défend une approche particulière en séparant la naissance sociologique de l’Etat de celle proprement juridique : “L’Etat naît parce que l’histoire, les vicissitudes et la volonté humaine le font naître”316. Il avait auparavant affirmé que “le droit international est supérieur à l’Etat en ce sens qu’il constitue une limite juridique de sa puissance, mais non pas dans le sens que la puissance de l’Etat soit une délégation du droit international ; cette dernière thèse, qui d’ailleurs n’est pas logiquement nécessaire, a contre elle non seulement l’expérience historique, mais encore et principalement la conviction des Etats auxquels rien ne répugne davantage que l’idée d’exercer un pouvoir à eux concédé par l’ordre international”317. Joe Verhoeven se rapproche de cette position : “L’antériorité ou la postériorité historique de l’Etat par rapport au droit est probablement à cet égard un faux problème. Dans la logique du droit des gens, il y a antériorité nécessaire de l’Etat par

plus loin : “la formation initiale de l’Etat n’est commandée par aucun ordre juridique préexistant : elle est la condition du droit, elle n’est pas conditionnée par le droit”. Se référant à Michoud, Esmein ou Berthélémy, il conclut ainsi son développement : “La source de l’Etat, c’est du fait : à ce fait se rattache ultérieurement le droit.”, p. 492.

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R. Erich affirme : “La naissance d’un nouvel Etat est toujours un fait historique qui ne dépend pas de certaines conditions juridiques. […] C’est là une thèse qui paraît être généralement adoptée par la doctrine du droit public. S’il en est ainsi, on ne peut annuler ou invalider l’existence d’un nouvel Etat pour cette raison qu’il doit cette existence à un acte ou un événement contraire au droit […]. Combien de fois a-t-on pu constater, dans ce domaine, qu’un pur fait historique, étranger au droit, peut produire des changements dont il n’est pas possible de contester la validité juridique”, La naissance et la reconnaissance des Etats, RCADI, 1926, t. III, vol. 13, p. 441.

314 H. Kelsen affirme : “Si l’on doit comprendre juridiquement le début comme la fin des systèmes de droit interne, c’est-à-dire la naissance et la fin des Etats, il faut supposer qu’un ordre juridique, supérieur aux droits étatiques, règle ces événements, […] ; qu’il détermine les faits qui sont les conditions dont il fait dépendre le début et la fin de la validité du droit étatique ; qu’il définit les éléments constitutifs de la naissance et de la fin de l’Etat. Cet ordre, c’est le droit international.” In Théorie générale du droit international public. Problèmes choisis, RCADI, 1932, t. IV, vol. 42, pp. 260-261. Pour J. Combacau et S. Sûr, “l’Etat entretient avec le droit international des relations contradictoires : comme réalité historique, il lui est antérieur, mais comme phénomène juridique il le constitue autant qu’il en procède. Il le constitue car le droit international est le produit de la volonté des Etats ; il en procède en ce que c’est le droit international lui-même qui permet de discerner dans une collectivité naturelle concrète les traits caractéristiques de ce qu’il appelle abstraitement « Etat ».”, in Droit international public, 6e éd., Montchrestien, Paris, 2004, pp. 262-263.

315 Ch. Rousseau, Droit international public, t. III, pp. 514-515. 316 D. Anzilotti, In Cours de droit international, op. cit., p. 165. 317

rapport au droit dans la mesure où, comme système de relations, celui-ci ne saurait exister sans sujets préexistants ; dans l’histoire du droit des gens en revanche, il y a postériorité de l’Etat dans la mesure où seule l’idée de droit progressivement forgée a configuré l’Etat et l’a imposé comme régulateur premier des rapports internationaux”318.

Depuis déjà fort longtemps, le Rapport de la Commission internationale des juristes désignés par le Conseil de la Société des Nations dans l’affaire des îles Aaland avait synthétisé cette position, majoritairement admise depuis par la doctrine319. Cette Commission, mise en place car la Cour permanente de justice internationale n’était pas encore constituée, a indiqué dans son texte, en date du 5 septembre 1920, que “la formation, la transformation et le démembrement d’Etats par suite de révolutions et de guerres créent des situations de fait qui échappent en grande partie aux règles normales de droit positif”320.

L’on trouve confirmation de cette analyse dans deux des avis de la Commission d’arbitrage de la Conférence européenne pour la paix en Yougoslavie. Le 29 novembre 1991, tout en rappelant classiquement que “seuls les principes du droit international permettent de définir à quelles conditions une entité constitue un Etat”, elle a considéré dans son premier avis que “l’existence ou la disparition de l’Etat est une question de fait”321. Elle réitère sa position dans l’avis n°8 de la Commission d’arbitrage322.

En revanche, Charles de Visscher remarque : “Ceci ne signifie aucunement que le droit international puisse se montrer indifférent aux aspirations des peuples à se constituer en Etats ou aux circonstances historiques qui déterminent la création des Etats. Une saine répartition des groupements humains ne contribue pas seulement à l’équilibre interne des Etats ; elle conditionne l’efficacité du droit international tout comme la stabilité des rapports internationaux.”323. De plus, le fait de continuer à considérer que création et

318 J. Verhoeven, “L’Etat et l’ordre juridique international”, op. cit. , p. 756.

319 L’on peut citer à titre d’illustration, J. Verhoeven selon qui “l’Etat est nécessairement avant le droit et son être échappe fondamentalement à ses prescrits, l’objet du droit n’étant pas de circonscrire ses sujets mais exclusivement d’en déterminer les droits et les devoirs respectifs.”, in “L’Etat et l’ordre juridique international”, op. cit., p. 752. Selon une approche similaire, Ch. de Visscher affirme : “L’ordre juridique international ne fonde pas l’Etat ; il présuppose son existence. Reconnaissant l’apparition sur un territoire d’une entité politique offrant les caractères généralement attribués à l’Etat, il se borne à investir de la personnalité du droit des gens et à exiger d’elle l’observation des devoirs internationaux.” op. cit., p. 185. 320 Rapport de la Commission internationale des juristes Larnaude, Struycken et Huber, cité par E. Erich, La naissance et la reconnaissance des Etats, RCADI, 1926, t. IV, vol. 13, p. 431.

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Publié in RGDIP 1992, pp. 264-269. Cf. A. Pellet, “Note sur la Commission d’arbitrage de la Conférence européenne pour la paix en Yougoslavie”, AFDI, 1991, pp. 329-348.

322 Elle affirme que “l’existence ou la disparition d’un Etat sont, en tout état de cause, des questions de fait”. RGDIP, 1993, p. 589.

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disparition des Etats sont des questions de fait semble nécessaire pour que le droit international assure sa fonction de stabilisation et d’ordre, de préservation de l’Etat. “Ici, un rôle essentiel sera conféré à l’effectivité, critère matériel d’appréciation des situations de fait en même temps que moyen de résistance aux mutations d’Etats”324. Encore faut-il s’entendre sur la signification de cette expression d’accession à l’indépendance. Sur ce point, Michel Virally précise : “Le droit international ne peut donc pas se désintéresser de l’accession à l’indépendance, qui constitue aussi un fait, comme tout ce qui l’a précédée, mais cette fois un fait juridique international, c’est-à-dire un fait auquel le droit international attribue des effets juridiques : en l’occurrence l’acquisition du statut juridique international d’Etat, avec tous les droits et obligations qui y sont attachés –en premier lieu la souveraineté – et que les autres Etats seront juridiquement tenus de respecter. En raison de son importance décisive, il est nécessaire qu’il soit constaté par une procédure juridique adéquate, qui le soustraie désormais à toute contestation”325.

Le droit international, régissant la Société internationale et reflétant les préoccupations des membres de cette dernière, enserre les nouvelles entités en dressant un certain nombre de critères326. La Convention de Montevideo, bien connue, du 26 décembre 1933, dispose en son article premier : « L’Etat comme personne de droit international doit réunir les conditions suivantes : 1) population permanente ; 2) territoire déterminé ; 3) gouvernement ; 4) capacité d’entrer en relations avec d’autres Etats. ». Certes la portée d’une telle norme (effet relatif des traités oblige) demeure restreinte, cette convention ayant été uniquement ratifiée par les Etats-Unis et certains Etats latino-américains. Cependant, les éléments contenus dans la définition ont été repris par de très nombreux textes. Précisons en outre que cette Convention ne faisait pas montre d’une grande capacité d’innovation. Elle se contentait, en effet, de reprendre les éléments auparavant dégagés dans la jurisprudence internationale. Le Tribunal arbitral mixte germano-polonais, dans la décision rendue en l’affaire de la Deutsche Continental Gas-Gesellschaft, le 1er août 1929, avait déjà affirmé : “Un Etat n’existe qu’à condition de posséder un territoire, une population habitant ce territoire et une puissance publique qui s’exerce sur la population et sur le territoire”327. La Cour internationale de justice dans son avis consultatif du 11 avril

324 H. Ruiz Fabri, op. cit., p. 154.

325 M. Virally, Panorama du droit international général, RCADI, op. cit., pp. 51-52. 326

Ch. de Visscher affirme : “Les faits historiques qui engendrent la formation d’Etats nouveaux constituent des données pré-juridiques. Il n’y a pas de critère de droit qui les serre d’assez près pour fournir un principe de légitimation indiscutable à l’aspiration d’une collectivité fixée sur un territoire déterminé à s’ériger en entité politique indépendante”, in Théories et réalités en droit international public, op. cit., p. 182.

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1949 en l’affaire de la réparation des dommages subis au service des Nations unies reconnaît dans les Etats des “entités politiques, égales en droit, de structure semblable, et relevant toutes deux directement du droit international”328.

Préalablement à une analyse plus approfondie, il nous faut mettre en exergue que l’ultime condition de la-dite Convention – la faculté de nouer des rapports avec d’autres Etats – n’est pas, loin s’en faut, unanimement admise en doctrine comme un élément constitutif. En effet, parmi les auteurs internationalistes notamment anglophones – à l’instar de James Crawford329 – certains l’analysent plus comme un corollaire de l’existence de l’Etat ; d’autres l’intègrent au troisième critère en tant qu’attribut du gouvernement. Cette remarque nous conduit à nous interroger sur la nature de ces critères : participent-ils uniquement à l’identification de l’Etat330 ou contribuent-ils – en tant qu’éléments constitutifs331 – à la création de l’Etat ? Il importe également, à l’exemple de Joe Verhoeven qui décèle dans cette énumération de conditions d’existence une sorte d’illusion, de rappeler l’importance de ne pas confondre le processus d’identification et celui de définition332. Il précise ainsi : “S’il y a des éléments « constitutifs » de l’Etat, ils tiennent sans doute dans la nature des pouvoirs que celui-ci exerce, dans les attributs qui

328 CIJ, avis du 11 avril 1949, Rec., p.178. 329

“In other words, capacity to enter into relations with other States, in the sense in which it might be a useful criterion, is a conflation of the requirements of government and independence”. J. Crawford, “The criteria for statehood in international law”, BYBIL, 1976-1977, p. 119.

330 J. Verhoeven précise sa pensée : “Il y a là probablement une illusion. La difficulté véritable n’est ni de comprendre comment une collectivité peut « se composer » d’un territoire, ni de constater que nombreuses sont celles qui sont soumises à un pouvoir dit politique sans pour autant constituer des Etats au sens du droit des gens. ”, Droit international public, op. cit., p. 55. (Voir plus généralement pp. 54-57).

331 Pour donner force créatrice ou constitutive à ces critères G. Scelle analyse les éléments constitutifs en relativisant cependant leur pertinence et dénie toute existence d’un critère juridique. “La doctrine classique se borne à donner de l’Etat cette définition analytique : une collectivité, -fixée sur un territoire délimité,- juridiquement organisée.” op. cit., p. 74. Selon J. Touscoz, “juridiquement un Etat nouveau apparaît lorsque les trois éléments constitutifs (territoire, population, pouvoirs publics) sont réunis, constituant un ensemble organisé doté d’une effectivité suffisante pour pouvoir entrer librement en relation avec les autres sujets de l’ordre international.”, Droit international, Puf, Paris, 1993, p. 85. P.-M. Dupuy affirme que les “trois éléments constitutifs de l’Etat” sont nécessaires à sa formation, op. cit., p. 31. Nguyen Quoc Dinh, P. Daillier et A. Pellet même s’ils relèvent le caractère tautologique de ces critères de définition et en atténuent quelque peu l’utilité utilisent le terme « éléments constitutifs de l’Etat » et lui consacrent une section, op. cit., pp. 408- 422. P. Reuter analyse dans son manuel “la réunion des éléments constituant un Etat”, in Droit international public, Puf, Paris, 1993, 7e éd., p. 176.

332 J. Verhoeven, Droit international public, op. cit., pp. 50-57. Il avait auparavant affirmé : “Dans cette perspective, la définition de l’Etat ne pose à proprement parler aucun problème juridique. L’Etat est nécessairement avant le droit et son être échappe fondamentalement à ses prescrits, l’objet du droit des gens n’étant pas de circonscrire ses sujets mais exclusivement d’en déterminer les droits et devoirs respectifs. Ce que l’on appelle les « critères » de l’Etat en droit des gens ne saurait dès lors constituer l’expression d’une règle coutumière ou d’un principe général de droit quelconque et l’on ne comprendrait guère l’importance que leur a depuis toujours réservée la doctrine si ne subsistait la nécessité d’ « identifier » l’Etat qui ne s’impose pas dans les rapports internationaux avec la même évidence que les personnes physiques au sein des sociétés, nationales, qui ont « inventé » le droit. J. Verhoeven, “L’Etat et l’ordre juridique international”, op. cit., pp. 752-753.

lui sont en conséquence reconnus et dans les finalités justifiant qu’ils le soient. Sur cette base, une définition « essentielle » de l’Etat doit être possible. Tel n’est pas l’objet du droit international. Il lui importe seulement d’identifier ses sujets « originels ».”333.

La doctrine continue cependant d’être partagée sur cette question. Adoptant une position de rupture, Georges Scelle soutient “qu’il n’y a point de critère juridique de l’Etat” puisque les trois éléments retenus par la doctrine classique “se retrouv[a]nt dans d’autres organisations politiques, ne suffisent même pas à le distinguer de ses propres circonscriptions”334. Encore faut-il partager son acception de la souveraineté. Il énonce un peu plus loin dans sa démonstration : “Or, si l’on abandonne la notion de souveraineté, il ne reste aucun critère de la compétence étatique.”335. Serge Sur et Jean Combacau ont développé une position originale, refusant de poser la question selon la théorie des « éléments constitutifs de l’Etat », qu’ils qualifient de vocabulaire trompeur. Ils analysent les trois éléments que sont la population sise sur un territoire et l’appareil institutionnel comme des manifestations matérielles pour les deux premiers et organique pour le troisième. Ces deux auteurs soulignent ainsi deux écueils à éviter : le premier consiste à “prendre pour des parties constituantes ce qu’il convient de voir comme des conditions d’émergence rien de plus”, le second conduit à “s’interdire de confondre ces conditions d’émergence d’un Etat en voie de formation avec les institutions propres à l’Etat effectivement constitué”336. En stigmatisant le caractère lacunaire de l’appréhension de l’Etat par le droit international, il faut constater – et ce faisant regretter – que son approche trop générale de l’identification laisse la part belle à l’interprétation au cas par cas. Il n’y aurait donc point de véritable théorie générale.

De même, doit être nuancée l’assertion pourtant largement partagée suivant laquelle les deux premiers éléments (population et territoire) relèveraient du naturel alors que le

333 J. Verhoeven, Droit international public, op. cit., p. 55. Il poursuivait ainsi son raisonnement : “L’acuité de ce problème d’identification est fonction de l’existence principalement rationnelle à laquelle répond sinon l’existence, du moins la personnification de l’Etat en droit des gens. C’est de ce point de vue seulement que présentent quelque intérêt les critères étatiques forgés par la doctrine et qui tournent tous, non sans variante, autour de trois éléments principaux : le territoire, la population, l’autorité. La vertu descriptive de semblables critères est indéniable ; il n’empêche qu’ils manquent d’une élémentaire précision pour identifier avec certitude les sujets dits primaires de l’ordre juridique international et pour les distinguer d’autres collectivités qui ne sont pas l’ « Etat » du droit des gens”, “L’Etat et l’ordre juridique international”, op. cit., p. 753. 334

G. Scelle, Précis de droit des gens, op. cit., p. 74. Dans un de ses articles resté célèbre, G. Scelle a affirmé en parlant de la doctrine des trois éléments : “Cette description n’est pas réaliste car elle met sur le même pied et combine en un amalgame forcé trois choses totalement disparates, incapables en tout cas de former dans leur trinité une « personne » morale ou juridique. “Obsession du Territoire”, op. cit., p. 349.

335 G. Scelle, Précis de droit des gens, op. cit., p. 78.

336 Justifiant leurs propos, ils continuent “ces données de fait ne sont que les conditions dont la réunion est nécessaire à la constitution de l’Etat, ils n’en sont en aucune manière les « éléments ». Droit international public, op. cit., p. 272.

troisième (le pouvoir politique) procéderait du construit. Les critères humain et spatial sont, tout autant que le critère politique, le produit de la volonté humaine, donc d’une évolution historique appartenant au champ du conventionnel337.

L’on peut également se plonger dans les réflexions de Georges Scelle qui s’attache à réfuter l’importance prise par le territoire dans le droit international et notamment dans le processus de définition de l’Etat338. Un peu plus loin au cours de son étude, il synthétise